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M. Rigaud se demande ensuite comment l'on peut admettre que la houille doive avant tout son origine à des végétaux (!), surtout si l'on considère que les « végétariens » n'ont qu'un seul et unique argument, c'est-à-dire les tourbières ».

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Or la théorie « végétarienne est, selon M. Rigaud, impossible à plusieurs chefs :

1° Il est impossible que les arbres debout du houiller se soient conservés assez intacts pour laisser les fossiles que nous savons. Et dans ce cas, que peuvent valoir les calculs chronologiques basés sur le temps de formation des dépôts houillers (p. 385)?

2o Comment les défenseurs de la théorie organique peuvent-ils imaginer que la puissante végétation houillère, charriée à chaud vers les deltas où elle s'amoncelait à la façon des tourbières, produise un combustible formé de menus fragments de feuilles et d'écorces (p. 390)?

3° Pour admettre l'enlèvement de tous les sels alcalins attesté par l'analyse des cendres, il faudrait une macération en eau courante qui détruirait toute matière organique avant de faire disparaître la totalité des sels alcalins (p. 391).

4° Là où la houille renferme des traces végétales, on constate que les cellules sont remplies d'hydrocarbures, tantôt trop riches en carbone et tantôt trop pauvres pour être dus à la transformation du contenu des cellules. Ce carbone n'est autre chose que du bitume plutonien introduit par endosmose (p. 391).

Il est donc inadmissible, conclut notre auteur, que les couches de houille soient totalement formées par une transformation des végétaux enfouis ceux-ci n'ont pu y apporter, en moyenne, qu'une faible partie de la masse totale du carbone qui s'y trouve aujourd'hui (p. 391). "

L'effort que vient de tenter M. Rigaud part d'un bon naturel. C'est une main secourable qu'il tend aux géologues

penchés sur le précipice de l'erreur. Toutefois hâtons-nous lentement, et voyons s'il faut saisir cette main.

Notre conclusion sera, comme bien l'on pense, négative, car la théorie de M. Rigaud pèche à la fois contre la logique, la chimie et la géologie, pour ne citer que ses péchés capitaux (1).

En bonne logique, M. Rigaud, devrait simplement conclure qu'il ne répugne pas d'admettre que son hypothèse puisse, dans certains cas isolés, répondre à la réalité. Bien qu'il ait jugé à propos de commettre un hors-d'œuvre sur la liberté de la science moderne, il faut avouer que M. Rigaud s'arroge, lui, un droit de licence contre lequel proteste le vieux bon sens. Comment une théorie uniquement cousue d'hypothèses peut-elle être plus voisine de la vérité» qu'une autre assise sur des faits et qui ne contient ni contradictions ni invraisemblances? Le précepte est ancien et compris du vulgaire : « La possibilité n'implique pas la réalité. »

N'en disons pas davantage, la discussion purement scientifique ne fera que mieux ressortir ce premier défaut.

Il ne faut pas être chimiste de profession pour être tenté de vérifier les conclusions qu'une vue théorique amène à formuler. Pourquoi notre auteur n'y a-t-il pas songé?

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M. Rigaud part d'un fait, - et c'est l'unique fait de sa théorie: les réactions de l'eau sur la fonte nous montrent qu'il se forme par « réduction des traces d'hydrocarbures. Oublie-t-il que les conditions de l'expérience ont une singulière influence sur les réactions qu'on veut produire? Entre la coupelle du laboratoire et les immenses brasiers

(1) La place nous manque pour suivre l'auteur dans les détours de son voyage à travers le savoir humain; mais nous tenons cependant à signaler ses réflexions au sujet du grisou. Plus documentée et mieux approfondie, la discussion de cette partie de l'article aurait certainement dû nous occuper davantage.

des feux internes du globe, il remarque à peine une différence du moins au plus, de la fraction de milligramme à la tonne.

Si la science positiviste de M. Rigaud n'a pas plus de souci de la rigueur de méthode, nous pouvons le suivre lestement sur son terrain et montrer au lecteur où conduirait la nouvelle théorie.

Dans un intéressant article (1) de M. Firket, ingénieur en chef-directeur des mines, nous voyons que la veine Grande-Pucelle (syn: Désirée) du bassin houiller de Liége doit couvrir environ 20 100 hectares. Appliquons à cette donnée la théorie de M. Rigaud.

Si nous attribuons à cette couche, en moyenne, om, 50 de puissance, elle contiendra 10 050 000 mètres cubes, ou environ 25 000 000 tonnes de houille.

Étant donné que la fonte contient au maximum 5,35 p. c. de carbone, et qu'il faut 18 tonnes et demie de fonte pour produire une tonne de houille, il aura fallu décarburer 462 500 000 tonnes de fonte

pour former la veine Grande-Pucelle.

