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fortes. Quand il s'agit de faire la paix, en esprit et en vérité, c'est la conversion qu'il faut et non l'accommodement. La Justice est tout entière ce qu'elle est.

Dans les relations d'homme à homme, quand un rapprochement semble avoir lieu, sans que le cœur du coupable soit changé, quand il croit qu'une poignée de main remplace le repentir et le sentiment de sa faute, ce rapprochement menteur s'ouvre promptement pour laisser voir la graine qu'il portait en lui, C'est une seconde séparation beaucoup plus profonde que la première. Il en est de même vis-à-vis des doctrines. La paix apparente, qu'une complaisance achète et paye, est aussi contraire à la charité qu'à la justice, car elle creuse un abîme là où il y avait un fossé. La charité veut toujours la lumière, et la lumière évite jusqu'à l'ombre d'un compromis. Toute beauté est une plénitude. La paix est peut-être au fond la victoire sûre d'elle-même.

Que dirait-on d'un médecin qui, par charité, ménagerait la maladie de son client? Imaginez ce tendre personnage. Il dirait au malade: après tout, mon ami, il faut être charitable. Le cancer qui vous ronge est peut-être de bonne foi. Voyons, soyez gentil, faites avec lui une bonne petite amitié; il ne faut pas être intraitable; faites la part de son caractère. Dans ce cancer, il y a peut-être une bête; elle se nourrit de votre chair et de votre sang, auriez-vous le courage de lui refuser ce qu'il lui faut? La pauvre bête mourrait de faim. D'ailleurs, je suis porté à croire que le cancer est de bonne foi et je remplis auprès de vous une mission de charité.

C'est le crime du dix-neuvième siècle que de ne pas haïr le mal, et de lui faire des propositions. Il n'y a qu'une proposition à lui faire, c'est de disparaître. Tout arrangement conclu avec lui ressemble non pas même à son triomphe partiel, mais à son triomphe complet, car le mal ne demande pas toujours à chasser le bien il demande la permission de cohabiter avec lui. Un instinct secret l'avertit qu'en demandant quelque chose, il demane tout. Dès qu'on ne le hait plus, il se sent adoré.

La paix, disais-je, est la victoire sûre d'elle-même. La paix est un écrasement. C'est un écrasement assez complet pour ne plus faire d'effort.

Le sommeil semble placé au sommet de l'activité humaine : Quand l'effort extérieur a fait son œuvre et atteint son but, l'homme s'endort. C'est la vie qui se recueille; c'est l'effort qui, vainqueur au-de

hors, rentre en lui-même pour vaincre au dedans, car le repos est la victoire remportée par la force qui répare, sur la force qui dépense. La paix ressemble au sommeil. Elle est le recueillement du vainqueur qui, ayant fait son œuvre et atteint son but au dehors, demande aux sources de la vie la régénération intérieure, et la victoire intime après la victoire éclatante.

que

Mais, pour qu'il en soit ainsi, pour que la paix soit la paix, il faut la justice ait été assouvie, il faut un dégagement de lumière et de chaleur qui ait fait mourir l'ennemi, car l'ennemi c'est le froid. Il faut que l'élément mauvais soit arraché, non pas voilé. Il faut qu'aucune rougeur ne menace les fronts de ceux qui vont s'embrasser. L'absolu est la chasteté de la victoire.

ERNEST HELLO.

SOUS UN NUAGE

L'HISTOIRE D'URSIE ROCHE

(Suite.)

