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lent contre les Génois, regardés comme des ennemis publics. Les Génois, à leur tour, les considérèrent toujours comme des colons, et ne songèrent guère à les civiliser.

En 1729 les insurgés ayant pris pour chefs André Cecaldi, gentilhomme de l'île, et Louis Giafferi, patriote intrépide, repoussèrent les Génois, qui eurent recours à l'Autriche. L'Empereur envoya contre les révoltés huit mille soldats commandés par le général Wactemdock, et six mille quatre cents sous les ordres du prince de Wurtenberg: mais les Corses en tuèrent mille dans un seul engagement. On les engagea à se confier à la clémence autrichienne; mais à peine eurent-ils déposé les armes, sur la promesse de conditions avantageuses, que l'Autriche livra plusieurs de leurs chefs aux Génois : elle publia une nouvelle amnistie, et donna au gouvernement une forme plus libérale, mais tout à fait illusoire, en ce qu'elle était sans garanties. Les Corses, résolus désormais à conquérir leur indépendance, relevèrent la téte, et proclamèrent la république, sous la protection de la Vierge immaculée : ils élurent Giafferi général et primat, conjointement avec Paoli. Les Génois prirent à leur solde des Suisses et des Grisons, et allèrent jusqu'à faire grâce aux malfaiteurs et aux bandits, pour les pousser à prendre les armes contre leurs compatriotes; mais ce fut en vain.

lei se présente un épisode bizarre: un gentilhomme westphalien, Théodore, baron de Neuhoff, qui menait une vie d'aventures, courut en Corse pour en chercher de nouvelles. Il avait quarante ans, une belle taille, des manières imposantes. Après s'être mis au service des Stuarts lors de leur tentative de débarquement en Angleterre, et avoir secondé Alberoni dans ses intrigues, il avait été employé par Law dans sa banque, où il vit les trésors s'accumuler et s'évanouir dans ses mains. Se trouvant à Florence en qualité de résident pour l'empereur Charles VI, il noua des intelligences avec des Corses qu'il avait connus à Gênes, lorsqu'il s'y trouvait en prison pour dettes. Après avoir demandé en vain des subsides pour la Corse à différentes cours, il obtint de la régence de Tunis un vaisseau, quatre mille fusils et mille sequins, qui, ajoutés à ses brillantes promesses, déterminèrent les Corses à lui confier la direction

de leurs affaires. S'intitulant donc « Théodore Ier, roi de Corse par la grâce de la très-sainte Trinité et par l'élection des trèsglorieux libérateurs et pères de la patrie, >> il battit monnaie, institua l'ordre de la Rédemption, et fit à Gênes une guerre hardie. Cependant, lorsqu'il eut dissipé le peu d'argent qu'il possédait, et que ses illusions se furent évanouies, il prit le parti d'aller chercher des secours au dehors. Arrêté pour dettes en Hollande, il détermina, par la promesse d'avantages commerciaux, une compagnie de négociants juifs à payer sa rançon et à lui fournir cinq millions, avec lesquels il équipa une flottille et retourna en Corse. Les Génois se voyant au moment de perdre cette île, traitèrent avec la France, qui, craignant que l'Angleterre ou l'Espagne ne vinssent à s'en emparer, s'entendit avec Vienne, et expédia des troupes pour rétablir la paix. Le roi Théodore s'enfuit, et alla mourir dans la misère à Londres, où l'on peut lire sur son tombeau : que la fortune lui donna un royaume, et lui refusa un morceau de pain.

Pascal Paoli, proclamé chef en 1755, après cet aventurier, conduisit heureusement la guerre. Déjà des bâtiments corses inquiétaient le commerce des Génois. La république signa alors avec la France le traité de Compiègne, sous la condition de 40 millions pour prix de la cession.

Ce honteux marché irrita les Corses, qui, animés par Paoli. résolurent de montrer qu'ils étaient des hommes, et non un troupeau de bétail, dont ses maîtres pussent trafiquer à leur gré. La première campagne coûta à la France plusieurs milliers de soldats et 30 millions; car l'héroïsme et la discipline y combattirent avec une connaissance parfaite des localités. Le duc de Choiseul, alors ministre, s'opiniâtrant à réussir, redoubla d'efforts; et les insulaires, trompés dans l'espoir que les Anglais leur avaient fait concevoir, finirent par se soumettre. Paoli chercha un refuge en Angleterre; ceux qui se refusèrent à accepter le joug se jetèrent dans les montagnes, où ils se livrèrent au brigandage, et pendant vingt ans enlevèrent à cette possession toute sécurité.

La France paya de beaucoup de sang et de 60 millions l'acquisition d'une île dont les produits sont nuls, mais qui est

d'une très grande importance pour la sûreté des côtes de Provence et du commerce de la Méditerranée.

Tel était l'état des affaires au dehors: voyons quelle était leur situation à l'intérieur.

Louis XIV avait promulgué cinquante et une lois contre les protestants, avant de révoquer l'édit de Nantes. Lorsqu'il fut mort, beaucoup d'entre eux rentrèrent, et demandèrent à reprendre leurs assemblées. Un édit renouvela les rigueurs dont ils étaient l'objet : tout autre culte que le culte catholique fut interdit, sous peine des galères pour les hommes, de l'emprisonnement perpétuel pour les femmes, et de la confiscation pour tous. Beaucoup de familles émigrèrent, surtout en Suisse. On s'alarma des effets désastreux de cette loi, et on la laissa tomber dans l'oubli; mais elle attira sur le molinisme de la cour, et sur le jansénisme des parlements, la haine et le mépris. Plus tard on tenta de la remettre en vigueur, alors que l'incrédulité notoire de la cour la rendait encore moins tolérable. Deux procès alors firent grand bruit : Un certain Jean Fabre trouva moyen de rester sept ans aux galères en place de son père, condamné à subir cette peine pour avoir assisté aux prêches. Jean Calas, accusé d'avoir tué son fils parce qu'il inclinait au catholicisme, fut condamné à mort, sur des preuves absurdes, par le parlement de Toulouse. Voltaire se fit l'interprète de l'indignation publique; l'arrêt fut cassé, mais trois ans après son exécution.

