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tels qu'il n'est guère possible d'en imaginer de plus grands.

Pourquoi? Mais parce que la révolte de notre premier père a été suivie, et l'est encore chaque jour, d'une infinité d'autres révoltes, qui ne sont guère moins condamnables que la première, et qui ajoutent encore à notre aveuglement et à notre entraînement au mal.

raisonnables dans nos projets, plus sobres, plus tempérants, plus éloignés des voluptés et des vices qui énervent à la fois l'âme et le corps, et nous verrons disparaître le plus grand nombre des maux que nous souffrons. L'homme, dit-on, est malheureux; mais prenons garde de nous tromper sur le bonheur on n'est heureux ni par la fortune, ni par les dignités, ni par le savoir, ni par les plaisirs du monde, ni par la solitude; mais on est heureux par le témoignage d'une conscience sans reproche; c'est là que se trouvent la paix, le plaisir solide de l'âme, le bonheur; et, dans cette matière, nos écrivains sacrés se sont montrés bien plus éclairés que tous les sages de l'antiquité. Ce bonheur est au pouvoir de tous, et il n'est au pouvoir de personne de nous le ravir; il est indépendant de tous les accidents de la vie humaine; il reste dans nous quand tout périt autour de nous. L'homme vertueux peut bien souffrir; mais, dans le calme de son âme pure, il ne voudrait pas changer sa destinée contre celle des méchants qui sembleraient être les plus heureux des mortels, et les chaînes dont il pourrait être chargé lui seraient plus douces que toutes les couronnes du vice triomplant. >>

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C'est ce que Jésus-Christ nous enseigne G'une manière admirable, non-seulement par ses paroles, mais encore par son exemple: Heureux ceux qui pleurent, nous dit-il, parce qu'ils seront consolés. Vous entendez bien il ne nous dit pas simplement que ceux qui pleurent ne sont point aussi malheureux qu'on pourrait se l'imaginer, mais qu'ils sont heureux, au contraire, et heureux précisément à cause de ce qui fait couler leurs larmes Beati qui lugent. (Matth. v, 5.) Aussi, quand il fut lui-même sur la croix, chargé de souffrances et d'opprobres tels qu'on n'en vit jamais de semblables accumulés sur un seul homme; quand, les mains et les pieds cloués, la tête Couronnée d'épines, souffrant dans toutes les parties de son être, il abaissa les regards sur sa divine Mère, du cœur de laquelle le cri'de sa douleur remonta jusqu'à son cœur, pour l'accroître encore s'il était possible; quand, élevant ses yeux en haut, il poussa vers le ciel ce cri de l'humanité aux abois : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné? (Matth. xxvi, 46) je ne doute point que déjà, à cause du triomphe qui l'attendait, et dont il commençait à jouir par anticipation, il ne fût infiniment plus heureux que ses ennemis victorieux, dont le faux et court triomphe allait être suivi de remords et de tourments sans fin, en cette vie et en l'autre : Beati qui lugent, quoniam ipsi consolabuntur.

Pourquoi tant de désordres, et de si grands désordres? avez-vous dit en dernier lieu. Pourquoi? Mais parce que l'homme s'est révolté contre son Dieu, et que, de cette ré volte insensée, abominable, révolte que tout alteste en nous et hors de nous, sont sortis un aveuglement, un entraînement au mal

De là tous les désordres qui vous étonnent, et vous font douter de la divine Providence Vous vous trompez, ce n'est point Dieu qui s'est éloigné de nous il ne le pouvait, après nous avoir créés; mais c'est nous qui nous sommes éloignés de lui, et qui nous en éloignons chaque jour davantage. Ces désordres, au reste, ne dureront pas toujours. Ils cesseront, pour faire place à l'ordre parfait, quand le moment sera venu où Dieu rendra à chacun en raison de sa conduite. Ce triomphe définitif de la vertu sur le vice, du bien sur le mal, aura lieu un jour, tout nous le dit, la religion, la raison, le consentement unanime des peuples. En attendant, que fait Dieu ? Tout ce que nous pouvions espérer d'un bon père qui veut pousser ses enfants à l'accomplissement de leurs devoirs, sans détruire pourtant la liberté qu'il leur a donnée pour mériter ses récompenses. Il nous détourne du mal, il nous porte au bien, que dis-je ! il le fait, en quelque sorte, avec nous, par sa divine assistance que nous recevons de mille manières. Quand, malgré tout, nous nous sommes jelés dans le mal, quand nous avons même produit ces graves désordres qui épouvantent, que fait Dieu encore? Ce que lui seul peut faire; il tire le bien du mal, et des plus grands désordres du vice il fait sortir quelquefois les plus grands triomphes de la vertu. Si nous ne voyons pas là la Providence, où donc la reconnaîtrons-nous?

