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ABSTINENCE.

Objections. Ce n'est point ce qui entre dans le corps qui souille l'âme... Dieu ne damnera point pour un morceau de viande... La viande n'est pas plus mauvaise le vendredi et le samedi que les autres jours. -Ici, la viande est interdite; faites quelques pas, el la défense n'existe plus. Vous croyez que c'est Dieu qui veut cela?-Quant à moi je suis le conseil de l'Apôtre, je mange tout ce qu'on me présente. A quoi sert, en réalité, l'abstinence? J'ai bien assez des privations auxquelles je suis forcé de me soumettre, sans en accepter de volontaires.

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Il ne s'agit donc pas de viande, ni de jours, ni d'estomac, il s'agit du cœur qui pèche en refusant de se soumettre à un commandement obligatoire et facile.

« Outre le grand et général motif d'observer toutes lois de l'Eglise, nous pouvons ajouter que ces lois ne sont pas faites au hasard, par caprice, mais qu'elles portent sur de sages et très-importantes raisons.

« Ainsi la loi de l'abstinence, dont l'application est plus fréquente, est destinée à rappeler incessamment au souvenir des Chrétiens la passion, les souffrances, la mort de leur Sauveur, ainsi que la nécessité de la pénitence; elle est la pratique publique de la pénitence des Chrétiens, etc.

« Il n'y a qu'un homme superficiel ou ignorant qui puisse regarder cette institution comme inutile. On ne peut croire combien, dans la pratique, cette seule observation du maigre le vendredi et le samedi empêche l'âme de sortir des idées religieu

ses.

« Les lois de l'Eglise, tout en obligeant sous peine de péché, sont loin d'être dures et tyranniques. L'Eglise est une mère et non une maîtresse impérieuse. Il suffit que, pour un motif grave, vous ne puissiez faire maigre, pour que vous en soyez par là même dispensés. La maladie, la faiblesse du tempérament, la grande fatigue du travail, la Dauvreté, la grande difficulté de se procurer

des aliments maigres sont des motifs qu: dispensent de l'abstinence.

« Pour ne pas se faire illusion, il est bon cependant de consulter le curé ou le confesseur, interprète de la loi.

« Cette observation, qui s'étend à toutes les lois de l'Eglise, montre combien sage et modérée est l'autorité qui les porte. Respectons-la donc du fond de notre cœur ; laissons rire ceux qui n'y entendent rien, et accomplissons sans murmure des commandements si simples, si sages et si utiles à nos âmes. »

Ainsi parle l'abbé de Ségur, et sa réponse courte et simple mais cependant pleine d'énergie et de sens est ce qu'elle doit être pour le livre qu'il a voulu mettre entre les mains de tous, et que tous semblent avoir accepté. Pour l'ouvrage que nous offrons également à tous, mais qui ne peut leur parvenir que par l'intermédiaire de ceux qui aiment à approfondir toute chose, nous avons besoin d'entrer dans de plus longs développements.

Ici, dites-vous, la viande est interdite; faites quelques pas et la défense n'existe plus. Croyez-vous que c'est Dieu qui veut cela?

Pourquoi non? Ne voyez-vous pas partout une diversité, ou, si vous l'aimez mieux, un contraste à peu près semblable, sans en être surpris? Considérons ce qui se passe chaque jour dans la société civile, dans les armées, au sein des familles. Ici, il est défendu sous peine de mort de se battre en duel; passez un pont, franchissez une montagne, une ligne imperceptible de démarcation, et la défense n'existe plus. Que dis-je! Ici vous ne pouvez émettre telle et telle doctrine, prononcer telles ou telles paroles, quefois même à une punition sévère; faites sans vous exposer à la réprimande, et quelquelques pas et non-seulement la défense n'existe plus, mais vous émettrez !& même doctrine, vous prononcerez publiquement les mêmes paroles à la joie et aux acclamations de tous. Dans les armées et surtout dans les armées en campagne, la différence est plus frappante encore. Ici, à tel moment, dans tel corps il est défendu, sous peine de mort, de franchir tel mur, tel fossé, de sortir même des rangs; à tel autre moment, dans tel autre corps, non-seulement la défense n'existe plus, mais il y a promesse des plus belles récompenses pour qui aura fait le premier ce qui était défendu auparavant et à d'autres hommes, sous les peines les plus sévères. Aimez-vous mieux voir ce qui se passe au sein des familles où tout est réglé avec le plus grand calme? Pourquoi cet enfant est-il dans les larmes ? qu'il a été sévèrement puni. Et pourquoi cette punition? Parce qu'il a fait telle action, parce qu'il a prononcé telle parole que ses parents venaient de lui interdire. Entrez dans une autre famille, ou, si vous l'aimez