D'autre part, la moyenne des analyses de bitumes naturels indiquées dans le Dictionnaire de Wurtz donne C = 78,3, H = 8,8.

Il aura donc fallu 462 500 000: 951 388 889 tonnes d'hydrogène, ce qui représente

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458 829 000 tonnes d'eau infiltrée

pour produire cette seule couche du seul bassin de Liége. Ces chiffres, déjà énormes, deviendraient fantastiques, si l'on tâchait d'évaluer ce qu'il faudrait de fonte et d'eau

(1) A. Firket. L'Origine et le mode de formation de la houille. REV. UNIV. DES MINES, (3), t. XXVI, p. 49.

infiltrée pour produire seulement la houille des bassins franco-belges (1).

Encore, pour aboutir à cet invraisemblable résultat, nous sommes-nous placé dans l'hypothèse la plus favorable: nous supposions que la totalité des éléments mis en présence au centre du globe réagiront; que les tonnes d'eau infiltrée convergeront vers la place voulue pour l'expérience; que les différences immenses de pression et de température ne modifieront en rien la réaction, etc.

Il faut avoir peu de souci de ses lecteurs pour oser leur servir une théorie aussi peu digérée !

S'il ne faut pas être chimiste, il faut moins encore être géologue pour saisir toute la contradiction et le manque d'observation élémentaire qui caractérisent la théorie tout hypothétique de M. Rigaud.

Critiquer en détail toutes les erreurs géologiques de ce travail serait aussi fastidieux qu'inutile; qu'on nous permette de nous borner à quelques points plus saillants.

M. Rigaud fait à M. Fayol le grand honneur d'être fort élogieux à l'endroit de ses théories. Seulement on est à se demander s'il ne brûle pas son encens à un dieu qu'il ignore.

Comment peut-on écrire, par exemple, que les tourbières sont le seul argument des végétariens» (p. 395)? Mais ils n'en veulent pas, ils n'en veulent à aucun prix, les végétariens que M. Rigaud croit comprendre. Rien de plus opposé à la belle théorie» (passim) de M. Fayol que d'en appeler à cette analogie.

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Après cela, M. Rigaud est mal venu de parler d'arbres debout, surtout qu'il semble n'en avoir jamais observés

(1) Voici un calcul analogue que nous devons au R. P. Tras, S. J., professeur de géologie au Collège N.-D. de la Paix à Namur :

En 1873, on a extrait, en Belgique, plus de 15 millions de tonnes de charbon, donc plus de charbon que ne pourrait en fournir la réduction de 275 millions de tonnes de fonte. C'est l'équivalent d'une coulée de fonte de 100 mètres de puissance couvrant 40 hectares!

que de l'intérieur d'une voiture de chemin de fer (p. 385). S'il en était autrement, pourrait-il écrire : « Les troncs d'arbres peu déformés que l'on trouve de loin en loin sont aussi remplis de matière charbonneuse renfermant beaucoup plus de carbone que le végétal vivant » (p. 391)?

Notre auteur, il est vrai, parle ailleurs de troncs d'arbres... remplacés par des matériaux adventifs, silice, fer ou calcaire» (p. 392). Mais cette fois il échappe à son observation que ces troncs sont d'ordinaire pour ne pas dire toujours entourés d'une gaîne de charbon qui n'a rien de plutonien.

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Le second et le troisième argument par lesquels M. Rigaud rejette la théorie végétarienne sont intéressants à mettre en regard. D'une part, il ne comprend pas comment le charriage de « la puissante végétation houillère » ait pu produire un combustible formé de menus fragments; tandis que, d'autre part, l'analyse des cendres atteste qu'il lui a fallu une macération en eau courante. La contradiction est singulière.

Ajoutons que les méditations de M. Rigaud, qui ont su évoquer des scènes nouvelles pour l'histoire de la nature, ont malheureusement fait fi du détail. Pourquoi refuser aux eaux des temps primaires une activité plus puissante et plus complexe que celle de nos eaux modernes? Ne contenaient-elles pas alors beaucoup de principes minéraux éminemment actifs qui, depuis lors, se sont fixés à l'état de gisements dans les strates de la croûte terrestre?

Partant, que vaut le quatrième argument de M. Rigaud? De ce que les cellules des plantes houillifiées contiennent tantôt trop, tantôt trop peu de carbone, s'ensuit-il que ce soit du bitume plutonien introduit avec une régularité et une universalité étonnantes par un phénomène endosmotique?

Si fantaisie il y a, dans quelle théorie la verra-t-on ? Qu'est-ce qui a démontré à M. Rigaud que ce phénomène ne pouvait pas être attribué à cette macération en eau

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