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Les mois d'août et de septembre ont vu éclore dans diverses contrées de l'Europe occidentale des congrès dont il serait aussi instructif que curieux de mettre en parallèle les doctrines et les résolutions pratiques. De ce parallèle sortirait l'irréfragable démonstration que la sagesse, la raison, l'entente des véritables intérêts de l'humanité n'ont pas été du côté de ceux pour qui la religion est une étrangère ou une ennemie. Aux congrès antireligieux de Genève et de Bruxelles on a proclamé, entre autres chimères, que la destinée de l'association internationale des travailleurs se confond désormais avec le progrès historique de la classe qui porte dans ses mains la régénération du genre humain." Les ouvriers du congrès de Gênes déclarent" qu'il faut se débarrasser de la tyrannie spirituelle, parce qu'elle étouffe les intelligences." La réunion du Vaux-Hall de Paris a laissé voir la haine la plus violente contre l'Eglise et tout ce qui peut rappeler sa bienfaisante action. Les institutions et les dogmes, les vérités les plus hautes, même celle que la philosophie de tous les temps a proclamées, ont été enveloppées dans la même proscription. Une femme est montée à la tribune et a demandé que toutes les écoles soient "assainies du catholicisme;" ces paroles ont été couvertes d'applaudissements. Un orateur lui succède et propose de conserver au moins des sœurs de Charité pour soigner les petits enfants malades. Cette proposition malséante a été accueillie avec des murmures et des sifflets. Un autre, dans le cours de sa harangue, a laissé échapper cette expression purement grammaticale: "Plaise à Dieu que...", aussitôt il est interrompu. Le mot de Dieu a choqué ces délicates oreilles; l'orateur a dû en faire ses excuses à l'assemblée.

En regard de ces extravagances, de ces cris de passion aveugle ou furieuse, nous voulons présenter une esquisse des calmes et féconds travaux que des congrès catholiques accomplissaient, à la même heure, en Allemagne et en Suisse.

La dix-neuvième réunion générale des associations catholiques de l'Allemagne a eu lieu à Bamberg, en Bavière, du 31 août au 3 septembre. On sait que ces congrès, composés d'ecclésiastiques et de laïques, laissant de côté les questions purement politiques, ont pour but la défense de la cause catholique et le développement des œuvres de la charité chrétienne. Dans les deux premiers, tenus à Mayence en 1848 et à Breslau en 1849, on arrêta l'organisation de cette grande réunion annuelle dont la fête patronale est celle de Notre-Dame de la Victoire. On s'y occupa des sociétés de Saint-Vincent-de-Paul, des écoles, des bonnes bibliothèques, des besoins religieux des Allemands à Paris et en France. Celui de Ratisbonne, en 1850, donna l'impulsion à la société de Saint-Boniface, qui a depuis lors réalisé 700,000 thalers, au moyen desquels ont été créées successivement 110 missions et 150 écoles pour les pauvres catholiques habitant les contrées protestantes. A Linz, en 1851, on s'occupa de l'art chrétien, en

faveur duquel une association fut fondée et organisée. A Munster, en 1855, on délibéra sur les moyens que pourraient prendre les associations catholiques pour contribuer à favoriser l'enseignement chrétien, et sur les démarches à faire pour arriver à la création d'une université catholique. Le congrès de 1856 s'occupa des congrégations de jeunes gens et des asiles pour l'enfance. Celui de 1857, à Saltzbourg, rechercha les moyens à prendre pour le développement de la bonne presse. L'association du Saint-Sépulcre, pour l'entretien des œuvres catholiques en Palestine, doit son origine à la réunion de Cologne, tenue en 1858, sous la présidence de M. Auguste Reichensperger. Celle de Prague, en 1860, sous la présidence du comte O'Donnell, organisa des missions dans l'intérieur de l'Allemagne, et celle de Trèves, en 1865, sous la présidence du baron d'Andlaw, s'occupa du sort religieux des pauvres émigrants d'Amérique.

