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veloppements, soulève des questions pleines d'intérêt et de lumière, et par là même sollicite vivement l'attention des esprits curieux et réfléchis.

Les origines du souverain pontificat, comme le Christianisme lui-même, et comme presque tout ce qui est divin, ont le double attrait de leurs prodigieux résultats dans le monde, et de la mystérieuse humilité au sein de laquelle elles se sont produites. Toute la civilisation moderne en dérive. C'est de là, c'est de ce premier foyer du Christianisme, qu'ont rayonné autrefois et que rayonnent encore sur l'humanité ces clartés nouvelles et si vives, dont nous ressentons aujourd'hui nous-mêmes, bon gré, mal gré, la puissante influence, dont nous vivons encore moralement, en dépit de nos superbes dédains. Ce qui commença alors en Judée ne fut rien moins que le renouvellement de l'ancien monde, la conception et l'enfantement du monde

nouveau.

Mais ces commencements de si grandes choses furent d'une obscurité, d'une petitesse, d'une étrangeté singulières; je dirais presque, si je l'osais, de la plus surprenante originalité. Rien de pareil ne s'est jamais vu ni dit nulle part. C'est en même temps le plus humble et le plus grand fait de l'histoire; et, qu'on ait ou non la foi, il est impossible qu'une si modeste préparation de la plus prodigieuse révolution morale qui fût jamais ne provoque la réflexion profonde de tout homme qui pense, et cherche à se rendre compte des choses.

Il y a là des détails si simples, si vulgaires en apparence, et d'une portée cependant si extraordinaire! Sur un fond de tableau immense, vaste comme le monde, se détachent tout à coup silencieusement quelques traits obscurs, quelques lignes inaperçues qui, insensiblement, grandissent,

s'éclairent, et bientôt, par je ne sais quel art divin, changent toutes les perspectives, illuminent tout l'horizon, et présentent, sous un aspect inattendu et radieux, tout le tableau transformé.

Ce contraste merveilleux ne montre-t-il pas ici, à qui sait voir, une main cachée qui dirige tout avec une force et une douceur infinies? Du moins on ne peut chercher à saisir sous des événements marqués à un cachet plus singulier, plus curieux, la pensée divine qui se découvre toujours tôt ou tard dans les faits humains, et qui seule contient et révèle le dernier mot de l'histoire. C'est cette intéressante étude que nous allons essayer de faire rapidement.

III

Rome avait conquis le monde par ses armes et le gouvernait par ses lois, des côtes de la Grande-Bretagne au Pont-Euxin, des colonnes d'Hercule à l'Euphrate. Ses historiens racontaient avec enthousiasme ses humbles commencements, et la suite merveilleuse de ses progrès et de ses conquêtes. Ses poëtes chantaient avec orgueil sa domination, poussée jusqu'aux derniers confins du monde connu, et son nom porté jusqu'aux astres, imperium Oceano, famam qui terminet astris, et l'immobile rocher de son Capitole, symbole de son empire éternel, Capitoli immobile saxum.

En paix avec l'univers et avec elle-même, après tant de guerres et de factions, elle s'était assise, fatiguée de ses agitations et du poids de sa grandeur, aux pieds d'un maître ; et un seul homme, concentrant dans sa main tous les pouvoirs du peuple et du sénat, représentant seul toute

la majesté romaine, commandait à la ville et au monde : Urbi et Orbi.

Cet homme avait joué sur la scène politique un rôle sans pareil. Venu de la fourberie, de la trahison et de la cruauté, il avait trouvé profit pour son ambition à démentir dans la seconde partie de sa vie les forfaits de la première, à étaler l'apparence des vertus qui charment les peuples, la simplicité, la modération, la clémence : tout lui avait réussi, le bien comme le mal; et il avait vu ses crimes triomphants, sa personne adorée; et l'adulation montant, de son vivant même, jusqu'à l'apothéose, l'avait appelé un Dieu tutélaire: Præsens Divus habebitur 1.

