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arrêts du 12 nov. 1886 (aff. Teyssier et Dantigny 1), rendus après un délibéré en chambre du conseil, d'autant plus sérieux que les conclusions de l'avocat général (M. Roussellier) avaient été contraires. Elle s'est affirmée de nouveau le 18 nov. 1886 (aff. Léon 2); le 8 juil. 1887 (aff. Duclos, B. er. 262); le 8 sept. 1887 (aff. Soufflet, B. cr. 328); le 1er déc. 1881 (aff. Rullier, B. cr. 411); enfin, le 8 juin 1888 (aff. Barrère de Haut, dont vous êtes saisis en ce moment).

« Le système du pourvoi se recommande par sa simplicité.

<< Il compte le nombre des poursuites qui ont été dirigées contre le malfaiteur menacé de la relégation et additionne les condamnations prononcées, sans aucun souci de la date des faits délictueux auxquels ils se rapportent.

« L'art. 4 de la loi est ainsi conçu : « Seront relégués les récidi« vistes qui, dans quelque ordre que ce soit, et dans un intervalle de << dix ans, non compris la durée de toute peine subie, auront encouru << les condamnations énumérées à l'un des paragraphes suivants... »

« Il y a donc dans ce texte deux formules décisives dont la réunion emporte la conviction. Dans quelque ordre que ce soit? Par conséquent, peu importe la date de chaque délit et l'ordre dans lequel ils sont déférés à la justice. Tout compte, parce que toute condamnation encourue (c'est le mot de notre article) ou méritée (expression ajoutée par la plupart des arrêts) devient un élément visé par la loi spéciale, pour que la nature du délit et la durée de la peine prononcée rentrent dans ses prévisions.

« L'art. 5 de la loi apporte son contingent à l'argumentation du pourvoi : « Les condamnations qui auront fait l'objet de grâce, de «< commutation ou réduction de peine seront néanmoins comptées << en vue de la relégation ». Il en résulte que « la loi considère seu«<lement le nombre et la nature des condamnations encourues, et << non pas le nombre des peines subies... Il en est ainsi (déclare « l'arrêt du 8 sept. 1887, B. 328) pour les condamnations dont les « peines auront pu être confondues dans les termes de l'art. 365 du « C. d'inst. cr. ».

<< Aucun emprunt aux principes généraux du droit criminel n'est nécessaire pour interpréter une loi exceptionnelle qui se suffit à ellemême.

Ce qu'a voulu la loi, dans un intérêt de défense sociale, ça été d'éloigner du territoire continental les malfaiteurs incorrigibles. Elle voit la preuve de cette incorrigibilité dans cette circonstance que, pendant un intervalle de dix ans, ces malfaiteurs auront mérité un

1. V. les arrêts Teyssier et Dantigny, J. cr., art. 11691, 1re et 2o esp. 2. V. l'arrét Léon, J. cr., art. 11691, 3o esp.

certain nombre de condamnations pour les délits qu'elle spécifie (tous les arrêts).

«< Si, faute d'un mot meilleur ou mieux choisi, celui de récidiviste figure dans l'intitulé de la loi ou dans ses articles, ce mot ne doit pas être pris dans le sens strict que lui attribuent les art. 56 et suivants du C. P. Dans les travaux préparatoires de la loi, le rapporteur du Sénat l'a expressément déclaré (V. rapport de M. Verninac, Off., mars 1885, p. 820).

<< Le mot récidiviste, disait l'un des rapporteurs à la chambre cri«< minelle (Pal. 1887, p. 75, M° Sevestre) a donc ici un sens beaucoup « plus vaste et plus général. Il vise tous ceux qui, par la réitération « de leurs méfaits et par le nombre des condamnations encourues, « sont considérés comme malfaiteurs incorrigibles et dangereux ».

« Les auteurs, qui ont approuvé la doctrine des arrêts de la chambre criminelle, ou qui la subissent sans protestation, comme M. Albert Desjardins, professeur à la faculté de Paris (le Droit, 27 janv. 1886), Paul Breton (Code de la relég., no 223), le Journal du Pal. (note sous l'arrêt du 12 nov. 1886, 1887, p. 72), n'ajoutent rien à l'argumentation précédente. Condamnations « encourues », c'est-à-dire « prononcées », quel que soit l'ordre... Tout est là. « Dura lex, sed lex ».

« L'art. 365, Code de justice criminelle, n'a aucun rôle à jouer dans l'application de la loi. Il ne fait pas obstacle à ce que le ministère public cumule les poursuites, ainsi que l'a reconnu une jurisprudence non contestée. Cet article pourvoit seulement au mode d'exécution des peines en dispensant le condamné de subir celle confondue avec une peine précédente. Chaque condamnation reste acquise avec la constatation juridique du fait délictueux. Dès lors on se demande pourquoi elle ne produirait pas ses effets légaux en matière de relégation?

