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IIIe siècle de notre ère : Les tremblements de terre s'expliqueraient par les assemblées des månes réunis sous terre. On a peine à croire à une telle aberration de la part du célèbre philosophe, et l'on peut supposer qu'il s'agit là d'une légende née pendant l'intervalle de plus de six siècles qui sépare Pythagore de cet écrivain, contemporain d'Alexandre Sévère. En tout cas, si l'attribution à Pythagore est fondée, il est à penser que le philosophe aura déduit cette interprétation des croyances des Egyptiens, qui donnaient l'importance que l'on sait aux faits et gestes du Double. A la vérité, on ignore si les Egyptiens attribuaient aux mânes les tremblements de terre. Il nous semble même probable que non, car leur pays était à peu près indemne de ces phénomènes. En tout cas, ils s'en préoccupaient si peu qu'ils ne nous en ont laissé aucun document.

Aristote (1) et Sénèque (2) ont exposé, mais celui-ci plus clairement que celui-là, les théories sismiques des philosophes antérieurs au Stagirite. Nous n'en ferons qu'un résumé succinct, leur intérêt historique étant restreint du fait qu'elles n'ont guère en d'influence sur l'évolution des théories ultérieures. D'ailleurs nous ne les connaissons que de seconde main.

C'est d'abord Thalès de Milet (639 à 519). Il s'expliquait les tremblements de terre par la mobilité de la planète qu'il supposait voguer sur la Grande Mer, ou Océan, hypothèse cosmogonique vraisemblablement venue de l'Inde védique ou brahmanique. Elle se sera transmise, par la Perse, au bassin occidental de la Méditerranée, tout en se conservant dans les écrits. bouddhistes. Thalès étayait sa théorie, nous dit Sénèque, sur ce fait d'observation que les grands tremblements

(1) Météorologie. Liv. II. Chap. VII. (2) Questions naturelles. Liv. VI.

de terre s'accompagnent souvent d'éjections d'eaux venues du sous-sol par les craterlets suivant l'expression employée par notre terminologie moderne. Le philosophe romain objecte avec raison que ce phénomène accessoire n'a pas une ampleur en proportion avec la cause qu'il met en jeu; qu'il n'accompagne d'ailleurs pas tous les tremblements de terre; et qu'enfin les commotions sismiques devraient se faire sentir par toute la Terre, puisqu'elles agiteraient en bloc toute la planète.

Anaximène de Milet vivait au vr° siècle, done peu après Thalès. Il aurait prédit avec succès un tremblement de terre aux Lacédémoniens, mais on ignore comment. Avec une réelle compréhension du sujet, il trouva, dans la Terre elle-même, la cause de ses commotions, idée logique s'il en fut, mais qui mit des siècles à faire son chemin, puisque, jusqu'au seuil de nos temps modernes, nous verrons encore prédominer dans les théories l'influence de causes externes, cosmiques et météorologiques. Dans des vides souterrains, tombent, selon Anaximène, les débris de la planète, débris dissous par l'eau, rongés par le feu, emportés par un souffle violent, ou délabrés par de vagues causes de destruction. Les voûtes de ces cavernes s'écroulent et font trembler la Terre. Anaximène est donc le précurseur d'une théorie moderne qui, après avoir joui d'une vogue remarquable, n'a plus guère de partisans, quoiqu'elle soit soutenue encore par un éminent sismologue, Agamennone. Nous en reparlerons.

Sur la théorie sismique d'Anaxagore de Clazomène (milieu du vre siècle), nous possédons plusieurs renseignements. D'après Aristote, il invoquait l'action de l'éther, entité physique des anciens, dont l'essence nous est peu compréhensible: c'est une théorie obscure, que le philosophe de Stagire ne rend d'ailleurs pas plus claire

en la réfutant. Mais selon Plutarque (1), Anaxagore attribuait les tremblements de terre « à ce que l'air, s'étant introduit par dessous (l'écorce terrestre), vient se heurter à la surface intérieure de la terre, surface dense qui ne saurait lui livrer passage; alors l'air s'agite et met en mouvement la terre où il est contenu ». Cette conception ne diffère pas essentiellement, comme nous le verrons, de la théorie aristotélicienne. Sénèque, au contraire, range Anaxagore parmi les philosophes qui, tout en se séparant sur le mode d'action, sont d'accord pour attribuer les tremblements de terre au feu. Nous aurons à revenir là-dessus à propos des théories électriques.

Démocrite d'Abdère, mort au cours de la 94° olympiade (404 à 401), modifia un peu l'opinion d'Anaximène en invoquant le choc des eaux souterraines contre les parois de leurs conduits, et Sénèque acceptera aussi cette manière de voir.

