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CHAPITRE XV.

Que la grâce de Dieu, qui nous fait revenir de la profondeur de notre ancienne misère, est un acheminement au siècle futur.

Aussi bien, ce joug pesant qui a été imposé aux fils d'Adam, depuis leur sortie du sein de leur mère jusqu'au jour de leur ensevelissement au sein de la mère commune, est encore pour nous, dans notre misère, un enseignement admirable: il nous exhorte à user sobrement de toutes choses, et nous fait comprendre que cette vie de châtiment n'est qu'une suite du péché effroyable commis dans le Paradis, et que tout ce qui nous est promis par le Nouveau Testament ne regarde que la part que nous aurons à la vie future; il faut donc accepter cette promesse comme un gage et vivre dans l'espérance, en faisant chaque jour de nouveaux progrès et mortifiant par l'esprit les mauvaises inclinations de la chair'; car « Dieu connaît ceux qui sont à lui (Tim., II. 19); » et « tous ceux qui sont conduits par l'esprit de Dieu sont enfants de Dieu (Rom., viii, 14; » enfants par grâce, et non par nature, n'y ayant qu'un seul Fils de Dieu par nature, qui, par sa bonté, s'est fait fils de l'homme, afin que nous, enfants de l'homme par nature, nous devinssions par grâce enfants de Dieu. Toujours immuable, il s'est revêtu de notre nature pour nous sauver, et, sans perdre sa divinité, il s'est fait participant de notre faiblesse, afin que, devenant meilleurs, nous

1 Rom., VIII, 13.

perdions ce que nous avons de vicieux et de mortel par la communication de sa justice et de son immortalité, et que nous conservions ce qu'il a mis de bon en nous dans la plénitude de sa bonté. De même que nous sommes tombés, par le péché d'un seul homme, dans une si déplorable misère', ainsi nous arrivons, par la grâce d'un seul homme, mais d'un hommeDieu, à la possession d'un şi grand bonheur. Et nul ne doit être assuré d'avoir passé du premier état au second, qu'il ne soit arrivé au lieu où il n'y aura plus de tentation, et qu'il ne possède cette paix qu'il poursuit à travers les combats que la chair livre contre l'esprit et l'esprit contre la chair 2. Or une telle guerre n'aurait pas lieu, si l'homme, par l'usage de son libre arbitre, eût conservé sa droiture naturelle; mais, par son refus d'entretenir avec Dieu une paix qui faisait son bonheur, il est contraint de combattre misérablement contre lui-même. Toutefois cet état vaut mieux encore que celui où il se trouvait avant de s'être converti à Dieu ; il vaut mieux combattre le vice que de le laisser régner sans combat, et la guerre, accompagnée de l'espérance d'une paix éternelle, est préférable à la captivité dont on n'espère point sortir. Il est vrai que nous souhaiterions bien de n'avoir plus cette guerre à soutenir, et qu'enflammés d'un divin amour, nous désirons ardemment cette paix et cet ordre accomplis, où les choses d'un prix inférieur seront pour jamais subordonnées aux choses supérieures. Mais lors même, ce qu'à Dieu ne plaise, que nous n'aurions pas foi dans un si grand bien,

1 Ibid., V, 12.

2 Galat., V, 17.

nous devrions toujours mieux aimer ce consbat, tout pénible qu'il puisse être, qu'une fausse paix achetée par l'abandon de notre âme à la tyrannie des passions.

CHAPITRE XVI.

Des lois de grâce qui s'étendent sur toutes les époques de la vie des hommes régénérés.

