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ment élaborées, où quelques ouvrages originaux même pourront être mis au jour. Or, est-il indifférent, je le demande, que les études se fassent avec l'entrain d'une armée à qui ses succès journaliers ne font entrevoir dans un nouvel assaut qu'une victoire nouvelle, ou sous l'influence de ce découragement retenu, malgré la meilleure volonté, dans les insuffisantes limites du strict devoir? Poser la question, c'est y répondre; hélas! que n'est-ce l'avoir résolue !

Il serait d'autant plus sage d'y songer, toutefois, que les œuvres annoncées sont justement de celles pour qui la médiocrité de l'exécution vocale équivaudrait à un arrêt de mort. Pour les Martyrs, toute la pièce est dans un rôle. Or, souvenez-vous de ce qu'il était avec Delahaye, de ce qu'il fut plus tard avec M. Valgalier!

D'Il Trovatore, je ne dirai rien, sinon que l'orchestration des opéras italiens modernes est trop pauvre relativement aux somptuosités de nos compositions nationales pour captiver bien vivement l'attention. Là encore c'est donc le talent des chanteurs qui décidera, en première ligne, du succès.

Ce n'est pas tout. S'il faut en croire des bruits trop conformes au vœu général pour être invraisemblables, l'administration serait à la veille de monter un opéra entièrement inédit. Jalouse de marquer son passage par un souvenir que la population reconnaissante conserverait avec orgueil, elle se déciderait enfin à une expérience capitale. Au premier jour, par ses soins, nous aurions la preuve que Lyon peut expédier en province, à l'étranger ses produits musicaux aussi bien que ses soieries. Alors commencerait à se justifier pour notre ville ce titre de second foyer artistique, objet de sa constante et jusqu'ici malheureuse ambition. Alors seulement nos oreilles cesseraient d'être humiliées par ces comparaisons incessantes au profit de la supériorité parisienne. Car l'exemple donné porterait vite ses fruits. A peine entr'ouverte, le monde des compositeurs se presscrait à cette porte bénie. Bientôt la direction n'aurait qu'à choisir. Nous pourrions donc, à notre tour, savourer de véritables débuts, des prémices réellement intactes. Et Paris lui-même, obligé de

compter désormais avec son rival si longtemps dédaigné, se verrait réduit à tenir de nos mains quelques-unes de ses richesses.

Dire que M. Halanzier songe mûrement à l'opportunité d'un semblable essai, c'est faire pressentir que le maestro qui en partagerait avec lui la responsabilité a déjà donné de solides garanties. Le nom de M. Simiot, si honorablement connu par d'originales inspirations, répond à toute objection. C'est dans nos églisur nos deux théâtres que notre savant compatriote a déjà fait ses preuves; et l'audition d'une œuvre de plus longue haleine - je suis heureux de pouvoir l'affirmer non par ouï dire mais par ouï chanter ne ferait que justifier les prévisions unanimes, toutes favorables à ce talent si riche de passé, si plein d'avenir.

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Mais hélas! s'il suffit d'un coup de la baguette directoriale pour nous donner à tous ce plaisir, cet orgueil, que d'efforts individuels ne devront pas être appelés à l'enfantement de cet embryon encore dans les limbes. Monstre inavoué, ou gracieux rejeton de la muse lyonnaise, oh! pour celui-là son sort dépend entièrement de ses parrains et marraines. Qu'ils entrevoient un rôle applaudi, un succès personnel; et chacun, créateur dans sa sphère, dotant, comme ces bonnes fées de la fable, le nouveau-né d'un don particulier, lui aura bientôt conféré l'ensemble des perfections. Que la tiédeur actuelle, au contraire, s'invétérant de plus en plus leur fasse voir pour tant d'efforts un insuccès plus que probable, au bout du fossé, inscrite d'avance, l'heure de la chûte..... l'avorton pourra être extrait par les fers; peut-être même lui fera-t-on la grâce de le baptiser au passage: mais il ne sera pas né viable.

De ce long discours, voici la morale. Au théâtre comme sous de plus vastes horizons, presque toujours les prétentions qu'au premier coup d'œil on croit les moins conciliables finiraient par s'entendre si chacun consentait à restreindre son droit dans la limite de son propre intérêt, sagement compris. Iei l'intérêt est évident. On vient de voir de quel côté, en réalité, il se trouve. Un dernier mot va le montrer plus sérieux, plus pressant qu'on ne le croit peut-être. En matière d'art, dès qu'une œuvre est produite, le public lui doit l'expression de son jugement. Fa

vorable ou non, louange ou critique, il la doit. Il la doit sous peine de déchéance. Si le parti pris du silence a suffi jadis pour poser haut quelques artistarques dédaigneux, le jour s'est fait maintenant sur cette commode ressource des sots.—Je n'exige, d'ailleurs, ni exclamations bourgeoisement retentissantes, ni compromettants battements de mains. Ce n'est pas celui qui claque le plus fort qui est le plus ému. Un murmure contenu sera pour l'artiste un tribut suffisant s'il a répondu avec la précision de l'écho au cri qui part de sa poitrine. Il le place bien au-dessus des bruyantes salves, trop rarement désintéressées; car dans ce suffrage d'élite il trouve à la fois la plus flatteuse récompense et le guide le moins capable de l'égarer. Voit-il, au contraire, son auditoire décidément rebelle? ne le pouvant transformer, peu à peu il descend à son niveau. Le culte sacré de l'art cède la place aux tours de force. Il la cède non sans sourire: faire applaudir ce qu'il méprise lui-même fut toujours la vengeance de prédilection du génie méconnu.