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mieux, revenez un peu plus tard dans cette même famille. Tous les enfants s'abandonnent à la joie. Ils ont fait cependant, je suppose, absolument la même action, ils ont prononcé la même parole que nous avons vu punir précédemment. Pourquoi cette différence? C'est uniquement parce qu'il y avait, dans le premier cas, une défense rigoureuse, qui n'existe pas dans le second.

Il ne devrait pas en être ainsi en religiou, me direz-vous, parce que là, c'est Dieu qui commande, et que Dieu est le même partout.

Mais dans les cas que je viens de citer, n'est-ce pas Dieu aussi qui commande? Ou, si vous l'aimez mieux, n'est-ce pas en son nom que le supérieur commande à l'inférieur? Dans la société civile, dans les armées, dans la famille, partout où vous voyez une autorité légitime, unanimement reconnue, dites qu'il y a là une délégation de l'autorité suprême, source, base nécessaire de toute autorité. Autrement, les hommes étant égaux entre eux, nul n'aurait le droit de commander à ses semblables. Dès lors, tout exercice de l'autorité serait une usurpation sacrilége; et, quand cet exercice aurait pour sanction une peine sévère, comme la mort, je suppose, ce ne serait plus qu'un assassinat public. C'est donc toujours Dieu qui commande. Il est le même partout sans doute; mais il ne commande pas la même chose à tous. Cela ne doit pas, cela ne peut pas être. Tout dépend du temps, des lieux, des personnes, d'une infinité de circonstances dont Dieu a laissé le discernement à ceux à qui il confie l'exercice de sa divine autorité. Ceuxci se trompent quelquefois, parce que c'est la triste condition de l'humanité de se tromper ici-bas, dans quelque position qu'elle se trouve, et ils se trompent encore, quand ils sont revêtus d'un caractère sacré, parce que ce caractère, tout en les élevant plus ou moins au-dessus des misères humaines, ne les rend pas tous infaillibles. Cependant, alors même qu'ils se trompent, pourvu que celte erreur ne soit pas en opposition directe avec une autorité supérieure contre laquelle nulle autorité inférieure ne saurait jamais prévaloir, nous devons leur obéir encore, parce que telle est la volonté de Dieu, et que, sans cela, nulle religion, nulle société, nul ordre ne pourrait subsister sur la terre. C'est là le devoir véritable, devoir toujours rigoureux, toujours immuable, quoique les choses auxquelles il s'applique varient elles-mêmes à l'infini.

Toutes les fois donc qu'une abstinence quelconque nous est prescrite par l'autorité compétente, observons-la ponctuellement. Gardons-nous bien de dire « Non, je ne veux point m'attrister, tandis que nos frères qui sont tous à côté de moi se livrent actuellement à la joie?» Car, ce serait là le langage des enfants. Disons plutôt, à cette occasion, comme des hommes sensés: « Et qu'importe que nous soyons dans la tristesse, tandis que les autres se livrent à la joie? Pourvu que nous fassions, chacun de notre

côté, la volonté du père que nous avons dans les cieux, nous aurons tous part, un jour, à ses récompenses éternelles. »>

Quant à moi, objectez-vous, je suis le conseil de l'Apôtre, je mange tout ce qu'on me présente.

