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dre au fond de vos cœurs, pour y écouter dans le silence des sens et de l'imagination, La voix de la vérité; et chacun de vous dira volontiers avec moi Mon âme éprouve je ne sais quel désir d'être heureuse que rien de terrestre ne peut satisfaire. Je cherche avec inquiétude quelque chose que les créatures ne peuvent me donner; je cours après une ombre toujours poursuivie et toujours fugitive; plus d'une fois je soupire malgré moi de dégoût et d'ennui; je voudrais un plaisir pur, fixe, permanent; je comprends que le bonheur se trouve dans un cœur dont tous les désirs sont remplis. Mais ce repos, où le trouver ? Quel est le mortel qui jamais l'a goûté sur la terre? Qu'il vienne donc nous en révéler le secret. Au milieu de ses palais superbes, de ses jardins délicieux, de la richesse de ses trésors, de l'éclat de sa gloire, de l'abondance de ses plaisirs, Salomon avoue qu'il n'est pas heureux et pour quoi ne l'est-il pas ? C'est que son oreille ne se rassasie pas d'entendre, ni son œil de voir, ni son cœur de désirer. Alexandre a conquis l'univers, la terre s'est tue devant lui. Eh bien! Alexandre est plutôt fatigué que rasassié de gloire; il soupire, il pleure au milieu des trophées du monde vaincu. Tibère, dégoûté de la puissance, va se renfermer dans l'ile de Caprée; il cherche dans le raffinement de la débauche ce qu'il n'a pu trouver dans la grandeur. Tibère sera trompé, le bonheur n'habite point avec lui dans le séjour de ses infamies; il sentira sa misère, et sera forcé d'en faire l'aveu devant le monde entier. Quels exemples mémorables du néant des choses humaines, et de leur impuissance pour nous rendre heureux! Je les ai rappelés pour nous faire sentir quelle est l'avidité du cœur humain, et comment sur la terre il est frustré dans ses espérances.

« Maintenant, je me replie sur moi-même, et je me dis: Le désir d'être heureux, c'est le besoin le plus impérieux de mon âme, c'est le penchant nécessaire de ma natnre. Ce désir, ce n'est pas moi qui me le suis donné, je ne suis pas le maître de m'en dépouiller; je l'ai reçu de Dieu avec l'être et la vie. Si Dieu lui-même me l'a donné, si tel est le but où il me fait tendre sans cesse, ne faut-il pas que tôt ou tard il m'y fasse parvenir? Serait-il le Dieu de vérité, s'il me trompait dans les désirs qu'il m'inspire, s'il me marquait le terme en me laissant dans l'impuissance de l'attendre; et si ce bonheur, pour lequel je sens qu'il m'a fait, n'existe pas pour moi sur la terre, ne faut-il pas que Dieu l'ait placé au delà du tombeau? Dans la nature entière, tout marche à ses fins; le soleil et les astres, par leurs mouvements réguliers, remplissent leur destinée; les animanx remplissent la leur en obéissant à leur instinct merveilleux. L'homme, dans cette chaîne immense des êtres, serait-il le seul à ne pas remplir la sienne, et la Providence l'aurait-elle condamné à courir sans cesse après la fin de sa nature sans y parvenir jamais ? Ayons de plus justes, de plus

consolantes idées du Créateur, et de l'excellence de la nature humaine. »

Si de la considération de notre propre nature, nous nous élevons à la contemplation de la nature divine, nous trouvons dans la méditation de ses attributs des preuves plus concluantes encore, s'il est possible, en faveur de l'immortalité de l'âme.

