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n'eussent pour but que de créer une principauté pour ses neveux; il les favorisa à un degré dont on n'avait pas vu d'exemple depuis les papes du quinzième siècle. Il s'entendait peu à la politique des cabinets. Nous ne devons pas toutefois passer sous silence qu'au milieu de l'orage qui menaçait alors, quelques cardinaux lui suggérèrent un projet digne des temps de la grandeur pontificale: il s'agissait de réunir l'Italie en une confédération, sous la suprématie de Rome; mais la ligue italique fit plus de peur à l'Autriche que l'invasion ennemie.

LITTÉRATURE ITALIENNE.

La pauvreté vaniteuse de la littérature, dans le cours du dixseptième siècle, se releva, grâce à l'ennui où l'on était du genre pastoral; elle n'eut pourtant pas l'inspiration de recourir à la nature, et à la source inépuisable des sentiments: elle se releva avec l'aide des trecentisti et des cinquecentisti, de Pétrarque principalement. Les écrivains ne lui empruntèrent pas seulement l'art, mais ses pensées, et sa pureté sans vigueur; ils visèrent à la rime, à la phrase, sans rien dire naturellement. Il en résulta des compositions minaudières, une petite élégance maniérée, une science de parade. La littérature italienne fut envahie par l'emphase et le bouffon, deux genres détestables. Ce ne furent que chants burlesques, poésies pour noces, récep tions de docteurs, prises d'habit, des amours, des dépits, qui De venaient jamais du cœur, mais de la tête. On débutait alors par des sonnets pour les recueils, comme aujourd'hui par des articles dans les journaux : heureux ceux à qui leurs productions valaient un diplôme académique! Quelques-uns ont l'expression pure, le tour harmonieux : leur prose a de la noblesse et de la magnificence, leurs vers de l'harmonie; mais jamais on n'y trouve de passion ni d'éloquence véritable. D'autres opposaient a la recherche fastidieuse des seicentisti une abondance facile, qui n'était pourtant pas du naturel. Nous nous bornerons à citer,

parmi un nombre infini d'écrivains, quelques-uns de ceux qui s'en tirèrent le moins mal.

Le Génois Frugoni (1692-1786) vécut dans l'indigence et les passions jusqu'au jour où il devint poëte de cour à Parme, et secrétaire de l'Académie des beaux arts. Il chanta tous les événements de cette cour, en dirigea tous les spectacles, et termina ses jours dans une agréable position. Bon coloriste, mais sans plan, il tourne dans un cercle étroit; il manque de correction. Poëte de la bonne compagnie, il bourre de chevilles, de lieux communs et d'allusions mythologiques, ses chants de circonstance, pour mariages, baptêmes de cloches, prêtres, docteurs qui l'ennuient, ou en l'honneur des riches qui l'invitent à leurs festins. C'est ainsi qu'il fut le versificateur le plus fécond de ce temps où les vers pleuvaient, et le chef de cette école de prétendus poëtes, fabricants de sonnets et d'opuscules à la louange non seulement des princes, mais de quiconque possédait une maison de campagne ou donnait des dîners.

Les P'ers libres des trois excellents auteurs, Frugoni, Bettinelli et Lorenzi, méritent, à raison du bruit qu'ils firent, une mention particulière; mais on n'y trouve qu'une prose cadencée, un retour continuel d'images faciles et maniérées : ils forgent des mots inutiles, en altérant les termes anciens; ils prennent l'emphase pour de la chaleur, le boursouflé et le mignard pour la noblesse et la grâce; jamais rien de profond, d'affectueux; et ils gâtent par des détails puérils les sujets les plus grands. Frugoni arrive, en contemplant le matin son plafond, à méditer sur les causes du beau; ce dont il est ensuite distrait par un valet qui entre avec son chocolat. Bettinelli s'occupe, dans

1 Il décrit plaisamment, dans ses Lettres sur l'épigramme, une visite qu'il fit à Voltaire. Le philosophe de Ferney, invité ensuite par Bettinelli à venir le voir à Vérone, lui répondait : « Vous voyez bien que je ne dois pas me soucier d'aller dans un pays où l'on séquestre aux portes de la ville les livres qu'un pauvre voyageur a dans son sac. Je ne san rais avoir envie de demander à un dominicain la permission de parler, de penser, de lire; et je vous dirai franchement que ce lâche esclavaga de l'Italie me fait horreur. Je crois la basilique de Saint-Pierre fort

l'éruption du Vésuve, des rats qui sont chassés de leur trou, Quelle étrange idée l'on avait de la poésie, quand on donnait à Lorenzi des sujets de physique pour improviser! Frugoni faisait soixante sonnets à la file contre l'avare Ciacco, et Casti en adressait cent à quelqu'un à qui il devait trois jules; toute l'académie milanaise des Trasformati déplorait en vers la mort du chat de Balestreri; une autre, celle du chien Pippo. Il y en avait qui s'entendaient pour traduire en octaves chacun un chant du Berthold! On allait cependant chercher dans un rang plus bas encore, c'est-à-dire parmi les improvisateurs, ceux qu'on couronnait au Capitole; ainsi la Corilla, surnommée l'Olympique; ainsi Perfetti, à qui on donna pour sujet d'épreuve douze thèmes sur les sciences.

