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PARIS.

TYPOGRAPHIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES,

RUE JACOB, N° 56.

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ESPAGNE,

DEPUIS L'EXPULSION DES MAURES JUSQU'A L'ANNÉE 1847,

PAR M. JOSEPH LAVALLÉE,

MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DE MADRID.

ILES BALEARES ET PITHYUSES,

PAR M. FRÉDÉRIC LACROIX.

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FIRMIN DIDOT FRÈRES, ÉDITEURS,

IMPRIMEURS DE L'INSTITUT DE FRANCE,

RUE JACOB, 56.

M DCCC XLVII.

GIFT OF

CHARLES A KOFOLD

120 447

sevil

v. 31

SUITE

DE L'ESPAGNE.

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En écrivant la préface de son histoire d'Espagne, Mariana avait annoncé l'intention de terminer son récit à la prise de Grenade. En effet, cette guerre de huit cents ans, que les Espagnols ont soutenue pour délivrer leur patrie du joug des mahométans, est si pleine d'intérêt, elle forme tellement une période à part, qu'après avoir raconté l'expulsion des Maures, tout historien doit être tenté de s'arrêter. Jusqu'à cet instant l'Espagne avait vu toutes ses forces absorbées par cette lutte à laquelle le reste de l'Europe n'avait pris aucune part. Elle s'était trouvée en quelque sorte isolée des autres nations; ce n'était que passagèrement et à de rares intervalles qu'elle s'était mêlée à leurs disputes. Mais, dès qu'elle fut débarrassée de l'adversaire qui l'avait exclusivement occupée, elle vint se jeter au milieu des autres peuples; elle ne demeura plus étrangère à leurs querelles; elle prit parti dans toutes leurs guerres. Son histoire perd donc le caractère qui lui était propre. Jusqu'à présent l'Espagne avait été seul acteur du drame. Maintenant d'autres personnages vont paraître sur la scène. Son histoire n'est plus à elle seule; elle lui devient commune avec d'autres nations. C'est en quelque sorte une ère nouvelle qui commence.

Lors de la prise de Grenade, l'Espagne n'était pas arrivée au dernier degré de grandeur qu'elle devait atteindre, et cependant elle renfermait déjà des éléments de dissolution. Elle

1re Livraison. (ESPAGNE.)

n'avait pas encore acquis toute sa puissance, et déjà le germe de sa décadence commençait à se développer. L'inquisition, l'intolérance religieuse, ces bourreaux de tout ce qui est progrès et liberté, occupaient une large place dans ses institutions et s'appliquaient à tarir les sources de la prospérité publique. L'expulsion des juifs, qui suivit de peu de jours la reddition de l'Alhambra, fut un des événements qui devaient avoir pour l'avenir de l'Espagne les conséquences les plus funestes. Le succès que les chrétiens venaient de remporter sur les infidèles avait exaspéré les passions religieuses. L'inquisiteur Torquemada, dont le fanatisme absurde ne connaissait pas de bornes, demandait que les nombreux Israélites qui vivaient dans les États de Ferdinand fussent contraints à recevoir le baptême, ou qu'ils fussent chassés du royaume. Il por tait contre eux ces accusations que le fanatisme invente et que la sottise répète. Il disait que les juifs dérobaient des enfants chrétiens pour les crucifier. Il leur imputait les mêmes crimes que les païens avaient imputés aux premiers chrétiens, dans les plus mauvais jours de la persécution. De son côté, Ferdinand, qui voyait ses finances épuisées par les dépenses énormes que la guerre de Grenade avait entraînées, prêtait à ces accusations une oreille facile; car il pensait qu'en expulsant les juifs il pourrait les dépouiller des immenses richesses qu'ils avaient amassées par l'usure ou par le commerce. Les juifs, avertis du péril dont ils étaient menacés, firent offrir au roi la somme de 32,000 ducats s'il consentait à les laisser pratiquer tranquillement leur religion. Ferdinand hésitait. Torquemada en fut prévenu; et, soit qu'il n'ait été inspiré que par son fanatisme, soit qu'il ait joué une odieuse comédie, pour exciter les esprits et ren