Ecoutons encore ici l'abbé de Frayssinous: « On sait bien, » dit-il, «< que la question de l'existence et de l'origine du mal est une de celles qui ont le plus tourmenté les esprits, et que c'est là un écueil contre leque! s'est brisée la raison humaine, quand elle a voulu tout pénétrer et tout savoir. Nous ne balançons point à dire qu'il est impossible de dissiper entièrement toutes les ténèbres qui enveloppent cette malière. Si, dans l'ètude des phénomènes du monde visible, on rencontre souvent des choses qui déconcer. tent l'intelligence des savants les plus habiles, et dont toute leur sagacité ne peut rendre compte, comment, dans un ordre de choses bien plus sublime, dans le mon ie intellectuel et moral, ne se trouverait-il pas des points au-dessus de la capacité humaine? Alors que doit-on faire? On doit admirer la Providence dans tous les traits de puissance et de sagesse par lesquels elle se découvre, et la croire également admirable dans les choses qu'elle nous cache. Ainsi, qaand je ne pourrais pas suffisamment éclaircir la question de la permission et de l'existence du mal sur la terre, ma foi en la Providence n'en serait point ébranlée. D'un côté, je serais ferme dans la vérité, comme dans l'autre

je ferais sans détour l'aven de mon ignorance, et j'obéirais aux inspirations mêmes d'une raison éclairée, en m'abaissant devant les hauteurs de la science de Dieu. En tout, il faut savoir s'arrêter; et dans le raisonnement, romme dans la conduite, la véritable force se trouve dans une juste mesure.

« Mais ne craignons point d'entamer la discussion; et, sans prétendre dissiper tous les nuages, présentons aux esprits sages et dociles assez de lumières pour voir que le mal n'a rien d'inconciliable avec la sainteté, la bonté, la sagesse, la justice d'un Dieu qui préside aux destinées humaines.

<< Il est vrai, le Dieu trois fois saint, comme l'appellent nos Livres sacrés, a une aversion infinie pour toute tache qui souillerait son être divin, une immuable volonté de ne rien faire qui soit indigne de ses perfections; mais le mal ne souille que les créatures qui le commettent, et, au milieu de leurs désordres, la sainteté de Dieu demeure inaltérable. Et ne pensons pas que Dieu doive être regardé comme l'auteur du mal qu'il permet. Il n'en est pas du monde moral comme du monde matériel; dans celui-ci, tout marche, tout s'exécute par des mouvements mécaniques; et les phénomènes que nous présente la nature peuvent être considérés comme l'ouvrage de Dieu, toutes les fois qu'ils sont le résultat inévitable des lois dont Dieu seul est l'auteur. Mais ce n'est pas ainsi que se gouvernent les esprits intelligents et libres : l'homme est capable d'agir par raison et par choix; il est doué de la sublime faculté de comparer, de réfléchir, de se déterminer; c'est par là qu'il est ce qu'il est, c'est par là qu'il est raisonnable. La liberté lui fut donnée pour qu'il embrassât le bien par choix, et qu'il eût le mérite de le pratiquer: il est vrai que, libre de choisir entre le vice et la verlu, il peut se tourner vers des objets indignes de ses affections, s'attacher à ce qui est défendu, en un mot faire le mal; mais ce n'est pas pour cela que Dieu l'a fait libre: la liberté vient de Dieu, l'abus vient de l'homme; sa détermination au mal est son ouvrage. Le mal est si peu la fin que le Créateur s'est proposée, qu'il a donné à l'homme le sentiment du bien, la conscience, le remords, la raison, pour démêler la vertu d'avec le vice, pour éviter l'un et pratiquer l'autre; et la religion nous fait connaître tout ce que sa Providence miséricordieuse ajoute de secours divins à la nature, pour éclairer nos esprits et remuer nos cœurs.

