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connaître la réponse des traditionalistes et les trois propositions qui la renferment. Ils invoquent en leur faveur le témoignage des Pères des premiers siècles sur la nécessité d'une révélation divine. Sans nous engager dans la discussion des textes particuliers, bornonsnous à une observation générale, dont chacun pourra aisément vérifier la justesse. Tous ces passages, interprétés dans leur vrai sens, ne prouvent rien de plus que l'impuissance morale de la raison, et, par suite, la nécessité morale de la révélation. La raison, livrée à elle-même dans son état présent, est moralement impuissante à connaître la vérité religieuse dans la mesure nécessaire à l'homme pour accomplir sa fin, même naturelle. Tel est l'enseignement unanime des Pères et des Docteurs. Du reste, ils n'ont pas traité la question au point de vue du traditionalisme proprement dit, dans le sens restreint du mot.

Venons maintenant aux partisans de la connaissance médiate. Leur théorie, disent-ils, est celle que saint Paul a formulée dans ces paroles de l'Épître aux Romains: «Les perfections invisibles de Dieu sont devenues visibles depuis la création du monde, par la connaissance que ses créatures nous en donnent (1). » Dieu ne se montre pas à nous dans cette vie tel qu'il est en lui-même, mais il se révèle par ses œuvres, per ea quæ facta sunt, et surtout par l'homme créé à son image. Les Pères ne font que reproduire et commenter le texte de l'Apôtre. Clément d'Alexandrie nous tiendra lieu de tous les autres. Son témoignage a d'autant plus de poids qu'il est généralement regardé comme celui des Pères qui se montre le plus favorable à la théorie de la connaissance immédiate de Dieu. Selon Clément, c'est par la considération des créatures que notre esprit, appuyé sur le principe de causalité, s'élève jusqu'à la connaissance du Créateur. Si la croyance en un Être souverain est gravée si avant dans tous les esprits, il faut, dit-il, en chercher la cause dans les effets de sa toutepuissance, qui se font sentir partout (2). Ailleurs, pour montrer comment l'idée de Dieu est naturelle à tous les hommes, il dit que la Providence, versant continuellement ses bienfaits sur tous, se fait ainsi connaître à tous (3). Il ajoute, dans un autre endroit, que si Dieu est infiniment au-dessus de nous par son essence, il en est très-rapproché par sa puissance, qui pénètre toutes choses (4). Si Pythagore, Socrate et Platon ont eu quelque connaissance du vrai Dieu, ils n'en sont pas uniquement redevables aux livres de Moïse et des Prophètes; (1) I, 20. —(2) Strom. V, 14. — (3) Ibid., n. 13. — (4) Ibid., II, n. 2.

ils l'ont puisée aussi dans le spectacle des œuvres de Dieu, c'est-àdire dans la considération des créatures, et en particulier dans l'étude de l'âme humaine (1). Aussi la fin suprême de la dialectique est-elle d'élever la raison, du plus bas degré au sommet de l'être, et de la contemplation du fini jusqu'à l'essence immuable, souveraine, infinie (2).

Ces passages, et beaucoup d'autres que nous omettons, laissent néamoins la question indécise, au moins sous un rapport. Ils établissent la possibilité d'une démonstration a posteriori de l'existence de Dieu. Tous les théologiens catholiques, à la suite des Pères, ont admis ce genre de preuve comme très-solide et très-concluant. En nier la valeur serait, pour le moins, une grande témérité. Mais la question reste entière quant à l'origine de l'idée de l'infini. Comment fait elle son apparition dans notre esprit ? vient-elle immédiatement d'un principe supérieur? ou bien jaillit-elle spontanément du fond de notre nature? ou bien encore doit-on la regarder comme l'œuvre de l'intellect, agissant d'après la même loi qui préside à la formation de nos idées en général? Il ne faut pas demander aux Pères anténicéens la solution raisonnée du problème. Ils ont vu et signalé les divers principes de la connaissance de Dieu, l'influence de la lumière incréée, la loi constitutive de notre raison, l'impulsion du sentiment, l'enseignement traditionnel, l'expérience et le raisonnement; mais ils ne cherchent point à déterminer leurs mutuels rapports, ni leur mode d'action, ni la part qui revient à chacun d'eux dans le résultat final. Ils obéissent, en ce point comme en beaucoup d'autres, à la tendance éclectique de leur temps.

