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la grandeur, mais l'enflure, et à qui celui qui donne sa grâce aux humbles (Jacobi, IV,6) résiste avec justice? Ici donc la justice consiste, à l'égard de l'homme, à obéir à Dieu; à l'égard du corps, à être soumis à l'âme, et à l'égard des vices, à les vaincre ou à leur résister par la raison et à demander à Dieu sa grâce et le pardon de ses fautes, comme à le remercier des biens qu'on en a reçus. Mais dans cette paix finale, qui doit être le but de toute la justice que nous tâchons d'acquérir ici-bas, comme la nature sera guérie sans retour de toutes les mauvaises inclinations, et que nous ne sentirons aucune résistance ni en nous-mêmes, ni de la part des autres, il ne sera pas nécessaire que la raison commande aux passions qui ne seront plus, mais Dieu commandera à l'homme, et l'âme au corps, avec une facilité et une douceur qui répondra à un état si glorieux et si fortuné. Cet état sera éternel, et nous serons assurés de son éternité, et c'est en cela que consistera notre souverain bien.

CHAPITRE XXVIII.

De la fin des méchants.

Mais, au contraire, tous ceux qui n'appartiennent pas à cette Cité de Dieu, leur misère sera éternelle ; c'est pourquoi l'Écriture l'appelle aussi la seconde mort, à cause que ni l'âme, ni le corps ne vivront : l'âme, parce qu'elle sera séparée de Dieu, qui est sa vie, et le corps, parce qu'il souffrira d'éternelles douleurs. Aussi cette seconde mort sera la plus cruelle,

parce qu'elle ne pourra finir par la mort. Or, la guerre étant contraire à la paix, comme la misère l'est à la béatitude et la mort à la vie, on peut demander si à la paix dont on jouira dans le souverain bien répond une guerre dans le souverain mal. Que celui qui fait cette demande prenne garde à ce qu'il y a de mauvais dans la guerre, et il trouvera que cela ne consiste que dans l'opposition et la contrariété des choses entre elles. Quelle guerre donc plus grande et plus cruelle peut-on s'imaginer que celle où la volonté est tellement contraire à la passion et la passion à la volonté que leur inimitié ne cesse jamais par la victoire de l'une ou de l'autre, et où la douleur combat tellement contre le corps qu'aucun des deux adversaires ne triomphe jamais? Quand il arrive en ce monde un pareil combat, ou bien la douleur a le dessus, et la mort en ôte le sentiment, ou la nature est victorieuse, et la santé chasse la douleur. Mais dans la vie à venir, la douleur demeurera pour tourmenter, et la nature subsistera pour sentir la douleur; car ni l'une ni l'autre ne sera détruite, afin que le supplice dure toujours. Or, comme c'est par le Jugement dernier que les bons et les méchants aboutiront, les uns au souverain bien et les autres au souverain mal, nous allons traiter ce sujet dans le livre suivant, s'il plaît à Dieu.

LIVRE XX.

Du jugement dernier et des témoignages qui l'annoncent dans l'Ancien Testament et dans le Nouveau.

CHAPITRE PREMIER.

Qu'on ne traitera proprement dans ce livre que du jugement dernier, bien que Dieu juge en tout temps.

Ayant dessein présentement, avec la grâce de Dieu, de parler du jour du dernier jugement et d'en établir la certitude contre les impies et les incrédules, nous devons d'abord poser comme fondement de notre édifice les témoignages de l'Écriture. Ceux qui n'y veulent point croire ne leur opposent que des raisonnements humains, pleins d'erreurs et de mensonges, tantôt soutenant que l'Écriture doit s'entendre dans un autre sens, et tantôt qu'elle n'a point l'autorité de la parole divine. Pour ceux qui l'entendent en son vrai sens et qui croient qu'elle renferme la parole de Dieu, je ne doute point qu'ils n'y donnent leur assentiment, soit qu'ils le déclarent au grand jour, soit qu'ils rougissent ou qu'ils craignent, sous de vains scrupules, d'avouer leur foi, soit même que, par une opiniâtreté qui tient de la

folie, ils s'obstinent à nier la vérité de choses qu'ils savent être vraies, la fausseté de choses qu'ils savent être fausses. Ainsi, ce que l'Église tout entière du vrai Dieu confesse et professe, à savoir que JésusChrist doit venir du ciel pour juger les vivants et les morts, voilà ce que nous appelons le dernier jour du jugement de Dieu, c'est-à-dire le dernier temps. Car combien de jours durera le jugement suprême? cela est incertain; mais personne n'ignore, pour peu qu'il soit versé dans l'Écriture sainte, que sa coutume est d'employer le mot jour pour celui de temps. Quand donc nous parlons du jour du jugement, nous ajoutons dernier ou suprême, parce que Dieu juge sans cesse et qu'il a jugé dès le commencement du genre humain, quand il a chassé du paradis et séparé de l'arbre de la vie les premiers hommes coupables. Bien plus, on peut dire qu'il a jugé, quand il a refusé son pardon aux anges prévaricateurs, dont le prince, vaincu par l'envie, trompa les hommes, après s'être trompé lui-même. Ce n'est pas non plus sans un juste et profond jugement de Dieu que les démons et les hommes mènent une vie si misérable et sujette à tant d'erreurs et de peines, les uns dans l'air, et les autres sur la terre. Mais quand personne n'aurait péché, ce serait encore par un jugement équitable de Dieu que toutes les créatures raisonnables demeureraient éternellement unies à leur Seigneur. Et il ne se contente pas de porter sur tous les démons et sur tous les hommes un jugement général, en ordonnant qu'ils soient misérables à cause du péché

1 II Petr., ",

du premier ange et du premier homme; il juge encore en particulier les œuvres que chacun d'eux accomplit en vertu de son libre arbitre. En effet, les démons le prient de ne point les tourmenter, et c'est avec justice qu'il les épargne ou les punit, selon qu'ils l'ont mérité. Les hommes aussi sont punis de leurs fautes, le plus souvent d'une manière manifeste, et toujours du moins en secret', soit dans cette vie, soit après la mort, bien qu'aucun ne puisse faire le bien, s'il n'est aidé du ciel, ni faire le mal, si Dieu ne le permet par un jugement très-juste. Car, ainsi que le dit l'Apôtre : « Il n'y a point d'injustice en Dieu (Rom., IX, 14); » et ailleurs : « Les jugements de Dieu sont impénétrables, et ses voies incompréhensibles (Ibid., x1, 33). » Mais nous ne parlerons dans ce livre ni des jugements que Dieu a rendus dès le principe, ni de ceux qu'il rend dans le présent, mais seulement du dernier jugement, alors que Jésus-Christ viendra du ciel juger les vivants et les morts. C'est bien là le jour suprême du jugement; car alors il n'y aura plus lieu à de vaines plaintes sur le bonheur du méchant ou sur le malheur du juste. Alors, en effet, la félicité véritable et éternelle des seuls justes, et le malheur irrévocable et mérité des seuls méchants seront également manifestes.

1 Mallh., VIII, 39.

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