Qu'arrivera-t-il si, de part et d'autre, on s'opiniâtre dans cette voie? Il est trop aisé de le prédire, car la pente est glissante et le cercle sans issue. Si le public réserve ses plus chauds transports aux exercices vocaux les plus périlleux; s'il demeure décidément impassible à la phrase « Toi qui me fus ravie » si magistralement débitée a mezza voce par Renard, au 2me acte de Jérusalem; si le chef-d'œuvre de Rossini, le trio final du Comte Ory, délicieusement interprété sur notre scène, s'y termine toujours dans un morne silence; alors l'artiste, se voilant la face, demandera au métier ce que l'inspiration lui refuse; alors l'exagération remplacera la nature; l'ignoble ficelle, les cordes mélodieuses de la lyre dramatique: alors l'art musical aura vécu à Lyon.

P. DIDAY

A quelle cause est due l'affluence des spectateurs qui, cette année, se porte avec un empressement inaccoutumé au GrandThéatre? Faut-il l'attribuer, comme nous l'avons entendu dire, aux chemins de fer qui, au fur et à mesure qu'ils se multiplient, augmentent dans une mesure inattendue cette population flottante dont vivent les théâtres? Nous l'ignorons. Il se peut que les chemins de fer soient pour quelque chose dans ce phénomène assez insolite dans les annales théâtrales pour être universellement remarqué. Nous serions cependant plutôt porté à croire que l'empressement du public à se rendre aux invitations de l'affiche tient à des causes plus immédiates: une grande variété dans le répertoire incessamment renouvelé, une troupe homogène dont les éléments se prêtent un mutuel appui, une impulsion toujours présente dans toutes les parties de cette vaste machine qu'on appelle le monde des théâtres, impulsion vigoureuse et simple tout à la fois, raisonnable et résolue, perpétuellement une, sans tiraillements d'aucune sorte, éclairée et courtoise dans ses relations avec le public, une tendance manifeste à réaliser le mieux possible, à utiliser toutes les forces, à quelque degré que ce soit, en vue de la perfection de l'ensemble: là est peut-être l'unique cause de la faveur dont jouissent cette année nos deux théâtres, le Grand-Théâtre surtout. La direction a fait naître, à son avénement, un sentiment assez nouveau dans ces régions mobiles et orageuses, le sentiment de la stabilité. C'est quelque chose, allez; sans qu'on s'en rende compte, il réagit sur les dispositions et sur les habitudes du public. Les parterres passent généralement pour être de nature turbulente; les abonnés ont aussi, comme tous les désœuvrés, des caprices et des vapeurs. Mais, en somme, abonnés et parterre ressemblent assez aujourd'hui aux peuples modernes qui, après avoir essayé de gouverner par des pouvoirs qu'ils prétendaient métamorphoser

en instruments obéissants de leur volonté, ne demandent pas mieux que d'être administrés et bien administrés. On a laissé, il est vrai, au public le veto du sifflet. Mais c'est là un droit tombé en désuétude; à quoi lui servirait-il d'en faire usage? Tel acteur ne vous semble pas idoine et suffisant, comme on disait autrefois dans les vieux règlements, et parce que le parterre a été muet, vous craignez d'avoir à le subir jusqu'à la fin de l'année. Rassurez-vous; un administrateur de notre temps, quand il est habile, sait bien qu'il doit se substituer à ses administrés. Après avoir eu la responsabilité et l'initiative de l'engagement, il fera, en vrai critique qu'il doit être, son feuilleton secret sur l'artiste engagé, feuilleton sincère, exact, celui-là, sans fausses complaisances; car le critique est, dans ce cas, doublé du comptable. C'est ainsi que M. Halanzier, le directeur actuel, en a agi à l'égard d'artistes que l'indifférence avait accueillis et que sa prévoyante sagacité a promptement remplacés.

M. Renard est resté ce qu'il était l'année dernière, l'idole du public, le diamant de la troupe de M. Halanzier. Mais le diamant qui déjà lançait il y a un an de si brillants éclairs, semble chaque jour épurer son eau, s'orner d'une nouvelle facette, et rayonner de plus d'éclat. M. Renard n'est plus seulement une grande voix; le sentiment de nuances, les préoccupations du style, cet art de donner de la physionomie, du contour, de l'expression à la phrase musicale, de la balancer avec grâce et avec goût, tout cela est visible chez lui et lui présage de beaux triomphes à l'Opéra. Malheureusement le public lui tient moins compte de ces délicatesses qu'il sent peu que des grandes manifestations vocales qu'il applaudit à outrance. Raison de plus de ne pas laisser ignorer à M. Renard qu'il y a des gens auxquels n'échappent ni ses efforts, ni ses progrès. A côté de M. Renard qui s'apprête à prendre le chemin de Paris, les mains pleines d'espérances en train de fleurir, nous trouvons M. Audran qui en revient, chargé d'espérances moissonnées, nous voulons dire riche des fruits savoureux d'une maturité brillante et non encore épuisée; et M. Achard qui, malgré son extrême jeunesse, a déjà touché barre à Paris et se réserve sans doute d'y retour

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