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s'était proposée d'établir un séminaire, pour l'instruction des filles sauvages, sur le modèle de celui que les PP. Jésuites avaient ouvert pour les garçons; mais, ne pouvant jouir de ses biens, elle fut obligée de se borner à six ou sept élèves, qu'elle habillait, nourrissait et logeait avec les Ursulines, indépendamment des autres et des filles françaises qui fréquentaient le monastère, pour y recevoir l'instruction. Le séminaire commencé pour les garçons ne fut pas plus nombreux, les Jésuites, abandonnés à leurs propres ressources, ne pouvant en nourrir davantage; et encore les commencements de cette institution semblèrent ne servir qu'à montrer la difficulté désolante du succès.

IV.

Mauvais succès du Séminaire des garçons. Difficulté de cette œuvre.

Ces Religieux avaient reçu, comme nous l'avons dit, six enfants sauvages, qu'ils s'étaient empressés d'habiller à la Française et auxquels ils donnaient toute sorte de soins. Mais un capitaine Huron ayant appris, aux Trois-Rivières, la formation du nouvel établissement, et étant descendu à Québec pour voir ces enfants, l'un d'eux, qui était son neveu, voulut s'en aller dès qu'il l'eut vu, et quitta, en effet, le séminaire. Des cinq autres, l'un mourut bientôt après; et on l'avait à peine mis en terre, qu'un autre tomba malade de la même maladie et mourut aussi, par suite du changement d'air, et surtout par la nourriture à la Française, dont ils prenaient avec excès. L'année suivante, il restait au séminaire deux de ces petits sauvages; on leur en adjoignit quatre autres pour compléter le nombre de six; et, de ces six, l'un fut bientôt dégoûté de son nouveau genre de vie par un de ses parents, qui le ramena dans son pays. Les . trois autres, nouvellement entrés, se laissèrent aller, selon leur coutume, au vol, à la gourmandise, au jeu, à l'oisiveté, au mensonge et à d'autres semblables désordres; et, ne pouvant souffrir les avertissements paternels qu'on leur donnait pour les engager à changer de vie, ils résolurent de s'enfuir. Ils concertèrent si secrètement leur évasion et l'excutèrent avec tant d'adresse, qu'un jour, de grand matin, à l'insu de leurs deux autres condisciples et de leurs maîtres, ils enlèvent tout ce qu'ils peuvent, chargent un canot de vivres et de ce qui leur était nécessaire dans le chemin, et s'en vont à la dérobée, sans qu'on en eût depuis aucune nouvelle. Outre la difficulté de former des enfants si peu susceptibles, pour la plupart, de toute discipline qui eût gêné leur liberté naturelle ou leurs penchants vicieux, les Jésuites avaient encore des dépenses considérables à faire, pour déterminer les parents à les leur donner à élever. D'abord il fallait vêtir ces enfants à neuf, remettre à leurs parents les vêtements sauvages qu'ils quittaient, faire encore des présents aux parents; et, s'ils demeuraient dans le voisinage, les aider à vivre une partie de l'année. Car, en donnant leurs enfants à habiller, à loger, à nourrir et à instruire gratuitement, ils s'imaginaient que les missionnaires leur fussent beaucoup redevables.

V.

Les Jésuites cessent d'élever des enfants, et attirent des sauvages à Sillery. Pour éviter de faire plus longtemps ces dépenses et employer leurs fonds à une œuvre plus fructueuse dans ses résultats, les missionnaires cessèrent, pour un temps, de prendre des enfants, et donnèrent tous leurs soins aux sauvages, qui se fixaient à Sillery, pour y pratiquer la vie sédentaire. "Au commencement, dit le P. Vimont, comme nous n'espérions quasi rien "des vieux arbres, nous employions toutes nos forces à cultiver les jeunes "plantes; mais Notre-Seigneur nous donnant des adultes, nous convertissons les grandes dépenses, que nous faisions pour les enfants, à secourir "leurs pères et leurs mères, les aidant à cultiver la terre et à se loger "dans une maison fixe et permanente. Ceux qui prenaient plaisir de se"courir notre séminaire seront consolés, voyant que les dépenses qu'on "faisait pour les enfants, étant employées à faire une petite maison, arrê“tent et gagnent à Jésus-Christ les enfants, la mère et le père."

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VI.

