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près de son but. Sans doute Pierre Damien n'approuvait pas tout ce qui se faisait, peut-être par envie, car les lettres qu'il écrivait dans ces temps en fournissent plus d'une preuve. Il demanda donc au pape et à Hildebrand la permission de se démettre de l'évêché d'Ostie et de tout autre gouvernement; mais Hildebrand s'y opposa et refusa son consentement, quoique le saint Père trouvât convenable de soulager la vieillesse de cet homme laborieux. Cependant, malgré la résistance de Hildebrand, Pierre se démit de son évêché, et le pontife ne put le déterminer à rester plus longtemps près de lui. Il se retira dans la solitude, peut-être parce qu'il se trouvait éclipsé par le génie de Hildebrand *. C'est vers ce temps qu'il

Baron., Annal., ann. 1061.

* M. Voigt me semble attribuer à Pierre Damiani des motifs indignes de lui, et que je n'ai pu trouver dans ses lettres. Préoccupé longtemps par les idées de l'auteur, j'avais de la peine à me rendre compte de cet antagonisme subit de Pierre pour un homme tel que Hildebrand. Une lecture sérieuse de ses lettres et des écrits de Baronius m'ont fait considérer la conduite du célèbre évêque d'Ostie sous un tout autre point de vue. Damien éprouva de la part de Hildebrand une vive résistance, lorsqu'il manifesta le désir de se démettre de son évêché : c'était un homme trop précieux et les temps étaient trop difficiles pour que Hildebrand le vit s'éloigner sans regret. Cette opposition put vexer le vénérable réformateur, et peut-être lui inspirer ce singulier mélange de plaisanterie et de sarcasme qu'on trouve à cette occasion. « Il appelle l'archidiacre saint Satan, dit Baronius : Satan, c'est-à-dire son adversaire; et saint, parce qu'il agissait dans de bonnes intentions, et non pour jui-même. C'était entre eux une sainte querelle, l'un voulant retenir un homme qui soupirait après la retraite, l'autre ne voulant pas être retenu. » Cette interprétation me semble jeter beaucoup de jour sur cette prétendue animosité, le style ampoulé de Pierre a

fit un distique par lequel il donne à entendre que Hildebrand se servait du pape comme d'un instrument, et que lui seul mettait en mouvement tous les ressorts de la hiérarchie ecclésiastique. Voici ses vers :

Papam rite colo, sed Te prostratus adoro;

Tu facis hunc Dominum, Te facit ipse Deum '.

Damien écrivit bientôt de sa solitude, au saint Père et à Hildebrand, des lettres dont une entre autres avec cette adresse: Au très-chéri élu de l'Eglise romaine et au fléau Assur, Hildebrand, de la part de Pierre, etc.

à

Dans cette épître il dit que Cadaloüs cherchait gagner les Romains par la corruption, ce qui l'a porté à se retirer des affaires publiques; puis il parle de Hildebrand avec ce ton singulier: « Peut-être ce tyran flatteur, qui s'est toujours

'Baron., Annal., ann. 1061.

* Les paroles de Pierre sont remarquables, même sous le rapport du style. « Nunc etiam cum Simon ille, alternosus scilicet trapesita malleum et incudem reparat, cum Romanam urbem veluti officinam sibi per monetarios pestiferæ negotiationis usurpat. >>

fait le reste. Il est d'ailleurs à remarquer qu'après avoir arraché le consentement du pontife (extorsit ab invitis), il se tint toujours à portée de répondre à tout appel que celui-ci lui ferait : « Namque in proposito sibi fuisse alibi narrat, ut manens in solitudine, semper cum obedientia juberet, inde recederet, vel occasione synodi celebrandæ, vel suscipiendæ legationis. » Baron., Ann., ann. 1061, p. 285 et 288. (Audley.)