Louis XV était un des hommes les plus beaux et les plus heureusement doués de son royaume. Mais avec un jugement droit, un esprit sagace, il avait un caractère timide: c'était le fruit de son enfance maladive et de son éducation. Son intelligence avait été peu cultivée, et il se trouvait mal à l'aise avec les gens de mérite, dans un temps où l'instruction commençait à se répandre; aussi aimait-il mieux s'entourer de jeunes gens. Or la jeunesse de la cour avait été pervertie par les exemples de la Régence; et tout ce que le cardinal de Fleury put obtenir, ce fut qu'on cessât du moins d'afficher le libertinage. Entraîné dès sa première jeunesse par la passion de la chasse, Louis XV y passait ses journées, et les terminait par des soupers d'une etrange profusion.

Une intrigue lui donna pour femme Marie Leczinska, fille du roi de Pologne détrôné, qui se consolait dans l'infortune avec l'aide de la philosophie. Marie, qui avait grandi au milieu des vertus domestiques, était un ange de bonté; mais elle inspira peu d'amour à son mari. Bien que par sa condescendance, sa douceur, sa vertu et sa fécondité qui lui donnait un enfant chaque année, elle conservât l'estime et les égards du roi, elle expia par vingt-deux années de peines l'honneur de porter une couronne. Les courtisans mirent en œuvre les séductions les plus adroites pour arracher Louis XV à ses devoirs conjugaux. Une fois qu'il eut goûté à la coupe, il s'y enivra. Ses liaisons successives et presque contemporaines avec cinq sœurs de la maison de Nesle scandalisèrent un monde corrompu, et firent mépriser celui qu'on avait déjà cessé d'estimer.

Louis XV, à la mort du cardinal (1743), ne voulut plus de premier ministre; la duchesse de Châteauroux, alors maîtresse en titre, devint l'arbitre des affaires. Elle sut pourtant inspirer à l'indolent Louis XV un certain désir de gloire, et elle le poussa à se mettre à la tête de l'armée de Flandre. Mais si le peuple applaudit à cette résolution guerrière du roi, il fut scandalisé de voir au camp cette maîtresse toute-puissante, qui se vantait de faire de Louis XV ce qu'Isabelle faisait de saint Louis. Dès le début de la campagne, le roi tombe maJade; les prêtres lui reprochent le scandale de ce double adultère, et l'étrange spectacle que donnerait au monde un petitfils de saint Louis, s'il mourait dans les bras d'une courtisane. La duchesse est congédiée, et la reine vole au chevet de son époux repentant. Louis guérit; et le peuple, qui le croyait revenu de ses erreurs, le surnomma le Bien-Aimé.

Mais Louis XV ne changea point de genre de vie; il changea seulement de maîtresse. La duchesse mourut, et fut bientôt remplacée par la marquise de Pompadour, dont l'empire survécut à l'amour. Sans être capable de combinaisons fortes et puissantes, elle possédait un art qui était de tous les moments. Elle arrachait Louis à ses deux maux les plus graves, l'ennui et les affaires; elle voulait tout connaître, pour avoir mille sujets de raconter, de rire, de louer ou de bafouer auteurs, ma

gistrats, diplomates. Éprise des arts et de tout ce qui pouvait charmer ou distraire le roi, elle s'entoura de gens de mérite, dévoués à ses intérêts. Elle réunit une bibliothèque choisie, augmenta la galerie du Louvre, embellit Versailles dans le goût auquel elle a donné son nom; et elle posa elle-même plus d'une fois, comme modèle, devant les artistes qui ornaient la demeure royale de tableaux et de statues. Elle disposait du trésor, moyennant de simples billets payables sur la seule signature du roi, sans avoir à rendre compte de l'emploi1. Elle en usait tantôt pour favoriser le mérite, plus souvent pour soutenir des talents médiocres, pour secourir les pauvres et les orphelins; car elle affectait la philosophie et la philanthropie. Lors des couches de la Dauphine, elle suggéra au roi de doter six cents jeunes filles, au lieu de dépenser cet argent en fêtes. Elle en mariait elle-même un grand nombre sur ses terres; et les courtisans de marier à l'envi, par imitation.

Lorsque la marquise sentit que le prestige de ses charmes allait s'évanouir, elle s'arrangea pour procurer au roi, dont elle aimait le pouvoir et non la personne, des amours passagères, en prenant soin de diriger elle-même sa lubricité. Le parc aux Cerfs, enceinte décorée d'habitations élégantes, fut peuplé de jeunes filles destinées aux plaisirs du maître. Pour l'approvisionner, on portait le trouble dans les familles les plus vertueuses; on préparait pendant des années entières des séductions à l'innocence et à la fidélité; on y éleva jusqu'à des petites filles, pour y être livrées, dans la fleur de l'âge, à l'impudicité. Quelques-unes eurent le malheur de se prendre de passion pour ce libertin. Toutes sortaient de ce sérail enrichies et dépravées.

Ce harem d'un roi très-chrétien, qui sut être scandaleux même après les soupers du Régent, coûta plus de 100 millions à la France. Les courtisans, suivant de loin ses traces, se livraient à l'envi aux déportements du vice et à un jeu effréné.

'Sous Louis XIV, les acquits de comptant montèrent à 10 millions par an; sous Louis XV, ils s'élevèrent dans une seule année jusqu'à 180 millions.

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