Telle est la miséricorde de Dieu à l'égard des vases de miséricorde qu'il a destinés à la gloire, que la première et la seconde enfance de l'homme, l'une livrée sans défense à la domination de la chair, l'autre en qui la raison encore faible, quoique aidée de la parole, ne peut combattre les mauvaises inclinations, toutes deux ne laissent pas cependant de passer de la puissance des ténèbres au royaume de Jésus-Christ, sans même traverser le purgatoire, quand une créature humaine vient à mourir à cet âge où elle n'est pas encore capable d'accomplir les commandements de Dieu, pourvu qu'elle ait reçu les sacrements du Médiateur'. Car la seule régénération spirituelle suffit pour rendre impuissante à nuire après la mort l'alliance que la génération charnelle avait contractée avec la mort. Mais quand on est arrivé à un âge capable de discipline, il faut commencer la guerre contre les vices, et s'y porter avec courage, de peur de tomber en des péchés qui méritent la damnation. Nos mauvaises inclinations sont plus faciles à surmonter, quand elles net sont pas encore fortifiées par l'habitude; si nous les

1 Comp. saint Augustin, Epist., XCVIII, ad Bonifacium.

laissons prendre empire sur nous et nous maîtriser, la victoire est plus difficile, et on ne les surmonte véritablement que lorsqu'on le fait par amour de la véritable justice, qui ne se trouve qu'en la foi de Jésus-Christ. Car si la loi commande sans que l'esprit vienne à son secours, la défense qu'elle fait du péché ne sert qu'à en augmenter le désir; si bien qu'on y ajoute encore par la violation de la loi. Quelquefois aussi on surmonte des vices manifestes par d'autres qui sont cachés et que l'on prend pour des vertus, quoique l'orgueil et une vanité périlleuse en soient les véritables principes. Les vices ne sont donc vraiment vaincus que lorsqu'ils le sont par l'amour de Dieu, amour que Dieu seul donne, et qu'il ne donne que par le Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, qui a voulu participer à notre mortalité misérable pour nous faire participer à sa divinité. Or, ils sont en bien petit nombre ceux qui ont atteint l'adolescence sans commettre aucun péché mortel, sans tomber dans aucun excès, dans aucune impiété, assez heureux et assez forts pour avoir comprimé par la grâce abondante de l'esprit tous les mouvements déréglés de la convoitise. La plupart, après avoir reçu le commandement de la loi, l'ont violé, et, s'étant laissé emporter au torrent des vices, ont eu recours ensuite à la pénitence; de la sorte, assistés de la grâce de Dieu, ils reprennent courage, et leur esprit soumis à Dieu parvient à soumettre la chair. Que celui donc qui veut se soustraire aux peines éternelles, ne soit pas seulement baptisé, mais justifié en Jésus-Christ, afin de passer véritablement de l'empire du diable

sous la puissance du Sauveur. Et qu'il ne compte pas sur des peines purifiantes, si ce n'est avant le dernier et redoutable jugement! On ne saurait nier pourtant que le feu, même éternel, ne fasse plus ou moins souffrir les damnés, selon la diversité de leurs crimes, et qu'il ne doive être moins ardent pour les plus ardent pour les autres, soit que son ardeur varie suivant l'énormité de la peine, soit qu'elle reste égale, mais que tous ne la sentent pas égale

uns,

ment.

CHAPITRE XVII.

De ceux qui pensent que nul homme n'aura à subir des peines éternelles.

Il me semble maintenant à propos de combattre avec douceur l'opinion de ceux d'entre nous qui, par esprit de miséricorde, ne veulent pas croire au supplice éternel des damnés, et soutiennent qu'ils seront délivrés après un espace de temps plus ou moins long, selon la grandeur de leurs péchés. Les uns font cette grâce à tous les damnés, les autres la font seulement à quelques-uns. Origène est encore plus indulgent: il croit que le diable même et ses anges, après avoir longtemps souffert, seront à la fin délivrés de leurs tourments pour être associés aux saints anges. Mais l'Église l'a condamné justement pour cette erreur et pour d'autres encore, entre lesquelles je citerai surtout ces vicissitudes éternelles de félicité et de misère où il soumet les âmes. En cela, il se départ de cette compassion qu'il semble avoir pour les malheureux damnés, puisqu'il fait souffrir

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