Il est un Dieu créateur et conservateur du monde; tout le prouve, tout le reconnaît. Le nier, ce serait plus que de l'absurdité, ce serait une insigne folie, ce serait vouloir nier l'existence du soleil en plein midi. Etre infini, ce Dieu possède toutes les perfections au suprême degré. Il est juste et d'une justice infinie; il est saint et d'une sainteté infinie; il est sage et d'une sagesse infinie. Puisqu'il est infiniment juste, il doit rendre à chacun en raison de ses œuvres; puisqu'il est infiniment saint, il doit aimer et attirer à lui tout ce qui participe à sa sainteté, comme il doit détester et repousser au contraire tout ce qui s'en éloigne ; puisqu'il est infiniment sage, il doit donner une sanction suffisante à ses lois en arrêtant autant que possible, par la crainte de châtiments terribles ceux qui les transgressent et en encourageant par l'attente des plus magnifiques récompenses ceux qui les observent. Or rien de cela ne saurait avoir lieu sans l'immortalité de l'âme. Donc l'âme est immortelle. C'est aussi clair que deux et deux font quatre, et c'est beaucoup plus satisfaisant. C'est aussi clair, puisque la raison en reconnaît aussi bien l'évidence; c'est beaucoup plus satisfaisant, puisque ce n'est pas la raison seulement qui le voit, mais le cœur aussi, mais l'âme entière, qui en le voyant a tressailli d'allégresse.

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Oui, je suis immortelle I s'écrie-t-elle à la vue des infinies perfections de Dieu, et il est impossible que je ne le sois pas ; car si je ne l'étais point, Dieu ne serait ni juste, ni saint, ni sage, et, par conséquent, ne serait pas Dieu. Oui, je suis immortelle! et c'est là ce qui m'encourage à remplir chaque jour les difficiles devoirs qui me sont imposés, c'est ce qui me fait tendre de plus en plus à la perfection divine que je dois m'efforcer d'imiter, c'est ce qui m'empêche de quitter la voie sainte dans laquelle je suis entrée malgré les scandaleux triomphes du vice et les abaissements si désolants de la vertu: J'ai vu sous le soleil l'impiété au lieu du jugement, et_l'iniquité au lieu de la justice, et j'ai dit dans mon cœur : Dieu jugera le juste et l'injuste, et alors ce sera le temps du rétablissement de toutes choses. (Eccle. III, 16, 17.)

Vous medirez peut-être que Dieu récompense quelquefois la vertu d'une manière admirable, dès cette vie, comme il punit le vice par des châtiments épouvantables.

Oui, quelquefois vous avez raison, mais non pas toujours comme le demandent la justice, la sainteté, la sagesse, tous les attributs de la Divinité : « Il faut en convenir, »> ajoute ici l'abbé de Frayssinous, «si la vie présente n'était pas liée à un autre ordre de

choses, ce monde ne serait qu'un chaos, qu'une énigme inconcevable, qu'un perpétuel désordre qui accuserait la Providence. Dans tous les temps et chez tous les peuples que nous présente l'histoire, bien Souvent des vertus méconnues, des vices honorés, des forfaits échappés au glaive de la justice humaine, des familles ruinées par la mauvaise foi, des victimes infortunées, de la haine et de l'envie, des prisons où gémit l'innocence, des échafauds où périt la vertu. Ces désordres qui éclatent de toutes parts sous nos yeux doivent nous rappeler l'ordre éternel dont Dieu est la source. Je sais qu'il y a dans les trésors de sa puissance de quoi réparer tout ce qu'il y a de déréglé dans le monde présent. Je m'élance dans le sein de son éternité, c'est de là qu'abaissant mes regards sur la terre, je la vois dans son véritable point de vue ; je reconnais que ce qu'il y a de plus discordant rentre dans l'harmonie universelle par sa liaison avec les desseins infinis de celui qui vit et règne au delà des temps. Les souffrances de l'homme vertueux sont à mes yeux non des injustices, mais des épreuves, mais des combats qui mènent à la gloire, et quand je compare ce qu'il souffre avec la couronne qui lui est réservée, je ne vois plus dans ses afflictions que les ango`sses d'une âme en travail de son immortalité.