Gardez-vous bien, je vous en conjure, de tenir jamais un pareil langage; car vous feriez évidemment une fausse supposition, et, de plus, vous diriez une chose absurde. Vous feriez une fausse supposition, puisque ce serait supposer que l'Apôtre conseillait de tout manger, tout absolument, sans aucune distinction, tandis qu'il recommandait seulement de manger la viande qui était alors présentée, sans s'inquiéter si elle avait été ou non offerte aux idoles, comme le voulaient ceux qui s'efforçaient d'emmaillotter encore dans les langes du judaïsme l'homme que le christianisme venait d'en faire sortir. Vous diriez, de plus, une chose absurde, puisque, ne faisant aucune exception, vous vous montreriez disposé à tout accepter, même ce que vous sauriez avoir été volé, même le poison.

Pour ce qui aurait eté volé, direz-vous, c'est bien différent, car il faut rendre à chacun ce qui lui appartient; pour le poison, il n'y a aucune comparaison possible, car le poison peut faire mourir.

Ce ne sont point précisément des comparaisons que j'ai prétendu faire ; j'ai voulu montrer seulement que votre objection conduisait à l'absurde, et que, par conséquent, elle était inadmissible. Est-ce bien vrai, d'ailleurs, qu'il n'y a point de comparaison à établir ici? Voyons, examinons la chose attentivement. Pour ce qui aurait été volé, dites-vous, il est clair qu'il faut rendre à chacun ce qui lui appartient. Vous avez raison, il faut rendre à chacun ce qui lui appartient. Donc, l'honneur à qui nous devons l'honneur, l'obéissance à qui nous devons T'obéissance. C'est Notre-Seigneur JésusChrist lui même qui l'a dit. Or l'Eglise, la plus haute autorité qu'il y ait sur la terre, nous prescrit l'abstinence. Donc, nous devons respecter cette prescription, et nous y soumettre. Pour le poison, ajoutez-vous, c'est tout différent, car il peut faire mourir. -Et la viande! ou, ce qui est la même chose ici, et la désobéissance au précepte qui nous défend de manger de la viande, ne peutelle pas faire mourir également? Elle ne donnera pas la mort sans doute à ce corps formé de terre, mais elle la donnera à l'âme créée à l'image de Dieu. Elle ne nous exposera pas à perdre cette vie misérable qui ne dure qu'un instant, mais cette autre vie infiniment plus précieuse qui dure éternellement.

Je vous entends vous écrier ici : « Quoi ! Dieu me damnerait pour un morceau de viande ! »

Non, je vous le répète, ce n'est point pour un morceau de viande, mais à cause de la désobéissance au précepte qui vous défend d'en manger. La peine, quelle qu'elle soit, ne doit donc plus vous surprendre. Avez

vous oublié le fruit défendu, et ses suites si déplorables? En plaçant nos premiers parents dans le paradis terrestre, Dieu leur avait permis de manger de tous les fruits, à l'exception de celui d'un arbre placé au milieu du paradis, auquel il leur avait même défendu de toucher sous peine de mort. Vous ne mourrez point, leur dit le démon. Nequaquam morte moriemini. (Gen. 1, 4.) Adam et Eve ont écouté ses suggessions funestes, et ils sont morts, suivant la menace qui leur avait été faite; comme eux, sont morts tous leurs descendants; et aujourd'hui encore, après bientôt six mille ans, quoique le Fils de Dieu soit venu lui-même sur la terre racheter, par son sacrifice, l'humanité déchue, celle-ci offre partout, aux yeux les moins clairvoyants, les preuves les plus convaincantes du décret de mort porté contre leur désobéissance.

Ce drame lamentable se renouvelle chaque jour dans un cercle beaucoup plus restreint, et, nécessairement aussi, avec des suites beaucoup moins funestes. A certains temps, et dans certaines circonstances données, cette bonne Mère qui voudrait voir tous ses enfants heureux même dès cette vie, si cela était possible, l'Eglise leur interdit à tous, ou du moins à plusieurs d'entre eux, l'usage de quelques aliments, sous peine de péché mortel. Non, vous ne mourrez point, leur dit encore le démon, prenant toujours dans la nature les formes les plus insinuantes pour arriver à son but. Nequaquam moriemini. Au contraire, l'aliment qu'on vous défend est le plus propre à vous nourrir. De plus, il est beau aux yeux, délectable même à la vue. Bonum... ad vescendum, et pulchrum oculis, aspectuque delectabile. (Gen. m. 6.) Ces paroles trompeuses sont encore écoutées, l'innocence succombe de nouveau, et se rend coupable d'une désobéissance qui ne peut être effacée que par le sang d'un Dieu, et qui, même après cela, a encore jusqu'à la fin des suites bien déplorables.

