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cette cherté est-elle un fléau et une calamité? n'est-ce pas pour le malheureux qui ne peut plus acheter ni le pain qui doit le nourrir, ni le vêtement qui doit couvrir sa nudité; et non pour vous qui continuez de vivre sous des lambris dorés, de vous asseoir à une table somptueusement servie, et qui n'avez encore rien rabattu de vos équipages, de vos parures et de vos plus évidentes superfluités? Avouez-le : craindre la détresse au milieu de tant d'opulence et de splendeur, c'est être par trop timide; et d'ailleurs, que vous demande-t-on ? et de quoi vous alarmez-vous ? Retranchez seulement un de ces banquets où vous invitez des amis riches comme vous, et des parasites peut-être, et cent pauvres seront nourris et rassasiés. Que chacun de vous dépose ici aujourd'hui, dans le trésor de la miséricorde, ce qu'il lui en coûte pour une seule partie de plaisir, et ces cinquante orphelines que vous recommande la Providence, seront pourvues abondamment de toutes choses pendant l'année entière. O mon Dieu! comment s'effraie-t-on si aisément des dépenses de la charité, qui sont en effet si modiques; tandis qu'on redoute si peu celles de la vanité qui sont immenses, et qui dévorent chaque jour les plus brillantes fortunes?

Mais non, dira en troisième lieu quelqu'un, nous ne pouvons plus suffire aux bonnes œuvres

dont on nous accable; nous ne somines qu'un petit nombre; la plupart des riches de ce siècle, en abandonnant la piété, ont aussi méconnu le devoir sacré de l'aumône : et que peuvent nos efforts pour soulager tant de misères ? faiblesse! ô pusillanimité! Les bonnes œuvres vous accablent! Dites-moi donc, je vous prie, qui de vous a été jusqu'à présent appauvri par ces libéralités saintes? Elles vous accablent! et moi je vous dis que ce sont elles qui soutiennent vos fortunes, qui protégent vos familles, qui conservent l'état, qui nous attirent tant de faveurs inespérées du Ciel. Vous êtes seuls à exercer la miséricorde! Oh! si cela est, mes Frères, que votre sort est digne d'envie! Vous êtes donc les seuls objets de l'amour de votre Dieu, les seuls héritiers de son royaume, les seuls qui empêchent que sa colère n'éclate et que le monde ne périsse; car lorsque la charité sera universellement refroidie, la fin des temps sera venue et le monde sera détruit. Vous exercez seuls la miséricorde! Avec quelle magnificence la devez-vous donc exercer, pour suppléer au vide que laissent tant de riches impitoyables, et combler, s'il était possible, l'abîme de tant de besoins! Mais quoi ! vous reprochons-nous donc d'être avares dans vos dons? Non, mes Frères, ce serait nous contredire nous-mêmes. Nous le disions en com

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mençant ces assemblées où la charité préside sont fréquentes, et toutes attestent votre libéralité; nous l'avouons et nous aimons à le publier. Mais mes chers Auditeurs, qu'il nous soit permis de le dire si les sommes sont grandes, à quoi se borne le sacrifice de chacun de vous? est-il grand aussi ? Retranchez de ces pieuses contributions, la part vraiment royale que daignent fournir le monarque et chaque membre de cette très chrétienne et très-auguste famille; comptez ensuite votre nombre, et supputez. A quoi tout se réduit-il ? Je ne presserai pas ceci davantage; mais je demanderai aux plus opulens et aux plus généreux : qu'est-ce qu'une pièce d'or, comparée à vos immenses révenus? qu'est-ce qu'une pièce d'or dans vos dépenses de l'année où d'un mois seulement ? Ah! humilions-nous, et craignons d'avoir acquis à trop peu de frais la réputation de bienfaiteurs magnifiques des pauvres.

Qu'objecterez-vous donc enfin ? Que les pauvres ne sont pas toujours assez dignes de l'intérêt que nous voulons inspirer en leur faveur ? qu'il en est parmi eux de trompeurs et de dissolus, qui consument dans la débauche les dons qu'ils surprennent à la confiante charité ?

Abrégeons cette dernière discussion, mes Frères, car il est temps de finir. Je pourrais répoudre d'abord, que, dans le doute, il serait

affreux de refuser à un infortuné le léger secours qu'il sollicite, parce qu'il serait possible qu'il en abusât. Cet homme vêtu de lambeaux, qui implore si humblement votre compassion, est peut-être un imposteur, je l'avoue; mais c'est peut-être aussi un malheureux père de famille, que la faim et la douleur font sortir pour la première fois du triste réduit où il vient de laisser une épouse expirante et des enfans éplorés; il s'est armé de tout son courage, pour mendier le pain que toute sa famille lui demande par des cris déchirans; un premier refus va flétrir son âme, il ira s'envelopper dans son désespoir, et mourir. Serez-vous innocent devant Dieu de son malheur? Je pourrais répondre encore, que si quelquefois un misérable abuse de vos bienfaits, vous avez bien plus souvent abusé de ceux de la Providence, sans qu'elle se lasse pour cela de vous les prodiguer; et qu'il n'est pas juste que vous soyez plus sévère à l'égard de vos semblables, que Dieu même ne l'est en

vers vous.

Mais, laissant toutes ces réponses, ne me suffit-il pas de vous dire, qu'ici du moins vous n'avez pas de semblable surprise à craindre ; que ces tendres orphelines sont des enfans bénis du Ciel, séparés, presque dès le berceau, de la contagion du siècle, nourris du lait de la piété, élevés dans l'innocence et dans l'habitude d'un

honnête travail, formés avec soin par des maîtresses vertueuses, pour être un jour des épouses et des mères chrétiennes. Déjà, par leur industrie, elles commencent à acquitter une partie de leur dette envers leurs bienfaiteurs et envers la société. Que de titres vous les recommandent! elles sont les enfans de la Providence, les nourrissons de la charité, l'objet des soins assidus du vénérable pasteur de cette paroisse royale; le dirai-je ? mais ne le voyez-vous pas assez vous-même ? l'objet de l'intérêt spécial des augustes princesses qui honorent cette assemblée de leur présence. La fille des rois n'a pas dédaigné de visiter les filles des pauvres dans leur modeste asile, et d'applaudir elle-même à leurs humbles travaux. Une auguste enfant, hélas! orpheline elle-même (1), devenue, dans l'âge où l'on commence à peine à se connaître, la protectrice de tant d'orphelines, fait déjà l'apprentissage de cette bienfaisance royale dont elle a tant de modèles dans son illustre race, et vous invite à imiter de si beaux exemples.

O Dieu qui chérissez le sang de saint Louis, voyez la postérité de ce saint roi, donnant l'exemple de toutes les vertus, animant toutes les bonnes œuvres.

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(1) Mademoiselle, soeur du duc de Bordeaux.

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