<< Mais, dira-t-on peut-être, pourquoi recourir à l'autre vie pour justifier la Providence? Vous cherchez des récompenses pour la vertu, elles sont dans la paix et le témoignage d'une bonne conscience; vous voulez des châtiments pour le vice, ils sont dans le remoris qui en est inséparable.

« Ce n'est là qu'un vain système dont nous allons faire sentir toute la futilité. Vous voulez que la paix de l'âme soit la seule récompense de la vertu, mais cette paix n'en est pas toujours inséparable; il est des cœurs vertueux qui vivent au sein des alarmes ; timides jusqu'à l'excès, ils craignent là où rien n'est à craindre. La délicatesse de leur conscience fait leur tourment; l'imagination les effraye de ses fantômes, elle leur peint de légers défauts sous les couleurs des vices les plus noirs, elle convertit en mal ce qui est bien. Or, au milieu de ces orages d'une âme agitée, la paix s'est évanouie et avec elle ce que vous croyez être la seule récompense de la vertu. Ce n'est pas tout, il faut que la récompense se mesure sur le mérite, et pourtant dans le monde présent cette règle d'équité se trouve perpétuellement violée. En effet, cette paix de la conscience accompagne aussi des vertus qui d'ailleurs très-solides sont moins pénibles à la nature, et je demande où sera la récompense de ces vertus plus fortes, plus difficiles? Je m'explique: cet homme est né avec d'heureux penchants, par témpérament il est doux, modéré, maître de lui-même, la vertu lui est naturellement facile. Cet autre est agité par des passions violentes, il faut qu'il soit patient malgré les saillies d'un tempérament fougueux, continent walgré l'impétuosité de

ses désirs, modeste au milieu de tout le bruit de la renommée la plus éclatante. Si l'un et l'autre sont vertueux, la paix de l'âme est également leur partage sur la terre, mais le second a bien plus d'obstacles à vaincre, plus de victoires à remporter sur lui-même, sa fidélité est bien plus difficile: sa vertu est donc plus méritoire et digne d'une plus grande récompense: et cependant la récompense serait la même si elle ne consistait que dans la paix du cœur Mais voici une considération d'un plus grand poids: lorsque l'homme de bien meurt pour son devoir, qu'il sacrifie ses jours plutôt que sa conscience, c'est alors surtout qu'il se rend agréable à son Créateur et qu'il est digne de ses faveurs; et pourtant s'il n'est d'autre prix de sa vertu que la paix de sa conscience, où sera la valeur de son héroïsme ? Cette paix de l'âme descendra-t-elle avec lui dans le tembeau ? Vous êtes, je suppose, placé entre la prévarication et la mort: Dieu vous commande de mourir pour lui plaire, ce dernier acte de votre vie met le comble à tous les autres, de tous c'est le plus méritoire et il faudra que vous le fassiez sans l'espoir d'aucun dédommagement ! quoi de plus injuste?

« On n'est pas mieux fondé à ne reconnaître d'autre châtiment du vice que le remords. Je conviens que le coupable trouve son premier châtiment dans le remords, qui l'accuse et qui le condamne; mais, si le remords est leur unique peine, les plus coupables seront bien souvent les moins punis, parce qu'ils sauront mieux que les autres étouffer leur conscience sous le poids de leurs crimes entassés. Le remords, après tout, ne serait qu'un préjugé ridicule, dont il faudrait se débarrasser, si rien n'existait an delà du tombeau. Tant qu'une âme est pénétrée de la crainte d'un Dieu vengeur, je conçois en elle le remords; mais si cette crainte s'affaiblit et s'éteint, on verra le remords s'affaiblir et s'éteindre avec elle. Aussi les grands coupables ont-ils un secret penchant vers ces doctrines de matérialisme qui, en faisant mourir l'âme et le corps, leur assurent l'impunité. Débarrassés de toute terreur d'une vie future, ils pourront biens craindre le supplice ou l'opprobre, ils ne connaîtront pas le remords. Il est d'ailleurs un genre de crime qui resterait toujours impuni, je veux parler de ce crime, rare autrefois, aujourd'hui très-commun, l'effroi de la société et le scandale de nos mœurs, le suicide. Cet homme se doit à la société qui l'a nourri et qui a veillé à la conservation de ses jours; à sa famille avec laquelle il a contracté des engagements; dans tous les cas, à Dieu, qui lui a donné l'existence, et qui seul a le droit de la reprendre. N'importe, au mépris de toutes les obligations divines et humaines, il s'arrache la vie. S'il n'est pas égaré par une aliénation mentale, s'il conserve son libre arbitre, c'est un attentat affreux, et ce dernier attentat a mis peut-être le sceau à une vie toute crimihelle. Où en sera le châtiment, s'il a'cn.

