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pulvérisée. Nous n'insisterons pas sur cette découverte : elle sort du domaine de la physique et a déjà été présentée aux lecteurs de la Revue dans un bulletin de chimie (1).

La première application pratique des installations de Berlin a été de préparer, sur la proposition de M. Libreich, et de fournir aux cliniques médicales un chloroforme très pur, obtenu par la cristallisation du chloroforme ordinaire. La pureté du liquide provenant de la fusion de ces cristaux est attestée par sa densité, toujours identique à elle-même à une température déterminée, et par l'absence complète de résidus quand on le soumet à l'ébullition, sous la pression ordinaire. Sa valeur médicale repose sur ce fait, constaté par M. du Bois-Reymond, que le chloroforme purifié par le froid est débarrassé d'impuretés toxiques, non cristallisables, et renfermant un principe dangereux, plus actif que le chloroforme pur.

Au cours de cette préparation, M. Pictet a constaté que dès qu'on atteint des températures inférieures à - 65° ou - 70o centigrades, le phénomène du rayonnement subit des modifications singulières. Il s'est attaché surtout à étudier les conditions du rayonnement de la chaleur obscure entre 50o et 165o. Voici quelques-uns des résultats auxquels ces observations l'ont conduit.

Tous les corps réputés mauvais conducteurs de la chaleur, tels que la laine, le coton, la soie, le bois, le carton, le charbon en poudre, la tourbe, etc., retiennent très bien le rayonnement de la chaleur obscure émise entre 50o et 60o centigrades. Ils commencent à se montrer diathermanes, et le deviennent de plus en plus, quand la température de la source rayonnante baisse de

60o à 80o. Au-dessous de 100o, les radiations froides traversent tous ces corps comme la lumière traverse le verre. Ces faits ouvrent à la biologie expérimentale une voie nouvelle. Sur notre globe, les animaux ne sont jamais soumis à des températures inférieures à 45o ou 50o. Dans ces conditions, leurs fourrures naturelles les protègent très bien elles empêchent les rayons chauds du corps de se perdre dans l'espace, et ne laissent pas arriver jusqu'à l'organisme les rayons froids du milieu. Mais que se passera-t-il si l'on enveloppe un animal, un chien par exemple, de tissus réputés bien chauds, et qu'on le plonge dans un frigorifère? Le corps du chien est, au début, à la température normale de + 37°, 5; voici qu'on l'ex

(1) Revue des QUEST. SCIENTIF., juillet 1893, p. 283.

100o ou

pose à la radiation du puits dont la température est maintenue, nous le supposons, à 110o. Dans la pensée de M. Pictet, les radiations froides, inférieures à 70o, traversent, presque sans absorption, le manteau protecteur qui retient, au contraire, les radiations d'ordres plus élevés. Les tissus dont on a entouré l'animal empêcheront donc encore la chaleur du corps de se disperser; mais elles n'empêcheront plus le froid du dehors d'arriver jusqu'à lui : le chien tendra à se refroidir. Tout son corps participera à cette perte de chaleur, car les rayons froids qui l'envahissent traversent les tissus organiques avec la même facilité que les étoffes protectrices; et cependant la sensation douloureuse du froid ne le préviendra pas du danger qu'il court, puisque la peau ne subira pas un refroidissement plus considérable que le reste des organes, et sera en contact avec des enveloppes ni plus ni moins froides qu'elle.

Ce sont là des vues théoriques que M. Pictet a voulu soumettre à l'expérience. Un chien, auquel on avait servi d'abord, jusqu'à refus, un repas réconfortant, fut soigneusement emmaillotté, puis descendu dans le frigorifère. Souffrit-il du froid? Il n'y parut rien; mais 6 minutes de séjour dans cette glacière suffirent á activer singulièrement la respiration et à augmenter très énergiquement la circulation sanguine. L'organisme luttait évidemment contre l'envahissement du froid; et cette lutte dut être bien épuisante, car le chien sortit du puits vraisemblablement avec un besoin impérieux de manger, puisqu'il accepta de suite et très avidemment la nourriture qu'il refusait quelques instants auparavant.

