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d'une femme, régénérait l'art et la philosophie, Bacon fit pour l'observation et l'expérience ce que Platon avait fait pour l'idéal. Dans son Novum organum, et dans son traité De Dignitate et Augmentis Scientiarum, il trace les règles de la méthode expérimentale. Voici sa théorie de l'induc

tion:

APHORISMUS XIX (1).

« Duæ viæ sunt, atque esse possunt ad inquirendam et in« veniendam veritatem. Altera a sensu et particularibus advo« lat ad axiomata generalia, atque ex iis principiis eorumque « immota veritate judicat et invenit axiomata media : atque « hæc via in usu est. Altera a sensu et particularibus excitat axiomata, ascendendo continenter et gradatim, ut ultimo loco perveniatur ad maxime generalia : quæ via vera est,

« sed intentata. »

APHORISMUS XXII (2).

« Utraque via orditur a sensu et particularibus et acquies«cit in maxime generalibus. Sed immensum quiddam discre"pant; cum altera perstringat tantum experientiam et par«ticularia cursim, altera in iis rite et ordine versetur; altera « rursus jam a principio constituat generalia quædam ab«stracta et inutilia, altera gradatim exsurgat ad ea quæ revera naturæ sunt notiora.

Ainsi pour Bacon, qui s'insurgeait contre la scolastique, des deux méthodes qui peuvent mener à la vérité, la première,

(1) Novum Organum, liber primus, digestus in aphorismos.

(2) Ibidem.

c'est de s'élancer sur-le-champ à des axiomes généraux, et de cet apogée de descendre aux axiomes intermédiaires; l'autre, au contraire, pénètre dans les faits particuliers, les observe, et en abstrait une généralisation qui s'élève graduellement à ces axiomes, dont l'autre méthode descendait a priori. Voilà la véritable route. Mais elle attend encore des esprits qui s'y engagent. Et cependant on y recueillerait des résultats aussi féconds que les généralités a principio sont pauvres et chimériques.

Bacon rétablissait la nécessité et les droits de l'expérience, et méconnaissait en même temps les lois de l'intelligence, qui sont le point de départ légitime de l'idéalisme. Car dans cette phrase, utraque via orditur a sensu et particularibus, et plus explicitement encore dans d'autres passages, s'il veut dire que la pensée est non-seulement provoquée par la sensibilité, mais n'est elle-même que la sensibilité transformée, il défigure un fait fondamental, indestructible, clairement observé par Aristote et par Kant: savoir que l'esprit humain a des conditions et des formes nécessaires mises en mouvement par la sensibilité, mais qui s'en distinguent, et qui tout ensemble réfléchissent le monde et le formulent. Mais heureusement la méthode de Bacon, aussi légitime et aussi salutaire dans l'étude de l'homme et de l'histoire que dans celle de la nature, comprend virtuellement l'observation de tous les faits, alors même que Bacon lui-même peut en méconnaître quelques-uns.

Sortons de ces détails psychologiques pour apprécier la mission de la science dans chaque siècle. Si la sociabilité humaine est progressive, la science devra l'être également, se développer en se détruisant d'époque en époque; car l'homme n'avance qu'en réagissant contre lui-même la réaction contre l'histoire est une révolution; la réaction contre la philosophie est un système nouveau. Au dix-septième siècle, la conception de Bacon renversa la scolastique et restaura les sciences physiques et morales. Le dix-huitième, époque

pour la France d'une vive fermentation dans la pensée, et d'une gloire littéraire qui sut être neuve après les contemporains de Louis XIV, fut travaillé néanmoins d'une pauvreté singulière dans les bases primitives de sa philosophie. Il hérita de la conception de Bacon, et se contenta de la reproduire, plan, divisions, classification des connaissances humaines en histoire, poésie et philosophie. L'Encyclopédie, instrument de révolutions, s'enrichit des dépouilles du philosophe anglais, de Bayle, de Spinosa, de l'érudition de Brucker; grâce surtout à la persévérance, à la fougue de Diderot; grâce, après lui, à l'esprit calme, lumineux et froid de d'Alembert. Pas de conception originale, mais une exécution hardie, opiniâtre; morceaux brillants, effusions parfois éloquentes, secours heureux prêtés par Voltaire et Montesquieu, et, par-dessus tout cela, même ardeur dans tous les rangs de la cohorte philosophique. Le siècle s'était cotisé pour détruire le monde sait aujourd'hui comment il a rempli sa tâche.

