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milliers d'hommes; Christophe brûla le pays, pour affamer les Français; puis survint la fièvre jaune, qui moissonna quinze mille hommes en deux mois, et Leclerc lui-même. Les hôpitaux ne pouvaient plus y suffire. On ne se fiait plus à traiter; l'incendie était partout; et les Anglais fournissaient des armes aux noirs, dont ils excitaient la fureur. Rochambeau, appelé à remplacer Leclerc, fit jeter à la mer un grand nombre de nègres, et quelques mulâtres qui s'étaient réfugiés sur les vaisseaux. Il s'attira par là l'inimitié des hommes de couleur, et se trouva réduit à se livrer prisonnier aux Anglais. L'expédition fut entièrement perdue'.

Le 29 novembre 1803, l'indépendance d'Haïti fut proclamée par les vainqueurs, qui « jurèrent à l'univers de mourir plutôt que de retomber sous la domination de la France. » Le nègre Dessalines, général de l'armée libératrice, se fit proclamer empereur sous le nom de Jacques Ier (8 octobre 1804), et domina sur l'île entière, à l'exception d'une poignée de braves qui se soutint jusqu'en 1810. Guerrier intrépide, mais étranger à la politique, il savait vaincre et non organiser. Péthion et Gerin l'ayant fait assassiner (17 octobre 1806), Christophe fut nommé chef du gouvernement, avec une constitution; mais il la repoussa, se mit en guerre civile avec Péthion, et se fit roi. Plusieurs années après, il se tua. Boyer, proclamé président unique, réunit sous sa domination l'île tout entière, dont l'indépendance fut enfin reconnue par la France, moyennant l'indemnité de cent cinquante millions.

Cette colonie perdue, la Louisiane restait à la France. Bonaparte, n'espérant pas pouvoir la défendre en cas d'une nouvelle guerre avec l'Angleterre, songea à la céder. Non-seulement l'équité, mais une promesse formelle, aurait dû le déterminer à la rendre à l'Espagne, dont il l'avait obtenue: il préféra les Etats-Unis, qui furent charmés d'acquérir, pour soixante mil

'J'ai à me reprocher l'entreprise contre cette colonie. C'était une erreur grave que de vouloir la soumettre par la force je devais me contenter de la gouverner par le moyen de Toussaint. » Mémorial de Sainte-Hélène.

lions, un pays qui doublait leur territoire et leur puissance. C'était un acte arbitraire de la part du premier consul, qui, au moment où il rêvait des colonies dans l'Inde, sacrifiait celles d'Amérique, et stipulait des dons pour lui et sa famille dans le traité de cession.

SUISSE UNITAIRE. CAMP DE BOULOGNE.

NAPOLÉON EMPEREUR.

Dans un pays fatigué de luttes et ébloui de sa gloire, il ne restait plus à Bonaparte que peu d'obstacles à écarter pour marcher droit à la dictature et reconstituer la monarchie. Déjà il s'était entouré d'une garde consulaire, d'officiers du palais tant civils que militaires, de damnes pour le cortège de Joséphine. Ses innovations' n'avaient rencontré aucune opposition dans le sénat, devenu une espèce de pouvoir constituant, et dont il augmenta de plus en plus l'autorité, afin de lui réserver la faculté d'interpréter la constitution, de la compléter, d'en faciliter la marche à l'aide de sénatus-consultes. Il agissait ainsi, dans la certitude où il était de pouvoir diriger à son gré cè patriciat. En même temps il restreignait les attributions du tribunat, qui, ayant pénétré ses projets, le contrecarra, surtout

1 La constitution consulaire, qui avait été empruntée en grande partie au projet de Sieyes, fut remaniée en juillet 1802. On substitua, aux listes de notabilité, des colléges électoraux à vie; le sénat reçut de nouvelles attributions, le pouvoir d'interpréter, de modifier et de compléter la constitution par des sénatus-consultes, de dissoudre le tribunat et le corps législatif, de casser les jugements des tribunaux lors qu'ils seraient attentatoires à la sûreté de l'État.

« C'était toujours, dit M. Thiers, la constitution aristocratique de M. Sieyes, apte à tourner à l'aristocratie ou au despotisme, suivant la main qui la dirigealt; tournant en ce moment au pouvoir absolu sous la main du général Bonaparte, mais pouvant tourner après sa mort à une franche aristocratie, si, avant de mourir, il ne précipitait pas le tout dans un abîme. » (AM. R.)

à propos du code. Il restreignit le nombre de ses membres, et le réduisit uniquement à la faculté de critiquer les mesures qui lui étaient soumises, et encore à huis clos. Il institua un conseil privé, pour le consulter quant aux traités avec les puissances, sûr de ne rencontrer là encore aucune opposition.

Déjà toute forme d'antagonisme et d'équilibre lui déplaisait : il n'admettait que le commandement et l'obéissance; il multipliait les bonnes institutions, mais sans liberté; il écartait ceux qui l'avaient aidé à s'élever. Une police sévère châtiait ceux qui ne voulaient pas se laisser gagner par les honneurs. Il disposa peu à peu les choses de manière à se faire offrir une grande récompense par les différents corps de l'État. Le sénat crut atteindre ce but, en offrant de proroger de dix ans ses fonctions de premier consul; mais il voulut recourir à la source de tout droit, c'est-à-dire au peuple; et il fit ouvrir des listes pour que chacun s'inscrivit pour ou contre sur la question de savoir s'il convenait de lui conférer le consulat à vie. La réponse (3 août 1802) ne pouvait être que favorable à son ambition, et elle fut bientôt suivie du droit de désigner son successeur. L'épée de Bonaparte allait ainsi prenant peu à peu la forme de sceptre.

après

Il avait commencé son agrandissement par l'armée l'avoir conduite à la victoire sans tenir compte des ordres du gouvernement, il s'en était servi pour abattre le gouvernement lui-même. Les officiers parvenus dont il s'était entouré comme aides de camp étaient un noyau de cour dont le dévouement lui était acquis. Mais les sévères et pauvres soldats de l'armée du Rhin contrastaient avec les brillants militaires revenus d'Italie l'esprit républicain était alimenté par l'envie chez les généraux; et comme la paix les empêchait de grandir, ils s'étaient mis à faire de l'opposition à un camarade qui voulait devenir leur maître. Moreau, dont la jalousie ne pliait qu'à regret, portait surtout ombrage à Bonaparte, dont il était le seul rival redoutable et considéré.