L'abbé THOMAS, Chanoine, professeur de théologie.

(Sera continué.)

(1) Strom. V, n. 14.

-

(2) Ibid., I, 28.

LE TREIZIÈME APOTRE

(3o article (1).

On sait que, vers le commencement de ce siècle, un écrivain, membre de l'Institut comme M. Renan, le sieur Charles-François Dupuis, entreprit de prouver, dans son Origine de tous les cultes, que JésusChrist n'avait jamais existé, pas plus que n'avaient existé les Apôtres; ce qui, par parenthèse, rendait assez extraordinaire l'établissement de la religion chrétienne. D'après ce savant, Jésus était le symbole du Soleil, et les douze Apôtres la figure manifeste des douze signes du Zodiaque. Il déploya pour soutenir cette thèse un assez lourd bagage de connaissances astronomiques. Et comme tout ce qui est impie trouve momentanément des badauds pour l'accepter et pour le prôner, Dupuis fut aussi célèbre pendant quelque temps qu'il est oublié aujourd'hui. On dépensa beaucoup de savoir et l'on écrivit de gros livres pour le combattre.

Toutefois, rien ne valut le tout petit opuscule d'un esprit ingénieux qui appliqua à Napoléon et à ses douze maréchaux le système de Dupuis, et qui prouva de la même façon et avec les mêmes arguments que Napoléon n'a jamais existé. Ce coup d'épingle fut suffisant pour faire crever l'énorme vessie scientifique de Charles-François Dupuis.

Et, en vérité, je me dis à ce souvenir, que M. Renan ne vaut pas une réfutation plus sérieuse. Aujourd'hui l'irréligion s'est déclarée battue sur le terrain où l'auteur de l'Origine de tous les cultes avait porté le débat, et M. Renan repousse bien loin de lui le paradoxe insensé de Dupuis prétendant que Jésus-Christ n'a jamais existé. Non-seulement M. Renan reconnaît l'existence personnelle de Notre-Seigneur et celle des Apôtres, mais il admet la vérité d'un très-grand nombre de faits attestés par les Évangiles, et il nous les a racontés parfois lui-même dans la Vie de Jésus jusqu'aux plus minimes détails. Il sait trop bien l'histoire de Pilate, de Judas, d'Hérode, de Caïphe, pour ne pas accepter celle de Jésus et des Apôtres. Quant à la résurrection du (1) Voir la Revue des 10 et 25 mai.

Christ, attestée et cent fois prouvée comme nous l'avons vu; quant à sa vie sur la terre pendant quarante jours, il ne veut pas qu'on y croie, et il explique tout par les hallucinations.

Cette grande découverte historique a une portée bien plus grande que celle de Charles-François Dupuis, et l'on ne saurait trop la propager. Voilà donc que, convaincu moi-même à la fin à force de lire M. Renan, j'ai cru de mon devoir d'écrire suivant cette méthode l'Histoire du retour de l'île d' Elbe, histoire qui me conduira, je l'espère bien, à l'Institut.

Soyons humble cependant. Dans le récit de quinze à vingt pages que l'on va lire, il n'y a pas trente phrases de moi : tout est composé avec des phrases de M. Renan recueillies avec soin dans le volume que nous venons d'examiner. L'en tête de chaque chapitre, souvent même une lettre italique avant l'alinéa, donnent l'indication précise de la page, et chacun pourra vérifier. C'est, on le voit, un travail très-sérieux. Le lecteur qui voudra bien le méditer jusqu'au bout, aura l'idée la plus exacte possible du livre des Apôtres par M. Renan. Et il verra, - en même temps que la fécondité de cette méthode historique, qui s'applique à tout, comment, jusques à moi, les historiens et le monde entier s'étaient grossièrement trompés sur l'événement singulier dont j'entreprends le récit, au nom de la Haute science, de l'Exégèse, de la Fine Critique, toutes choses inconnues ou méconnues avant M. Renan et avant moi.