A quoi donc sert, en réalité, cette abstinence? allez-vous me dire.

Quand bien même nous n'en apercevrions pas les motifs, ce ne serait pas une raison pour ne pas nous y soumettre. L'Eglise parle, il suffit. Cette divine Mère, également pleine de bonté et de sagesse, ne peut rien Hous prescrire que pour la gloire de Dieu et dans les intérêts de ses chers enfants. Mais il n'y a point lieu ici de parler de la sorte. Au contraire, les motifs pour lesquels l'abstinence nous est prescrite sont en si grand nombre, que, quand on nous les demande, nous ne pouvons éprouver que l'embarras du choix. Vous demandez à quoi sert, en réalité, l'abstinence; mais ne seraitil pas plus simple de demander à quoi elle ne sert pas? Que nous la considérions au point de vue religieux, moral, hygiénique, sous tous les rapports, pour ainsi dire, nous la trouvons souverainement utile, nécessaire même quelquefois.

Au point de vue religieux, nul ne saurait nier l'utilité de l'abstinence. Elle nous met

sous les yeux, jour par jour, en quelque sorte, toute l'économie de la religion, depuis le moment où nous nous disposons à célébrer la venue du Sauveur sur la terre, jusqu'à celui où nous commençons à contempler la récompense qu'il accorde à ses fidèles serviteurs. Dans un langage intelligible à tons, et que tous sont obligés d'écouter, elle nous rappelle les vérités que nous avons à croire, les saintes pratiques que nous avons à observer pour être de bons Chrétiens, c'est-à-dire des hommes véritablement religieux. Elle nous rappelle, en effet, qu'il est au ciel un Dieu qui a créé toutes choses, et qui conserve nécessairement sur ses créatures un pouvoir absolu. Elle nous rappelle la déchéance de l'humanité et la nécessité d'une réhabilitation, la venue du Fils de Dieu sur la terre, ses humiliations, ses souffrances et sa mort, la nécessité et la manière de nous appliquer les mérites de sa Passion, la solidarité des hommes entre eux et la réversibilité des mérites, la supériorité de l'esprit sur la chair et la révolte de la chair contre l'esprit créé pour la diriger, la certitude d'une vie future et la manière de nous y préparer, si nous voulons éviter les châtiments dont nous menace sa justice, et recevoir les récompenses que nous pro met sa miséricorde... Et ne vous imaginez pas que, pour obtenir ce résultat, il faille une intelligence supérieure, de longues et pénibles réflexions. Point du tout. Prenez un homme du peuple, un enfant même, pourvu qu'il ait été suffisamment instruit de la religion. Parlez-lui de l'abstinence en général, ou seulement de certains jours d'abstinence en particulier. Causez avec lui, je suppose, ou du vendredi, ou bien encore du samedi. De la vérité qui alors se présentera naturellement la première à votre esprit, passez successivement aux autres qui suivront, ayant avec celle-ci un enchaînement nécessaire, et vous serez étonné de voir se dérouler sous vos yeux, comme en tableaux, le christianisme tout entier, avec ses dogmes si purs et si élevés, avec ses cérémonies si touchantes, qui ne sont encore, en quelque sorte, que l'incarnation de ses dogmes, si je puis appliquer aux différents mystères de la religion le terme consacré pour exprimer le grand mystère du Verbe fait chair.

J'ai donc eu raison de dire que nul ne saurait nier l'utilité de l'abstinence, au point de vue religieux. Au point de vue moral, n'est-ce pas la même chose?