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apitoyé sur moi avec la compassion d'un Néron'; qui m'a aiguillonné en me donnant des soufflets; qui m'a, pour ainsi dire, caressé avec des serres d'aigle, se plaindra de moi en disant : Voyez, il cherche un coin pour se retirer, et, sous prétexte de pénitence et de mortification, il s'efforce de quitter Rome, et cherche la fraîcheur de l'ombre pendant que les autres se précipitent dans le combat. » Mais je dirai à mon saint Satan2 ce que les enfants de Ruben et de Gad répliquèrent à Moïse, leur chef: « Nous marcherons au combat >> ceints et armés devant les fils d'Israël, jusqu'à >> ce que nous les ayons conduits à leur demeure. S'il a renoncé au monde, dit-il, c'est « qu'il ne pou» vait plus vivre avec ceux dont les mœurs s'éloi

2

gnaient si étrangement des siennes3. Les temps >> ne sont plus où la pudeur, la vie austère et la pu» reté ecclésiastique étaient en honneur. Car, » pour déverser le blâme sur moi seul, vous

1

Qui mihi neroniana semper pietate condoluit, qui me colaphisando demulsit.

2 Il lui donne souvent ce titre; il l'appelle encore « hostilis amicus meus dominus archiepiscopus» (epist. 1, 2). Comme un jour Damien se plaignait d'une maladie dont il souffrait, il dit : « Sed hoc uberius non exaggero quia dum gemitum et compassionem ex fraternâ cæterorum sodalium meorum caritate requiro, à summo meorum amicorum domino videlicet archidiacono (Hildebrand) risum extorquentem non ambigo. »

Ses lettres, quoique très-hyperboliques, sont très-instructives pour ces temps.

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D

» voyez qu'aussitôt que je parais auprès de vous, » on n'entend plus que des saillies, des plaisanteries, des bons mots, des propos mondains, des > conversations inutiles, qui nous font prendre plutôt pour des parleurs que pour des prêtres. » Si nous entamons une conversation, elle tombe toujours tôt ou tard sur l'adultère et la débau che, qui ôtent toute la vigueur à notre âme; au > lieu d'un entretien sérieux, on n'entend que des » éclats de rire et des facéties déshonnêtes. Tout >> respect pour le prêtre est perdu, et cette con» duite exemplaire qui doit servir de modèle aux >> autres ne se retrouve plus. Et alors, si, pénétrés > de honte et de crainte, nous voulons nous retirer, nous sommes des êtres inhumains, rusti»ques, des hommes de pierre, nés du tigre de » l'Hircanie. L'auteur ajouta à tout cela la chasse, » la fureur des jeux de hasard, des échecs, toutes > choses qui font du prêtre un bouffon; et en effet, on le prenait pour tel à son regard, à son lan»gage et à ses actions 1. »

Un jour je voyageais avec l'évêque de Flo»rence. Arrivés le soir à une hôtellerie, je me > retirai dans la cellule d'un prêtre, tandis que » l'évêque resta dans la cohue des autres voyageurs.

Voici un passage de la lettre de Pierre à Cadaloüs (Baron., Ann., ann. 1062): «Sacerdotes Dei... in superbiæ se cornibus elevant, et non sacerdotalem, sed regalem, imo tyran>>nicam ferulam arripere super humanum genus anhe» lant. »

» Le lendemain, mon serviteur me rapporta que » l'évêque avait passé toute la soirée au jeu d'é» checs 1. Cette nouvelle me perça le cœur comme » une flèche, et me jeta dans une profonde afflic» tion. Je pris mon temps pour aller trouver cet >> homme et pour lui faire de vifs reproches, di» sant que si un certain individu présentait son >> dos, je le ramènerais à la pénitence par le fouet >> et les coups. « Si j'ai commis une faute, répliqua-t-il, je ne refuserai pas d'en faire pénitence.

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Quoi! repris-je, est-il juste, convient-il à ton » état de passer la soirée à jouer aux échecs, de >> souiller par le jeu et le divertissement la main » qui porte le corps du Seigneur, la langue qui » le rend médiateur entre Dieu et les hommes 1? >> Les saints canons déclarent que les évêques qui » se livrent aux jeux doivent être déposés. » Il » chercha à se justifier en jouant sur des mots. << Autre chose, disait-il, sont les jeux de hasard et >> autre chose les échecs; les premiers sont défendus, tandis que les seconds ne le sont pas. Le décret, il est vrai, ne parle pas des échecs, répli

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>>

quais-je; mais en proscrivant tous les jeux de » hasard, il proscrit également les échecs. » L'a

1 Ces détails, qui ne sont malheureusement que trop vrais, montrent que l'Eglise avait besoin d'un bras de fer; Pierre Damien, désespéré de trouver un remède, se retira dans la solitude. Hildebrand, plus courageux que lui, resta à son poste. (Note du trad.)

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