existe d'autres que le remords? Et ne dit-on pas que l'anéantissement du coupable est un Phâtiment suffisant. Non, car les peines infligées par la Providence doivent être telles qu'elles puissent intimider l'homme, le contenir dans le devoir ou l'y ramener. Or les méchants seraient sans crainte, si le partage du néant, tout misérable qu'il est, leur était assuré. Ne faut-il pas aussi que les peines soient décernées avec équité, qu'elles soient graduées sur le nombre, la nature et la grièveté des fautes; qu'il y ait différence de châti ment là où il y a différence dans les délits? La suprême justice, la sainteté parfaite, la sagesse infinie, Dieu, en un mot, pourrait-il confondre un simple vol avec le suicide? Et cependant, si l'anéantissement était la peine commune de toutes les fautes, elles seraient toutes également punies; ou plutôt aucune ne le serait par là positivement, du moins. >>

Si du ciel nous reportons nos regards sur la terre, nous y trouvons, dans la croyance unanime des peuples une nouvelle preuve, non moins décisive que les autres, en faveur de l'immortalité de l'âme.

Consultons les peuples de tous les temps et de tous les lieux, nous les voyons proclamer unanimement, par leurs actions aussi bien que par leurs paroles, leur croyance constante, invincible à l'immortalité de l'âme. Prenons chaque peuple en particulier, pour le mieux connaître; allons d'une ville à une autre ville, d'un hameau à un autre hameau, d'une famille à une autre famille, d'un individu à un autre individu; nous constatons presque partout la même croyance. Que dis-je allons avec nos savants et nos missionnaires chez ces sauvages qui méritent à peine le nom d'hommes. Vous diriez que, disséminés au milieu des déserts, sur les montagnes et dans les bois, ils n'ont rien. qui les distingue des bêtes avec lesquelles ils passent leur vie. Pas du tout, regardez les bien, écoutez-les attentivement, quelque chose les distingue essentiellement. C'est ce port élevé, ce regard tourné vers les cieux; c'est cette attente d'une autre vie qui se manifeste, chez chacun d'eux, depuis Je commencement de sa carrière jusqu'à la fin. Or, je vous le demande, d'où vient cet élancement du cœur au-dessus de la terre, qui se manifeste en tous lieux, sans que rien puisse le comprimer, si ce n'est de la nature? D'où vient cette voix qui partout appelle l'homme vers les cieux, sans que rien puisse l'étouffer, si ce n'est de Dieu lui-même ? L'âme est donc immortelle.

Et pourtant, observez-vous, il y en a bien d'autres qui disent, comme moi, que quand

on est mort tout est mort.

Oui, il y en a d'autres, mais il n'y en a pas beaucoup, ainsi que je vous le disais tout à l'heure. Voulez-vous vous en assurer par vous-même? Comptez. Vous faites partie d'une réunion composée de mille personnes, je suppose. N'en prenons pas une trop forte; on se connaît mieux.-Sur ces mille personnes combien y en a-t-il qui ne croient point à l'existence d'une autre vie? Vingt?