La religion est la base de la morale. Si donc l'abstinence est souverainement utile au point de vue religieux, elle doit l'être également, par une conséquence rigoureuse, au point de vue moral. Mais ce n'est là prouver que d'une manière indirecte cette utilité de l'abstinence. Il nous est facile, si vous le désirez, de la prouver encore d'une manière tout à fait directe.

Qu'est-ce que la mora.e? C'est l'ensemble des préceptes que la religion nous impose, chaque jour, pour régler nos mœurs, en les

rendant conformes, autant que possible, à la morale même de Notre-Seigneur JésusChrist. Il ne faut pas de grands efforts d'intelligence pour comprendre cela. Le mot même parle assez clairement. Or, comme nous venons de le montrer tout à l'heure, l'abstinence bien comprise nous rappelle notre religion tout entière, non-seuleinent dans sa partie spéculative, communément appelée dogme, c'est-à-dire l'enseignement, mais encore dans sa partie pratique, communément appelée morale, c'est-à-dire le règlement des mœurs; et, de plus, elle agit efficacement sur nous, pour nous faire remplir les devoirs qui nous sont imposés, comme pour nous faire admettre les vérités qui qui nous sont enseignées. L'abstinence est donc souverainement utile aussi au point de vue moral.

Que faut-il pour nous bien disposer a pratiquer cette morale dont nous parlons? Pour ce qui nous regarde nous-mêmes, c'est-àdire pour ce qui concerne cette misérable nature humaine qu'il nous est commandé de réhabiliter suivant le modèle que nous avons en Jésus-Christ, une chose est avant tout nécessaire : c'est de dompter nos passions, qui viennent de la chair révoltée, et de soumettre cette chair aveugle et révoltée à l'esprit qui doit naturellement la régir.

C'est là, par rapport à nous, tout l'enseignement de la religion, c'est la doctrine à laquelle l'Apôtre des nations ne cesse de revenir, et qu'il développe sous toutes les formes. La chair, dit-il dans son Epître aux Galates, a des désirs contraires à ceux de l'esprit, et l'esprit en a de contraires à ceux de la chair, et ils sont opposés l'un à l'autre; de sorte que vous ne faites pas les choses que vous voudriez.... Or il est aisé de connaître les œuvres de la chair, qui sont ia fornication, l'impureté, l'impudicité, la dissolution, l'idolatrie, les empoisonnements, les inimitiés, les dissensions, les jalousies, les animosités, les querelles, les divisions, les hérésies, les envies, les meurtres, les ivrogneries, les débauches, et autres choses semblables, dont je vous déclare, comme je vous l'ai déjà dit, que ceux qui commettent ces crimes, ne seront point héritiers du royaume de Dieu. Les fruits de l'esprit, au contraire, sont la charité, la joie, la paix, la patience, I humanité, la bonté, la persévérance, la douceur, la foi, la modestie, la continence, la chasteté. Il n'y a point de loi contre ceux qui vivent de la sorte. Or ceux qui sont à Jésus-Christ, ont crucifié leur chair avec les passions et les désirs déréglés. (Galat. v, 17-24.)

Actuellement, je vous le demande, quel est le moyen de crucifier la chair avec ses passions et ses désirs déréglés, pour parler le langage de l'Apôtre? L'abstinence et surtout cette sage abstinence établie par l'autorité de l'Eglise. L'abstinence est donc souverainement utile, nécessaire même, au point de vue moral.

Et ce n'est pas là seulement la doctrine du christianisme, c'est aussi celle de la phi

losophie, c'était même celle de la philosophie païenne, quand elle n'était point entraînée par le sensualisme de la religion alors dominante Abstenez-vous ! disait-elle aux hommes, c'est la base de toute morale. »

Mais qu'est-il besoin d'aller chercher si haut son enseignement que nous trouverons volontiers chez l'un des plus petits enfants du peuple, pour peu qu'il ait d'intelligence? Demandez-lui, en effet, ce qu'est un homme de chair, celui qui, au lieu de mortifier son corps, en a fait un Dieu, pour parler le langage de l'Ecriture, et il sourira de pitié, et il vous répondra, ou, s'il n'est pas en état de le faire, il pensera du moins que c'est un homme sans mœurs, un homme qui, pour satisfaire ses passions, est capable de tout, dans un temps donné.