Les contrastes de sa propre vie, et ce spectacle de bassesse insigne, avaient jeté dans son âme, avec le mépris des hommes, le scepticisme jusqu'à l'ironie pour toutes choses; et, son regard ne s'étendant pas au delà de la sphère dont il avait été le centre, et de la scène qu'il avait seul remplic, il mourait avec ces paroles sur les lèvres, accompagnées d'un sourire amer et dégoûté : « Mes amis, « la pièce est jouée; mais, n'est-ce pas que j'ai bien fait « mon rôle ? »

Et cependant c'est ici, sans contredit, la plus cruelle dérision de la fortune et des gloires humaines qui fût jamais le nom, dont la flatterie avait recouvert les crimes de cet homme, le nom d'Auguste, est resté l'épithète la plus haute qu'on puisse donner ici-bas aux plus grandes majestés; et son siècle, avec ce nom, est compté parmi les quatre siècles fameux de l'histoire... Soit! Les choses terrestres ne valent pas mieux que cela. Pour ceux à qui

1 HORACE.

cela ne plaît pas, il y a une ressource: c'est de se confier à la Providence, et de croire à l'avenir; et quant à ceux à qui cela plaît, il n'y a qu'une chose à leur dire, c'est qu'ils en sont dignes Talibus Dominis terra erat digna, le monde était digne de tels maîtres, et n'avait pas le droit de se plaindre, dit justement saint Augustin dans la Gité de Dieu.

:

IV

Donc, pendant qu'Auguste régnait sur le monde, dans un coin obscur du globe, en Judée, dans la province la plus décriée d'un pays si méprisé lui-même1, dans la Galilée, un petit garçon jouait aux bords d'un lac sur le bateau de son père. Il se nommait Simon, et il était fils de Jean le pêcheur. Eh bien! c'était lui, cet enfant, ce fils d'un batelier du lac de Génézareth, qui devait un jour succéder, à sa manière, à Auguste dans l'empire de Rome et du monde.

L'an quinzième de Tibère, successeur d'Auguste, ce petit garçon avait atteint l'âge d'environ trente ans. Or, en ce temps-là, Tibère étant à Caprée, et vivant comme le raconte l'histoire, les rives du Jourdain retentissaient d'une parole étrange. Un homme extraordinaire, d'une vie austère et prophétique, disait : « Faites pénitence, ou vous périrez <<< tous. Êtes-vous le Christ? » lui demandait-on. - II répondait : « Non; mais je marche devant lui. Je viens << vous dire Préparez ses voies, rendez droits ses sentiers:

1 Peut-il sortir quelque chose de bon de la Galilée? C'était un proverbe juif. Numquid aliquid boni à Galilæâ potest esse. (S. MATTH.)

<< comblez pour lui les vallées de votre bassesse, abaissez « les montagnes de votre orgueil. »

Le Christ, en effet, allait venir; il était déjà dans la foule de ceux que Jean baptisait; il venait même, symbole de l'humanité pénitente et régénérée, se faire baptiser comme les autres; et pendant que Jean-Baptiste versait sur son front et sur ses épaules nues l'eau purificatrice, les cieux s'ouvraient sur sa tête et l'environnaient de gloire.

A quelque temps de là, comme il revenait du désert, Jean, le montrant du doigt à deux de ses disciples, leur dit : Voici l'Agneau de Dieu, voici la Victime qui ôte le péché du monde.

Or, l'un des deux se nommait André, et il était frère du Simon, fils de Jean, de la Galilée : « Nous avons trouvé le « Messie, » dit-il à Simon son frère; et il le mena à Jésus. Jésus l'ayant regardé fixement, intuitus eum, lui dit : « Vous êtes Simon, fils de Jean. Désormais, vous vous apa pellerez PIERRE. »

Quelques jours après, Jésus suivait les bords de la mer de Galilée, lorsqu'il aperçut les deux frères, Simon surnommé Pierre et André, qui jetaient leurs filets dans la il leur dit « Suivez-moi, et je vous ferai PÊCHEURS « D'HOMMES. » Aussitôt ils laissèrent là leurs filets et le suivirent.

mer;

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Telle fut la première vocation apostolique, et les instruments de régénération universelle que choisit d'abord cet homme, encore inconnu au monde dont il allait bientôt être adoré, et qui alors marchait solitaire sur les bords d'un lac, portant dans les profondeurs de sa pensée le salut du genre humain, et regardant avec amour deux pauvres bateliers, occupés, sans se douter de lui ni de ses desseins, à pêcher des poissons.

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