C'est trop. Dix? C'est encore beaucoup. Admettons cependant. Il y en a dix sur mille. Et encore parmi ces dix, n'y en a-t-il pas qui y croient au fond du cœur? N'y en a-t-il pas d'autres qui y croient en action, si je puis m'exprimer de la sorte, c'est-à-dire qui se conduisent de manière à montrer qu'ils ont cette foi à l'immortalité de l'âme qu'ils affirment ne point avoir? N'y en a-t-il pas d'autres qui y croiront demain, après demain, dans vingt ans peut-être, mais certainement à la fin de leur vie? Oui, il y en a et c'est même le plus grand nombre. En sorte que, sur mille personnes, il serait peut-être difficile d'en compter une, oui une seule, en qui on ne découvrit, en aucun temps, aucune sorte de foi en l'immortalité de l'âme. Et vous ne tremblez pas d'en voir si peu de votre opinion, sur un point si important, surtout quand l'univers entier se lève contre vous pour donner le plus éclatant démenti à vos timides assertions?

Il y en a bien d'autres, avez-vous dit.

Mais, de grâce, ne le dites pas trop haut: car, entre nous, ceux dont vous parlez sont des gens dans la société desquels on n'aime pas trop à se rencontrer. Vous ne voudriez pas me les nommer, n'est-ce pas ? Eh bien! je vais le faire à votre place. Ceux qui refusent de reconnaître une autre vie après celle-ci, ce sont les impudiques, les voleurs les assassins, tous ceux en un mot qui, transgressant ouvertement la loi de Dieu, craignent les châtiments qu'ils méritent par leur conduite. Et encore faut-il faire un choix parmi ces grands coupables Les meilleurs, ou, pour parler plus exactement, les moins mauvais d'entre eux croiront encore volontiers à l'immortalité de l'âme, parce qu'ils ont l'espoir de fléchir, avant leur mort, la justice divine offensée par leurs péchés. Ceux qui refusent obstinément de la reconnaître, ce sont les impudiques qui veulent mourir dans la débauche, parce qu'ils savent que rien de souillé ne saurait entrer dans le royaume des cieux; ce sont les voleurs qui ne veulent point restituer, parce qu'ils n'ignorent pas que la justice divine leur demandera compte éternellement du bien d'autrui, qu'ils auront éternellement sur la conscience; ce sont les assassins qui veulent mourir souillés du sang de leurs frères, parce qu'ils voient que ce sang crièra éternellement vengeance contre eux; ce sont, en un mot, tous ceux qui veulent mourir dans la transgression de la loi divine, parce que, n'ayant point demandé grâce en cette vie, ils ne peuvent espérer de l'obtenir dans l'autre.

Grand Dieu! quelle société et c'est le témoignage dégoûtant de ces homines que Vous ne craignez point d'opposer au témoignage si pur des patriarches, des prophètes, des apôtres, des martyrs, des confesseurs, des anachorètes, des vierges, de tous les justes de tous les temps et de tous les lieux, au témoignage encore de ceux qui, sans avoir au cœur une sainteté parfaite, y gardent intact cependant le dépôt sacré des

DES OBJECTIONS POPULAIRES. vérités éternelles! Ah! vous devriez en rougir. Vous ne sauriez avoir je ne dis pas la certitude, mais le plus léger espoir d'être dans le vrai avec de tels hommes. Quittez donc leurs rangs; hâtez-vous d'en sortir, ou nous vous apliquerons le proverbe reçu de tous: Dismoi qui tu hantes, et je te dirai qui tu es. L'âme est un mot.

Oui, c'est un mot, comme Dieu aussi est un mot. Oui, c'est un mot, mais un bien grand mot, car il exprime une grande chose, l'une des plus grandes après Dieu lui-même, l'esprit créé à son image et à sa ressemblance, capable comme lui de penser et d'aimer, appelé à faire sa volonté, dans ce lieu d'épreuves, et à partager, dans l'autre vie, son immortalité bienheureuse.