<< Mais, dira-t-on, comment la bonté toutepuissante de Dieu n'empêche-t-elle pas tous, ces abus du libre arbitre, qu'il lui est si facile d'empêcher? Sans doute, le Dieu bon doit se manifester par des bienfaits, et tous ses ouvrages doivent porter l'empreinte de sa munificence; mais il est ici une réflexion décisive, et que je vous prie de bien saisir, c'est que dans Dieu la bonté n'est pas une sorte de penchant et d'instinct aveugle, sans lumières et sans règles, qui tend au bien des créatures sans aucun égard aux autres attributs divins. La conduite de Dieu, dans ses

œuvres, ne doit pas seulement présenter le caractère de sa bonté, mais encore celui de sa sagesse, de sa justice, de son indépendance, de son empire souverain sur tout ce qui vit et respire. N'est-il pas naturel que ses ouvrages soient l'expression de son être divin tout entier, que Dieu agisse en Dieu? Dès lors, ce n'est pas seulement sa qualité de père qu'il faut envisager en lui, mais encore celle de souverain maître de l'univers. Père commun de tous les hommes, il doit à tous des marques de son amour; mais aussi, roi et législateur suprême, pourquoi ne pourrait-il pas nous imposer des lois, exiger de nous des hommages de soumission et de gratitude, et faire dépendre notre bonheur de notre fidélité? Les abus du libre arbitre, source du mal, sont déplorables, comme la faiblesse de notre intelligence, source de tant d'erreurs, est humiliante pour nous; mais si Dieu n'est pas obligé de nous rendre infaillibles dans nos jugements, pourquoi serait-il obligé de nous rendre impeccables dans nos actions? Voudrait-on que, pour em: êcher le mal, il enchaînât notre liberté, qu'il n'eût fait de nous que des automates se portant au bien comme par nécessité? Alors, où serait le mérite de la vertu? Oui, c'est le pouvoir de faire le mal qui donne tant de prix à notre fidélité, qui rend la vertu si méritoire pour nous, et si glorieuse à la Divinité. Nous aimons à ne voir en Dieu que sa bonté, parce qu'elle nous rassure sur nos désordres; et nous oublions sa souveraineté, parce qu'elle intimide nos passions; mais si nous ne vou lons pas nous abuser nous-mêmes, en donnant aux obligations de la bonté divine une étendue imaginaire, ne séparons jamais en Dieu le titre de très-bon de celui de trèsgrand.

«Que si, insistant d'une autre manière, on demande comment le Dieu sage a pu être l'auteur d'un monde plein de désordres, nous répondrons que ce Dieu est assez puissant pour tirer le bien du mal, et même pour en faire naître un plus grand bien; que la permission du mal, qu'on présente comme contraire à sa sagesse, ne sert que la faire éclater davantage, et que, sous plus d'un rapport, le mal lui-même contribue à la beauté, à la perfection du monde moral. En effet, qui n'admirerait comment Dieu sait gouverner cette multitude de volontés libres et opposées, régler jusqu'à leur déréglement même, faire rentrer leurs désordres dans l'ordre universel, et conserver les sociétés humaines malgré le soulèvement et le choc des passions contraires qui tendent à tout confondre et à tout détruire? Vous considérez toujours en eux-mêmes ces vices, ces désordres, qui sont la honte et le fléau de l'humanité, et vous ne voulez pas voir que ce qui est malheureusement un mal trop véritable se tourne néanmoins en une sorte de bien s'il n'y avait pas de mal sur la terre, le bien aurait moins de prix. C'est le vice qui fait ressortir la vertu, comme la tempête fait ressortir l'éclat d'un beau jour. La générosité brille davantage à côté de l'avarice, la

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pureté des mœurs à côté de la débauche; la clémence paraît plus magnanime au milieu des fureurs de la vengeance; la paix domestique semble plus touchante au milieu des discordes qui trop souvent agitent les familles.

