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CHRISTOPHE COLOMB

Les diverses Phases de sa vie d'après la Légende et l'Histoire

LES SOURCES

Quiconque veut étudier la vie de Christophe Colomb doit envisager ces choses essentielles : la personne de l'amiral et le projet qu'il conçut et mena à bonne fin.

Cette étude peut s'appuyer sur deux sources d'information bien distinctes (1). La plus abondante et la moins digne de foi est constituée par les écrits de Colomb, ceux de son fills naturel Fernand, ceux de son historiographe l'évêque Las Casas, ceux enfin des écrivains contemporains espagnols ou portugais qui connurent personnellement l'amiral: Oviedo (2), Andrès Bernaldez (3), Geraldini (4), Pierre Martyr (5). Notons encore Ruy de Pina (6), Resende (7), Bar

(1) H. Vignaud, Études critiques sur la vie de Christophe Colomb avant ses découvertes, Paris, 1905, p. 24; Harrisse, Christophe Colomb, Paris, 1884, t. I, pp. 1-136.

(2) La Historia general de las Indias, Séville, 1535, et éditions suivantes. (3) Historia de los Reyes Catolicos D. Fernando y Dona Isabel..., Séville, 1870, 2 vol. in-8°.

(4) Itinerarium, 1651.

(5) Opus epistolarum... Compluti... MDXXX. in-fo; Sommario dell' historia dell' Indie occidentale..., dans RAMUSIO, Terzo Volume delle Navigationi, Venise, 1553.

(6) Chronica do Senhor Rey D. Alfonso V (Collecção de livros ineditos de Historia portugueza, etc.), Lisboa, 1792.

(7) Chronica dos valorosos e insignes feitos del Rey Joao II..., Lisbonne, 1622, in-fo.

ros (1), Lopez de Gomara (2), qui chercha parfois à s'écarter de la tradition colombienne, Herrera (3), qui se borna à copier Las Casas, etc., etc. Les informations fournies par cette première source forment la tradition colombienne.

La seconde source, plus sûre mais plus pauvre que la précédente, à laquelle elle n'emprunte rien, fournit encore assez de matériaux : les courtes notices d'Antonio Gallo, chancelier de la Banque St-Georges à Gênes (4); de B. Seranega, chancelier de la République de Gênes (5); de l'évêque A. Giustiniani (6), tous trois compatriotes de l'amiral; puis une série de documents provenant des archives notariales génoises et savonaises, « la correspondance officielle relative aux affaires auxquelles les deux Colombo prirent part, et les pièces authentiques, extraites des archives d'Espagne, qui se rapportent aux relations officielles de Colomb avec les Rois Catholiques à l'époque de l'acceptation et de la mise à exécution de son grand dessein ».

Si les premières années de l'amiral ne présentent rien de particulier, il faut les connaître cependant pour bien saisir le caractère de son entreprise, ou mieux pour s'assurer si elles expliquent naturellement la formation, chez le grand Génois, de la théorie savante qui aurait été la cause déterminante de sa découverte (7). Cela est devenu d'autant plus facile qu'une critique

(1) Da Asia..., Lisboa, 1778-1788, 24 t., in-12°.

(2) La historia general de las Indias, con tudos los descubrimientos..., Anveres, Juan Lacio..., 1554, in-8°.

(3) Historia general de los hechos de los Castellanos en las islas y tierra firme del mar Oceano..., Madrid, 1728, 4 vol. in-fo.

(4) De navigatione Columbi per inaccessum ante Oceanum Commentariolus, dans RACCOLTA, Ille partie, t. II, pp. 188-191 (Fonti italiane per la storia della scoperta del Nuevo Mondo, raccolte da G. Berchet).

(5) De rebus Genuensibus commentaria, ab anno 498 usque ad annum 1514, dans RACCOLTA. Fonti italiane, t. II, pp. 192-196.

(6) Psalterium hebreum, arabicum et chaldeum cum tribus latinis interpretationibus et glossis, Gênes, 1516, in-fo.

(7) H. Vignaud, Loc. cit., p. 26.

éclairée s'est appliquée depuis quelques années à élucider quantité de points, obscurcis à plaisir. Ces énigmes, le mot n'est pas exagéré, se rapportent à la naissance de Christophe Colomb, à la condition sociale de sa famille, à l'instruction qu'il a reçue, aux voyages qu'il a ou aurait entrepris, aux connaissances nautiques qu'il lui aurait été donné d'acquérir; à l'établissement de l'amiral au Portugal, à la formation et au développement de son projet; à l'histoire de sa présentation, aux luttes qu'il eut à soutenir pour le faire agréer, etc.

La plupart des nombreux et remarquables travaux qui exposent la vie de Colomb et la découverte de l'Amérique, le font d'après la tradition colombienne; or, cette tradition, si respectable et si documentée qu'elle soit, est-elle d'une authenticité incontestable ? N'est-elle pas infirmée par une série de documents, récemment exhumés, qui montrent la fausseté des articles de foi formant sa trame, et qui bouleversent de fond en comble la physionomie du Colomb, dont le nom est inscrit dans les annales de l'Humanité ?