Voudriez-vous dire le contraire? Prétendriez-vous que c'est un vain son, un mot qui ne nous rappelle aucune idée positive, aucun être du moins réellement existant? Ce serait un peu fort. Et comment donc n'est-il aucune langue qui ne le prononce avec la signification que nous y attachons? Comment se fait-il que cette même signification lui soit donnée tout naturellement, sans nons quelquefois, et comme malgré nous?

Voyez le sauvage qui aura vécu dans l'isolement du désert. Je ne vous dirai pas qu'il n'a aucune idée d'une vie future, et conséquemment de l'existence d'une âme. Tout à l'heure j'affirmais le contraire; mais c'est chez lui une idée vague, confuse, dont il ne se rend pas compte à lui-même, bien loin de pouvoir le faire aux autres. Cependant arrive à lui un de ces missionnaires que le désir de sauver son âme et d'autres avec la sienne a porté à quitter sa patrie pour venir évangéliser ces pays plongés dans les ténèbres de la plus profonde ignorance, et, l'abordant avec bonté : « Mon frère, » lui dit-il, soit de vive voix, soit par geste, «j'arrive ici de bien loin, avec beaucoup de privations et de difficultés. Je viens à vous pour régénérer votre âme, et la conduire au ciel. » Le pauvre sauvage cherche en lui cette âme dont jamais personne ne lui avait parlé encore en termes aussi positifs et aussi clairs. Pen à peu les ténèbres se dissipent, la lumière se fait, il reconnaît l'existence de cette âme qui vient de lui être annoncée, il la voit, en quelque sorte, il la proclame lui aussi infiniment supérieure au corps, et il commence à mener une vie aussi spirituelle que celle qu'il a eue jusqu'ici a été matérielle.

Vous-même qui niez l'immortalité de l'âme et jusqu'à son existence, vous qui avez répété mille fois peut-être en votre vie : "Quand on est mort, tout est mort. » ou bien: « L'âme est un mot, vous qui le répétez encore en ce moment, c'est à votre propre témoignage que je vais en appeler pour vous confondre. Vous avez passe, je suppose, l'âge des passions. Vous voilà arrivé à cette époque de la vie où nous jugeons des choses plus sainement que jamais. Une maladie sérieuse, en laissant à votre raison toute sa force, est venue appeler davantage Core votre attention à la considération des

vérités éternelles : « Mon ami, » vous dira le ministre de la religion, « mon ami,» répéteront après lui peut-être un père, une mère, une épouse, des enfants tendrement aimés, mon ami, sauvez votre âme. Il en est temps; car bientôt Dien aura décidé pour toujours de son sort!» Vous y aviez pensé déjà de vousmême. Le voile abaissé sur vos yeux se déchire de plus en plus. Vous reconnaissez cette âme immortelle que vous aviez vue si pure dans votre enfance, et dont vous n'aviez commencé à nier l'existence qu'après l'avoir souillée et rendue en effet méconnaissable par le péché, et vous allez faire tout ce qui dépendra de vous désormais pour lui rendre son antique beauté.

Direz-vous actuellement que l'âme n'est qu'un mot? Ne voyez-vous pas, au contraire, que c'est une chose réelle, à la vérité de laquelle tout rend hommage au ciel et sur la terre, et qu'on ne peut révoquer en doute sans rejeter également toutes les autres choses, puisqu'il n'y en a point dont l'existence soit plus généralement, plus irrésistiblement attestée, non pas en un lieu seulement, mais partout?

C'est tout au plus un souffle, ainsi qu'on l'appelle communément, même dans nos livres religieux.

Oui, c'est un souffle, mais un souffle divin, et ce souffle est une âme vivante, comme le disent en propres termes les saintes Ecritures: Et inspiravit in faciem ejus spiraculum vitæ, et factus est homo in animam viventem. (Gen. 11, 7.)

