que j'y parle de ma personne et des divers actes de mon ministère, qui ont obtenu l'applaudissement du public. Car il me semble tout-à-fait inconvenant de parler de soi et de ses actions.

Cette année de mon ministère a été, aux yeux du vulgaire, une époque déplorable et funeste; mais, au jugement des personnes sages et réfléchies, elle sera pour le St.Siège et pour l'immortel Pie VII, une époque infiniment glorieuse et digne d'une éternelle mémoire. Car, sous quelques rapports, ces paroles d'un auteur moderne sont vraies: « La prospérité de la religion est différente << de celle des empires : les humiliations de « l'Eglise, sa dispersion, la destruction de <«<ses temples, les tourmens de ses martyrs << sont le temps de sa gloire, et, quand aux << yeux du monde elle semble triompher, << c'est ordinairement le temps de son abais<<< sement. » (1)

Quant aux opérations de mon ministère,

(1) Montesquieu. De la grandeur et de la décadence des Romains. C. XXII.

qui ont mérité l'approbation des gens de bien, toute la gloire en est due à Pie VII. Je n'ai fait qu'exécuter ses ordres. D'autres peut-être l'auraient mieux fait que moi.

Ainsi, lorsque je raconte ce qui s'est passé à cette époque, on ne doit m'accuser d'être vain ni présomptueux.

Et puisque c'est vous qui m'avez engagé à me faire imprimer, vous aurez compassion de moi, et vous verrez dans ma soumission à vos conseils, une nouvelle preuve de l'estime et de la véritable amitié dont je fais profession pour vous.

B. C. PACCA.

Voici, mon cher Frère, des notes que j'écrivis dans les premiers mois de ma prison à Fenestrelle. Vous savez combien de fois nous en avons parlé pendant le dernier séjour que vous fîtes à Rome. Je ne puis pas assurer qu'elles contiennent une relation complète, exacte et chronologique des évènemens qui ont eu lieu pendant mon douloureux ministère, je veux dire, depuis le 18 juin 1808, jusqu'au 6 juillet de l'année 1809; mais on peut les regarder comme une apologie de ma conduite, pendant que j'ai été secrétaire-d'état, ou comme une réponse aux divers reproches que l'on a pu me faire jusqu'ici, et que l'on me fera

peut-être dans la suite. Ces Mémoires quoique très-courts, forment en substance l'histoire des événemens les plus remarquables de mon ministère. Voici ce qui m'a engagé à les écrire, et comment j'ai pu me déterminer à les continuer.

Pendant les premiers mois de ma prison, et dans le silence de la solitude, je roulais plusieurs pensées dans ma tête ; mais une entre autres blessait mon amour-propre. Il me semblait prévoir ce que mes contemporains diraient et ce que la postérité penserait de la chute de la cour de Rome et de la puissance temporelle des Papes; événemens funestes, dont je puis dire avec raison : J'ai vu moi-même ces douloureuses catastrophes, et j'y ai eu la plus grande part (1). Il est vrai que ma conscience ne me reprochait pas d'avoir fourni au gouvernement français aucun motif, ni même

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aucun prétexte apparent d'en venir à cette spoliation sacrilège; mais je dois avouer toute ma faiblesse et la force de mon amourpropre je craignais la censure de mes contemporains et plus encore le blâme de la postérité.

Cependant je me disais à moi-même, et cette réflexion me rassurait un peu Mes contemporains ont vu les sept provinces unies qui formaient la république de Hollande, se soumettre au gouvernement monarchique, sans obstacles et sans secousse, malgré l'esprit d'indépendance et de liberté qu'elles avaient toujours conservé depuis l'ancien Empire Romain jusqu'au XVI. siècle, et qui devait les attacher au système républicain : ils ont vu la république de Venise, la plus ancienne de toutes celles qui ont existé, et qui existaient encore de nos jours, disparaître et cesser d'être au nombre des puissances de l'Europe: il ont également vu se dissoudre et s'évanouir la confédération des princes de l'Allemagne, cet empire ger