Sayfadaki görseller
PDF
ePub

raux et religieux sont la base de toute science.

mandaient des restrictions à la liberté de la presse, qui, selon lui, n'était qu'une source de maux pour le pays. Dans la Au mois d'août 1824 il fut nommé discussion des articles, il soutint que ce ministre de la maison du roi, en remplaserait blesser la prérogative royale que cement de M. le maréchal Lauriston. Il d'attribuer les délits de la presse au jury, profita alors de sa position pour engager dont il redoutait l'indulgence. Il appuya Charles X à acheter pour 900,000 fr. fortement toutes les dispositions propo- la terre de Grignon, afin d'y établir la sées en faveur de la religion, et en mo- ferme-modèle et d'y fonder l'école d'atíva la nécessité sur l'état du clergé, dont | griculture qui répand aujourd'hui des il s'exagérait sans doute la situation pré- | bienfaits immenses sur toute la France. caire. Dans la discussion de la loi de re- Il fit aussi donner à M. Cam. Beauvais crutement, il combattit avec chaleur le une ferme considérable à long bail, pour principe de l'avancement par ancienneté | essayer d'élever des vers à soie près de comme attentatoire à cette même pré- Paris, et cet établissement a parfaitement rogative royale dont il se constituait le réussi. Lors de la scène scandaleuse qui zélé défenseur. Plus tard, il vota pour la eut lieu aux obsèques de son cousin, le proposition du comte Barthélemy (voy.), vénérable duc de La Rochefoucauld – relative à la loi des élections. Liancourt, M. de Doudeauville ne put cacher son indignation, et montra qu'il est de certains abus qui, quelle que soit leur source, révoltent toujours un esprit droit. Puis à l'époque du licenciement de la garde nationale de Paris (le 29 avril 1827), il combattit cette mesure de toutes ses forces, de concert avec le comte de Chabrol de Crussol, alors ministre de la marine (voy. son article}, et il donna sa démission en prédisant tout ce qui est arrivé depuis. Cet acte de vigueur fit trouver à M. de Doudeauville dans l'estime et l'affection publiques une compensation à la perte de ses dignités. Depuis lors il s'est livré tout entier à la direction d'établissements de bienfaisance, dont plusieurs l'ont choisi pour leur président.

Le déplorable état des prisons ayant attiré l'attention du gouvernement, le duc de Doudeauville fit partie de la société royale quí, sous la présidence du duc d'Angoulême, fut chargée de son amélioration.

En 1820, le projet de loi tendant à suspendre pendant cinq ans la liberté indéfinie des journaux lui fournit une nouvelle occasion de faire un effrayant tableau du désordre occasionné, suivant lui, par la liberté de la presse. La nouvelle foi des élections, qui détruisit celle du 5 février, trouva en lui un appui dans la chambre haute et dans le collége électoral du département de la Marne, dont il fut peu de temps après nommé président. Plus tard il appuya la foi sur la septennalité de la Chainbre des députés.

Nommé, par ordonnance royale du 22 septembre 1822, directeur général des postes, il introduisit dans cette administration d'importantes améliorations; il lui imprima surtout ce mouvement de célérité et de régularité qui se continue encore aujourd'hui. Louis XVIII, voulant récompenser son zèle et son dévouement, lui conféra à cette époque l'ordre du Saint-Esprit.

Avant son entrée aux postes, M. de Doudeauville avait été placé pendant plusieurs années à la tête de l'École polytechnique, où il avait su se rendre cher aux élèves, auxquels il s'attachait surout à démontrer que les principes mo

La révolution de juillet vint le frapper au cœur dans ses plus chères affections; mais il crut ne pas devoir s'éloigner de la Chambre des pairs, où il vint siéger à cause du procès des ministres et des propositions Baude et Briqueville pour le bannissement perpétuel de la branche aînée des Bourbons. Après les avoir combattues autant qu'il était en lui, et ne croyant plus être utile dans cette assemblée, il écrivit au président qu'il n'y reparaîtrait plus, et son nom fut en conséquence rayé sur la liste de ses membres.