Oui, c'est un souffle, comme l'ange, ministre du Seigneur, est une flamme de feu: Qui facit angelos suos spiritus, et ministros suos flammam ignis. (Psal. c, 4; Hebr. 1, 7.) C'est-à-dire qu'elle franchit, elle aussi, avec une facilité et une rapidité incroyables toutes les distances de l'espace et du temps; mais, comme elle a tonjours conscience d'ellemême, de quelque manière qu'elle se manifeste, comme elle peut faire, et fait souvent, en réalité, des choses grandes, admirables, si non aussi surprenantes que les œuvres de Dieu, esprit infini, du moins d'une magnificence proportionnée à sa nature d'esprit créé, comme étant venue de Dieu, elle retourne d'elle-même, sa mission achevée sur la terre,. dans le sein du Dieu de vérité qui l'a rachetée: In manus tuas commendo spiritum meum, redemisti me, Domine Deus veritatis. (Psal. xxx, 6.) Cette image sous laquelle on la représente ne saurait nous empêcher de reconnaître sa spiritualité et son immortalité.

Voulez-vous dire le contraire? prétendezvous que l'âme n'est réellement qu'un souffle matériel et périssable, dont il ne reste plus rien après son rapide passage? Ah! vous allez recevoir aussitôt sur ce point, le plus éclatant démenti, non pas seulement de la religion, mais de la raison, du cœur, du témoignage unanime des peuples, de tout ce qui a mission de Dieu de nous attester la vérité la plus essentielle. Non, ce n'est point un souffle, à la : moins dont vous l'entendez, réée à l'image de Dieu! Non, Souffle seulement, celle don

le rayon, perçant à travers nos sens, montre aussitôt notre origine céleste, indique notre supériorité incontestable sur tous les animaux, et notre domination presque absolue sur la nature entière! Non, ce n'est point un souffle seulement, celle qui aplanit les montagnes, comble les vallées, dompte la mer dans ses plus grandes fureurs, mesure la bauleur des cieux, suit de point en point, dans sa marche immense, cette grande armée des astres à laquelle le Créateur seul a le droit de commander! Non, ce n'est point un souffle seulement, celle qui s'élève jusqu'à Dieu, et peut rester constamment unie à lui. par la foi et la pratique des plus sublimes vertus! Non, ce n'est point un souffle seulement celle qui, au moment de se séparer du corps auquel elle est restée unie pendant son séjour sur la terre, inspire aux plus hardis une religieuse terreur, commande le respect à ceux qui n'avaient pas foi ni à sa grandeur ni même à son existence, fait courber les fronts les moins respectueux, et fléchir les genoux qui refusaient de le faire en présence de la Divinité! Que vous dirai-je enfin? Non, ce n'est point un souffle seulement, celle qui ayant acquis sur la terre une grande puissance, la conserve intacte, si ce n'est même plus grande encore, après de longs siècles écoulés, et partage, jusqu'à un certain point, du haut des cieux, les honneurs que nous rendons au Créateur de toutes choses!

C'est le corps qui pense.

Qu'entendez-vous par là? Que c'est véritablement notre corps tel qu'il est, ce corps sorti de terre, nourri par la terre, renouvelé continuellement, dans chacune de ses parties, par la nourriture qu'il prend, ce corps que tous croient avoir été donné à l'être pensant pour lui servir d'intermédiaire et d'organe, que c'est lui, dis-je, qui est le sujet et l'agent de la pensée? C'est plus que faux, c'est ridicule. Car, ou c'est le corps tout entier qui pense, dans votre supposition, ou c'est une ou quelques-unes de ses parties seulement. Si c'est le corps tout entier, c'est donc aussi mon pied, ma main, mes cheveux peut-être... Et pourquoi pas? Ce n'est pas la partie la moins subtile du corps. Je vous défie, du reste, de soutenir celà sérieusement. Pour réfuter une telle assertion, il ne serait pas nécessaire d'en appeler au témoignage des hommes, il suffirait de celui des enfants, qui, en vous entendant, ne pourraient s'empêcher d'éclater d'un fou rire. Ne voyez-vous pas d'ailleurs que, dans cette supposition, nous ne pourrions perdre un bras, une jambe, ou quelque autre membre semblable, sans que, chez nous, le sujet et l'agent de la pensée ne fût détruit dans la même proportion? Ce qui est démenti par l'expérience de tous les jours. Si c'est une ou plusieurs de ses parties, pourquoi cette partie ou ces parties de préférence aux autres? C'est toujours la même substance; et, s'il est souverainement ridicule de supposer le corps entier sujet et agent de la pensée, cette supposition ne saurait être moins ridicule pour une ou plusieurs de ses parties.

