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Tout autour du relief, aux murs, pendent des photographies de nos établissements de par là-bas, des types d'indigènes, des plans et des projets. Ici une collection entomologique, là des oiseaux empaillés, et à tous les angles, comme des trophées, d'immenses pointes d'ivoire. Dans la salle suivante, au centre, un groupe de Congolais portant sur les épaules un petit canon et son affût en pièces démontables il faut pour ce petit canon Nordenfeld, du calibre de 47 millimètres un peu plus que nos vieux fusils de rempart, dix porteurs! Deux

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porteurs pour un seul tronçon de canot démontable en tôle d'acier !

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Le long des murs sont disposés - je serais tenté de dire entassés des meubles et ustensiles, des poteries et de la vannerie, des instruments de musique, des flèches et des haches, des costumes complets mais fort réduits, tout l'outillage industriel des races indigènes.

La poterie est primitive, mais excellente, et visant déjà dans son ornementation et sa forme à quelque cachet artistique. La vannerie est parfaite et témoigne d'une habileté manuelle que ne dépassent pas nos vanniers d'Europe. Les instruments de musique font rêver; il y a des tambours irréprochables et qui consolent des timballes de la rue du Caire; mais que de civilisation déjà dans ces petites lames d'acier fixées par un bout sur une caisse de résonance et vibrant comme les belles boîtes à musique de Genève! Dix ou douze lames sont insérées sur la même boîte et doivent donner, j'imagine, des accords très doux aux oreilles congolaises, mais que je n'ai pu apprécier, la consigne étant de ne toucher à rien.

Les pointes d'acier des flèches avec leurs savantes barbelures, les haches avec leur galbe bizarre, mais singulièrement adapté à leur besogne, toutes leurs pièces de forge et jusqu'à leurs clous montrent une métallurgie, naissante il est vrai, mais déjà très raisonnée. Dans l'enclos du village, tous les jours un Congolais, aidé de deux

manoeuvres, forgeait sous les yeux des visiteurs, et il faisait bien sa besogne sur son enclume de pierre. J'ai déjà remarqué qu'entre leur soufflerie et la soufflerie de nos forges il n'y a qu'une nuance du plus au moins. Il y a un fait plus frappant la soufflerie des Congolais est absolument identique à la soufflerie des Indous et des Bengalis. Seulement, aux Indes, ce n'est pas un aide du forgeron qui souffle, c'est sa femme. Et elle ne manœuvre pas les soufflets à la main : elle se suspend à une traverse, saisit entre les orteils la poignée peut-on encore dire la poignée? des soufflets, fait des jambes marcher la soufflerie. On ne comprend pas que ce soit beaucoup plus facile; mais peut-être la malheureuse y trouve-t-elle une vague réminiscence des bals de sa jeunesse.

Evidemment la statuaire de nos braves Congolais est toute rudimentaire si l'expression y survient, c'est au hasard, comme elle survient à tout gamin qui fait des bonshommes. Il y a déjà cependant dans ces ébauches des marques d'observation saisissantes. Plusieurs de ces statues sont des fétiches. Il y a dans un coin une grande déesse, et au centre un dieu crocodile, qui ont été particulièrement vénérés. Quand un dieu résiste à leurs prières, pour aiguillonner sa bienveillance, les Congolais lui enfoncent dans le dos ou dans le ventre de grands clous. Les deux magots en question doivent avoir eu l'oreille fort dure, car ils sont criblés.

Dans la salle suivante sont exposés les produits naturels du Congo. Ici surtout c'est l'entassement; et combien je le regrette, car il y là de vraies richesses qui, étalées plus au large, avec de plus voyantes étiquettes, auraient ouvert les yeux aux plus incrédules sur l'étonnante fécondité de ce sol africain et sur les ressources immenses qu'il réserve à l'industrie et au commerce. Je ne puis tout citer; mais comment ne pas appeler l'attention sur les cultures déjà entreprises, sur les fruits, sur les essences de bois, sur les résines et les caoutchouc, sur les plantes textiles qui

naissent et croissent presque au hasard dans tous les points de ce mystérieux pays?- Les bois ont éveillé l'attention, parce qu'on les avait utilisés à la fabrication de quelques. meubles, et on les admirait. J'entendis quelqu'un reprocher assez vivement qu'on ne leur eût pas donné leur nom technique dans les classifications méthodiques de Linné ou de Jussieu. Il était très divertissant, ce Monsieur, et j'ai trouvé superbe cette critique faite à nos vaillants officiers, à nos explorateurs intrépides: "Ils ont exposé leur vie, versé leur sang peut-être, mais... ils ne savaient pas la botanique ! » Et voilà!

Dans cette même salle sont exposés des ivoires taillés par nos grands maîtres: plusieurs sont de purs chefsd'œuvre. Je signalerai la Minerve de Dillens, la Fortune de Samuel, la Méduse de Vinçotte et une tête d'enfant de Lagae. Il y a aussi une tête de Vierge et un buste de petit saint; eh bien! cela me démange et je le dirai : il y a peut-être là beaucoup d'art et de facture; mais une tête de Vierge, une tête de saint, non pas! Ce masque de jeune fille confine à la bêtise inconsciente; c'est une pauvre innocente, ce n'est pas la Vierge; quant à l'autre, un hydrocéphale hébété, il n'a de saint que le fil d'or tourné autour de son cou en guise de nimbe si du moins on se résignait à concéder à nos saints un peu d'esprit !