Il semble que la dernière hypothèse s'impose; c'est la conclusion qui se dégage de ce travail, en tête duquel il ne semble pas superflu de placer quelques notions sur les sources d'information.

Colomb mourut dans l'obscurité la plus complète, et resta presque ignoré des chroniqueurs du temps; en revanche son fils naturel Fernand (1), et l'évêque Barth. Las Casas (2) dépositaire des papiers de l'amiral, écrivirent sa biographie, pour ne pas dire son apologie, en traduisant sa pensée et en transcrivant les

(1) Historie del S. D. Fernando Colombo. Nella quali s'ha particulare e vera relatione dell' Ammiraglio D. Christoforo Colombo, suo padre. Nuovamente di lingua spanuola tradotte nell' Italiana dal S. Alfonso Ulloa. Venise, 1571, in-12o

(2) Historia de Las Indias, Madrid, 1875, 5 vol. in-8°. (Las Casas termina son Historia en 1561.)

assertions qu'il avait disséminées dans ses écrits, en partie égarés aujourd'hui.

Ces deux ouvrages justement suspects de partialité ne sont pourtant pas dépourvus de valeur, en raison des renseignements de première main dont ils abondent; avec leur aide on a écrit la vie de Colomb, telle qu'on la trouve dans les livres, à partir d'Herrera, et telle qu'elle a fini par se graver dans les esprits et dans les cœurs.

Après Washington Irving « le plus renommé et le plus séduisant des biographes modernes » de l'amiral (1), et après Alexandre de Humboldt (2), le comte Roselly de Lorgues tenta aussi d'écrire l'histoire de Christophe Colomb (3). Contrairement au silence de ces deux écrivains, il tint compte d'un point important de la légende colombienne : la mission providentielle attribuée au découvreur de l'Amérique. D'après cette conception, Colomb devenait « un être exceptionnel, supérieur à tous et en quelque sorte en dehors de l'Humanité. Chacun de ses actes était déterminé, et sa vie tout entière formait une chaîne dont aucun anneau ne pouvait être séparé. La légende prenait ainsi un caractère sacré qu'il fallait respecter » (1). La vogue de ce livre favorisait la « singulière campagne entreprise, à la même époque, pour canoniser celui dans lequel on ne voulait voir qu'un héros chrétien ».

Une réaction salutaire ne tarda pas à se produire. Armé de pied en cap, H. Harrisse, le sagace et persévérant critique, entra le premier dans la lice.

(1) A History of the life and voyages of Christopher Columbus, Londres, 1828, 4 vol. in-8° et éd. subséquentes.

(2) Eramen critique de l'histoire de la géographie du Nouveau Continent, et des progrès de l'astronomie nautique du XVe au XVIe siècle, Paris, 18361839, 5 t. in-8°.

(3) Christophe Colomb. Histoire de sa vie et de ses voyages, d'après des documents authentiques tirés d'Espagne et d'Italie, 4 éd., Paris, 1878, 2 vol. in-8°.

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Des documents, des actes notariés, passés à Gènes et à Savone notamment, avaient été découverts, qui ne concordaient pas toujours avec les assertions de Fernand Colomb et de Las Casas, et qui les atténuaient même de singulière façon. Le consciencieux critique s'en empara et montra, en se trompant parfois, il est vrai, que les Historie, l'une des bases fondamentales de la légende colombienne, fourmillaient d'erreurs et contenaient des affirmations inacceptables. Harrisse ne s'en prit pas à Christophe Colomb lui-même; à ses yeux il était resté étranger à la légende qui se forma autour de son nom (1).

L'émoi, causé par l'apparition du Fernand Colomb de Harrisse, était à peine calmé, que l'Académie d'Histoire de Madrid mit au jour le mémoire, resté manuscrit, de Las Casas, qui constituait la deuxième assise de la légende colombienne. Cette publication dessilla les yeux; elle montra qu'il ne s'était pas glissé d'interpolations dans le texte de Fernand Colomb, texte qui était passé d'Espagne en Italic.

Quelques années plus tard, en 1882, Harrisse, qu'on verra sur la brèche pendant à peu près un demi-siècle, consacra à Christophe Colomb un important ouvrage (2). Cette fois ce ne fut plus le témoignage du fils, mais celui du père qui fut scientifiquement contesté. Si les rectifications, que cette critique pénétrante des sources apporta à quantité de données acquises, ne tiennent pas une grande place « dans l'enchainement des causes qui déterminèrent la découverte du Nouveau Monde », en revanche elles ont eu, à l'insu de H. Harrisse, des conséquences d'une portée considérable. Convaincu

(1) Fernand Colomb, sa vie, ses œuvres. Essai critique par l'auteur de la Bibliotheca americana vetustissima, Paris, Tross, 1872, in-8°.

(2) Christophe Colomb, son origine, sa vie, ses voyages, sa famille et ses descendants. Études d'histoire critique, Paris, E. Leroux, 1884, 2 vol. in-8", XI-458 et 605 pp.

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