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J'ai dit encore que, même sous le rapport hygiénique, l'abstinence est souverainement utile, nécessaire même en certaines circonstances. Qui ne le comprend! qui ne sait que le médecin parle ou doit parler, à cette occasion, absolument comme le moraliste et l'Apôtre ! « Abstenez-vous, »> nous répètet-il sans cesse, lui aussi, «abstenez-vous, car c'est toujours une chose fort salutaire! » Et allant plus loin quelquefois: «Abstenez-vous,>> nous dit-il avec autorité, « car, si vous ne le faites, vous allez mourir. » — « Quoi ! » répondrez-vous, «et si je me porte bien? » «Abstenez-vous de temps en temps du moins,» vous dira encore ce directeur des corps, absolument comme le directeur des ames, « car l'abstinence, quelquefois nécessaire, est toujours très-utile. » Et ce langage est plein de sens, car beaucoup d'hommes périssent de trop manger, mais de privation, personne, à moins que la privation ne soit complète : ce que la religion est la première à condamner.

J'ai bien assez, me direz-vous, des privations auxquelles je suis forcé de me soumettre, sans en accepter de volontaires.

Non, ce n'est point assez; car si cela suffisait, tant pour la santé du corps que pour celle de l'âme, tant pour le bien-être de la vie présente que pour le bonheur de la vie future, le médecin, le moraliste, le ministre de la religion s'en contenteraient et ne vous en demanderaient pas d'autres. Mais ce n'est point assez, car l'abstinence est enseignée partout, louée partout comme un acte méritoire, comme une vertu, et elle ne s'élèverait point évidemment à ce degré sublime, si elle n'était volontaire. Non encore une fois, ce n'est point assez; car si vous ne savez pas accepter et supporter courageusement des privations volontaires, vous ne saurez point accepter et supporter de même celles auxquelles vous serez forcé de vous soumettre. C'est une vérité que l'expérience et la raison nous enseignent également. Il faut un apprentissage à tout, mais principalement à la mortification des sens toujours rebelles. Je l'ai déjà demandé, et je le ferai encore: Qu'est-ce qu'un homme sensuel, et de quoi est-il capable? Est-ce un Chrétien? Loin de là. Est-ce un

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sa e e? - Non encore. Est-ce un homme? - Pas davantage. Qu'est-ce done?-Une machine à digérer qui n'admet de relâche qu'en faveur du plaisir : Sedit populus manducare et bibere, et surrexerunt ludere (I Cor. x, 7), disent les saintes Ecritures. En dehors de cela, n'en attendez rien.

Un jour, un médecin avait été appelé auprès d'un de ces hommes habitués, comme nous l'avons déjà rappelé, à faire un dieu de leur ventre. La maladie était grave, et le médecin prescrivit au malade de s'abstenir de tout aliment, et de ne boire que de l'eau. Ne point manger et ne boire que de l'eau, dit le gastronome, un peu ivrogne; mais c'est la mort! » C'était la mort, en effet,

car le désespoir et la peur lui enlevant tout courage hâtèrent les progrès de la maladie. qui le tua en quelques jours.

Quelle mort et combien elle diffère de celle du Chrétien Soldat courageux de Jésus-Christ, et digne enfant de l'Eglise, il ne se laisse abattre ni par les privations, ni par les souffrances, ni par la mort ellemême. Quand celle-ci croit le frapper, c'est lui, au contraire, qui la frappe, puisqu'il trouve en elle son triomphe, à l'exemple de son divin Maître. Habitué à s'élever audessus des sens, son âme se détache volontiers des biens du corps, et s'élève avec joic au séjour des esprits.

A BUS.