Que nul ne s'avise de voir là-dedans une plaisanterie. Je me livre ici à la sereine contemplation de la vérité. Moi le premier, après M. Renan, je déplore qu'on ne connaisse l'histoire des événements que par ceux qui y croient. Il n'y a que le sceptique qui écrive l'histoire ad narrandum (1).

Il en est de la controverse politique comme de la controverse religieuse. « Cette controverse, dit M. Renan, est toujours de mauvaise foi, sans le << savoir et sans le vouloir. Il ne s'agit pas pour elle de discuter avec indé« pendance, de chercher avec anxiété; il s'agit de défendre une doctrine « arrêtée, de prouver que le dissident est un ignorant ou un homme de « mauvaise foi. Calomnies, contre-sens, falsifications des idées et des textes, << raisonnements triomphants sur des choses que l'adversaire n'a pas dites, cris de victoire sur des erreurs qu'il n'a pas commises, rien ne paraît « déloyal à celui qui croit lenir en main les intérêts de la vérité absolue (2).

(1) Les Apôtres, introd., p. xxix.

(2) Les Apôtres, introd., p. LI. Convenez, honnête lecteur, que ceci est d'une belle audace.

« Quel but me suis-je donc proposé en écrivant ce qu'on va lire? Un « seul trouver le vrai et le faire vivre, travailler à ce que les grandes « choses du passé soient connues avec le plus d'exactitude possible (!) et « exposées d'une façon digne d'elles (!!) La pensée d'ébranler la foi de « personne est à mille lieues de moi (!!!) Ces œuvres doivent être exécu«tées avec une suprême indifférence, comme si l'on écrivait pour une « planète déserte. Toute concession aux scrupules d'un ordre inférieur est un manquement au culte de l'art et de la cérité (1).

Pour moi, le jour où l'on pourrait me convaincre d'un effort pour attirer « à mes idées un seul adhérent qui n'y vient pas de lui-même, on me causerait la peine la plus vive. J'en conclurais ou que mon esprit s'est laissé trou«bler dans sa libre et sereiné allure, ou que quelque chose s'est appesanti « en moi, puisque je ne suis plus capable de me contenter de la joyeuse « contemplation de l'univers (2).

« Je m'en tiendrai invariablement à cette règle de conduite, la seule con« forme à la dignité (?) du savant (??) Je sais que les recherches d'histoire « politique touchent à des questions vives, qui semblent exiger une solu«tion. Les personnes peu familiarisées avec la libre spéculation ne com<< prennent pas les calmes lenteurs de la pensée; les esprits pratiques s'impatientent contre la science, qui ne répond pas à leurs empresse«ments. Défendons-nous de ces vaines ardeurs. Gardons-nous de rien « fonder (3). »

Tels sont les inébranlables principes qui m'ont guidé dans mon travail. Les Apôtres sont, comme on l'a vu, une œuvre sérieuse. J'entends placer en face, ou plutôt à côté, une œuvre de même valeur; et voilà pourquoi le très-savant récit qu'on va lire terminera la trop longue étude que je viens de consacrer à M. Renan.

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« Peut-être Napoléon fut-il mis à mort à Fontainebleau par les agents des Bourbons. On redoutait l'exaspération de l'armée devant l'exécution de son Chef: aussi ne le fusilla-t-on pas, de peur du bruit, et ce fut par le poison qu'on s'en débarrassa (4). Le nouveau gouver

(1) Les Apôtres, introd., p. 1.

(2) Ibid, introd., p. LV.

(3) Ibid, introd., p. LXIII.

(a) Ibid, p. 28 à 30, passim.

(4) Y aurait-il une vague lueur de ceci dans le récit de M. Thiers, lorsqu'il dit que l'Empereur tenta lui-même de s'empoisonner avec une préparation composée par Yvan ?

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