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tèrent les céréales On tua les grives, les merles; et les chenilles dévastèrent les pommiers. On tua les hérons, les cigognes; et les serpents se multiplièrent. On tua les gobemouches, les rouges-gorges; et les mouches infectèrent les habitations. On tua les mésanges, les traquets; et les pucerons dévorèrent les fleurs. On tua les fauvettes, les rossignols; et les vers mangèrent jusqu'aux buissons. On tua les piverts, les épeiches; et les larves ligneuses eurent raison des forêts.

Tous les vices concoururent au massacre. On tua par gourmandise, par plaisir cruel. Une criminelle faiblesse laissa faire aux enfants un jeu de ces destructions. La coquetterie des femmes continua l'œuvre de mort, achevée par ce libéralisme politique qui tolérait dans les campagnes les exterminations en masse. De dérisoires arrêtés sur le hannetonage et l'échenillage n'empêchèrent point la nature violée d'opérer par l'insecte ses légitimes représailles. Et la Terre redevint stérile et muette, ainsi qu'au premier jour de la Genèse.

La réparation de cette démence coûtait maintenant à l'État plusieurs millions chaque année. Encore certaines espèces avaient-elles entièrement disparu.

Néanmoins la nature reprenait vie. Le merveilleux équilibre des espèces se rétablissait par l'assagissement de l'homme. Chaque site retrouvait la sorte de poésie que lui avait préparée la Providence à l'origine du monde. L'éclatant plumage des pics, des loriots, des huppes, restitutait aux futaies leur flore vivante. La symphonie des passereaux enchantait les jardins. L'alouette fêtait les matinées de soleil; la chouette accentuait par son hululement l'horreur nocturne des bois. Les cris du goëland et du pluvier accompagnaient la basse des tempêtes; la blanche mouette réjouissait les espaces de la mer calme.

Et si, à mon tour, je vous parlais de mes fleurs ! s'écria l'abbé. Que de merveilles là encore, et souvent dédaignées

par la frivolité humaine! Ah! comme la Providence a prodigué la beauté sur cette planète, où l'homme, lui, ajoute quelques actes de sainteté ou d'héroïsme, mélés, hélas ! à combien de crimes! Songer que des athées osent attribuer au hasard les mouvements sidéraux, l'ordre de l'univers, le pullulement des existences, la splendeur et la diversité des êtres, l'intelligence et l'amour humains! Un semblable aveuglement fait frissonner. Lorsque, sans orgueil philosophique, on étudie la nature, on voudrait vivre à genoux et ne plus proférer une parole qui ne fût un hymne! Encore toutes ces merveilles terrestres ne représentent-elles rien, en comparaison des ravissements que Dieu réserve à ses élus, et dont l'Apôtre déclare que nous ne saurions nous former aucune idée.

- Soit! dit l'oncle. Mais vous avouez vous-même que la méchanceté des hommes projette une ombre fâcheuse sur ce tableau.

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Certes, reprit l'abbé. Et le dernier acte volontaire du réprouvé le fixe à jamais, par de là ce monde, dans la haine de Dieu. Oh! la véritable horreur de l'enfer, c'est ce refus de l'amour, en quelque sorte cristallisé chez le rebelle.

Ils se turent un moment. Puis l'oncle reprit la conversation sur l'objet de leur visite. Son irrésolution et sa paresse se traduisirent par de prétendus scrupules: Avaitil le droit de dénoncer Me Farin? L'abbé se récria :

-

Ne pas dénoncer le mal, c'est pactiser avec lui! Je vous répète que la faiblesse à l'égard du crime constitue un crime envers l'innocence. La perte d'un innocent, l'impunité d'un coupable, voilà les deux grands scandales d'une société. Ne m'objectez pas que cette femme n'a ni tué ni volé. Elle a fait pis. Elle a, par ses commérages, brouillé plusieurs familles, séparé des époux, réduit au désespoir d'honnêtes femmes et d'intègres fonctionnaires. Et nous la laisserions en repos, quand l'avenir de nos jeunes amis est

en question! Si elle n'a point à répondre d'un délit matériel devant les tribunaux ordinaires, c'est le moins qu'elle soit notée d'infamie par le censeur, afin que la crédulité publique cesse de se faire l'involontaire complice de ses calomnies. Ah! l'Écriture énonce de redoutables menaces contre ceux qui s'abandonnent au démon de la langue!

