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tout, et s'appliqua à se concilier ses bonnes grâces; et, uniquement occupé de sa fortune, il excita autant de mécontentement qu'il avait d'abord fait naître d'espérances. On fit pourtant à cette époque de bonnes et de mauvaises lois. Michel Jorio prépara un code de commerce et de marine qui resta en projet. On ne sut pas rendre l'administration communale uniforme, ni la soustraire aux feudataires. Les arts et métiers étaient encore dans les liens des corporations; l'industrie des vers à soie se trouvait entravée par le monopole royal.

Les habitants de Torre del Greco, toujours menacés par le Vésuve, s'étaient adonnés avec intrépidité à la pêche du corail, qui leur avait procuré de grandes richesses; mais cette in dustrie languit aussitôt que le gouvernement voulut s'en mêler, et lui donner les règles dans le code Corallin. On favorisa cependant le défrichement des terres, on peupla des îles dé sertes; on institua les archives royales pour la conservation des hypothèques ; les gens de loi, fléau de ce pays, devinrent l'objet de quelques mesures de répression; les jugements furent soustraits à l'arbitraire; mais on conserva la procédure inquisito riale, ainsi que la torture et les peines barbares contre les filous. Ceux qui lisaient Voltaire étaient condamnés à trois ans de galères; les lecteurs de la Gazette de Florence, à six mois de prison. Les routes étaient infestées de voleurs, au point que le gouvernement se vit réduit à recommander aux voyageurs d'al ler en caravanes. Les Barbaresques ne cessaient d'insulter les côtes. La noblesse, sans armes ni puissance, et hors d'état de tenir tête au roi, était encore le fléau du peuple. La propriété se trouvait concentrée dans un petit nombre de mains; en même temps les non-propriétaires étaient grevés de taxes aussi diverses qu'arbitraires; de forts droits d'entrée et de sortie pesaient sur les marchandises; l'impôt frappait sur tout, jusque sur l'eau pluviale. Indépendamment des obligations personnelles, telles que les corvées, David Winspeare a supputé trois cent quatrevingt-quinze droits sur les personnes et les choses, qui subsistaient encore lors de l'avénement de la famille de Napoléon. La justice et la jurisprudence étaient tombées au plus bas; tout demeurait incertain et arbitraire entre les douze législations qui

s'étaient succédé, et la fraude avait beau jeu dans ce dédale. Pour le jugement du truglio, le procureur fiscal et le défenseur royal des accusés pouvaient transiger, en convertissant la peine de la détention en celle de l'exil ou des galères, sans mener le procès à fin, et seulement pour vider les prisons. Les procès étaient perpétués par des appels sans fin, des recours en nullité, et souvent par des interventions du roi. Le tribunal des subsistances examinait arbitrairement les marchandises sur la frontière de l'État pontifical, empêchant la sortie de tous grains, du bétail, du numéraire, et punissant les délinquants à son gré. Il n'y avait pas moins de vexations pour les terres de l'Abruzze maritime, qui étaient assujetties à la servitude du pâturage d'hiver (reggii stucchi) : c'était au point qu'on ne pouvait ni les enclore, ni les cultiver en grains, ni les planter d'arbres, et que c'était pitié de les voir. Ces abus furent supprimés, sur les réclamations de Melchior Delfico 1.

Le roi, qui avait visité les laiteries de la Lombardie, voulut en essayer dans son pays. Il fonda donc à San-Leuccio une colonie, à laquelle il donna la forme d'un État indépendant, avec ses lois, sa milice propre, et un gouvernement en commun entre les chefs de famille. C'était un amusement de roi. Mais l'éducation des vers à soie prospéra dans cette petite république, où furent introduits les métiers pour la fabrication du gros de Naples.

La Sicile était administrée comme une province dont on élude les franchises, où on laisse dominer la féodalité, dépérir l'agriculture, et qu'on accable d'impôts. Des bandes de voleurs infestaient les malheureuses campagnes, et un certain Testalonga, de Pietrapercia, en avait trois nombreuses sous ses ordres; les côtes étaient exposées aux attaques des Barbaresques. Tanucci

Les Mémoires sur le royaume de Naples, par Orlof, ont beaucoup d'importance, quoiqu'ils soient écrits avec passion. Voyez aussi : Galanti, Descrizione geografica e política delle Sicilie; Arrigii, Saggio storico per servire di studio alle rivoluzioni di Napoli; et surtout, Vicenzo Coco, Saggio sulla rivoluzione dia Napoli, rempli d'aperçus politiques et économiques de la plus haute valeur.

G

fit peupler Ustica, île qui servait de refuge à ces pirates; mais ils n'y vinrent pas moins, et enlevèrent les colons. Les disettes étaient fréquentes dans ce grenier de l'Italie. Aussi, comme ce n'était pas assez de défendre l'exportation des grains, on tenait en réserve de grands magasins de blé, et un capital ( colonna frumentaria) destiné spécialement à en acheter en cas de besoin. Le marquis Fogliano, vice-roi, ayant accordé au Génois Gazzini l'autorisation d'exporter des grains, le peuple attribua à cette concession le renchérissement qui était survenu dans le prix des céréales (1773): il mit le feu à la maison de Gazzini, s'empara des canons qui étaient sur les bâtiments mouillés dans le port, délivra les criminels; et il aurait massacré le pusillanime viceroi, si l'archevêque Filangieri n'eût favorisé sa fuite à Messine. George Caraffa, général sexagénaire, étouffa l'émeute par la rigueur; mais Filangieri contribua plus encore à l'apaiser par les voies de douceur. Fogliano fut destitué, et le gouvernement réformé, mais fort peu amélioré. Il n'y eut de sang répandu que dans les supplices.