Je placerai ici une observation importante, pour nous faire sentir combien nous devons être discrets à prononcer sur les desseins de Dieu, et sur la sagesse des moyens qu'il emploie pour arriver à ses fins passageres sur la terre. Placés dans un seul point du temps et de l'espace, nous sommes trop accoutumés à ne considérer que l'instant et le lieu où nous sommes, tandis que nous devrions considérer toute la chaîne des siècles; frappés du mal présent, nous ne vivons pas assez pour en voir la liaison avec le bien universel, et, parce que, dans ses desseins, la Providence ne marche pas aussi vite que nos désirs, nous en prenons occasion de blasphémer contre elle. Les desseins de Dieu sont immenses et nos vues bornées. Voyonsnous assez bien les rapports de ce qui est avec ce qui a été et ce qui sera? En connaissons-nous la liaison avec la plénitude et la fin ultérieure de tous les ouvrages de l'Eternel, pour les soumettre à notre censure? Souvent le temps découvre le but des événements, et ce qui est inexplicable aux contemporains qui le voient sera plus intelligible pour la postérité. Ainsi, que l'innocent fils de Jacob, dont nos Livres saints ont conservé la touchante histoire, soit vendu par ses frères, qu'il soit esclave en Egypte, précipité dans un cachot: voilà d'abord ce qui déconcerte; mais si l'on se rappelle que ses infortunes furent comme autant de degrés qui le portèrent au faîte de la puissance, où il devint le sauveur de l'Egypte et de sa race; que ses malheurs passagers furent comme le pivot sur lequel roulaient les destinées d'on peuple entier, son sort ne devra-t-il pas exciter notre admiration au lieu de nos murmures? Trop souvent, nos plaintes sont aussi injustes, aussi irréfléchies qu'elles sont communes? Lorsque autrefois les peuples barbares du Nord fondirent sur les provinces de l'empire romain, et causèrent tant de ravages au milieu des nations catholiques des Gaules, des Espagnes et de l'Italie, il arriva que les Chrétiens, faibles dans leur foi, furent tentés de demander comment il se faisait que le peuple fidèle devint ainsi la proie de l'erreur et de l'infidélité. Salvien, éloquent prétre de Marseille, crut devoir prendre la plume, pour arrêter ces murmures, et venger la Providence.

« Nous venons de faire sentir que c'est bien légèrement quelquefois qu'on présente la permission du mal comme inconciliable avec la sainteté, la bonté, la sagesse de Dieu. Mais on peut dire encore, et c'est le dernier terme de la difficulté: Non-seulement Dieu permet le mal, mais il le permet de manière que le sort de la vertu est pire que celui du vice, et c'est là un désordre qui accuse sa

justice. La réponse à cette dernière plainte va compléter celle que nous avons donnée aux plaintes précédentes, et détruire celles-ci dans ce qu'elles paraîtraient avoir de plus légitime.

« Vous êtes choqué avec raison des humiliations et des souffrances de la vertu, des prospérités et des triomphes du vice. Mais oseriez-vous bien assurer que Dieu ne trouvera pas dans les trésors de sa puissance et de sa sagesse quelques moyens de réparer un mal si choquant? Si vous le croyez infiniment sage, croyez aussi que dans ces désordres qui vous offusquent, il y a quelque ordre caché. Vous aurez beau faire, jamais les sophismes ne pourront étouffer en vous ce cri de lanature, de la conscience, du genre humain tout entier, qu'il y a une Providence. Que si vous ne voyez pas clairement comment peut se concilier avec sa justice le sort du vice et de la vertu sur la terre, il serait bien plus sage d'avouer votre insuffisance, que de vous prévaloir de quelques vains arguments. Méconnaître une vérité aussi éclatante que celle d'une Providence, parce qu'elle est enveloppée de quelques obscurités, ce serait méconnaître l'existence du soleil, lorsqu'il est caché derrière un nuage. N'y eût-il qu'un seul moyen de justifier la Providence, vous devriez le saisir avidement, plutôt que de vous livrer à des murmures. Or, n'est-il pas possible que ce que vous voyez soit lié avec un autre ordre de choses, que vous ne voyez pas encore; que ce monde imparfait soit l'ébauche d'un monde bien plus régulier, où tout sera remis à sa place? Pourquoi ne pas penser que l'Etre infini a des desseins infinis ? N'est-il pas naturel que l'Etre éternel travaille pour l'éternité ? Voyez les choses sous ce point de vue, et tous vos doutes seront dissipés. Quel pourrait être, en effet, le sujet de vos plaintes ? Les prospérités du vice? mais elles sont si passagères, et elles doivent le couvrir de tant de confusion devant le tribunal indéciinable du juge suprême ! Les combats de la vertu ? ils lui assurent une couronne immortelle. Les souffrances du juste? elles seront converties en un poids immense de gloire et de félicité.