Zèle des Jésuites pour fixer les sauvages et les former à l'agriculture. Si le zèle des PP. Jésuites eût été secondé par la Compagnie, on ne peut pas douter que ces sauvages, disposés, comme ils l'étaient alors, n'eussent, en peu de temps, quitté la vie errante des bois, pour se réunir en villages et se fixer auprès des Français. "Ils ne se contentent pas de "se faire baptiser, écrivait la mère Marie de l'Incarnation le 3 septembre "1840, ils commencent à se rendre sédentaires et à défricher la terre, pour s'établir. Si la France leur donne un peu de secours, pour se bâtir "de petites loges dans la bourgade qu'on a commencée à Sillery, l'on verra, en peu de temps, un bien autre progrès. C'est une chose admirable que "la ferveur et le zèle des RR. PP. de la compagnie de Jésus. Le P. "Vimont, supérieur de la mission, pour encourager ses pauvres sauvages, ❝ les mène lui-même au travail, et travaille à la terre avec eux, ne trouvant rien de bas, en ce qui concerne la gloire de Dieu et le bien de ce "pauvre peuple." Ce Religieux, après l'interruption du séminaire, fit construire cette année, quatre petits logements à Sillery, pour autant de familles. Mais un si faible secours ne pouvait avancer beaucoup l'œuvre de la civilisation des sauvages, puisque, comme on l'a dit déjà, depuis l'embouchure du fleuve Saint-Laurent jusqu'à l'île de Montréal, tous les indigènes étaient errants, et que, pour les civiliser et les convertir, eux et leurs enfants, il eût fallu les réduire à la vie sédentaire.

VII.

Les sauvages demandent des défricheurs qui les aident à s'établir.

Aussi les missionnaires pressaient-ils la Compagnie des Cent-Associés d'envoyer de France des défricheurs, qui aidassent les sauvages à s'établir

et à se bâtir des maisons, et de fournir à ceux-ci quelques secours, en attendant que leurs champs pussent les faire vivre. Sur les espérances que leur donnait la Compagnie, les missionnaires promettaient d'année en année, aux sauvages, des défricheurs, qu'on allait leur envoyer de France, pour les aider; mais les uns et les autres étaient toujours frustrés dans leur attente. Le jour de l'Assomption 1639, des sauvages réunis à Québec, à l'occasion de la Procession solennelle dont nous avons parlé, s'assemblèrent, après les Vêpres, dans la salle des missionnaires, pour les presser de faire exécuter enfin ces promesses: et M. de Montmagny et madame de la Pelterie, si zélés pour procurer le bien des indigènes, voulurent être présents à cette assemblée. Un capitaine sauvage, prenant la parole, dit au P. Le Jeune, supérieur des missionnaires: "Ne laisse point égarer ton "esprit, afin que tu ne perdes rien de ce que je vais dire. Toutefois, ce "n'est point moi qui parle : ce sont tous ceux que tu vois assis dans ce "lieu. Ils m'ont donné charge de te dire que tous nous désirons croire "en Dieu, et que nous souhaitons d'être aidés à cultiver la terre, pour "demeurer auprès de vous. Tu nous avais fait espérer qu'il viendrait "beaucoup de monde, et maintenant tu n'en as que fort peu. Dis donc "à notre Gouverneur qu'il écrive à notre roi: Tous les sauvages vous "disent: Aidez-nous, puisque vous nous aimez; mais nous ne saurions "faire des maisons comme les vôtres, si vous ne nous aidez.”

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Celui-ci ayant fini sa harangne, un autre prit la parole, et dit au P. Le Jeune: "Je ne suis pas de ce pays-ci; voilà ma demeure, dans ces montagnes, vers le midi; il y a fort longtemps que je n'étais venu à Québec. "Ces hommes que tu vois, étant venus me visiter en mon pays, m'ont dit que tu faisais bâtir des maisons pour les sauvages, que tu les aidais à "cultiver la terre. Ils m'ont demandé si je ne voulais point demeurer auprès de toi avec les autres. Je suis venu, et j'ai vu que tu avais com"mencé, mais que tu n'as pas fait beaucoup de choses, pour tant de per66 sonnes que nous sommes. Prends donc courage, et ne ments point; je "m'en vais encore dans les froidures de nos montagnes pour cet hiver. "Au printemps, qu'il y aura encore de la neige sur la terre, je viendrai "voir si tu dis vrai, et si tu as des hommes, pour nous aider à cultiver, "afin que nous ne soyons plus comme les bêtes, qui vont chercher leur vie "dans les bois.”

VIII.

Regrets des Jésuites et de Madame de la Pelterie, qui ne peuvent aider les sauvages à s'établir.

A ces paroles, tout le monde fut touché de compassion. M. de Montmagny promit, de son côté, de faire tout ce qui serait en son pouvoir. Le P. Vimont, qui venait remplacer, à Québec, le P. Le Jeune, ne put s'empêcher de regretter avec amertume que, faute de secours temporels, ces