Dominique Caracciolo, marquis de Villamarina, fut envové dans l'île en 1781, avec le titre de vice-roi. Il s'était lié d'amitie, dans ses voyages, avec Diderot, d'Alembert, Garat, et autres : imbu des idées nouvelles, il se mit à les introduire sans trop de discernement. Il assoupit les divisions que par politique on avait entretenues de pays à pays; il fit abolir l'inquisition, et réorganisa le parlement de telle sorte que les barons n'y fussent pas seuls élus, et qu'ils eussent à contribuer aussi aux charges. Le roi et le peuple! telle était sa devise. Il écrivit Sur l'exportation des blés de Sicile; il voulait que l'administration eût le droit de l'empêcher. Élève des philosophes, il avait grande opinion de lui-même, se moquait des critiques, bravait l'opinion publique, et tournait en ridicule la dévotion à la Vierge et à sainte Rosalie, tout en fréquentant les danseuses et les cantatrices. Devenu ministre à Naples, il eut une telle émotion en apprenant la prise de la Bastille, lui novateur, qu'il en mourut.

Il y avait donc en Italie des hommes animés de bonnes intentions, mais qui, faisant et défaisant à la hâte, sans expliquer leurs motifs, ébranlaient la foi publique. L'éducation y était ré

pandue, mais seulement dans certaines classes. La littérature faisait consister la réforme à changer de modèles, et s'arrangeait de l'imitation; elle n'éprouvait pas le besoin de cette originalité qui naît de vérités vivement senties, et exprimées dans le langage de tous : aussi ne produisit-elle aucun de ces ouvrages où l'auteur laisse quelques lambeaux de sa vie aux ronces de son glorieux chemin. La société prenait pour un présage de bonheur la langueur des âmes et l'abaissement des caractères. La situation politique n'offrait rien de ces grandes choses qui, lorsqu'on les veut fortement, développent les grandes facultés. Il y avait un besoin d'améliorations dont on était effrayé, sitôt qu'elles touchaient à des points essentiels. C'est dans de pareilles circonstances, où un rhéteur seul peut voir un siècle d'or, que l'Italie fut surprise par la Révolution française.

LES JACOBINS EN ITALIE. PREMIÈRES CAMPAGNES
DE NAPOLÉON.

Le premier bruit de la Révolution française avait fait sentir aux princes italiens combien ils avaient été mal inspirés en ébranlant ce qui se rattachait aux idées anciennes et nationales. Sur quel autre moyen de résistance pouvaient-ils compter désormais que sur la force matérielle? Après avoir habitué les peuples à accepter sans examen des innovations pour lesquelles ils n'étaient pas mûrs, ils devaient s'attendre à les voir accueillir avec joie quand elles viendraient en foule, et sous un aspect fait pour les séduire 1.

Ce sentiment de leur faiblesse se révèle dans l'ouvrage que l'on fit alors écrire aux Hospitaliers au sujet des Droits de l'homme, afin d'atténuer l'effet des livres étrangers; ouvrage de transition entre des idées en vogue et d'autres que l'on combattait, car il pose en principe que la société se fonde sur un pacte social, sans que Dieu y intervienne directement; que la nation qui l'a stipulé a le pouvoir de déclarer déchu le souverain qui le viole, c'est-à-dire qui devient un tyran; enfin, que la protection suprême des droits de l'homme est la religion chrétienne.

L'effroi était donc égal chez tous les princes, mais non la résolution; et ils n'osèrent en venir au moyen qui aurait pu les sauver, à une alliance défensive dans le genre de celle de Pilnitz, alliance que proposait Pie VI. Naples était brouillé avec le pape pour le tribut de la haquenée; Venise ne voulait pas compromettre son commerce; et cet accord de volontés ne pouvait convenir à l'Autriche. Ils auraient dû au moins rester tranquilles, car le Piémont sentait que la Savoie était menacée; Naples avait intérêt à fournir à la France l'huile et les savons dont elle manquait depuis les ravages du Midi, et les grains qu'il lui fallait tirer du Levant. Mais, revenant à la politique de sentiment, ils songèrent tous à leurs liens de famille, et s'armèrent contre la république. Le duc de Modène, le dernier des princes d'Este célébrés par les poëtes, conservait les goûts splendides de ses aïeux, tout en mettant en réserve un trésor considérable, pour faire face à l'orage qui grondait. La Toscane, soumise à un gouvernement très-doux, était favorable aux idées françaises son grand-duc, bien qu'Autrichien, fut l'un des premiers à reconnaître la république ; et Carletti, son ministre à Paris, s'était même rendu suspect par un patriotisme ardent.

Quant aux peuples, ils n'étaient pas sur le duvet sans doute, mais ils ne sentaient pas les mêmes abus qu'en France. Les princes avaient égalisé la condition des biens. Ici, ils avaient brisé les liens féodaux; là, diminué les services corporels. Ils restaient attachés à la religion, au moins par sentiment. Les querelles jansénistes étaient des disputes d'école; les loges maconniques s'occupaient plus d'amusements et de bienfaisance que de desseins politiques; les agitateurs expédiés du dehors ne trouvaient à se faire écouter que par des gens qui n'avaient rien à risquer; les novateurs, en petit nombre, n'osaient se montrer devant ceux qui, tenant pour l'ancien ordre de choses, formerent une majorité toujours plus forte, quand ils eurent vu les conséquences affreuses qui résultaient des principes les plus

saints.

Grâce au voisinage, le Piémont se trouva exposé le premier au péril. Victor-Amédée III, lors de son avénement au trône

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