Vous êtes donc obligé, pour renare votro assertion un peu plus présentable, si je puis m'exprimer de la sorte, de reconnaître comme sujet et agent de la pensée une substance corporelle plus immatérielle, plus spirituelle que les corps ordinaires. Et pourquoi, dès lors, n'en pas reconnaître une complétement immatérielle et spirituelle, comme nous le faisons nous-mêmes? Car cet être pensant, après tout, dont vous admettez l'existence aussi bien que nous, quoique vous ne lui reconnaissiez pas la même nature que nous lui reconnaissons, cet être, dis-je, a reçu du Créateur des dons particuliers, ainsi que nous l'avons montré plus haut. Il porte en lui même une réponse d'immortalité que rien ne saurait étouffer. Dieu la lui a promise, cette immortalité, comme récompense à ses vertus ou châtiment à ses vices. Le genre humain la lui garantit, en termes qu'il estimpossible de méconnaître. Il est donc immortel! Et vous voilà forcé d'admettre les conséquences auxquelles vous croyiez échapper, en rejetant sa spiritualité.

Je pourrais à la rigueur, m'en tenir là; car ce qu'il y a d'essentiel, pour la morale conme pour la religion, c'est de reconnaître que tout ne meurt pas à la mort. Mais je ne le ferai pas, car toute doctrine matérialiste, quelle qu'elle soit, renferme toujours d'immenses dangers, en ravalant l'âme au rang de la matière, composée de parties, et que le temps détruit généralement par la dissolution des parties. Après avoir reconnu que nous avons une âme créée à l'image de Dieu, et qui survit nécessairement au corps, reconnaissons donc aussi qu'elle est spirituelle comme Dieu lui-même, et de sa nature impérissable.

Nous pourrions nous en rapporter encore, sur ce point, au témoignage de la religion, qui ne cesse de nous rappeler, de toute manière, la spiritualité de notre âme, et à celui de tous les peuples, qui nous la rappellent également, d'une manière plus ou moins claire, plus ou moins directe; mais comme il s'agit ici beaucoup moins d'établir une vérité dont nous ne pouvons guère douter déjà, que de nous en bien pénétrer, nous allons consulter la raison. Ecoutons donc, je ne dis pas le langage de la philosophie que tous ne peuvent comprendre, et qui d'ailleurs trompe si souvent les plus habiles, mais celui du sens commun, qui ne trompe personne, quand on sait le comprendre, parce que c'est la voix de Dieu même qui, voulant le salut de tous, la fait entendre à tous également.

« Il y a dans chacun de nous, »> dit à ce sujet l'apologiste que nous avons cité plus haut, « quelque chose qui sent, pense et juge. Or pour peu qu'on veuille réfléchir sur cette triple capacité qu'elle a d'éprouver des sensations, d'engendrer des idées, de former des jugements, on y trouve une triple démonstration de sa simplicité, de son immatérialité, de sa spiritualité, trois termes qui seront synonymes dans mon langage. »

« C'est par la médiation des sens, il est vrai, par le moyen de l'oeil, de l'oreille, de

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