Cet essai enhardit M. Pictet, et lui fit entrevoir le remède à une indisposition dont il souffrait depuis longtemps. Le savant physicien était atteint, depuis 1886, d'une affection d'estomac rebelle à tous les traitements, et qui non seulement lui avait enlevé complètement l'appétit, mais lui rendait toute digestion extrêmement douloureuse. Il retrouva la santé au fond d'un frigorifère, maintenu à 110°, où il descendit, entouré d'une pelisse et de vêtements épais, la tête et le haut du corps dépassant l'appareil. Il en sortit, après 8 minutes, sans avoir éprouvé aucune sensation désagréable de froid à la peau, et pressé par le plus impérieux besoin de manger. Quelle a été la marche de la température du patient pendant cette expérience? S'est-il réellement refroidi, ou la surexcitation de la respiration, de la circulation sanguine et du travail de la digestion a-t-elle triomphé de la tendance au refroidissement ? M. Pictet ne nous le dit pas;

il ajoute seulement qu'une promenade de 5 minutes amena une réaction puissante de chaleur, et que, pour la première fois depuis bien des années, il put dîner" de grand appétit et sans douleur. La même expérience répétée les jours suivants eut les mêmes résultats; huit séances au fond du puits amenèrent la guérison complète et durable. Avant cette cure... merveilleuse, M. Pictet pesait 65 kilog., 350; en trois mois et demi il a gagné plus de 10 kilog.: il pèse aujourd'hui 76 kilog., 220, et qui pourrait dire où il s'arrêtera ? car jamais son estomac n'a été ni plus valide, ni plus complaisant. Souhaitons que la cryothérapie réussisse à faire sortir l'appétit et la santé des puits frigorifiques de Berlin, où l'on ne se doutait pas qu'ils se fussent réfugiés.

C'est encore aux propriétés du rayonnement à basse température que M. Pictet rattache l'observation suivante que le hasard lui a fait faire.

Il y a, dans son laboratoire, côte à côte, deux frigorifères de capacités très inégales : l'un mesure deux litres et demi environ; l'autre, plus de trente-deux litres. Le premier se prête d'autant mieux aux expériences qu'il fonctionne au protoxyde d'azote liquéfié et permet l'abaissement de la température jusqu'à 160o ou 165o. Pendant trois mois, cet appareil avait servi à la cristallisation du chloroforme, phénomène qui s'était constamment produit à la température de 68o,5 ou de 69o. Il ne semblait donc pas douteux que la cristallisation s'opérerait dans le grand réfrigérant refroidi à - 81o. On mit l'appareil en marche à cette température, et on y introduisit le chloroforme liquide au sein duquel plongeait un thermomètre. La température ne tarda pas à baisser; mais elle dépassa 69o et atteignit - S1o sans provoquer la moindre trace de cristallisation. Se trouvaiton devant un cas de surfusion ordinaire, si fréquent dans les liquides cristallisables? Peut-être; il était d'ailleurs aisé de s'en

assurer.

L'état de surfusion est instable: un choc suffit parfois à le détruire; la projection dans le liquide d'un cristal de la même substance y réussit toujours. M. Pictet fit donc fonctionner le petit réfrigérant, obtint des cristaux de chloroforme à 68o,5, et les projeta dans le chloroforme liquide et refroidi à S1o du grand appareil: ils s'y fondirent et disparurent en très peu de temps.

Il ne restait qu'une explication possible de cette anomalie : le produit n'était pas pur; on y avait mêlé peut-être une dose

excessive d'alcool. Pour s'en assurer, M. Pictet vide ses réfrigérants, les nettoie à fond, remplit deux éprouvettes du même chloroforme neuf et fait fonctionner à la fois les deux frigorifères. La température baisse dans les deux appareils; voici qu'elle atteint - 68°,5 dans le petit, et on voit aussitôt se former les premiers cristaux; mais elle continue à baisser dans le grand 81o sans qu'on observe le moindre trace de cris

et atteint tallisation.

Les thermomètres seraient-ils faussés ? Non, car le même thermomètre, plongé successivement dans les deux éprouvettes, marque ici, où les cristaux se développent, 68o,5, et là où aucune cristallisation ne s'opère, 81o.