<< Disons-le hautement: ici, comme partout, on ne peut qu'admirer cette religion chrétienne, qui en nous découvrant dans la dégradation primitive la source de nos maux, nous en découvre le remède; qui, ajoutant de nouvelles lumières à celles de la raison, change en certitude les opinious vacillantes de la philosophie humaine, fixe tous les esprits dans la croyance de la vie future, explique ainsi le monde présent par le monde à venir, et nous apprend que les plus légers désordres qui peuvent être remarqués sur la terre seront complétement réparés dans le règne de l'éternelle justice. »

PURGATOIRE.

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Réponse, Le dogme du purgatoire est bien l'un des plus touchants, l'un des plus utiles, même pour ce monde, de tous ceux que nous enseigne la religion. Aussi, estce l'un de ceux auxquels l'esprit et le cœur, l'âme entière s'ouvre le plus volontiers. Il y en a qui le nient cependant: ce sont nos frères séparés, ce sont encore quelques hommes qui, nés dans la religion catholique, n'en ont gardé que le nom, si même ils ne l'ont également répudié, et qu'on trouve toujours empressés à nier tout ce que croit et enseigne l'Eglise qui les a élevés.

Il n'y a point de purgatoire, disent-ils.

Parlez-vous bien sérieusement? croyezvous bien ce que vous dites? pouvons-nous leur répondre. Ecoutez, en ce cas, ce que nous avons dit nous-même ailleurs (Le céleste banquet) sur ce sujet important. Nous n'aurions pas autre chose à vous dire aujourd'hui.

« Qu'il y ait un purgatoire, c'est-à-dire un lieu de purification où souffrent les âmes qui meurent en état de grâce sans avoir entièrement satisfait à la justice divine, jusqu'à ce qu'elles puissent être reçues dans le ciel, où rien de souillé n'entrera jamais (Apoc. XXI, 27), c'est une vérité également prouvée par l'Ecriture, la tradition, le consentement général des peuples, le sentiment et la raison.

donc un purgatoire, d'après l'enseignement des Ecritures.

« La tradition s'exprime d'une manière aussi positive à ce sujet, mais avec une telle réunion de témoignages qu'il est impossible d'en concevoir une plus imposante. Et ici je ne discuterai pas les textes plus ou moins clairs de quelques savants appartenant à différentes époques de l'Eglise et connus seulement dans les hautes régions de la science. J'en appelle immédiatement à l'attestation universelle et constante, à l'attestation, sous toutes les formes, de tous les Chrétiens, pour ainsi dire, appartenant à tous les temps, à tous les âges, à toutes les conditions. Lisez, consultez, interrogez... interrogez non pas seulement la parole exprimée par la voix et les écrits, mais encore celle qui l'est d'une manière infinimentplus frappante, par nos actions, et vous reconnaîtrez que, partout et toujours, les Chrétiens ont eu la foi la plus énergique à l'existence du purgatoire. Pourquoi, en effet, toutes ces prières publiques et particulières après la mort? Pourquoi l'eau sainte mêlée à nos larmes et jetée si souvent sur les restes des défunts, sur la terre même qui les renferme? pourquoi ces offrandes funèbres? pourquoi le saint sacrifice en leur faveur?... Evidemment, pour demander leur purification complète et leur délivrance. Mais à qui nos prières et nos bonnes œuvres de toute sorte peuvent-elles servir? Aux saints? Non, ils n'en ont pas besoin. Aux damnés? Non encore, leur sort ne peut plus être changé. A ceux conséquemment qui souffrent dans le purgatoire. L'existence du purgatoire est donc incontestable suivant le témoignage de la tradition.