Le congrès de Bamberg n'a pas dégénéré de ses devanciers. Présidé par M. Félix de Loé, de la Prusse rhénane, et réunissant ce que l'Allemagne catholique compte de distingué dans l'aristocratie, le haut enseignement, la presse, le ministère pastoral, il a repris la plupart des questions déjà introduites par les congrès antérieurs. A l'audacieux manifeste du congrès de Genève, qui, quelques jours anparavant, avouait sans ambages qu'il ne s'agit de rien moins que de ravir à l'homme toute notion supérieure et d'introniser le matérialisme, il répond en protestant contre les écoles d'Etat sans religion, et en affirmant le droit sacré des parents sur l'éducation de leurs enfants. Il a un cri du cœur pour l'Eglise martyre de Pologne; il adjure les journaux, les peuples et les princes de faire leur devoir et de défendre cette nation, livrée à l'oppression la plus barbare.

Un des points sur lesquels la réunion de Bamberg s'est arrêtée avec le plus de sollicitude et d'attention est l'organisation d'une presse catholique en Allemagne. On ne peut se dissimuler que la presse est une grande puissance, partout présente, l'oreille au guet, s'insinuant partout, et dont la portée dépasse celle de l'église et de l'école. Cette arme prête pour le mal et pour le bien, la ravir aux mains de l'impiété: soutenir, relever et propager la presse paraît au congrès de Bamberg une fonction vraiment apostolique que devrait favoriser surtout le clergé. Il veut donc qu'on crée partout des associations pour la bonne presse, des Pressverien," parce que le peuple ne manque pas de bonne volonté; mais il faut qu'il soit éclairé et encouragé."

Ces préoccupations du congrès à l'endroit des journaux, ces instantes recommandations ne s'expliquent que trop par l'état d'infériorité où se trouvait naguère encore la presse catholique en Allemagne. Sur 761 grands journaux politiques qui s'y publient, c'est à peine si on peut dire que huit sont franchement et ouvertement catholiques: ce sont le Journal de Mayence, les Feuilles de Cologne, l'Observateur badois, le Volkshlatt allemand, la Gazette des Postes d'Augsbourg, le Volksfreund de Vienne

et l'Echo du temps présent d'Aix-la-Chapelle. Ces huit journaux réunis n'ont pas à eux tous autant d'abonnés que les seules Neuest Nachrichten de Munich, qui en comptent 25,000. Les feuilles juives de Vienne et les feuilles piétistes de Berlin dépassent encore co chiffre. Telle revue populaire, impie et indigeste, distille le poison par ses 230,000 exemplaires, immédiatement dévorés par la foule. Cette production, intitulée la Gertenlaube, a donc dix fois plus d'abonnés que les huit journaux catholiques ensemble. Devant cette situation douloureuse, les catholiques ne pouvaient reste indifférents et les bras croisés. Déjà, dans le nord de l'Allemagne, se fait sentir l'influence des divers congrès catholiques tenus dans le cours des dernières années. Différentes feuilles locales défendent les bons principes; de nouveaux journaux sont fondés. Une revue illustrée se publie à Aix-la-Chapelle, M. l'abbé Niedermayer vient de faire paraître la seconde livraison de sa revue mensuelle, le Mouvement catholique en Allemagne, dont la tendance principale est de contribuer à réunir, puis à organiser les forces éparpillées des catholiques. Non seulement Cologne, Trèves, Aixla-Chapelle, Münster, Paderborn, mais encore Berlin, Breslau, Elberfeld et même Magdebourg possèdent leur feuille dominicale. Les presses de M. Sartori, à Vienne et à Gratz, ont déjà donné aux Autrichiens un grand nombre d'excellentes brochures de circonstances; plusieurs sont à leur quatrième édition et présagent pour un avenir prochain une vogue semblable à celle que possèdent déjà les collections populaires de Francfort et de Soest. C'est à ce mouvement si heureusement commencé que le congrès de Bamberg a voulu imprimer une impulsion nouvelle et plus général; ce sont ces efforts de la presse catholique qu'il s'est plu à encourager et à applaudir.