:

N'avons-nous pas l'instinct d'un autre édifice, d'une encyclopédie qui édifie et non plus qui détruise? Chaque science, la philosophie, la législation, l'histoire, la médecine, n'ambitionne-t-elle pas d'arriver à des résultats généraux, d'agrandir la circonférence dans laquelle elle se meut, d'en trouver le véritable centre, et d'en faire un monde? Elles sentent toutes qu'elles doivent travailler à être ellesmêmes, à former un système complet, puis à se rallier à quelque chose de plus un, de plus simple, c'est-à-dire à une unité qui les coordonne. On dirait qu'elles désirent cette commune alliance vers laquelle gravitent les nations. Alors, le temps venu, les sciences, à la fois profondément cultivées et généralisées, pourront se présenter devant une conception ultérieure, et se réunir en faisceau pour servir de base à une encyclopédie positive. Il serait prématuré de vouloir aujour d'hui généraliser la généralité même, et brusquer l'histoire de l'esprit humain et du monde. Il faut encore creuser et

élargir chaque sillon, ajourner la conclusion et le dogmatisme.

CHAPITRE V.

DE LA RELIGION.

La science seule ne suffit pas pour expliquer la vie de l'homme. Le marin qui fend les mers, le voyageur qui se fie, pour abréger les distances, à ces appareils de l'industrie que vient d'animer la vapeur, se sont-ils rendu compte du mécanisme qui fait leur sécurité et protége leur existence ? Leur présence est un acte de foi, et, sans savoir par euxmêmes, ils croient aux assertions et à la puissance de leurs semblables. Fichte l'a dit avec vérité : Nous marchons dans la foi. En effet, combien souvent agissons-nous, non par une conviction rationnelle et dialectique, mais par une conviction crédule, qui nous fait ajouter créance à des choses dont nous ne nous sommes pas rendu un compte rigoureux et positif? La foi est donc une disposition naturelle à l'homme; il croit naturellement. Mais à quoi doit-il croire? A quoi doit-il appliquer sa foi ? Le domaine de la foi et celui de la raison ne sont ils pas en aspect continuel? et l'un ne diminue-t-il pas à mesure que l'autre s'agrandit? Voilà la question.

Nous ne nous contentons pas des abstractions de la pensée. Pourquoi ce peuple court-il aux théâtres, aux temples? parce qu'il lui faut les plaisirs et les festins de l'imagination : imagination qui électrise les multitudes, en leur représentant, sous des formes vivantes, les idées qui leur sont naturelles et chères; qui poursuit l'homme de ses songes, de ses apparences, jusque dans l'isolement le plus complet de la vie et de la pensée, et dont le prisme inépuisable fait d'un monde auparavant inanimé la forêt enchantée du Tasse.

Est-ce tout? Oh! nous avons dans le cœur une autre dis

position à satisfaire, le sentiment. Schiller a dit que sur des rives inconnues, dans une mystérieuse vallée, paraissait à chaque printemps une jeune fille, belle et merveilleuse; elle n'était pas née dans la vallée, on ne savait d'où elle venait, et dès qu'elle prenait congé des pauvres bergers, sa trace était perdue; cependant son approche était bienfaisante; tous les cœurs allaient à elle; elle avait dans ses mains des fleurs et des fruits éclos sous un autre soleil, par un souffle plus fécond, dans une nature plus heureuse que la nôtre; elle partageait ses dons, à l'un une fleur, à l'autre un fruit; et chacun s'en allait dans sa maison content et consolé (1).

(1) In einem Thal, bei armen Hirten
Erschien mit jedem jungen Jahr,
Sobald die ersten Lerchen schwirrten,
Ein Mädchen schon und wunderbar.

Sie wahr nicht in dem Thal geboren,
Man wusste nicht woher sie kam;
Doch schnell war ihre Spur verloren,
Sobald das Mädchen Abschied nahm.

Beseligend war ihre Nähe,

Und alle Herzen wurden weit.

Sie brachte Blumen mit und Früchte,

Gereift auf einer andern Flur,
In einem andern Sonnenlichte,
In einer glücklichern Natur:

Und theilte jedem eine Gabe,
Dem Früchte, jenem Blumen aus,

Ein jeder ging beschenkt nach Haus.

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