Pendant que le choléra moissonnait la population parisienne, M. de Doudeauville donna l'exemple d'un dévouement absolu et d'un courage remarquable, vi

AR

sitant fréquemment les hospices, s'ap- | Froissard, au milieu d'une action, après prochant des plus malades et leur distribuant des secours et des consolations. Nous ajouterons à sa gloire qu'il n'a jamais rien demandé, ni rien reçu du gouvernement, qu'il n'a aucune pension, et qu'il refusa, lors de sa nomination au ministère de la maison du roi, les 25,000 fr. pour frais d'établissement qu'on accordait à tous les ministres ; enfin qu'il a rempli plus de vingt-cinq places gratuites auxquelles l'ont appelé l'estime et la bienveillance de ses concitoyens.

L'année dernière (1836) il a reçu une nouvelle preuve de cette estime par sa nomination, à une grande majorité, au conseil général de la Marne, qu'il avait autrefois présidé et dont il est membre depuis plus de 30 ans. Ses adversaires politiques les plus prononcés lui rendent cette justice que nul n'a défendu les principes monarchiques de la légitimité avec un plus loyal et plus consciencieux désintéressement, et il est remarquable que la presse quotidienne, dont il a combattu autrefois les écarts, n'a jamais eu contre lui une parole offenM-s.

sante.

DOUGLAS. C'est le nom d'une noble et ancienne famille d'Écosse qui se distingua surtout dans les guerres acharnées que ce pays eut à soutenir contre l'Angleterre. Sir JAMES Douglas, en qui commencèrent la grandeur et la renommée de cette race de braves, seconda Robert Bruce (voy.) dans toutes ses expéditions. Il commandait la cavalerie à la bataille de Bannockburn, culbuta celle des ennemis et les poursuivit pendant l'espace de 90 milles. Dans une autre rencontre,

Édouard III ayant proposé un cartel aux Écossais, l'impétueux Douglas voulut l'accepter. Détourné de ce dessein, il surprit le mot du guet, pénétra à la tête de 200 soldats déterminés dans le camp ennemi, et s'avança droit à la tente du roi d'Angleterre pour le tuer ou l'enlever; mais l'éveil fut donné, et Douglas échappa à grande peine avec quelques hommes. Lorsque la paix fut conclue entre les deux pays, ennuyé de son inaction, il passa en Espagne pour servir dans une croisade contre des Maures, et fut tué, dit

des prodiges de valeur (1327).
CHIBALD Douglas, frère du précédent, fut
nommé général en chef des armées écos-
saises en 1333. Il repoussa le prétendant
Baliol (voy.) et défendit vaillamment
Berwick contre les Anglais; mais ayant
attaqué à Halidon-Hill l'armée ennemie
supérieure en nombre, il y perdit la vie
avec la fleur de la chevalerie écossaise,
dont les chroniqueurs portent le nombre
à 30,000 hommes. · Un autre guerrier
du même nom, né vers 1374, se signala
à la bataille de Shrewsbury (1413) par

[ocr errors]

une bravoure extraordinaire. Comme son
aïeul, il voulut s'attaquer au roi d'An-
gleterre lui-même il le chercha dans
la mêlée pour le combattre corps à
corps; mais Henry IV avait fait prendre
à plusieurs officiers une armure sembla-
ble à la sienne, honneur qui leur devint
fatal. Douglas fut fait prisonnier, puis
rendu à la liberté quelque temps après.
En 1421 la régence d'Écosse lui donna le
commandement de 5,000 Écossais qu'elle
envoya au secours de Charles VII. A la
tête de cette poignée de braves, il rendit
à l'armée française des services signalés,
notamment à la bataille de Beaugé, après
laquelle il fut nommé lieutenant général
et duc de Touraine. Il fut tué avec ses fils à
Verneuil, en combattant pour la France.
Telle fut l'origine de cette longue confra-
ternité d'armes qui régna entre les deux
peuples. Douglas fut la souche de plu-
sieurs familles de ce nom qui s'établirent
en France, et dont l'une existe encore à
Montréal (Ain ). GAVIN Douglas,
évêque et poète écossais, était le troisième
fils d'Archibald, comte d'Angus. Né vers
l'an 1474, il fit ses études à l'université
de Paris, et, de retour en Ecosse, entra
dans les ordres. Emprisonné par suite des
querelles entre la régente et le duc d'Al-
bany, il n'obtint un évêché que pour s'en
voir chassé quelque temps après. Hen-
ry VIII lui permit de se fixer à Londres,
où il mourut de la peste vers 1522. Il est
considéré comme le créateur de la poésie
écossaise. Son principal ouvrage est sa
traduction en vers de l'Énéide, la pre-
mière qui ait paru en Angleterre et qui
se recommande encore à d'autres titres
par sa pureté et son élégance. R-Y.