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N'y comprenant plus rien, M. Pictet retire du petit réfrigérant l'éprouvette avec son contenu, chloroforme en cristaux contre les parois et au centre chloroforme liquide noyant le thermomètre qui marque - 68o,5. Il plonge le tout dans le chloroforme liquide du grand appareil dont le thermomètre accuse 81o. Presque immédiatement, le thermomètre de l'éprouvette apportée baisse de 68°,5 à 81o, pendant que les cristaux disparaissent à vue d'œil et fondent bientôt complètement.

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L'expérience répétée plusieurs fois conduisit toujours au même résultat. Le hasard se chargea même d'en varier la forme.

Une éprouvette remplie de chloroforme cristallisé au sein duquel plongeait un thermomètre venait d'être placée sur le plateau d'une balance. Pendant que l'on procédait à la pesée, voici que le thermomètre remonte jusqu'à 48o au sein du chloroforme liquide baignant de toute part les cristaux solides du même corps. Saisissant l'éprouvette, M. Pictet l'expose aux rayons du soleil; le thermomètre s'élève rapidement à 34o, et les cristaux solides nagent toujours dans le liquide. Il la reporte à l'ombre, agite le contenu le thermomètre tombe à 77°; etc.

Voilà certes des phénomènes bien étranges et dignes de fixer l'attention des physiciens. Qui dira le mot de l'énigme ?

M. Pictet le cherche dans la diathermanie des corps très refroidis. Nous ne reproduirons pas son explication : elle nous paraît encore indécise, et étayée d'hypothèses subsidiaires trop ingénieuses pour satisfaire complètement l'esprit. Nous attendrons, avant de la présenter à nos lecteurs, qu'on lui ait donné une forme plus acceptable, sinon définitive.

Les lois des changements d'état ne sont point les seules qui

subissent l'atteinte des basses températures. M. Pictet a constaté des anomalies également curieuses dans le phénomènes de la phosphorescence. Voici dans quelles circonstances.

Il prit des tubes de verre très mince, longs de 12 centimètres environ, qu'il remplit de corps phosphorescents, tels que les sulfures de calcium, de baryum, de strontium, etc. Après avoir constaté qu'ils possédaient bien leur qualité caractéristique dans les conditions ordinaires, il les exposa au soleil pendant plus d'une minute, puis les introduisit rapidement dans un cylindre de verre entouré d'une double enveloppe pleine de protoxyde d'azote à 140o. Au bout de cinq ou six minutes, alors que leur température devait être voisine de 100°, il retira les tubes du réfrigérant, dans l'obscurité d'une chambre noire hermétiquement close, et constata qu'aucune lueur phosphorescente n'était perceptible. Mais en laissant les tubes se réchauffer d'eux-mêmes, dans l'obscurité, on les vit bientôt s'illuminer dans la partie supérieure, mieux protégée tantôt contre le froid par les supports; puis, peu à peu, l'illumination s'accentua, progressa et finit par envahir les tubes tout entiers, si bien qu'après quelques minutes, tous avaient retrouvé leur éclat normal, sans avoir subi, depuis leur refroidissement, la moindre influence d'une lumière étrangère.

Après ces premières expériences, M. Pictet a cherché à fixer la limite de la température à laquelle se produit la suppression complète de la phosphorescence. Il a constaté que, pour toutes les substances phosphorescentes employées dans les cabinets de physique, les lueurs, quelle que soit leur teinte, bleue, verte, orangée, tendent d'abord toutes vers le jaune terreux, pour s'éteindre ensuite brusquement et complètement dès que la surface des poudres qui les émettent a atteint une température voisine de 70°. On peut suspendre ainsi pendant un temps relativement long (plus d'une demi-heure) l'activité lumineuse de n'importe quelle substance phosphorescente, et elle renaît toujours spontanément avec le réchauffement dans l'obscurité.

"Il est donc certain, dit M. Pictet, que la lumière phosphorescente réclame un certain mouvement des particules constitutives des corps. Quand on les refroidit et qu'on annule progressivement les mouvements oscillatoires calorifiques, les ondes lumineuses ne se produisent plus et la phosphorescence disparaît.

Nous allons examiner le temps pendant lequel on peut conserver le potentiel lumineux de ces corps phosphorescents, en les refroidissant subitement après l'insolation et en les réchauf

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