CHAPITRE XI

LA FIN DU VOYAGE

Cette « prochaine fois» dont Hugh Fitz-Gérald avait parlé à Ursie Roche, devait se faire attendre. L'état de Mary empira, et le lendemain le docteur O'Leary la déclara en danger. Ursie était infatigable à ses côtés; et Hugh ne fit que l'entrevoir quand elle venait à la porte répondre aux demandes fréquentes envoyées du château, sur l'état de la malade. Et même était-ce encore rare, car généralement c'était une femme ou un enfant du village qui ouvrait la porte. Ursie Roche ne manquait pas d'aide. Aussitôt qu'elle fut dans le malheur, Rathlinn oublia ses soupçons et ses cancans, et chaque jour quelques bonnes gens traversaient le marais de Kilroonan, soit pour mettre en ordre la maison, soit pour ouvrir la porte ou pour faire le dîner d'Antony. Quant à la malade elle-même, tous ses besoins était largement satisfaits par sa douce mattressse. Devant tant de charité la nature affectueuse d'Ursie avait reparu et elle n'avait que l'embarras de choisir parmi ces offres et ces aides. Tout son temps pouvait donc être consacré à sa mère, et il est permis de douter que celle-ci, couchée sur son lit de douleur, mais soignée et caressée par l'enfant qu'elle aimait tant, ne se trouvât pas plus heureuse que depuis longtemps elle ne l'avait été.

Antony, toujours inutile, était souvent embarrassant dans cette chambre de malade, où sa voix haute et ses pas lourds faisaient subir de dures épreuves aux nerfs agités et à la tête souffrante de sa femme. Le docteur O'Leary ne tarda pas à réclamer son éloignement; et, pour lui rendre justice, Antony eut assez la conscience de son incapacité pour se soumettre à la prescription. Katie, encore délicate, restait au château, et tous les jours elle venait voir sa mère, «l'égayer, » comme disait le vieux jardinier. Ce n'était pas l'effet que produisait snr Mary les visites de sa fille. Elle pouvait sourire devant ce jeune et gai visage et recevoir avec bonheur ces caresses, ces câlineries qui faisaient un des grands charmes de Katie; mais l'inquiétude peinte dans son regard ne se démentait pas un seul instant pendant la visite,

et Ursie savait que lorsque, après le départ de la jeune fille, sa mère se retournait sous prétexte de dormir, ce n'était que pour donner libre cours à ses larmes. L'avenir de Katie effrayait la pauvre femme; Ursie ne s'en étonnait pas vaine, frivole et jolie, Katie Roche, plus que personne, avait besoin du regard vigilant d'une mère. Malgré la nature calme de Mary, malgré sa profonde piété et la force de sa confiance en Dieu, ces inquiétudes pesèrent lourdement sur elle pendant sa dernière maladie; dernière, pensait-elle; car même devant les espérances du médecin, elle ne se fit pas un moment illusion. Elle n'avait pas encore reçu la visite promise de Mme Fitz-Gérald; mais celle-ci, résolue à ne pas laisser mourir sa fidèle servante sans la revoir encore une fois ici-bas, devait être avertie aussitôt que tout espoir serait perdu; elle consentait à remettre jusque-là l'entrevue. Ce moment ne tarda pas à arriver. Mary, après une courte période de délire suivi d'un retour à la raison et d'une grande faiblesse, reçut les derniers sacrements avec le calme et la piété qui la caractérisaient.

Mais, dit-elle pourtant un jour au Père O'Hara : Comment puis-je mourir sans anxiété, comme femme et comme mère !

-

- Prenez courage, ma fille, Antony restera ici et vos filles seront bien entourées. Je sais que leur meilleure amie leur sera sans doute enlevée, mais il reste le squire et sa fille. Puis vous pouvez compter sur moi, Mary.

- Oui, dit-elle, que Dieu vous en récompense! Oh! je reconnais bien sa miséricorde. Combien il m'aurait été pénible de mourir dans cette ville protestante, si j'y étais restée, tandis que ma pauvre fille était au loin. Mais mon fils, mon fils ! Je n'ai jamais reçu un mot de lui. Que Dieu le préserve du mal, mon pauvre, pauvre Corney.

Elle se couvrit le visage avec une émotion extraordinaire.

-Dieu vous éprouve cruellement, oui, ma pauvre enfant. Mais Corney est le fils de bien des prières, et, Mary, bientôt vous saurez tout ce que vous voulez savoir.

