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n'étaient pas quaternaires. Les fouilles de M. Flinders Petrie à Cahoun (Égypte) ont exhumé une industrie néolithique en plein épanouissement, contemporaine de la XII et de la XIII dynastie (2500 à 3000 ans avant JésusChrist). On trouve aussi à Cahoun des instruments en cuivre et en bronze. Des pointes de flèches en obsidienne d'un travail admirable ont été recueillies dans les tombes royales de Mycènes, au milieu d'incomparables richesses métalliques. Ces observations rendent défiant à l'égard des classifications qui n'ont pas une base stratigraphique ou historique.

Elles prouvent, une fois de plus, que des types attribués à des âges différents peuvent être contemporains et se présenter simultanément dans les mêmes lieux. C'est ce que nous avions déjà constaté à la fin de l'époque quaternaire. Nous voilà donc autorisés à penser que les choses ont pu se passer de même pendant les débuts de l'époque néolithique. Ici l'on trouve des tribus très arriérées (kjoekken-moeddinger); ailleurs des populations plus avancées ont laissé leurs traces (palafittes; camps retranchés). Des lambeaux de stratigraphie montrent sur certains points la pierre polie succédant à des assises néolithiques où il n'y a encore que de la pierre taillée (Spiennes). Sur d'autres points, la pierre polie semble succéder directement au paléolithique (grotte de Sordes).

C'est seulement à l'époque des dolmens, au moment où les métaux font ou vont faire leur apparition en Occident, que la civilisation néolithique se présente avec des caractères bien fixés et uniformes. La faune domestique est au complet. La hachette polie est répandue partout. La póterie est d'un usage commun. Les mêmes parures ornent les dépouilles des morts dans leurs asiles funèbres. On continue à ensevelir dans les grottes naturelles. Mais on creuse aussi des grottes sépulcrales artificielles, et l'on élève, en l'honneur de ceux qui ne sont plus, de grands monuments en pierres brutes, renfermant le caveau funéraire.

Les populations européennes sont-elles arrivées seules à réaliser cet état de choses? On a cru pendant longtemps trouver dans le matériel néolithique les traces d'importations d'origine étrangère, asiatique. Dans un travail récent, M. Salomon Reinach s'est efforcé de combattre cette opinion qu'il qualifie de mirage oriental. Il discute l'un après l'autre les principaux arguments invoqués en sa faveur. Ces arguments sont empruntés soit à la linguistique, soit à l'histoire naturelle, soit à l'archéologie (1).

L'argument linguistique reposait principalement sur l'idée que le sanscrit est la langue la plus voisine de la langue primitive parlée par les Aryas avant leur dispersion. On en concluait que l'Asie aurait été le berceau des Aryas. Pictet avait attribué aux Aryas indivis la connaissance des métaux. Mais M. Schrader a démontré depuis qu'ils sortaient à peine (si tant est qu'ils en sortaient) du stage néolithique. On pouvait donc leur attribuer l'importation de la civilisation néolithique en Europe. Mais on sait maintenant qu'il y a parmi les langues européennes des idiomes, comme le lithuanien, qui ont conservé, mieux que le sanscrit, les formes et les sons primitifs; et l'on part de là pour ébranler la vieille croyance à l'origine asiatique des langues aryennes et des Aryas. C'est une question très controversée aujourd'hui. D'ailleurs, comme on ne saura jamais quelle était la langue des Européens à l'époque néolithique, il faut renoncer à les identifier avec les Aryas et à s'appuyer sur l'argument linguistique.

Des naturalistes ont admis, sur la foi des historiens, que l'Arménie ou la région méridionale du Caucase pouvaient être la patrie de nos animaux domestiques. M. Reinach leur oppose l'opinion du Dr Otto, de MM. Nehring et Sanson, qui pensent voir dans nos races sauvages indigènes la source primitive des races domestiques. C'est aussi l'opinion de M. Rütimeyer relativement aux animaux des palafittes de l'âge de la pierre. L'origine

(1) L'ANTHROPOLOGIE, 1893, pp. 539, 699.

des plantes cultivées est encore plus obscure. Les assertions des historiens ont pesé également sur les jugements des naturalistes. D'ailleurs, à l'âge de la pierre, on ne trouve dans les palafittes de la Suisse que deux plantes considérées comme cultivées, le blé et l'orge, dont la provenance est inconnue. Actuellement, le blé n'est spontané nulle part. Je remarquerai que, parmi le blé des palafittes néolithiques, M. le Dr Heer a reconnu le blé égyptien (Triticum turgidum), fait curieux, mais trop isolé pour en tirer une conclusion.

