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foi à ces sortes de phénomènes, il ne manquera pas, même aujourd'hui, de gens qui assureront en avoir appris ou expérimenté de semblables. Comme nous étions en Italie, on nous assura que certaines hôtelières de notre voisinage, initiées aux arts sacriléges, se vantaient de donner aux passants d'un certain fromage qui les changeait sur-le-champ en bêtes de somme, dont elles se servaient pour transporter leurs bagages, après quoi elles leur rendaient leur première forme. Pendant la métamorphose, ils conservaient toujours leur raison, comme Apulée le raconte de lui-même dans son récit ou son roman de l'Ane d'or.

Je tiens tout cela pour faux, ou du moins ce sont là des phénomènes si rares qu'on a raison de n'y pas ajouter foi. Ce qu'il faut croire fermement, c'est que Dieu, l'être tout-puissant, peut faire tout ce qu'il veut, soit pour répandre ses grâces, soit pour punir, et que les démons, qui sont des anges, mais corrompus, ne peuvent rien au delà de ce que leur permet celui dont les jugements sont quelquefois secrets, jamais injustes. Quand donc ils opèrent de semblables phénomènes, ils ne créent pas de nouvelles natures, mais se bornent à changer celles que le vrai Dieu a créées et à les faire paraître autres qu'elles ne sont. Ainsi, non-seulement je ne crois pas que les démons puissent changer l'âme d'un homme en celle d'une bête, mais, à mon avis, ils ne peuvent pas même produire dans leurs corps cette métamorphose. Ce qu'ils peuvent, c'est de frapper l'imagination, qui tout incorporelle qu'elle soit, est susceptible de mille représentations corporelles; ap

pelant d'ailleurs à leur aide l'assoupissement ou la léthargie, ils parviennent, je ne sais comment, à imprimer dans les âmes une forme toute fantastique assez fortement pour qu'elle semble réelle à nos faibles yeux. Il peut même arriver que celui dont ils se jouent de la sorte se croie tel qu'il paraît, tout comme il lui semble en dormant qu'il est un cheval et qu'il porte quelque fardeau. Si ces fardeaux sont de vrais corps, ce sont les démons qui les portent, afin de surprendre les hommes par cette illusion et de leur faire croire que la bête qu'ils voient est aussi réelle que le fardeau dont elle est chargée. Un certain Prostantius racontait que son père, ayant par hasard mangé de ce singulier fromage dont nous parlions tout à l'heure, demeura comme endormi sur son lit sans qu'on le pût éveiller; quelques jours après, il revint à lui comme d'un profond sommeil, disant qu'il était devenu cheval et qu'il avait porté à l'armée de ces vivres qu'on appelle retica à cause des filets' qui les enveloppent; or, le fait s'était passé, dit-on, comme il le décrivait, bien qu'il prît tout cela pour un songe. Un autre rapportait qu'une nuit, avant de s'endormir, il avait vu venir à lui un philosophe platonicien de sa connaissance, qui lui avait expliqué certains sentiments de Platon qu'il avait refusé auparavant de lui éclaircir. Comme on demandait à ce philosophe pourquoi il avait accordé hors de chez lui ce que chez lui il avait refusé : « Je n'ai pas fait cela, dit-il, mais j'ai songé que je le faisais. » Et ainsi, l'un vit en

1 Retia, filets.

veillant, par le moyen d'une image fantastique, ce que l'autre avait rêvé.

Ces faits nous ont été rapportés, non par des témoins quelconques, mais par des personnes dignes de foi. Si donc ce que l'on dit des Arcadiens et de ces compagnons d'Ulysse dont parle Virgile':