«Ne pouvons-nous pas ajouter ici que cette existence est également attestée par le témoignage unanime des peuples? Quoique les lumières du christianisme suffisent amplement pour nous éclairer, sortons par la pensée, si on le désire, du cercle de notre religion, interrogeons les peuples idolâtres sur leurs coutumes comme sur leurs croyan

<< Nous lisons dans les Ecritures: C'est une sainte et salutaire pensée de prier pour les morts, afin qu'ils soient délivrés de leurs péchés. (11 Mach. xii, 46.) Ces morts pour qui il nous est recommandé de prier, afin d'obtenir la rémission de leurs péchés, ce ne sont point les saints, qui n'ont aucune souillure et jouissent du bonheur éternel; ce ne sont point non plus les damnés dont la peices (114) et nous arriverons encore au même

ne est irrémissible; ce sont donc ceux qui se trouvent dans ce lieu intermédiaire communément appelé le purgatoire. Il existe

(114) Le genre de cet article ne nous permettant guère de faire au texte même des citations d'auteurs profanes, nous en faisons, en note, deux seulement. Voici d'abord ce que nous trouvons dans Platon: • Quiconque subit un juste châtiment devient meilleur et gagne à souffrir, ou sert au moins d'exemple aux autres, que la terreur du supplice peut rendre à la vertu. Ceux qui profitent des punitions infligées par les hommes ou par les dieux sont les condamnés dont l'âme malade n'est pas indigne de guérison; et ils y arrivent, dans un autre monde, comme dans le nôtre, par les souffrances et les remords, seuls expiations d'une vie criminelle. Mais les vils scélérats, etc. (Gorgias, traduction de Victor Leclerc.)

résultat. Chez eux, comme chez les Chrétiens, pourquoi toutes ces prières après la mort? pourquoi ces cérémonies funèbres

Dans le vi livre de l'Enéide le dogme du purgatoire est encore plus clairement exprimé :

.... De ses fers quand l'âme se dépouille,
Comme elle garde encor la trace de leur rouille,
Elle doit effacer par un long châtiment
La souillure mêlée à son pur élément:
Les unes, pour laver cette empreinte de boue,
Flottent au sein des airs, où le vent les secoue,
D'autres vont se plonger daus de larges torrents,
Ou passent mille fois sur des feux dévorants :
Une peine diverse est marquée à chaque ombre.
Puis du calme Elisée (hélas! en petit nombre)
Nous venons habiter les fortunés abris.

(Traduction de BARTHÉLEMY.)

de toute nature? pourquoi ces sacrifices dont quelques-uns (les sacrifices sanglants) ont une énergie d'expression physiquement plus frappante que le sacrifice chrétien? incontestablement pour obtenir la purification des morts. Ils reconnaissaient donc que les âmes, au sortir de cette vie, ont encore besoin, généralement parlant, d'être purifiées de certaines souillures, ce qui est l'essence même du purgatoire.

Pour en venir à une preuve moins difficile à constater, à la preuve du sentiment, je vous dirai actuellement Rentrons au dedans de nous-mêmes, examinons la conduite des autres hommes, quels que soient leur âge, leur condition, leur éducation, Ieurs principes; ne voyons-nous pas en nous, ne découvrons-nous pas dans les autres je ne sais quel instinct plus ou moins prononcé, qui nous porte tous indistinctement à supplier, à notre manière, la toutepuissance divine en faveur de ceux que nous avons perdus? Considérez ces hommes qu'on a crus longtemps, qui se sont crus peut-être eux-mêmes sans aucune conviction, sans aucune pensée religieuse; considérez ceux dont l'impiété a tellement bouleversé les âmes qu'elles sont dans un état mille fois plus déplorable que si elles n'avaient jamais reçu aucune éducation religieuse; comme ces bonnes terres qu'un torrent dévastateur a rendues pires que si elles n'avaient jamais été cultivées. S'ils viennent à perdre une personne tendrement aimée, ils se montrent aussitôt religieux, du moins à leur manière. Ils prient, ils font des vœux. Il ne leur serait peut être pas facile à eux-mêmes d'expliquer la valeur de leurs actes; mais ces actes ont pourtant une signification. Ne reconnaissant point le dogme du purgatoire, ceux dont nous parlons en ont du moins le pressentiment, si je puis m'exprimer de la sorte, et ils agissent en conséquence. Oui, je le soutiendrai toute ma vie, il est impossible à l'homme le plus impie, le plus immoral, le plus dur, le plus abruti, de rester longtemps calme en face d'un cercueil, pourvu qu'il s'abandonne aux réflexions qui lui sont alors tout naturellement suggérées. Quand il aura longtemps et sérieusement contemplé, dites-lui de rentrer au dedans de lui-même, et il sentira je ne sais quelle vague terreur, je ne sais quelle défaillance interne qui lui feront reconnaître le besoin, la nécessité même d'une intervention céleste pour ceux qui ne sont plus, intervention qu'il s'empresse de réclamer pour les autres, comme il désire qu'on la réclame un jour pour lui. Il y a donc au fond du cœur un sentiment inné, universel, indestructible, qui proclame, d'une manière plus ou moins claire, plus ou moins directe, l'existence du purgatoire.

