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A Turin, en plein parlement, dans le moment même où des bandes piémontaises, conduites par Zambianchi, envahissent l'État Pontifical, le premier ministre de la couronne, M. de Cavour, ose bien parler des hordes papales, et de ce Lamoricière qui s'en est fait le chef.

C'est le Pape, qui, dépouillé en partie de ses prcvinces par le Piémont et menacé de perdre le reste, c'est lui qui attaque le Piémont ! « Le Pape, dit M. de << Cavour, a recours à tous les moyens pour nous at<<< taquer. >>

Eh bien! je dois le dire; j'aimais mieux la langue de Garibaldi. Le chef révolutionnaire était dans son rôle et dans la franchise impie de sa pensée, quand, pour extirper le chancre de la Papauté, il appelait aux armes les Marches, l'Ombrie, la Campagne romaine, le pays napolitain, etc. Mais la langue de M. de Cavour, comment la qualifier?

Ce n'est pas tout: voici qu'un autre Souverain, en relations régulières avec un pays voisin, voit ses États envahis tout à coup par des milliers de révolutionnaires venus de ce pays. Garibaldi, parti de Gênes, va porter en Sicile le fer et le feu; mais le Piémont n'a rien vu, n'a rien su! L'Europe a entendu M. de Cavour affirmer qu'il ne s'était pas aperçu du départ des flottes armées par des mains piémontaises, soudoyées avec de l'argent piémontais, et sorties des ports et des villes piémontaises, pour

tomber en plein jour, en pleine paix, sur la Sicile, et la soulever au nom du Piémont; et de tous les points du Piémont de nouvelles bandes s'élancent chaque jour, qui vont rejoindre les premières. Et c'est au nom de Victor-Emmanuel que Garibaldi se proclame dictateur; c'est au nom de Victor-Emmanuel, roi d'Italie, que tous ses décrets sont portés! Et le Piémont ignore tout cela! Et la vérité et l'honneur ont encore un nom parmi les hommes ! Et l'Europe croit qu'il y a encore une justice internationale et un droit des gens dans le monde civilisé !

Ajoutons que ce nouveau droit public apparaît en Europe sous les auspices et sous le pavillon trop redouté d'une autre Puissance, étrangère à l'Italie, mais alliée de toutes les révolutions qui troublent aujourd'hui le monde. L'Angleterre ne fait pas moins, elle a plus fait peut-être pour Garibaldi que le Piémont.

Ce sont en effet des navires et des capitaines anglais qui protégent les débarquements de Garibaldi. Les croisières napolitaines capturent deux bâtiments chargés d'armes et de volontaires garibaldiens le Piémont, avec l'appui des agents britanniques, réclame ces bâtiments et les fait rendre.

L'enthousiasme pour Garibaldi éclate en Angleterre jusque dans le Parlement. Lord Brougham proclame que neuf cent quatre-vingt-dix-neuf

Anglais sur mille font des vœux pour lui; et, tandis qu'on lui expédie des ports du Royaume-Uni de l'argent et des armes, et que des officiers quittent l'armée anglaise pour aller lui offrir leur épée, le gouvernement anglais déclare illégales les souscriptions faites par les Catholiques en faveur du Pape. Puis bientôt Palerme se rend à Garibaldi; vingtcinq mille hommes capitulent devant huit mille.

Après la capitulation le sang coule, des femmes même sont massacrées; et c'est alors que M. de Cavour, se lassant enfin de ses dénégations officielles, accueille les représentants de Garibaldi et lui députe les siens; c'est alors aussi qu'il proteste le plus énergiquement contre toute intervention en Sicile. Apparemment, ce qu'il fait, ce que fait l'Angleterre, n'est pas une intervention!

Les Chambres piémontaises lui accordent cent cinquante millions, à la condition qu'il poursuivra « la politique militante qui a conduit le Piémont à « Milan, à Bologne, à Florence; et qui conduira de << Palerme à Naples, de Naples à Venise et à Rome; « à la condition qu'à la couronne piémontaise, qui << a perdu le joyau de Nice et la Savoie, on ajoutera <<< le fleuron de la Sicile. » Et ce n'est pas là non plus une intervention!

Puis, on conseille au roi de Naples de négocier avec le Piémont! Il l'essaye, il proclame une constitution, il éloigne ses régiments fidèles, il députe des

envoyés à Paris, à Londres, à Turin; cependant Garibaldi poursuit son œuvre : Messine tombe après Palerme, et les massacres recommencent: le Dictateur ordonne tranquillement de fusiller les prisonniers désarmés, et cela pour donner «< un salutaire exemple » et préparer la libre émission des suffrages siciliens.

Et voilà les actes qui valent à Garibaldi le titre de libérateur de l'Italie, et l'appui moral de la libre Angleterre !

La révolution, déchaînée, est peut-être aujourd'hui à Naples, demain à Rome... En attendant, elle tient le pied sur la gorge d'un roi, qui, seul, abandonné de tous, lutte vainement et l'Europe regarde!

Et que dire de la nouvelle que nous apprenons à

l'instant d'un armistice conclu entre Garibaldi et les troupes du roi ? Quel homme de bonne foi ne sent pas que ce n'est pas ici la paix, mais la mort? Traité digne en vérité de faire pendant à celui que les Druses viennent de conclure avec les Maronites!

Je ne sais ce qui saisit plus tristement l'âme, ou ce qui se passe en Orient, ou ce qui se passe en Sicile; les massacres de Beyrouth et de Damas, ou les luttes fratricides de Palerme et de Milazzo; la connivence des Turcs ou celle du Piémont.

Pour moi, je vois de tous côtés, et depuis longtemps déjà en Italie, l'accomplissement de cette loi inexorable qui fait succéder au mal de la faute le

mal du châtiment. Je vois une révolution qui étouffe la justice, suivie peut-être bientôt d'une réaction qui étouffera la liberté : la liberté follement et indignement abandonnée par tous à la poursuite d'une chimérique unité! Quand cette noble terre sortirat-elle donc de ce cercle fatal? O généreuses, ô désirables pensées des Balbo, des Pellico et de Pie IX lui-même, où êtes-vous? quand nous serez-vous rendues?

Mais pendant que le Père commun des fidèles souffre avec toute l'Italie, ses enfants sont massacrés en Orient.

Et cependant l'Europe délibère, et, tandis qu'on délibère, l'extermination continue: le sang des chrétiens coule à flots et crie vers nous; mais le cabinet anglais est sourd à ces cris, et à bien d'autres encore! Il faut lire sur tout cela le journal de lord Palmerston, pour avoir une idée de ce qui reste de vérité et de justice dans le cœur et les entrailles de l'égoïsme britannique!

Mais la France, qui a combattu tant de fois pour une idée, fera-t-elle moins pour un devoir? Son gouvernement n'a pas hésité, et, pour provoquer et approuver son initiative, il n'y a eu qu'un cri dans toute la France. Certes, c'est bien là une politique qu'on peut appeler nationale, puisqu'elle a été suivie sous tous les régimes, à toutes les époques, depuis Charles Martel jusqu'à saint Louis, et depuis

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