L'argument archéologique se subdivise en plusieurs questions. Il y a d'abord celle de la jadéite et de la néphrite, deux minéraux qui servirent à confectionner des outils à l'époque néolithique. Ces roches furent-elles importées d'Asie, comme on l'a cru longtemps, ou bien sont-elles originaires de l'Europe? On a acquis la certitude que des outils en néphrite et en jadéite ont été fabriqués sur place dans les stations de la Suisse et ailleurs. Les explorateurs ont en effet retrouvé, sur plus d'un point, les déchets de fabrication. De plus, on découvert des gisements de néphrite en Silésie, et l'on a reconnu que la composition chimique des jadéites n'est pas la même en Europe qu'en Asie. La callaïs, qu'on a considérée aussi comme un minéral exotique, a servi à fabriquer des grains de collier à l'époque néolithique. On ne connaît pas ses gisements naturels; mais c'est principalement dans le Morbihan, la Provence, les Pyrénées, le Portugal, qu'elle fut employée comme ornement. On ne la trouve pas dans l'Europe centrale. Cette répartition n'est pas favorable à l'idée d'une importation orientale. De la distribution géographique des cités lacustres ou palafittes, on avait conclu à l'existence d'un courant venu du Caucase. Elles forment, en effet, une longue traînée depuis le Phase jusqu'en Helvétie. Mais M. Reinach a fait observer que les cités lacustres asiatiques sont beaucoup plus récentes que celles d'Europe,

puisqu'elles existaient au temps d'Hippocrate (ve siècle avant J.-C.), en sorte que le courant, au lieu de partir du Caucase, semblerait s'y diriger et y finir. D'ailleurs, rien ne prouve qu'il y ait eu un courant unique; le contraire est plus probable. Il y a encore, en Océanie, des palafittes que personne ne prétend rattacher au courant européen.

L'étude des monuments mégalithiques conduirait, d'après M. Reinach, à des conclusions analogues. Les dolmens de l'Asie sont d'un âge plus récent que ceux de l'Europe. On en construit encore chez quelques tribus de l'Inde. Ce n'est donc pas dans cette direction qu'il faut aller chercher l'origine des monuments mégalithiques.

Si l'opinion qui attribue à la civilisation néolithique une origine orientale semble perdre du terrain, il ne faut pas trop se hâter cependant d'admettre que cette civilisation. est née par une sorte de génération spontanée, dans l'isolement absolu, au sein des populations européennes. Sans doute, il est difficile de citer à l'époque néolithique. un objet, un animal, une plante, une coutume, une race humaine de provenance orientale certaine. Mais la question d'origine reste néanmoins posée dans quelques cas. Nous ne savons pas où a commencé l'usage de la hachette polie, cet instrument si universellement répandu dans le monde. Même en limitant la question, nous ne pouvons pas dire où ont paru les premières hachettes polies dans l'Europe occidentale. Écartons, si l'on veut, l'hypothèse des importations orientales. Les Européens ont bien pu néanmoins recevoir du dehors certains ferments de civilisation. On ne conçoit même pas que les choses se soient passées autrement. L'Europe n'est pas un pays fermé. Elle s'est trouvée en contact avec des civilisations plus 'anciennes. Elle fut ouverte de tout temps aux migrations des peuples d'Orient. C'est la nature du sol qui fait à l'origine les races de pêcheurs, de chasseurs et de pasteurs. Les unes et les autres restent extraordinaire

ment attachées à leur genre de vie, tant que les conditions de milieu ne changent pas, ou que le contact de l'étranger ne vient pas modifier leurs habitudes séculaires. Sans doute, les conditions de milieu sous l'empire desquelles ont vécu les Européens à la fin des temps quaternaires, ont subi de grands changements, qui furent probablement des stimulants favorables à leur transformation sociale et industrielle. Mais comme l'Orient, dès la plus haute antiquité, a précédé l'Europe sur le chemin du progrès, il est naturel de lui attribuer un rôle d'initiation, et son influence a pu se manifester sous la forme d'idées nouvelles qui, transmises de proche en proche, finirent par trouver en Occident un terrain favorable où elles se développèrent. De même que, dans la nature physique, tous les corps matériels tendent vers un équilibre de température, de même, parmi les sociétés humaines, on voit l'activité sociale s'acheminer vers un équilibre de civilisation. Le rayonnement va des foyers les plus intenses vers les milieux les plus obscurs. A l'époque où nos pères vivaient dans ce qu'on peut appeler le moyen âge néolithique, qui commence peut-être vers le quarantième siècle avant Jésus-Christ, les Chaldéens construisaient déjà de grandes villes, élevaient des statues à leurs prêtres-rois, connaissaient l'écriture, et savaient fondre et mouler le cuivre. L'Égypte n'était pas moins avancée. Est-il invraisemblable que, dès ces temps reculés, quelques infiltrations, quelques rayons de lumière aient pénétré jusqu'au fond de l'Occident? A la fin de l'époque néolithique, le doute se change en certitude, quand on voit le métal apparaître sous la forme de quelques rares objets de parure, sur les rivages maritimes, remonter le cours des fleuves et se répandre peu à peu à l'intérieur du continent. L'importation seule peut expliquer ce mode de dispersion:

A. ARCELIN.

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