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entre un curé et son évêque. Aucune contestation ne peut être terminée régulièrement. Les esprits brouillons, turbulents, désolent l'administration, devenue elle-même arbitraire ou incertaine. Il n'existe plus de règles dont elle n'ait le pouvoir de s'affranchir, et au lieu de reconnoître ses bornes réelles dans une autorité supérieure, elle n'en trouve que d'illégitimes dans l'indocilité des subalternes deux causes de désordre qui, à la longue, suffiroient pour énerver et détruire entièrement la discipline.

Les difficultés qu'on oppose, contre les dispositions expresses des canons, à la tenue des conciles provinciaux et nationaux ne lui sont pas moins funestes. C'étoit dans ces saintes assemblées que les évêques, s'instruisant des besoins communs de leurs troupeaux, concertoient ensemble de sages règlements, s'excitoient à la réforme des abus, s'avertissoient, s'exhortoient les uns les autres, s'occupoient des intérêts généraux de leurs églises, veilloient efficacement à la défense du sacré dépôt de la vérité, et s'animoient à tout genre de bien. Elles donnoient aux actes de la puissance ecclésiastique une certaine solennité qui leur concilioit un respect plus grand; elles prévenoient les écarts de l'autorité épiscopale, ou y remédioient, quelquefois même par la déposition, dans des cas heureusement très rares, et toujours sauf l'appel au

souverain Pontife, seul investi de la juridiction suprême. L'Église avoit-elle, soit des plaintes, soit des demandes à adresser au pouvoir civil, combien ses réclamations n'acquéroient-elles pas d'importance et de poids, lorsqu'au lieu d'être présentées par quelques hommes épars, tous les premiers pasteurs, après un mûr examen et de graves délibérations, les portoient ensemble au pied du trône! Mais ce qu'on redoute, ce qu'on ne veut pas, c'est précisément ce concert qui rendroit à la religion sa dignité et une partie de sa force. On l'abaisse, on la dégrade; on relâche, on brise tous les ressorts de sa divine police, pour consommer son asservissement. Le despotisme administratif, indifférent à la licence de l'impiété et de l'anarchie, d'où sort tôt ou tard la servitude, tremble à la seule pensée qu'une voix libre puisse s'élever en faveur de l'ordre. Retiré au fond de l'athéisme, il s'y fait un rempart de toutes les erreurs; et, sûr de régner par elles, il 'dit comme Joad, mais dans un autre sens : Je crains Dieu, et n'ai point d'autre crainte.

Que les évêques le sachent cependant, nulle loi n'empêche qu'ils ne s'assemblent selon les ordonnances des canons; il suffit qu'ils le veuillent pour rentrer en possession de ce droit; parlons plus exactement, pour remplir ce devoir que les décrets de l'Église leur imposent. Le dessein qu'on

a conçu de les affoiblir en les isolant n'est que trop manifeste: qu'ils considèrent les suites qu'entraîneroit une déplorable condescendance, qu'ils réfléchissent sur le passé, qu'ils regardent l'avenir, et le courage de la foi dont ils donneront l'exemple sauvera peut-être la société (1). Ce qui la perd, c'est que l'autorité, toute-puissante par sa nature, a cessé de croire en elle-même; au lieu de franchir les obstacles, elle calcule les inconvénients; elle transige, au lieu de commander; et le droit devenu dès lors, aux yeux des hommes, une prétention, est discuté d'abord, et bientôt après rejeté comme un abus. Descendre,

(1) Dans ces temps de prudence et de silence, où l'on tremble plus d'une vérité dite que d'une vérité niée, il ne sera pas inutile de rappeler ce que Fénelon écrivoit à un évêque : « Je suis » très édifié, monseigneur, de votre zèle sincère contre la nou» veauté, et de votre constante persuasion en faveur de la bonne » cause. J'en espère de grands fruits, pourvu que la voix flatteuse » de l'enchanteur, qui endort si dangereusement d'autres per» sonnes, d'ailleurs très zélées, ne ralentisse point votre vigi>> lance sur les périls de la sainte doctrine. Rien n'affoiblit tant >> les pasteurs qu'une timidité colorée par de vains prétextes » de paix, qu'une incertitude qui rend l'esprit flottant à tout vent » de doctrine spécieuse; enfin que les ménagements d'une poli>>tique souvent bien plus mondaine qu'ils ne la croient eux-mê

>> mes. >>>

OEuvres de Fénelon, tome XII, page 375, édition de Versailles,

pour le pouvoir, c'est mourir : cela est vrai universellement. Mais une politique timide et pliante est surtout funeste en religion; elle donne à ce qui est de Dieu l'apparence d'une chose humaine. Laissez les hommes combiner, peser les chances incertaines de la terre. L'Église a d'autres pensées et une autre prudence; elle attend, mais elle ne cède point. Aux époques sinistres, lorsque des mouvements extraordinaires agitent le monde, elle sait qu'en elle est le salut, bien qu'elle en ignore et le temps et la manière ; et immobile alors on la voit opposer, sans jamais fléchir, aux tempêtes de l'erreur, aux flots des passions, son inébranlable foi et sa législation impérissable.

L'état de la société, qui rend les gouvernements même dépendants de cette puissance vague et mobile qu'on appelle l'opinion, exige impérieusement que la défense de la religion, les plaintes qu'elle a le droit de former, l'exposition de ses besoins, aient un caractère éclatant de publicité. Il faut parler au peuple dans les démocraties. Que ce soit là l'indice d'un profond désordre, ce ne sera pas nous, certes, qui le nierons; mais la nécessité n'en subsiste pas moins. Qu'on nous dise à quoi reviennent des observations adressées par quelques évêques à un ministre, et passant, quelquefois sans être lues, de ses mains en celles d'un commis chargé de les ensevelir dans des cartons? Re

présentez-vous, au contraire, l'épiscopat entier élevant sa voix, et ses gémissements, et ses lamentations prophétiques au milieu de la France, rappelant à la souveraineté temporelle, avec une sainte et respectueuse liberté, ses devoirs envers Dieu, envers la religion, envers la société humaine qui, séparée de son principe de vie, se dissout comme un cadavre; peignant les ravages du doute, de l'impiété, du libertinage, entretenus, propagés jusque dans les dernières classes, par une multitude chaque jour croissante de livres corrupteurs; réclamant, au nom de l'état même, au nom des familles, les droits sacrés dont on a dépouillé l'Église ; secouant, pour ainsi parler, ses chaînes, afin de réveiller à ce bruit lugubre les chrétiens assoupis et tièdes; montrant aux hommes les suites terribles, prochaines, inévitables, de la fausse indépendance qui les séduit, et ouvrant à leurs pieds le gouffre où ils courent se précipiter: pense-t-on que, ces remontrances, ces avertissements, ces annonces effrayantes et trop certaines qui retentiroient entre la terre et le ciel, fussent tout-à-fait stériles; qu'un rayon de lumière ne pénétrât pas dans les esprits les plus aveuglés ; qu'un remords, qu'une crainte au moins, ne se fît sentir aux cœurs les plus endurcis ? Et après tout, estce donc du succès qu'il s'agit? La victoire est à Dieu; combattre, voilà notre partage.

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