Cette fécondité inépuisable excita la verve mordante de Joseph Baretti', de Turin (1716-1789), que ses éditeurs mettent au rang des bons critiques et des écrivains distingués, et qui rédigea le journal intitulé le Fouet littéraire, dans lequel il se mit à fustiger« ces malheureux qui s'en allaient griffonnant chaque jour des comédies impures, des tragédies stupides, des critiques puériles, des romans biscornus, des dissertations frivoles, de la prose et des vers de toute famille, sans substance ni qualité. » En effet, on ne voyait plus dans la littérature que Frugoniens, tersi scioltai. Ceux qui écrivaient sur les sciences étaient vul, gaires, impropres, sans couleur. L'école jésuitique sacrifiait au Lombre la concision, la force, le mot propre. Personne ne pourrait aujourd'hui supporter l'harmonieuse et vaine élégance du

belle; mais j'aime mieux un bon livre anglais, écrit librement, que cent mille colonnes de marbre. »

On cite parmi les plus célèbres Thérèse Bandettini ( Amaryllis étrusque), Livie Accarigi, Fortunée Fantastici, le mordant Matthieu Berardi, le Napolitain Gaspard Mollo, qui improvisait en latin comme Cagliuffi, etc.

* Baretti, poëte burlesque par-dessus tout, a traduit en vers libres (scioffi) les tragédies de Corneille et l'Art d'aimer d'Ovide. Il se fit l'antagoniste des philosophes français, disant qu'ils n'en pouvaient imposer qu'aux femmes de chambrell a laissé des pamphlets, des dis sertations, et un dictionnaire italien-anglais.

HIST. DE CENT ANS. - T. II.

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père Roberti, de Bassano. Rezzonico, lié avec les hommes les plus distingués de son temps dans sa patrie et au dehors, n'arriva lui-même qu'à une poésie imitatrice des plus mauvaises imitations, et à une prose flasque et incorrecte, tout à la fois phraseuse et arrogante.

La vie du comte Algarotti (1712-1764) fut une suite de triomphes. Il est fêté à Paris par les savants; Auguste III, de Saxe, le charge de recueillir des tableaux pour sa galerie; Frédéric, de Prusse, le prend pour compagnon de ses voyages et de ses soupers; il est applaudi par les philosophes, mais il écrit comme ses contemporains : il est fardé et vide; ses vers sont contournés; tout emprunt, pour lui, est de bonne prise, pourvu qu'il vise à l'effet du reste, rien qui vienne de l'âme, jamais de vigueur ni de concision. Son Newtonianisme pour les dames, traduit dans toutes les langues, est ridicule pour les savants, inutile aux ignorants. Il n'est pas jusqu'aux voyages, qui pourtant intéressent toujours, à raison des impressions per sonnelles du narrateur, où il ne trouve moyen de vous glacer par des réflexions niaises et par un étalage de citations, au lieu de chercher à faire connaître à ses compatriotes les intérêts, les idées, les mœurs, les progrès des peuples, afin de les piquer d'émulation. Partout, en un mot, on mettait du rouge et des mouches à la phrase; partout l'apprêt, au lieu de l'inspiration.

Il en était ainsi de l'éloquence de la chaire, amplification laborieuse qui laisse le cœur froid, l'esprit sans conviction, la volonté indifférente. On ne trouve chez ces orateurs sacrés que des mots, des discours, des déclamations. Ils n'ont pas cette tristesse évangélique qui est le fond de cette éloquence, ni ce style nourri des saintes Écritures, qui mettent la parole divine à la portée du peuple avec une dignité paisible et familière.

Quel champ Baretti avait devant lui, s'il n'eût trop songé à la forme; s'il eût compris le mérite de la hardiesse et de la sincérité dans l'art; si à l'intention sage il eût associé des sentiments élevés, des vues larges, et les inspirations du patriotisme! Mais combien il sait peu! comme il dédaigne ce qu'il ne comprend pas! comme il s'arrête toujours à la forme, lui qui ne

voit rien, dans le livre Des délits et des peines, « qu'une mauvaise chose écrite dans un style bâtard! » comme il abuse sans ménagement de la raillerie! comme il s'abandonne à des passions haineuses contre tout ce qui lui est supérieur ! C'est là ce qui l'entraîna à des grossièretés ignobles, à exalter ce qu'il y avait de plus médiocre, et à faire une guerre si acharnée à Goldoni.

Peu d'hommes furent doués plus richement par la nature que cet avocat vénitien ; mais Goldoni (1707-1793) ne cultiva pas ces qualités précieuses, et sa patrie fit tort à son talent. Il n'y était pas permis de se mêler de politique; il eût suffi, pour perdre un auteur, d'un noble qui se crût offensé. D'autre côté, le théâtre était livré à des entrepreneurs, qui ne visaient qu'à attirer la foule en flattant son goût; il n'y avait aucune relation, nulle sympathie entre les gens de lettres et le peuple. Les gens de lettres faisaient des comédies d'après les règles d'un art froid, conventionnel, que personne ne lisait, et qui endormaient à la représentation. Le peuple avait pour pourvoyeurs des gens du métier, qui ébauchaient des canevas de comédies à sujet, dont les acteurs improvisaient eux-mêmes le dialogue, en mettant en scène des masques, sortes de types génériques qui revenaient dans toutes les intrigues.

Les acteurs étaient des tailleurs, des cordonniers, des tisserands, qui, le soir, se changeaient en Ninus et en Arbacès. Les arlequins devinrent célèbres. Un ouvrier en soie, le Napolitain Cerlone, inventeur des masques de Polichinelle et du docteur Fastidio, composa une multitude de canevas pour ces pièces improvisées, pleines de facéties, de verve, de traits satiriques, de bouffonneries et d'allusions transparentes, et dont les actes se prolongeaient indéfiniment, avec changement à vue et carnage général. Il fit longtemps la passion des Napolitains, qui voyaient dans ces représentations leur propre vie. Mais ce fut au grand détriment de l'auteur, qui aurait pu, s'il eût compris sa vocation, s'élever à quelque chose de mieux.

Goldoni s'abandonna à ces nécessités locales avec l'insouciance qui était dans sa nature. Il ne possède pas une grande variété; il n'a pas l'art de tracer fortement les caractères ; il

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