Les Douglas reçurent dans la suite le titre de duc, qui s'éteignit dans leur famille en 1751 à la mort d'Archibald, duc de Douglas. Ce pair d'Écosse eut pour héritière sa sœur JANE, laquelle épousa sir John Stewart, dont le fils aîné ARCHIBALD prit le nom et les armes de son oncle. Il fut créé baron Douglas of Douglas-Castle (comté de Lanark) le 8 juillet 1790, épousa une fille du duc de Montrose, et, en secondes noces, une sœur du duc de Buccleuch, et laissa en mouraut (1827) une nombreuse famille, dont le chef actuel est son fils, ARCHIBALD Douglas, baron Douglas, de DouglasCastle, né en 1773, sheriff héréditaire, etc. Son héritier présomptif est son frère CHARLES Douglas.

sent ni lieux ni jours privilégiés pour l'exercice du culte ; en faisant leur prière, ils ne se signent pas comme les fidèles de cette Église. Leur oraison unique est le Notre Père; ils n'admettent de la Bible que les quatre Évangiles. La croyance des Doukhobortses leur interdit, comme aux Quakers, de porter les armes et de répandre le sang; elle ne leur permet pas non plus de prêter serment. Ils ont une doctrine particulière sur la Trinité, dont ils comparent la nature à la hauteur, à la largeur et à la profondeur qui appartiennent aux objets matériels. Ces sectaires, au reste pieux et fort paisibles, furent persécutés en Russie jusqu'en 1802; mais l'empereur Alexandre mit fin aux mesures acerbes qui avaient été prises contre eux et annonça ses résolutions par un rescrit adressé en 1817 au gouverneur militaire de Kherson, et qui, modèle d'une sage et charitable tolérauce, a reçu une juste publicité et se trouve reproduit dans l'Histoire des sectes religieuses de l'évêque Grégoire (t. IV, p. 182;.

S.

En dehors de cette célèbre famille, il y eut plusieurs médecins anglais du nom de Douglas. Le premier et le plus célèbre, JAMES, se fit connaitre dans le commencement du XVIIIe siècle par des travaux anatomiques fort remarquables. Il mourut en 1742. JOHN Douglas, évêque an· glais, né en 1721, se trouvait, en qualité de chapelain d'un régiment des gardes, à la bataille de Fontenoy. Il prit part à plusieurs polémiques littéraires, défendit Milton contre Lander et les miracles de la religion chrétienne contre Hume. C'est à lui qu'on doit la publication du troisième voyage de Cook, qu'il enrichit d'une introduction et de notes. Il est mort en 1805, après avoir été successivement évêque de Carlisle et de Salisbury. R-y. | DOUKHOBORTSES, mot russe qui signifie lutteurs d'âme, de doukha, âme, et borotsia, lutter. Au singulier, et suivant son exacte prononciation, le mot s'écrit doukhoboretz.

Les Doukhobortses forment une des nombreuses sectes qui se sont élevées au sein de l'Église russe. On les vit paraître, sous le règne d'Anne Ivanovna, à Moscou et dans d'autres villes; mais avant l'année 1788 on les appelait Ikonobortses, dénomination à peu près synonyme d'Iconoclastes. En effet, ils rejettent toutes les images et n'en souffrent pas la présence dans les lieux qu'ils habitent. Ils n'ont point d'églises et point de prêtres; quoiqu'ils suspendent leurs travaux aux fêtes chomées par l'Église russe, ils ne reconnais

[ocr errors]
[ocr errors]

|

|

Anjourd'hui les Doukhobortses habitent vers l'embouchure du Don dans la mer d'Azof, sur la Molotchna, où ils se sont fait déporter en 1803 de leur propre gré, et sur quelques autres points de la Nouvelle-Russie. Leur principal établissement est Bogdanofka où ils forment environ 1150 familles. Un programme latin de M. Lenz, jeune professeur prématurément enlevé à la science, traite des Doukhobortses (Dorpat, 1829, 35 pages in-4°), et peut servir à débrouiller la confusion qui règne dans le chapitre consacré à cette secte par l'auteur de l'Histoire des sectes religieuses déjà citée. S.