«La raison arrive encore au même résultat. Eclairée des lumières de la foi, elle nous enseigne que, sans être coupable de péchés graves, l'homme peut mourir, et meurt même la plupart du temps coupable d'un grand nombre de péchés véniels, ou bien avant d'avoir

entièrement satisfait à la justice divine pour les péchés mortels dont il a reçu le pardon. D'où elle conclut la nécessité pour lui de rester, après la mort, dans les flammes du purgatoire jusqu'à ce qu'il ait acquis une pureté parfaite, et soit devenu digne de s'unir à Dieu, qui est la sainteté même. »>

Ainsi, tout semble se réunir pour prouver le purgatoire. D'où il suit que personne ne saurait avoir aucun prétexte de le nier, à quelque subterfuge qu'il ait recours.

Vous admettez vous-même, nous dit-on, qu'il n'y en aura point après le jugement général; pourquoi n'en serait-il pas ainsi auparavant ?

«La conséquence n'est pas rigoureuse, >> avons-nous répondu encore à cette objection, dans l'ouvrage que nous venons de citer. « Il n'y aura plus de purgatoire après le jugement général parce que déjà aura été atteint le double but pour lequel Dieu l'a établi je veux dire la purification des âmes et la satisfaction à sa justice infinie. Ceux qui mourront à la fin du monde, ou qui n'auront point encore achevé de subir la peine à laquelle ils auront été condamnés, ceuxlà souffriront immédiatement autant qu'ils le devront pour être jugés dignes du royaume éternel. S'ils souffrent moins longtemps, ils souffriront davantage, et l'intensité compensera chez eux ce qui aura manqué du côté de la durée. Que la dette soit acquittée en totalité ou par parties, elle n'en est pas moins acquittée également dans l'un et l'autre

cas.

«On me dira peut-être ici: Pourquoi donc n'en serait-il pas ainsi avant le jugement dernier ?Ce serait la même chose comme vous en convenez, et la justice divine s'exercerait d'une manière plus uniforme.

« Pourquoi...? Mais si nous voulions avoir la raison de chaque chose, si nous voulions savoir surtout quels sont les motifs des impénétrables desseins de Dieu, nous serions promptement écrasés sous le poids de cette glorieuse majesté que nous aurions imprudemment scrutée, pour parler le langage des saintes Ecritures (Prov. xxv, 27). Je vais essayer pourtant de résoudre cette difficulté, parce que la réponse que j'ai à donner me fait entrer dans le fond même de mon sujet.

« Je dirai d'abord que, le temps détruit, il me paraît rationnel que Dieu ne conserve pas non plus un purgatoire temporel qui se trouve intimement lié à la conservation de l'Eglise sur la terre. C'est là la raison métaphysique de la chose. La raison morale, que je vais donner actuellement, me semble beaucoup plus importante à approfondir.

« Il est évident que dans ses actes, dans ceux principalement qui ont rapport à notre religion, Dieu ne perd jamais de vue la sanctification de l'homme, ce chef-d'œuvre, ce complément, ce résumé de la création terrestre. Sa propre gloire sans doute doit être la fin dernière de tout ce qu'il fait autrement, a dit le pieux et savant Fénelon, il agirait d'une manière moins parfaite que la

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