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des hauteurs du rocher de la Turbie, je portai mes yeux au loin sur la vaste et radieuse étendue des flots, je me le représentai encore là, jetant un long et dernier regard jusqu'aux extrémités de l'horizon et au delà de la Méditerranée, jusqu'à Porto; et la grande image de Virgile revint à mon souvenir :

Cunclæque profundum

Pontum aspectabant flentes

Il partit de là, et ne devait plus revenir.

Et parmi ces tristes images, je me souvins plus douloureusement encore d'une parole de l'Écriture prononcée sur les princes dont le ciel semble détourner sa lumière: Effusa est contemptio super principes; car alors ils marchent dans des voies sans issue, qui ne sont pas des voies: Et errare fecit eos in invio, et non in via.

Et voilà pourquoi il faut pleurer et prier pour

eux.

Orléans, 8 mai 1860, en la fête de Jeanne d'Arc.

LA SOUVERAINETÉ

PONTIFICALE

CHAPITRE PREMIER

Le Batelier de la Galilée.

I

Toutes les œuvres de Dieu ont un caractère de grandeur et de simplicité qui étonne; et certainement JésusChrist accomplit une chose d'une simplicité et d'une gran deur surhumaine, quand il choisit un homme mortel, ignorant, obscur, pour en faire le Chef suprême de son immortelle Église, le Père des âmes, le guide des consciences, le juge en dernier ressort des intérê's religieux de l'humanité. Il donna, sans contredit, l'un des plus merveilleux témoignages de sa puissance, quand il dit à

cet homme, ou plutôt à ce grain de sable ramassé sur les

bords d'un lac de Galilée : « Tu es Pierre, et sur cette pierre « je bâtirai mon Église, et les portes de l'enfer ne prévau« dront pas contre elle. »

On sent, dans ce jeu de mots singulier', je ne sais quelle assurance familière et toute-puissante, je ne sais quelle complaisance divine de langage. En le méditant, et surtout en considérant toute la suite des temps et des choses, je me rappelle involontairement ces lignes de Fénelon « Les paroles des hommes sincères disent ce qui « est; mais les paroles toutes-puissantes du Fils de Dieu font « ce qu'elles disent. »

:

Il fut fait de la sorte. Depuis dix-huit siècles, cette faible créature, ce roseau est devenu PIERRE sur lui repose la forte Église du Fils de Dieu, et les portes de l'enfer n'ont pas encore prévalu contre elle.

Pour moi, je l'avouerai simplement, cet homme, que Dieu a si extraordinairement conçu dans sa pensée, et fait dans sa puissance, cet homme, centre et fondement du plus grand conseil divin réalisé dans le temps, et conservé par une providence immuable, à travers les siècles, parmi tant d'orages; cet homme est non-seulement l'objet de ma foi et l'attrait de mon cœur, mais aussi l'étonnement inépuisable de mon esprit. Je n'oublierai jamais l'impres

Ce jeu de mots, appelé par les rhéteurs paronomase, est fréquent dans l'Écriture. Glassius, dans sa Rhétor. sacrée (tract. 2, cap. 2), et Lowts, De Sacra Poesi Hebr, en citent de nombreux exemples. On peut remarquer, entre autres, dans la Prophétie de Jacob (Genèse, 49), les jeux de mots sur Juda et Jad; et dans Isaïe, ceux sur l'Emmanuel et sur les enfants du prophète, nommés Maher Schalal, Hach-Baz; dans l'Épître à Philémon (v. 20), celui sur Onésime. (On peut consulter à cet égard Estius et autres commentateurs.)

sion qui me saisit, lorsque je le contemplai pour la première fois, à Rome, en 1831; lorsque je vis le Vicaire de Jésus-Christ apparaître, pour la première fois, à mes yeux, sous les voûtes resplendissantes de Sainte-MarieMajeure. Profondément touché à la vue du Père commun des fidèles, mais remué plus violemment par une pensée plus haute encore et plus forte, je me disais :

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« Le voilà donc, ce Pape! ce successeur de Pierre ; ace Chef de la chrétienté catholique; cette bouche de « l'Église, os Ecclesiæ, toujours vivante et ouverte pour enseigner l'univers; ce centre de la foi et de l'unité • chrétienne; ce foyer de la lumière et de la vérité, allumé « pour éclairer le monde, lux mundi; cet homme infirme, « ce faible vieillard, base immuable d'un édifice divin, « contre lequel les puissances de ténèbres seront éternelle«<ment sans force; cette pierre angulaire sur laquelle « s'élève ici-bas la cité de Dieu! La voilà, cette tête mor« telle sur laquelle reposent tant de glorieux souvenirs << du passé, les espérances du présent, les desseins mêmes « de l'éternel avenir! Prince des prêtres, Père des pères, « héritier des Apôtres; plus grand qu'Abraham par le « patriarcat, comme disait autrefois saint Bernard; plus « grand que Melchisédech par le sacerdoce, plus grand « que Moïse par l'autorité, plus grand que Samuel par la « juridiction; en un mot, Pierre par la puissance, Christ << par l'onction, Pasteur des pasteurs, guide des guides, point cardinal de toutes les Églises, clef de la voûte catholique, citadelle imprenable de la communion des << enfants de Dieu! >>

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Et cette merveille, elle dure depuis dix-huit cents ans, sur cette terre où tout passe! elle dure, non pas au milieu des ténèbres et de l'imbécillité de nations engourdies dans

le sommeil d'une éternelle enfance, non c'est au milieu de toutes les lumières les plus vives de cette grande civilisation moderne, qui éclaire tout; elle dure au centre même de cette activité des peuples européens, qui use tout; elle dure et elle résiste à tout à la méchanceté des hommes, à la fatalité des événements, à l'inconsistance des choses, et surtout à la faiblesse naturelle de ceux en qui elle est personnifiée, et qui sont de chair et d'os comme vous et moi. Qu'on le dise Dieu a-t-il rien fait de plus étrange et de plus grand? N'y a-t-il pas là manifestement quelque œuvre divine, le jeu le plus extraordinaire d'une puissance infinie, ludens in orbe terrarum, comme disent les divines Écritures?

Or, cette œuvre, Dieu l'a faite pour un but immortel: elle doit demeurer jusqu'à la fin des temps, et sa durée passée, déjà si étonnante, nous est, à nous catholiques, un garant de la vérité des oracles qui la déclarent impérissable. Et maintenant, nous le demandons, quels moyens, quels instruments la Providence emploie-t-elle pour conduire à son terme ce divin établissement, pour le soutenir et le conserver au milieu de l'agitation des siècles, in medio annorum, comme dit un texte sacré ?

Mais avant de suivre ainsi la Papauté à travers les âges, il est nécessaire d'en étudier de près, quelques moments du moins, la première origine.

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On aime aujourd'hui à remonter aux origines, et on a raison la contemplation des choses dans leur première apparition en fait mieux comprendre la nature et les dé

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