âmes infortunées fussent toujours sous l'empire des Démons. "Hélas! "s'écria madame de la Pelterie, que d'âmes sauveraient, dans ce pays, "les dépenses frivoles d'une seule collation de Paris, et celles d'un seul "ballet, qui ne dure que deux ou trois heures! Je ferai ce que je pourrai 66 pour secourir ces bonnes gens: si je pouvais les aider de mes propres "bras, je le ferais de bon cœur ; je tâcherai de planter quelque chose pour "eux." Quand on leur eut interprété ces paroles de madame de la Pelterie, les sauvages se mirent à rire, disant que les blés que de si faibles bras auraient semés seraient beaucoup trop tardifs. La conclusion fut qu'on ferait un effort pour les secourir au printemps. Mais cet effort, auquel la Compagnie de la Nouvelle-France ne répondit pas, ne pouvait changer en mieux l'état des sauvages. Madame de la Pelterie n'avait guère à leur offrir que son zèle. En fondant des Ursulines à Québec, elle s'était seulement engagée de parole sans passer aucun contrat en leur faveur; et il se trouva qu'à la fin sa fondation fut si modique, qu'elle n'eût pas suffi seulement pour meubler les Religieuses et leurs séminaristes. Les défricheurs qu'elle avait amenés pour les Ursulines étaient en trop petit nombre; et, comme elle l'avait promis, elle essaya de cultiver la terre de ses propres mains, pour avoir de quoi soulager quelques pauvres néophytes. De son côté, le commandeur de Sillery n'avait assigné un fonds que pour six défricheurs, qui devaient travailler au village de ce nom; et une autre personne zélée en fit passer quatre autres, pour l'avantage des sauvages de la Nouvelle-France. Mais ces secours n'étaient rien, en égard aux besoins; et la Compagnie des Cent-Associés, qui aurait dû y pourvoir, se contenta d'accorder à ceux des sauvages chrétiens qui seraient déjà sédentaires les mêmes faveurs, dans son magasin, qu'elle faisait à tous les Français c'est-à-dire, de leur vendre les marchandises et d'acheter leurs fourrures aux mêmes prix; comme aussi d'ordonner qu'on concédât quelques terres défrichées à de jeunes filles sauvages, qui se marieraient; et, enfin, de destiner, tous les ans, une somme d'argent, pour faire quelque présent à ceux des Hurons chrétiens qui viendraient se fournir de ses marchandises. C'était ne rien faire, au fond, pour rendre sédentaires ces sauvages errants. Aussi l'œuvre de leur conversion ne fit que languir, malgré le zèle des communautés religieuses.

IX.

La Compagnie ne fait presque rien pour l'entretien du culte.

La Compagnie des Associés ne montra pas plus de bon vouloir, pour l'augmentation et l'affermissement de la colonie. Par le troisième article de son acte d'établissement, elle avait promis d'entretenir, dans chacune des habitations qu'elle ferait construire, trois ecclésiastiques au moins, de les loger, de les nourrir, de leur fournir des ornements et de les entretenir

de toutes choses nécessaires, tant pour leurs personnes que pour l'exercice du ministère qu'ils auraient à remplir. Mais, après avoir exclu du Canada les Religieux Récollets, pour éviter la dépense, et n'y avoir admis que les Jésuites, la Compagnie ne donna que six cents livres par année, pour chacune de ses résidences où elle entretenait des Français pour son commerce; ce qui fut cause, sans doute, qu'au lieu de trois prêtres, qu'il aurait dû y avoir, on se contenta d'en placer deux en chacune. Quant aux ornements et aux autres objets religieux, sur lesquels il n'y avait rien eu de réglé, il paraît que, si elle y pourvut pendant quelque temps, ce ne fut qu'avec une parcimonie bien peu honorable pour elle, comme on peut en juger par ce qu'elle fit pour l'entretien du culte à Québec. Après la construction de l'église de Notre-Dame de Recouvrance, les PP. Jésuites fournirent les ornements et le luminaire, jusqu'en 1634, où la Compagnie donna, une fois seulement, la somme de cent écus, pour les meubles d'église et les ornements de première nécessité. Enfin, en 1636 (qu'on nous permette ici ce détail, qui, tout minutieux qu'il est, montre au naturel l'état d'abandon où était le pays), elle envoya une aube de toile commune, une nappe d'autel, deux amicts, sept purificatoires, un surplis, trois ou quatre livres d'encens, dix livres de cire jaune et autant de cire blanche. C'est tout ce que la Compagnie donna, pour le culte divin, à Québec, si l'on en excepte une cloche, du poids de cent livres, qu'elle envoya l'année 1645. L'année 1640, l'église de Notre-Dame de Recouvrance ayant été consumée par le feu, avec la maison des PP. Jésuites, les associés cessèrent, dès l'année suivante, de faire aucun don pour les ornements d'église, et laissèrent à la charité des fidèles d'y pourvoir, se contentant de donner, comme auparavant, la pension annuelle de six cent livres, pour l'entretien des missionnaires en chaque résidence. Nous avons sous les yeux un état détaillé de tous les objets qu'on offrit année par année, et tous furent donnés par divers particuliers, M. de Montmagny, M. de l'Isle, son lieutenant, et d'autres, ou par les fidèles, en général, au moyen de quêtes qu'ils faisaient entre eux.

X.

L'église de Québec et la chapelle des Jésuites incendiées.

L'incendie dont nous parlons eut lieu le 15 juin 1640. La sécheresse étant extrême, cette année, et le vent assez violent ce jour-là, le feu envahit, avec l'église de Notre-Dame de Recouvrance, la maison des PP. Jésuites et la chapelle du Gouverneur; et comme ces édifices étaient construits en bois de sapin, qu'on sait être très-résineux, le feu les enflamma avec tant de promptitude et de violence, qu'on ne put presque rien sauver. Tous les objets de cuivre, à l'usage de l'église, les cloches et les calices se fondirent. Des étoffes, qu'on avait envoyées de France, pour habiller

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