DOULEUR (physiologie), sensation pénible transmise par les nerfs au cerveau et qui se manifeste dans toutes les parties du corps, soit sous l'influence de lésions appréciables, soit même sans que l'œil puisse découvrir aucun changement dans leur texture. Peut-être ces mots ne donnent-ils pas une idée nette de la douleur, mais la définition d'un phénomène que tout le monde connait par expérience peut bien rester incomplète, et l'immense variété des manières de souffrir ne permet pas d'en donner une qui

satisfasse généralement. Par extension, le nom de douleur a été donné à la souffrance morale dont nous n'avons pas à nous occuper ici (voy. ci-après); enfin on appelle douleurs certaines maladies dont la douleur est l'élément essentiel et en quelque sorte unique. Assez ordinairement on dit douleurs nerveuses ou névralgies (voy.), du grec vsupov, nerf, et alyos, douleur.

La douleur paraît être inhérente à l'organisation animale considérée dans la partie supérieure de l'échelle des êtres, ou du moins les manifestations n'en sont sensibles pour nous que jusqu'à un certaiu point de la chaîne. Les végétaux et les animaux qui leur ressemblent passent pour en être exempts, comme si un système nerveux complet, c'est-à-dire avec un centre unique, en était la condition indispensable.

sexe, le tempérament, les habitudes surtout; et ses caractères, ainsi que sa marche, ne sont rien moins que constants. La douleur ne se compare qu'à elle-même : ainsi elle est dite brûlante, lancinante, contusive, déchirante, suivant qu'elle rappelle telle ou telle sensation antérieurement éprouvée.

De ce que la douleur, dans quelques circonstances, naît sans causes que nous puissions apprécier, on s'est cru fondé à dire qu'elle pouvait naître spontanément; ce qui est loin d'éclairer la question. Peut-être un jour parviendra-t-on à découvrir cette cause jusqu'à présent ignorée.

Quoi qu'il en soit, la douleur, qu'on a si énergiquement appelée le cri de l'organe souffrant, ne demande pour ainsi dire qu'à cesser. Otez l'épine enfoncée dans les chairs, satisfaites la faim ou la soif, que les réservoirs soient débarrassés de ce qui les surchargeait, et tout est bientôt rentré dans l'ordre. Le même résultat s'obtient, mais plus difficilement et plus lentement, lorsqu'on a été sourd au premier avertissement et qu'on a laissé au mal le temps de jeter de profondes racines. Quant à la douleur nommée nerveuse, son caractère distinctif est la mobilité et l'instantanéité : tout d'un coup on la voit envahir une partie, la quitter pour s'emparer d'une autre, et disparaître, sans laisser nulle part trace de son

Les expériences des physiologistes, pour constater le mode de production et de transmission de la douleur, ont montré que la substance cérébrale, si apte à percevoir la sensation douloureuse, est elle-même insensible à ses propres lésions (voy. ENCEPHALE et SENSIBILITÉ). Cependant l'intégrité des nerfs et du cerveau est nécessaire pour que la perception ait lieu, et si l'on isole une partie du centre commun en coupant les nerfs qui s'y distribuent, on peut impunément la soumettre à l'action des agents les plus propres à produire la douleur. Même chose se présente lorsqu'une violente contention de la pensée, le délire, l'extase, etc., isolent en quelque sorte l'âme de tous les objets terrestres. On pourrait dire qu'alors il n'y a pas de douleur, puis-même sympathique, c'est-à-dire ayant sa qu'elle n'est pas perçue par le sujet, mais analogiquement supposée par l'observa

[blocks in formation]

passage.

Les secours de la médecine s'adressent plutôt aux causes qui produisent la douleur qu'à la douleur elle-même, qui est un phénomène secondaire et souvent

source loin du lieu où il se manifeste. Néanmoins, dans l'impossibilité où l'on a été trop souvent de constater et d'atteindre la source du mal, on a cherché d'autres moyens de soulagement et l'on a trouvé que la douleur, même ayant une cause permanente, pouvait se calmer cependant, soit par quelques agents qui diminuent la sensibilité générale, comme les bains, les saignées, etc., soit par quelques remèdes qui-agissent sur le système nerveux et qu'on a désignés, d'après leur effet, par les noms d'anodins, calmants, narcotiques ou somnifères (voy.); car.

un des principaux résultats de la dou- | peine effleurés par les coups les plus leur est d'occasionner la perte du sommeil.