« Cette loi a été inspirée avant tout et par-dessus tout dans un « intérêt de sécurité publique et de préservation sociale... Elle a été << faite dans l'intérêt de la société contre les malfaiteurs, et nulle«<ment dans l'intérêt de ces derniers, dont la situation légale, au << point de vue de la relégation, est déterminée par des points maté<< riels toujours faciles à vérifier (Rapport précité).

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<< Les distinctions proposées par l'arrêt attaqué sont donc repoussées par le texte et par l'esprit de la loi, dont elles bouleverseraient toute l'économie (Tous les arrêts).

<< Telle est la thèse du pourvoi.

« La défense de Barrère de Haut exigera des développements plus étendus.

« D'abord il est plus long de discuter et de réfuter que d'affirmer dogmatiquement. Plus l'adversaire est imposant (et le pourvoi se

couvre de l'autorité de notre chambre criminelle), plus il est nécessaire de ne rien omettre.

« D'ailleurs, l'art. 11, § 2, de notre loi attache tant d'importance à une discussion approfondie au profit du prévenu, qu'il prescrit, « à peine de nullité », de lui donner un défenseur d'office à toutes les phases de la procédure. Si cette formalité ne s'impose pas dans les débats en cassation, votre rapporteur a cru y trouver du moins l'obligation de rechercher tous les arguments qui peuvent être invoqués contre le pourvoi.

<< Il les a trouvés dans les deux arrêts des Cours de Nîmes et de Montpellier, et aussi dans les dissertations plus ou moins complètes des auteurs qui n'ont pas adhéré à la jurisprudence de la chambre criminelle. Tels sont, entre autres, Louis Sarrut, l'annotateur du Dalloz périodique (1887, p. 147); Tournade (Comm. de la loi des récidivistes); E. Garçon, professeur de droit criminel à la faculté de Douai (Journal du Droit criminel, 1885, art. 11395 et s.); Laborde, professeur de droit criminel à la faculté de Montpellier (J. la Loi, 19 fév. et 22 mai 1886 et 5 août 1888); Jambois (Code pratique de la relég.); Depèges (Code prat. de la loi sur les récid.); Le Poitevin (Code prat. de la loi de la relég.); Garraud, professeur à la faculté de Lyon (Traité du droit pénal, II, no 205).

<< Les divers éléments de la thèse de la défense peuvent se classer sous les paragraphes suivants :

« § 1er. Examen de la valeur des arguments de texte.

« § 2. Étude du pourvoi au point de vue de la récidive.

« § 3. Influence de l'art. 365, C. inst. crim. sur la solution de la question.

« § 4. Conséquence du système du pourvoi.

« § 1er.

Valeur de l'argument tiré du texte des articles 4 et 5 de la loi de 1885.

« Il faut d'abord écarter l'art. 5. Si la chambre crimineile vise cet article, où il est question seulement de grâce ou de réduction de peines, c'est pour conclure qu'il en est de même des peines confondues. Ce n'est pas là citer un texte, c'est le compléter. C'est un raisonnement dont la réfutation sera mieux à sa place sous le § 3.

« Avec l'art. 4, au contraire, il s'agit bien d'un argument de texte. On y a relevé deux formules dont la réunion a paru décisive, même à des auteurs défavorables à la conclusion du pourvoi : « condamna«<tions encourues dans quelque ordre que ce soit ». Cet assemblage de mots signifie-t-il nécessairement que tout jugement « prononcé » sera compté, à quelque date qu'il intervienne et à quelque fait qu'il

s'applique? Chacune de ces formules n'est-elle pas susceptible de se prêter à une autre interprétation?

« La défense retranche d'abord de ce faisceau l'expression qui semble la plus décisive « dans quelque ordre que ce soit ». On en connaît la genèse. Le premier rapport de M. de Verninac au Sénat a expliqué « qu'il était indispensable de dire expressément que la loi << nouvelle entendait bien s'écarter du principe formulé dans les << art. 56 et s. du C. P., et (remarquez bien ceci) frapper la récidive << sans se préoccuper de la gradation croissante ou décroissante de la « gravité des condamnations encourues ». C'est pour rendre cette idée qu'il est parlé au texte de l'ordre et non de la date des condamnations. Ainsi entendu (et le § II démontrera qu'on ne peut l'entendre autrement), ce membre de phrase perd toute influence sur la solution de la question, d'autant plus qu'il ne s'est jamais agi d'appliquer les art. 56 à 58, C. P., pour restreindre la portée de la loi.