Cependant, objecta l'oncle, vous ne prétendez pas que je joue le rôle d'un policier et que je tende des pièges à cette femme pour la faire parler devant témoins!

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Eh! pourquoi non? L'on doit protéger à tout prix l'innocence et châtier le crime. Il exista jadis d'exécrables préjugés contre la police. Ils naquirent de la substitution du point d'honneur féodal, ce masque fréquent de l'orgueil, à la saine doctrine répressive que professait le droit canonique et que mit en œuvre l'Inquisition. Ne vous récriez pas! Je ne vante point les hideux autodafés des rois d'Espagne. Mais considérez ceci : lorsque Gilles de Retz eut torturé et pollué un millier d'enfants dans les campagnes bretonnes, la justice du duc fut absolument paralysée par les intrigues des grands seigneurs pour sauver l'un de leurs pairs; seuls, l'évêque Jean de Malestroit et l'official réussirent à obtenir la tête de l'inégalable scélérat. L'Inquisition apparaît la véritable garantie judiciaire des peuples, jusqu'à l'établissement des sénéchaussées royales. Et celles-ci, dont l'esprit eut sans cesse à lutter contre le point d'honneur de la cour, avaient recueilli le legs de l'Inquisition en tout ce qui concernait la recherche des crimes. En somme, la police moderne continue celle de l'antique Rome, de qui l'Église hérita plusieurs institutions. Mais, je le répète, rien n'est plus opposé à la vertu et à la justice que les caprices du point d'honneur et que le souci d'une fausse élégance, faite d'indifférence envers le bien et le mal. Le dénonciateur d'un coupable a droit au suprême respect. L'espion au service d'une cause juste peut devenir un héros

par le sacrifice de sa sécurité. C'est le crime qui bénéficiait jadis de cette morale mondaine devant laquelle le policier n'obtenait que mépris.

- Et ma femme qui tient Mme Farin pour une sainte! déplora l'oncle. Il paraît qu'elle est très pieuse.

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Dévote peut-être; pieuse, assurément non. D'ailleurs, à supposer qu'elle possède certaines qualités, elle n'en est que davantage responsable de ses méchantes actions. Mais non, elle n'est pas pieuse; elle est de celles qui veulent tromper Dieu. Car le respect de la loi religieuse s'associe toujours à l'accomplissement du devoir envers nos semblables.

L'oncle hocha la tête avec découragement :

J'aurai beau dire, je ne convaincrai jamais ma femme! .

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1.

André. GODARD.

Vers plus de joie paraîtra le 20 janvier à la librairie académique Perrin (Un volume: 3 fr. 50).

ÉCOLES LIBRES LAIQUES A ANGERS

PENDANT LE XIX SIÈCLE

(Suite)

Madame Breton

Madame Breton, née Caron, Désirée-Honorine-LouiseConstance, est originaire de Versailles. Amenée jeune à Saumur où son père venait d'être nommé chef de musique, elle reçoit dans cette ville sa première instruction, mais vient l'achever à Angers, au pensionnat de la rue Valdemaine.

Mlle Caron ayant subi avec succès, le 15 mars 1836, les épreuves du diplôme pour l'enseignement primaire supérieur, reste chez Mlle Le Bailleul en qualité de maîtresse adjointe pendant six ans, puis va exercer les mêmes fonctions, place du Ralliement, n° 20, au pensionnat tenu par les demoiselles Blondel, auxquelles la jeune institutrice succède vers 1850.

Devenue Madame Breton, et pour des raisons de convenances', elle est autorisée, en septembre 1854, à venir s'installer place d'Armes, no 6 (place de Lorraine). Peu de temps après (octobre 1856), l'institution du boulevard de Saumur, no 5, n'ayant point prospéré, sa quatrième direc

1 M. Breton tenait un externat primaire, rue Ménage.

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