Puis vint Aristote dont la théorie si célèbre a eu trop de longévité pour ne pas mériter d'être examinée à part.

Ces quelques renseignements sont amplement suffisants pour des théories peu connues, vite tombées dans l'oubli, sauf celle d'Anaximène. Elles n'intéressent plus guère que les érudits.

Après Aristote, comme nous l'apprend Diogène Laerce dans ses Vies des philosophes, Zénon de Citium (362 à 264) et Épicure (343 à 271) ont transmis la théorie du Maître à leurs disciples des écoles stoïcienne et épicurienne.

III. LA THÉORIE D'ARISTOTE ET SES ORIGINES

La théorie aristotélicienne des tremblements de terre a régné sans conteste jusques et y compris une partie

(1) Opinions des Philosophes. Liv. III. Chap IX. Les tremblements de terre.

du XVIIIe siècle, époque à laquelle on la vit disparaître sans avoir été pour ainsi dire attaquée directement ni condamnée explicitement, tant il paraissait téméraire de toucher à la parole du Maître. Elle s'éteignit d'ellemême tout naturellement, dès que s'établirent en maitresses les méthodes modernes d'investigation scientifique basées uniquement sur l'observation des faits et pour lesquelles les hypothèses ne sont que des instruments de recherche. Cette extraordinaire survivance de vingt et un siècles est un fait à peu près unique dans l'histoire des sciences. L'on ne saurait trop s'en étonner aujourd'hui, tant cette théorie prêtait le flanc à des objections de simple bon sens, ou dictées par les observations les plus rudimentaires qu'il n'y a pas lieu d'étayer sur des faits d'observation qu'auraient ignorés les savants de l'antiquité.

Aristote (384 à 322) a développé sa théorie des tremblements de terre dans le chapitre VIII du livre II de sa Météorologie. Il en faisait donc un phénomène venu d'en haut, de l'atmosphère, en un mot, d'une origine extérieure à l'écorce terrestre. Cette idée a priori, très contraire au bon sens qui semblerait devoir faire chercher les causes des mouvements terrestres dans le milieu même où ils se produisent, la Terre, a eu une répercussion considérable sur toute l'histoire de la sismologie. Ainsi, quand on s'est mis, au XVIIIe siècle, à recueillir systématiquement les observations de tremblements de terre, ce fut surtout dans les recueils météorologiques qu'on se mit à les insérer, à titre, il est vrai, de phénomènes accessoires. Mais, conséquence plus grave encore de la théorie d'Aristote, on s'est évertué depuis longtemps à mettre les séismes en relation de cause à effet avec les phénomènes météorologiques les plus divers et ce fut là un impedimentum qui a longtemps retardé la marche de la science.

Le vent et le tonnerre sont les deux seuls phéno

mènes atmosphériques donnant l'impression, quand ils atteignent leurs paroxysmes, que le sol est matėriellement ébranlé. De là, pour le noter en passant, cette confusion si fréquente dans les documents entre les tempêtes et les séismes. Si une coincidence des deux phénomènes n'est point à rejeter a priori, elle est du moins assez rare pour qu'un sismologue prudent, à la lecture d'une relation de ce genre, doive mettre en doute le mouvement du sol et ne l'inscrire dans un catalogue que sur des preuves bien établies. Il doit s'assurer, par exemple, que le séisme a été ressenti hors de l'aire affectée par la tempête.

Réservant pour plus tard ce qui concerne le tonnerre, arrêtons-nous aux vents fauteurs des tremblements de terre. Aristote ne pouvait éluder ce fait que les mouvements sismiques ont bien quelque rapport avec l'écorce terrestre, puisqu'ils la fendent sur de grandes étendues et perturbent même son relief de façon notable. Il lui fallut donc logiquement faire pénétrer les vents dans les espaces souterrains, idée assez naturelle chez un philosophe grec, dont le pays, de topographie karstique, est percé de nombreux catavrothes, et présente de fréquentes disparitions de rivières avec leurs résurgences. Mais on ne peut lui pardonner de citer de prétendus faits d'observation à l'appui de la circulation souterraine des vents. Il donne en exemple une éruption de Hiéra, une des iles Eoliennes : « La terre s'y souleva, en effet, dans un certain lieu, et s'éleva avec bruit, comme la masse d'une colline; et cette masse étant venue à se briser, il en sortit beaucoup de vent; elle lança des étincelles et ensevelit sous cette cendre toute la ville des Lipariens qui n'est pas éloignée, se faisant sentir dans quelques-unes des villes d'Italie ». Voir dans l'édification d'un cône volcanique, dans la fumée et dans les matières incandescentes et les cendres qui en sont rejetées, le vent expulsé des abîmes

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