« Restent les mots « condamnations encourues » ou « condamnations méritées » par des délits prévus à l'art. 4. Ces deux épithètes, évidemment considérées comme synonymes et équivalentes, se retrouvent à la fois dans presque tous les arrêts de la chambre criminelle. Est-il exact de les traduire, comme on le fait en définitive, par les mots « condamnations prononcées » ou « jugements rendus » ? On peut en douter. Une condamnation est « méritée » ou « encourue », avant d'être prononcée, au moment même où le délit qu'elle réprimera plus tard est commis. Elle s'y reporte de plein droit, quand il s'agit notamment, au cas de lois pénales successives, de savoir quelle est celle qui devra être appliquée ou quels sont les éléments constitutifs du délit à vérifier. La qualité du coupable au moment du fait décidera parfois quelle juridiction sera compétente.

« Si les mots « condamnations encourues » avaient un sens si évident, si absolu, comment se fait-il qu'ils aient reçu deux interprétations différentes? L'art. 4 lui-même dispense de la relégation celui qui n'a pas encouru de condamnation pendant un intervalle de dix ans, non compris la durée des peines subies. Plusieurs cours et un auteur, M. Garçon 3, s'étaient crus obligés de ne tenir compte que de la date de la dernière condamnation. Ainsi un retard dans la poursuite, ou l'appel d'un condamné correctionnel lui auraient assuré le bénéfice de cette espèce de prescription et une immunité peu logique, mais imposée par l'interprétation de texte que préconise le pourvoi. Mais voici que les arrêts de la chambre criminelle déclarent que, pour être libératoire, la période de dix ans doit précéder immédiatement,

3. V. l'article de M. Garçon, J. cr., art. 11395, § 5.

non pas la date de la dernière condamnation, mais celle du nouveau délit (11 mars 1886, aff. Baritel; Ronjat, prés.; Dupré-Lasale, rapp.; Loubers, av. gén. ;-(10 juil. 1886, deux arrêts, Savoye et Valette; Low, prés.; Poux-Franklin et Auger, rapp.; Roussellier, av. gén.").

<< Comment concilier ces interprétations opposées des mêmes mots dans le même article? Il a été dit de cette loi qu'elle était faite dans l'intérêt de la société contre les malfaiteurs, et nullement dans l'intérêt de ces derniers. Certainement on n'accusera pas votre jurisprudence d'un excès d'indulgence, puisqu'avec elle le sens des mêmes mots varie pour frapper sans miséricorde. Mais a-t-elle suffisamment respecté le sentiment intime de la justice? N'aurait-il pas été préférable d'adopter, pour le cas où se trouve Barrère de Haut, une interprétation libérale comme celle que la chambre criminelle a donnée à l'art. 9 de notre loi. Ce sont encore à peu près les mêmes mots. Il s'agit de l'individu qui a « encouru » avant la promulgation de la loi des « condamnations » de nature à être comptées en vue de la relégation. « Il n'y sera soumis qu'en cas de « condamnation nouvelle » dans les conditions ci-dessus prescrites ». Des tribunaux virent dans une « condamnation nouvelle » un fait matériel qu'il suffisait de constater. Non, a proclamé votre chambre criminelle dans ses arrêts des 25 février et 25 mars 1886 (Aff. Duclert et Appolit; Ronjat, prés.; Dupré-Lasale et Lescouvé, rapp.; Loubers, av. gén. 6). Il faut encore que la «< condamnation nouvelle » ait été encourue pour un délit postérieur à la promulgation de la loi... Et si la date est incertaine, l'arrêt du 25 février 1886 juge en faveur du prévenu (Aff. Joux; Ronjat, prés.; Hérisson, rapp.; Loubers, av. gén. 7).

<«< En d'autres termes, la jurisprudence se conforme aux principes généraux du droit criminel, excepté dans le cas du pourvoi, et la défense conclut que ce qu'il faut rectifier, c'est l'interprétation sur laquelle s'appuie le demandeur en cassation.

§ II.

Examen du pourvoi au point de vue de la récidive.

« A la défense, qui montre et « souligne » le mot « récidivistes » inscrit en tête de la loi et répété dans la plupart des articles, on répond que ce mot ne « doit pas être pris dans le sens strict que lui « attribuent les art. 56 et 4 du C. P. ». Cela n'est pas douteux. Aucun

4. V. l'arrêt Baritel, J. cr., art. 11475.

5. V. les arréts Savoye et Valette, J. cr., art. 11530 et 11497.

6. V. les arrêts Duclert et Appolit, J. cr., art. 11457.

7. V. l'arrêt Joux, J. cr., art. 11457, 5o esp.

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