Pendant que les catholiques allemands so concertaient ainsi à Bamberg, ceux de la Suisse se réunissaient en assemblée générale du Piusverein à Will, dans le canton de Saint-Gall. L'association de Pie IX est le trait d'union des catholiques des diverses parties de la Suisse. En ouvrant la première séance, le président, comte Théodore de Scherer, a pu constater que tous les cantons se trouvaient représentés. Malgré la distance et la difficulté des communications, le Jura et le Tessin avaient envoyé un nombre considérable de délégués. Ces deux contrées, les plus éprouvées par la persécution, sentaient le besoin de faire connaître à toute la Suisse leurs douleurs. M. Hornstein, curé doyen de Porentury, a exposé le plan machiavélique des libres penseurs de Berne, qui sont arrivés à leurs fins par l'interdiction des fêtes catholiques, par la suppression des écoles publiques tenues par les sœurs, et par l'intimidation contre les prêtres et les laïques les plus influents. L'assemblée, émue par sa parole éloquente et par l'assurance donnée que les catholiques jurassiens sauraient, malgré 'abandon de la confédération, lutter toujours sans se décourager, s'est levée tout entière et a porté un triple vivat aux courageux catholiques du Jura. La situation de l'Eglise en général a été le sujet de plusieurs discours.

M. de Scherer, en ouvrant le congrès, a constaté le redoublement formdable des attaques contre notre religion et même contre toute révélation. "Pour nous défendre il ne faut plus compter sur les gouvernements, qui sont hostiles ou indifférents. Il faut savoir sauver nous-mêmes notre foi, nos âmes et les âmes qui nous sont chères : c'est par l'association que nous y parviendrons; associons-nous pour les diverses œuvres, pour résister à toutes les attaques, la constitution fédérale nous y autorise." Mgr. Greith, évêque de Saint-Gall, a éloquemment vengé l'Eglise de cette absurde et toujours renaissante calomnie, qu'elle condamne la science, les lettres, les arts; qu'elle précipite dans la décadence intellectuelle et matérielle les peuples qui lui sont restés fidèles. Le savant évêque a montré combien ces accusations étaient déplacées, surtout dans le canton de Saint-Gall, dont le monastère fut un des principaux asiles des lettres et des sciences, une source de prospérité pour le pays jusqu'à ce que le protestantisme vint le frapper. L'Eglise ne combat que la science qui fausse la vérité, ne proscrit que la littérature qui pervertit l'intelligence et le cœur.

Les divers rapports qui ont été lus ont montré la notable extension qu'a prise depuis un an l'association de Pie IX. Beaucoup de sections locales ont été fondées, d'autres se sont développées. Les missions intérieures suisses, qui sont sous le patronage spécial du piusverein, l'oeuvre des Apprentis, l'œuvre des Ouvriers catholiques, l'oeuvre des Bons Livres: toutes ces œuvres diverses se développent et prospèrent.

Un des vœux les plus chers des catholiques suisses est la canonisation du bienheureux Nicolas de Fluch. M. le curé de Sarnen a rendu compte des démarches faites par le comité depuis la dernière réunion. Le saintpère a accueilli très-favorablement la demande qui lui a été présentée par Mgr. l'évêque de Coire, et c'est le cardinal Reisach qui a été chargé de l'examen de la cause. Le comité a l'espoir fondé que la canonisation du patron de la Suisse ne se fera pas longtemps attendre. Cette déclaration a été accueillie par les applaudissements de la pieuse assemblée.