Portée à un très haut degré de développement, la douleur peut tuer, mais ce cas est rare; plus ordinairement elle réveille, pour ainsi dire, l'agonisant. L'excès de la douleur, et de certaines douleurs surtout, brise et anéantit les forces, et il faut un courage pen commun pour soutenir qu'elle n'est pas un mal. Elle est un mal, mais un mal souvent utile et nécessaire lorsqu'elle ne dépasse pas une certaine mesure. Vouloir prouver plus, c'est tomber dans le paradoxe.

La douleur est souvent employée comme moyen de rétablir la santé. Fondés sur l'axiome d'Hippocrate que, de deux douleurs développées en même temps en deux parties différentes la plus forte fait taire l'autre, nous voyons les médecins susciter des douleurs artificielles pour dissiper les douleurs de la maladie. Que de fois il arrive que les deux douleurs parlent en même temps, au grand détriment du malade! C'est ainsi que les vésícatoires, les cautères, les moxas, etc., agissent, ou sont censés agir. Attendre que la douleur cesse est plus sûr dans bien des cas et non moins expéditif peutêtre. F. R.

DOULEUR MORALE. La douleur est une condition inévitable de l'existence de l'homme, et le résultat nécessaire de l'imperfection de sa nature. Sa compagne dès le berceau,dans le chemin de la vie, elle s'attache à tous ses pas, et elle s'empare surtout de ses derniers moments. Elle corrompt même nos joies, s'associe à nos plaisirs, ou du moins elle les suit presque toujours. Ceux qui paraissent le plus à l'abri de ses traits souvent en sont le plus cruellement atteints. En un mot, l'histoire de la douleur est tout entière celle de l'humanité.

Elle n'est pas toujours le résultat de causes extérieures, et son principe se trouve aussi dans le caractère. La douleur a pour véhicules les plus actifs l'irritabilité du tempérament et la sensibilité du cœur. C'est une réalité : il y a des individus si malheureusement organisés que pour eux tout devient sujet de chagrin; d'autres au contraire semblent être à

cruels. Ainsi, dans la douleur comme dans la plupart des choses humaines, tout est relatif. Certains êtres sont tellement identifiés avec elle qu'on croirait qu'elle les fait vivre. Il en est d'autres qu'elle fait mourir. Quoique ce soit une opinion reçue qu'on ne meurt plus de douleur, rien n'est plus faux: mille exemples prouvent qu'accompagnée de saisissement, elle tue comme la foudre. Elle tue avec lenteur, mais d'une manière non moins sûre, quand elle est fondée sur un de ces désastres que rien ne saurait réparer. Telle est la perte totale de la fortune, lorsque l'existence de la famille y est attachée; telle est surtout la perte de l'honneur.

On dit avec raison que les grandes douleurs sont muettes; celles qui se répandent immodérément au dehors s'atténuent nécessairement par cette diffusion. Une douleur profondément sentie met à se communiquer, par l'expression, une sorte de pudeur mêlée de fierté : elle craindrait surtout de se voir profaner dans son objet, en s'exposant à l'accueil blessant de l'indifférence. S'il y a de la lâcheté à s'abandonner sans mesure à la douleur, il y a de l'orgueil et de la dureté à en méconnaître l'atteinte. C'est un cri échappé du cœur que ces deux vers de Voltaire, dans Alzire:

Ne cache point tes pleurs, cesse de t'en défendre:

C'est de l'humanité la marque la plus tendre!

Dans l'échelle des sentiments qui affectent l'âme d'une manière pénible, nous établirions ainsi les degrés : inquiétude vague, tristesse, chagrin ou affliction, douleur, désespoir (voy.). La douleur qui naît de la jalousie en amour est peut-être la plus poignante; celle qui a la honte pour principe est à coup sûr la plus amère; il n'en est pas de plus durable que celle de la perte des objets qui nous sont chers, et surtout de nos enfants. « Rachel, dit l'Écriture, pleure ses fils, « et ne veut pas étre consolée, parce a qu'ils ne sont plus. » La religion chrétienne nous offre encore dans la mère de Jésus un plus sublime emblème de douleurs. Dans aucune langue la poésie n'a

« ÖncekiDevam »