Le premier consul ne pouvait guère aimer la paix; elle n'était pas davantage du goût des Anglais, chez qui l'opposition se récriait contre un traité où toute la gloire était pour la France. Leurs journaux ne cessaient de lancer des traits acérés contre

Bonaparte et sa cour de plébéiens chamarrés. Il s'en dépitait, et demandait qu'on réprimât leurs attaques; mais on lui répondait que la constitution ne le permettait pas. En Angleterre se trouvaient aussi les exilés royalistes ou républicains, occupés de complots, en même temps que Bonaparte envoyait de l'autre côté de la Manche, et principalement en Irlande, des instigateurs secrets. Ni lui ni les Anglais, d'ailleurs, n'observaient loyalement la paix Pitt et toutes les puissances s'inquiétaient de le voir envahir en pleine paix la diplomatie des nations. Il avait fait abolir en Hollande les états généraux, mis une garnison dans le pays, et institué un conseil d'État qui devait concentrer la dictature morale.

Nous avons vu, dès le commencement de la révolution française, les bailliages insurgés en Suisse contre les cantons domi nants, et les bourgeois opprimés, contre les oligarques. Quand la coalition triompha en 1799, elle amena des châtiments, des déportations; mais à peine l'oppression étrangère se fit-elle moins sentir, qu'il y eut amnistie. L'Autriche, de son côté, ne s'obstina pas à rétablir les gouvernements primitifs, attendu qu'elle n'y avait point d'intérêt, et elle donna la cocarde allemande aux émigrés suisses admis dans ses troupes.

Quand l'aristocratie comprit qu'elle n'avait plus à compter sur les secours étrangers, elle se mit à intriguer au dedans, et le 18 brumaire raviva ses espérances. Le Directoire ayant été dissous (7 janvier 1801), fut remplacé par une commission exécutive de sept membres; mais la tranquillité ne revint pas pour cela. Lors de la paix de Lunéville (1802), l'indépendance de la Suisse fut ratifiée, ainsi que son droit à se donner le gouvernement qu'elle voudrait. Berne avait dû émanciper l'Argovie et le pays de Vaud, qui devinrent de nouveaux cantons. Il s'en forma un autre des bailliages italiens: Saint-Gall, le Tockenbourg et le Rheinthal se réunirent à Appenzell; et les bailliages de Sargans, Werdenberg, Guster, Uznach, Rapperschwill, an canton de Glaris. Cet accroissement était un piége, à l'aide duquel on espérait que la constitution démocratique ne pourrait

se soutenir.

Bien des gens demandaient, en Suisse, à sortir de la nullité

ordinaire aux États confédérés, et d'une neutralité qui n'aboutissait qu'à verser leur sang pour tout le monde; ils aspiraient, en conséquence, à cette centralisation qu'ils voyaient établie en France. En opposition à ces unitaires, d'autres voulaient la constitution fédérale, laissant chaque État dans un isolement complet. Pour arriver à ce but, une alliance se forma entre les trois cantons montagnards, Berne, Zurich et Bâle, ce que l'on appela le parti des oligarques. L'appui que chacun des deux partis cherchait au dehors envenimait cette question intérieure. Bien que Bonaparte n'osât pas s'y constituer législateur comme dans la Cisalpine, il prépara un projet de constitution d'après le principe unitaire, avec rachat des rétributions féodales. Une réaction armée surgit alors. Reding, homme résolu et bon soldat, plutôt qu'homme d'affaires, ayant été fait landamman, chercha à ramener l'ancien ordre de choses. Bonaparte considéra le fait comme une contre-révolution, et travailla à le renverser. Alors les constitutions se succédèrent; et à peine les troupes françaises eurent-elles quitté le pays, que la révolte éclata (octobre). Bonaparte prit le parti d'intervenir par la force il désarma les cantons, arrêta les chefs, convoqua à Paris une réunion consultative, et proposa un acte de médiation qui avait pour bases l'égalité entre les dix-neuf cantons, représentés par une diète où leurs députés auraient une ou deux voix, selon la population; une renonciation formelle de la part des familles patriciennes à leurs priviléges; une armée commune, une monnaie semblable, une douane unique, le système fédératif, et l'alliance défensive avec la France, qui s'attribuait le Valais, afin de s'assurer la route du Simplon.

Dans ce système, la démocratie resta aux petits cantons, et l'aristocratie aux grands; ces deux éléments se balançaient dans les nouveaux, et aucun d'eux ne fut assujetti à un autre. Ce remaniement enlevait toute influence à l'Autriche, qui, chaque jour, en perdait aussi en Allemagne.

C'est dans cet état que la paix de Lunéville avait laissé ces questions. Une guerre suscitée par l'empereur avait réduit l'Allemagne aux plus dures extrémités, et entraîné la perte de ses possessions situées sur la rive gauche du Rhin : c'était néan

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