Quelques jours après la réunion du Piusverein à Will, une autre société catholique s'assemblait à Fribourg, la Société des Etudiants Suisses. Fondée pour contre-balancer l'influence de la société protestante de Zofingue, elle réunit on un faisceau les intelligences de la jeunesse des colléges catholiques; ses membres apprennent à défendre leurs intérêts communs de religion et de nationalité, et à se soutenir dans les premiers pas des carrières publiques. Un acte de touchante reconnaissance qui réjouit notre cœur de Français a été accompli par les étudiants de Fribourg.-M. de Montalembert a été un des fondateurs de leur société ;ils se sont empressés d'envoyer à l'illustre champion de la cause catholique un télégramme de condoléance sur le triste accident qui venait de le frapper, et de félicitations pour la conservation d'une vie si précieuse à la littérature, à la liberté et à l'Eglise-Sem. Relag.

Dans sa séance solennelle du jeudi 20 août, l'Académie française a distribué les prix de vertu. Le rapport du président, M. le comte de Carné, fait connaître des faits trop touchants, des exemples trop sublimes de dévouement et d'abnégation, pour qu'une feuille catholique n'ait pas le devoir de les relever et de les proposer à l'admiration de ses lecteurs. Sans doute la docte compagnie, étrangère à toute préoccupation religieuse, n'a eu en vue que de couronner des vertus naturelles; mais il se trouve que ces vertus sont aussi, et par excellence, des vertus catholiques. Pour peu qu'on y regarde d'ailleurs, il ne sera pas difficile de découvrir que derrière ces actes de philanthropie, ces scènes simples d'héroïque dévouement, apparaissent, plus ou moins discrètement voilées, les inspirations de la religion et de la piété Tant il est vrai que l'amour de Dieu est l'ordinaire fondement de l'amour des hommes, et que c'est la foi presque toujours qui est l'inspiration de la charité!

-Dans le courant de l'été dernier, une des tranquilles vallées des Pyrénées entendit retentir une fusillade sur les pics que la dominent. Trois militaires engagés dans une tentative avortée d'insurrection en Aragon, vivement poursuivis par les troupes espagnoles, passèrent la frontière et pénétrèrent dans la petite ville d'Arreau, portant au front le signe de la défaite et de la proscription. Deux de ces hommes étaient blessés, l'autre ressentait les premières atteintes d'une fièvre typhoïde qui l'a conduit aux portes du tombeau. Exténués de fatigue et couverts de sang, sombres d'aspect et presque farouches, ils implorèrent une hospitalité qui leur fut partout refusée, la crainte comprimant la pitié jusque dans les coeurs les plus honnêtes. La nuit approchait, et la mort peut-être avec elle, lorsque Raymonde Olive, une humble ménagère déjà connue dans toute la contrée par une ardente charité, s'approcha des trois malheureux tombés de lassitude

coin d'une borne, les conduisit dans sa demeure et les installa dans sa chambre en se faisant leur garde-malade.

Un médecin visita leurs blessures: il les déclara graves, mais curables au moyen d'un traitement difficile, dont les prescriptions repoussantes furent appliquées par Raymonde Olive avec une minutieuse exactitude. Se consacrant à cette œuvre pieuse avec une sollicitude qui fit parfois oublier aux deux blessés ce qui s'oublie le moins en ce monde, la famille et la patrie absentes, elle veillait en même temps au chevet de leur compagnon d'infortune, dont l'état fut considéré pendant plusieurs jours comme sans espoir, et auquel elle dut faire administrer les derniers sacrements de l'Eglise. Le zèle éclairé déployé durant deux mois par cette généreuse fille, dans l'accomplissement d'une tâche qui dépassait la mesure de ses forces comme celle de ses ressources, est attesté dans l'enquête ouverte sur ces faits par le juge de paix d'Arreau. Une des dépositions les moins touchantes n'est pas celle des trois réfugiés espagnols, qui se déclarent redevables de la vie aux soins de Raymonde Olive.

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