Le Père O'Hara s'adressait à une chrétienne, ses paroles allèrent droit à son cœur. Quant à la petite Katie, continua-t-il, ne craignez rien. J'aurai l'œil ouvert sur ses rubans et colifichets, et ne laisserai pas les compliments des beaux garçons lui tourner la tête. C'est ce que j'aurai à surveiller. Katie deviendra une sérieuse petite femme. Et n'a-t-elle pas Ursie comme sauvegarde, comme ange gardien ?

Mon Ursie! murmura Mary. Oh! si Dieu m'avait permis, avant de la laisser, de soulever ce voile qui l'enveloppe. Il me semble que je ne dois pas mourir sans lui demander de tout me dire.

- Faites-la parler, pour elle plus que pour vous, vous le devez. Elle ne vous refusera pas. Elle croit que c'est son devoir de garder le secret. A-t-elle raison? nous ne pouvons le dire. Elle a un guide sage, mais auprès de vous, de sa mère mourante, elle n'a plus le droit de rester silencieuse.

Ce jour-là même, à la triste lueur d'un crépuscule de novembre, le Père O'Hara parla à Ursie. Elle écouta ses paroles avec son même visage pâle et rigide; quand il eut achevé, elle s'écria: Sera-ce bien, sera-ce vraiment

bien ?

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Il l'interrompit : Sera-ce bien ! bien de calmer le cœur de votre mère avant sa mort ! bien, de mettre fin à ce long martyre que vous lui avez fait endurer! Enfant, enfant, tâchez de vous oublier, vous et votre propre chagrin, et pensez à elle, qui est mourante, vous le savez !

Je le sais ! Oh! que je voudrais que ce fût moi! Elle parlait avec un morne désespoir, qui fit regretter au prêtre la dureté de son langage. Avant qu'il pût reprendre la parole, elle continua: Pensez-vous donc que j'aie été silencieuse pour moi, pour ma propre satisfaction? Je ne pense qu'à elle, à elle seule et non à moi. Et pourquoi penserais-je à moi ? Il était triste de l'entendre.

- Que Dieu vous protége, enfant, dit le prêtre profondément ému. Qu'il vous aide et allége votre fardeau ! Mais, Ursie, si votre conscience n'y est pas engagée.....

-Elle ne l'est pas, interrompit-elle. Je suis libre d'agir comme je veux.... Seulement je ne sais... je ne puis décider.

-Alors, laissez-moi en prendre la responsabilité, dit-il avec autorité. Montez près de votre mère et parlez-lui. Elle gardera votre secret le peu de temps qui lui reste à vivre; et croyez-moi, la pensée que vous l'auriez laissée mourir dans l'ignorance ajouterait à votre fardeau. Allez-y, Ursie, allez-y.

Elle resta un instant encore debout, les mains serrées étroitement l'une dans l'autre, puis se décida à monter. Elle entra sans bruit dans la chambre de sa mère, baissa les rideaux, alluma une bougie, la plaça de façon à ne pas gêner sa mère, et installa, tout vite et confortablement.

Maintenant, mère, voulez-vous boire ceci? Et elle souleva avec douceur la tête de la malade, qu'elle reposa ensuite aussi tendrement sur les oreillers.

- Je crois vraiment que vous êtes née garde-malade, chère enfant. Embrassez-moi, Ursie.

La jeune fille se pencha et posa ses lèvres froides sur celles de sa mère, dans un long et doux embrassement, où le chagrin se faisait pressentir autant que l'amour.

Mère, dit-elle, je veux vous parler ce soir : il faut que vous me compreniez avant de nous quitter.

Ursie, mon enfant, cela vaut mieux.

Oui, mère; le Père O'Hara le dit et je veux faire ce que vous aussi croyez le mieux. Mais, chère mère, vous aurez sans doute besoin de force; si vous avez à me dire quelque chose, je crois que vous ferez bien de parler la première.

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