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dre plus facile la mesure qu'il sollicitait, il se présenta devant les rois Ferdinand et Isabelle; et, leur tendant un crucifix qu'il portait à la main, il leur adressa ces paroles: « Judas a vendu le Christ « pour trente deniers; vous voulez à << votre tour le vendre pour trente-deux mille pièces d'argent. Le voici! pre« nez-le et livrez-le aux juifs.» Cette allocution n'avait pas le mérite d'être neuve. Elle était la parodie d'un des mots spirituels qui échappaient souvent à Alphonse V. Au reste, le grand inquisiteur s'embarrassait peu d'être plagiaire, pourvu qu'il arrivât à son but; et ses paroles eurent l'effet qu'il en attendait. Le 31 mars 1492, Ferdinand rendit une ordonnance qui enjoignit à tous les juifs de sortir de ses Etats avant le 31 juillet. Ce fut seulement un délai de quatre mois, qui leur fut laissé pour quitter leur patrie.

On les autorisa à emporter tous leurs biens; mais cette permission ne fut qu'un acte d'hypocrisie, pour déguiser la honteuse spoliation qu'on n'osait pas avouer; car on ne leur laissa pas un délai suffisant pour réaliser leur fortune. D'ailleurs il ne leur était permis de faire sortir du royaume ni or, ni bijoux, ni aucune des denrées dont les lois prohibaient l'exportation, et la liste des prohibitions était considérable : on ne pouvait exporter ni les blés, ni les armes, ni les chevaux; les laines payaient à la sortie un droit considérable; en sorte que la permission donnée à ces infortunés d'emporter leurs richesses était une amère dérision. Aussi André Bernaldez raconte-t-il dans son Histoire des rois catholiques, qu'il a vu donner par des juifs une maison pour un âne, et une vigne pour un peu de drap. Quelques-uns de ces malheureux, pour ne pas être obligés de quitter leur pays, recurent le baptême; mais l'inquisition leur prouva bientôt que leur conversion n'était pas sincère. La plupart

Un marchand bon chrétien, mais issu de parents israélites, voulait vendre au roi Alphonse V une précieuse image de saint Jean. Il en demandait cinq cents écus d'or. » Par Notre-Dame, lui dit ce prince, vous entendez mieux les affaires que vos aieux. Vous demandez cinq cents écus pour un disciple, tandis que les Juifs ont livré son maître, Notre-Seigneur Jésus-Christ pour trente deniers. >> ANTONIUS PANORMITÆ,

d'entre eux furent condamnés comme relaps et leurs biens furent confisqués. Au dire des historiens contemporains, il sortit d'Espagne en cette circonstance plus de huit cent mille âmes qui allèrent porter à l'étranger leur industrie et les débris de leur fortune. Malgré la défense qui leur en avait été faite, ils parvinrent à emporter une grande quantité d'or cachée dans les bâts et dans les selles de leurs montures, dans d'autres endroits secrets et jusque dans leurs propres intestins. Aussi, plusieurs de ceux qui s'étaient réfugiés sur les côtes d'Afrique furent-ils égorgés par les Maures, qui cherchaient de l'or dans leurs entrailles.

C'est ainsi que l'intolérance des moines et l'avarice du souverain concouraient à dépeupler le royaume. Si à ce nombre de huit cent mille Israélites qui furent chassés d'Espagne, vous joignez celuides infortunés que l'inquisition a fait périr; si vous y ajoutez dix-sept mille familles maures qui furent contraintes de s'expatrier pour échapper à la persécution, car, malgré les capitulations qui leur promettaient le libre exercice de leur religion, les Maures furent forcés de quitter l'Espagne, vous trouverez que Ferdinand et Isabelle, sans honneur pour eux-mêmes, sans avantage pour l'Etat, appauvrirent le pays de plus d'un million d'habitants.Les émigrations pour le nouveau monde, qui commencèrent sous leur règne, furent encore une cause de dépopulation; mais au moins celle-ci ne fut pas sans compensation. La découverte et la conquête de l'Amérique forment un des plus glorieux épisodes de ce règne.

Christophe Colomb, né en 1441, dans l'État de Gênes, s'étant adonné l'étude de la cosmographie. jugea que notre hémisphère ne pouvait pas former le monde entier. Il pensa qu'en naviguant vers le couchant on rencontrerait nécessairement des terres qui devaient servir de contre-poids à l'ancien continent. Il disait d'ailleurs que, puisque la terre était ronde, si l'on ne trouvait pas un second hémisphère en allant dans la direction de l'ouest, on ferait le tour du globe; qu'on arriverait ainsi aux rives qui forment la partie orientale de notre continent; qu'on

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