<< Transformés par les enchantements de Circé. »

si tout cela est vrai, j'estime que les choses se sont passées comme je viens de l'expliquer. Quant aux oiseaux de Diomède, comme on dit que la race en subsiste encore, je pense que les compagnons du héros grec ne furent pas métamorphosés en oiseaux, mais que ces oiseaux furent mis à leur place, comme la biche à celle d'Iphigénie. Il était facile aux démons, avec la permission de Dieu, d'opérer de semblables prestiges. Mais, comme Iphigénie fut trouvée vivante après le sacrifice, on jugea aisément que la biche avait été supposée en sa place; tandis que les compagnons de Diomède n'ayant point été trouvés depuis, parce que les mauvais anges les exterminèrent par l'ordre de Dieu, on a cru qu'ils avaient été changés en ces oiseaux que les démons eurent l'art de leur substituer. Maintenant, que ces oiseaux arrosent d'eau le temple de Diomède, qu'ils caressent les Grecs et déchirent les étrangers, c'est un stratagème des mêmes démons, auxquels il importe de faire croire que Diomède est devenu dieu, afin de tromper les simples, et d'obtenir pour des hommes morts, qui n'ont pas même vécu en hommes, ces temples, ces

Eclog,, VIII, v. 70.

autels, ces sacrifices, ces prêtres, tout ce culte enfin qui n'est dû qu'au Dieu de vie et de vérité.

CHAPITRE XIX.

Qu'Énée est venu en Italie au temps où Labdon était Juge

des Hébreux.

Après la ruine de Troie, Énée aborda en Italie avec vingt navires qui portaient les restes des Troyens. Latinus était roi de cette contrée, comme Mnesthéus l'était des Athéniens, Polyphidès des Sicyoniens, Tantanès des Assyriens; Labdon était juge des Hébreux. Après la mort de Latinus, Énée régna trois ans en Italie, tous les rois dont nous venons de parler étant encore vivants, à la réserve de Polyphidès, roi des Sicyoniens, à qui Pélasgus avait succédé. Samson était juge des Hébreux à la place de Labdon, et comme il était extraordinairement fort, on le prit pour Hercule. Énée ayant disparu après sa mort, les Latins en firent un dieu. Les Sabins mirent aussi au rang des dieux Sangus ou Sanctus, leur premier roi. Environ vers le même temps, Codrus, roi des Athéniens, se fit tuer volontairement par les Péloponésiens, et ce dévouement sauva son pays. Ceux du Péloponèse avaient reçu de l'oracle cette réponse, qu'ils vaincraient les Athéniens s'ils ne tuaient point leur roi. Codrus les trompa en changeant d'habit et leur disant des injures pour les provoquer à le tuer; c'est cette querelle de Codrus à laquelle Virgile fait quelque part allusion'. Les Athéniens honorèrent

Eclog., V, v. 11.

ce roi comme un dieu. Sous le règne de Sylvius, quatrième roi des Latins et fils d'Énée (non de Creuse, de laquelle naquit Ascanius, troisième roi de ces peuples, mais de Lavinia, fille de Latinus, qui accoucha de Sylvius après la mort d'Énée), Onéus étant le vingt-neuvième roi des Assyriens, Mélanthus le seizième d'Athènes, et le grand-prêtre Héli jugeant le peuple hébreu, la monarchie des Sicyoniens fut éteinte, après avoir duré l'espace de neuf cent cinquante-neuf ans.

CHAPITRE XX.

Succession des rois des Juifs après le temps des Juges.

Ce fut vers ce temps-là que le gouvernement des Juges étant fini parmi les Juifs, ils élurent pour leur premier roi Saül, sous lequel vivait le prophète Samuël. Les rois latins commencèrent alors à s'appeler Sylviens, de Sylvius, fils d'Énée, comme depuis on appela Césars tous les empereurs romains qui succédèrent à Auguste. Après la mort de Saül, qui régna quarante ans, David fut le second roi des Juifs. Depuis la mort de Codrus, les Athéniens n'eurent plus de rois, et confièrent à des magistrats le soin de gouverner leur république. A David, dont le règne dura aussi quarante ans, succéda son fils Salomon, qui bâtit ce fameux temple de Jérusalem. De son temps, les Latins fondèrent Albe, qui donna son nom à leurs rois. Salomon laissa son royaume à son fils Roboam, sous qui la Judée fut divisée en deux

royaumes.

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