Objections. Il n'y a qu'abus dans la religion, et surtout dans la religion catholique. -Admettons qu'il n'y ait, à parler rigoureusement, aucun abus dans la religion catholique considérée en elle-même; toujours est-il qu'il y en a de très-nombreux et de très-grands qui viennent d'elle, ou, ce qui est à peu près la même chose, à son occasion; et nous demandons comment une religion divine peut-être la cause, ou, si vous voulez, l'occasion de tous ces abus. --Quoi que vous puissiez dire, c'est toujours à l'occasion de la religion qu'ont lieu les plus grands abus. On ne peut s'empêcher de le remarquer et de se demander pourquoi Dieu permet cela.

Réponse. Quand vous affirmez qu'il n'y a qu'abus dans la religion, et surtout dans la religion catholique, vous dites une chose tellement fausse que c'est précisément l'opposé de cela qui se trouve être la vérité. Oui, rien n'est plus certain, il n'y a aucun abus dans la religion, et il est impossible même qu'il y en ait aucun. Il n'y en a ni dans ses dogmes, ni dans sa morale, ni dans ses sacrements, ni dans rien de ce qui tient à son essence. Ce qu'il y a en elle, au contraire, qu'on la considère dans son ensemble ou dans les parties qui la constituent, c'est la sainteté, c'est-à-dire la fuite de tout mal, la pratique de tout bien, et, par une conséquence nécessaire, la condamnation, l'éloignement, la destruction des abus, quels qu'ils soient.

Refusez-vous de croire ce que j'avance ici? Il m'est facile de vous le prouver. Je n'entrerai point pour cela dans de longs détails. Je ne vous montrerai point que la religion catholique est sainte dans ses dogmes, sainte dans sa morale, sainte dans ses sacrements, sainte dans toutes ses parties. Ce serait long, ce serait n'exposer à répéter ici ce qui doit être dit ailleurs, et puis je ne serais jamais assuré que ma longue énumération eût embrassé toutes les parties dont se compose notre religion. Prenons-la donc dans son ensemble et disons: Elle est divine; puisqu'elle vient de JésusChrist, qui est Dieu. Or aucun abus ne se

trouve ni ne peut se trouver en ce qui est divin; aucun abus ne vient ni ne peut venir de Dieu. Le dire, ce serait une évidente fausseté, un horrible sacrilége. Il n'y a done aucun abus dans la religion, et il ne saurait y en avoir aucun.

Niez-vous sa divinité? ou, ce qui serait la même chose, niez-vous la divinité de JésusChrist, son fondateur! ou bien encore, niezvous qu'elle se soit conservée telle qu'elle était au moment de son institution? Ce sont là d'autres questions que nous traitons ailleurs et auxquelles nous sommes obligés de renvoyer en ce moment, pour ne point sortir du sujet qui nous occupe. Disons seulement ici, en passant, qu'il n'est guère permis à un homme de sens et de bonne foi de nier ou de révoquer en doute de semblables vérités. Nier la divinité de Jésus-Christ ou de son Eglise, c'est nier l'évidence si frappante des prophéties, la multitude innombrable des miracles, la force surnaturelle des martyrs, l'établissement si prodigieux du christianisme, et sa conservation non moins surprenante dans le monde, malgré les obstacles qu'il y a rencontrés, et les luttes sans fin qu'il y a soutenues, la rénovation incompréhensible que l'esprit de cette religion a opérée et opère encore chaque jour dans la croyance et les mœurs des individus et des peuples,... c'est nier la lumière en plein midi. Dire que la religion catholique n'est plus actuellement ce qu'elle était au moment de son institution, c'est affirmer qu'une religion divine n'a pu se maintenir sur la terre, malgré les promesses d'une éternelle durée qu'elle avait reçues de son tout-puissant fondateur, puisque si la religion catholique n'est plus la religion de Jésus-Christ, il n'y a en point d'autres assurément qui puissent prétendre l'être avec quelque apparence de raison, c'est affirmer encore que l'erreur peut avoir des résultats aussi satisfaisants que la vérité, puisque la religion catholique est aujourd'hui aussi étendue, aussi puissante, aussi utile à l'humanité qu'elle l'a jamais été à aucune autre époque.

Il est donc impossible de ne pas reconnaître que la religion catholique est divine,

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