Le pavillon de la Société antiesclavagiste, en tôle emboutie et galvanisée, réalisait le plan d'une maison de missionnaire ou de résident, proposé et construit par les forges d'Aiseau. Elle comprend trois chambres se joignant de plain pied. Deux d'entre elles sont consacrées aux travaux des petits Congolais et des petites Congolaises élevées soit dans les colonies scolaires de l'État Indépendant, soit chez les Sœurs de Charité de Moanda, soit encore en Belgique, à Gyzegem, dans le pensionnat de M. l'abbé Van Impe. La troisième est toute documentaire et contient, outre les publications de la Société antiesclavagiste, les portraits des fondateurs de l'œuvre et de ses vaillants

soldats. Autour des murs, les carcans, les chaînes, les boulets qui torturaient les misérables esclaves et qu'ils ont fait tomber. Messieurs, les oreilles nous tintent encore des mâles accents du cardinal Lavigerie prêchant la croisade contre les ravisseurs, les bourreaux et les marchands d'esclaves. L'Europe a frémi, et une poignée de braves s'est levée; elle est partie; on l'admirait et on la plaignait n'était-ce pas à la mort qu'elle allait? Les prudents : dont Dieu nous garde! - trouvaient que c'était folie. Que pouvaient-ils vingt contre mille?... Eh bien, c'est fait. Voyez la carte du Congo belge, remontez du Tanganika jusqu'au Nil Blanc, jusqu'à nos nouvelles frontières du M'Bomou il n'y a plus d'Arabes, il n'y a plus d'esclaves. Et laissez-moi le dire avec orgueil: la petite poignée qui a balayé cette armée de brigands était conduite à la victoire par des Belges! Ah! il en a coûté du sang, du beau rouge sang de soldat; mais le sang est le prix de toutes les grandes œuvres et la monnaie dont se paie la gloire.

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L'histoire dira les noms de ces héros : Vrithoff, Jacques, Ponthière, Dhanis, de Wouters, Michaux, Gillain, de Heusch, Lothaire. Elle dira les grandes choses qu'ils ont faites, et peut-être s'étonnera-t-elle que nous soyons demeurés si longtemps froids devant leurs triomphes, et que nous leur ayons si longtemps marchandé nos enthousiasmes !

Le palais et le pavillon du Congo étaient gardés aux portes par des soldats de l'État Indépendant, très fiers et très dignes dans leur élégant costume militaire, admirablement exercés et manoeuvrant leurs armes avec une précision très rivale de leurs frères, nos petits soldats belges. Ils escortaient le matin et le soir la troupe des Congolais qui venait durant le jour occuper les huttes, les pelouses et la pièce d'eau où l'on avait reconstitué un de leurs villages. Ceux-ci formaient pour les visiteurs un grand centre d'attraction. On les avait habillés de grandes couvertures qui semblaient les gêner fort. Ils ne tardèrent

pas à se familiariser; on se fit comprendre vaille que vaille, et bientôt on en arriva à un échange d'excellents procédés: du côté blanc, des petits cadeaux, du côté noir, des poignées de main très reconnaissantes.

Je crois résumer l'avis général en disant qu'ils ont paru à tous de très belle race, bons, doux, très intelligents, moqueurs parfois et parfois très dédaigneux. Je n'oublierai jamais la moue et le tour de tête méprisant d'une Congolaise à qui une dame avait dit : « Montrez vos dents!» Croyait-on donc qu'elle était venue du Congo pour cela?... Et elle s'en alla, dans toute la majesté d'une reine outragée.

Pas de trace d'étonnement chez eux devant ce que nous appelons les splendeurs de nos édifices. Le palais des Beaux-Arts qu'ils avaient devant eux leur semblait « un grand chimbek », et c'est tout.

Mais que j'aurais voulu voir devant eux un négateur de l'unité des races humaines! Comme c'est bien l'homme, l'homme toujours le même, blanc ou noir, avec ses désirs, sa vanité, son regard, son sourire, sa pensée, sa passion, ses grandeurs et ses petitesses, toute son âme! Et comme c'est bien la femme!... mais n'insistons pas. Il serait intéressant de savoir ce qu'à leur tour ils ont pensé de nous. Peut-être un jour, de Matadi, on nous le dira dans une lettre. Préparons-nous à l'humilité.

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Pendant les premiers mois, des officiers qui avaient servi l'État ont donné dans l'enceinte du palais du Congo des conférences excessivement intéressantes sur les produits commerciaux africains. J'ai eu la bonne fortune d'entendre MM. Lemaire et Masui, et M. le Dr Dupont, et j'ai très vivement regretté que l'exiguïté du local ne se prêtât point à leur donner un auditoire plus considérable.

Il convient d'ajouter, comme annexe à l'exposition de l'État Indépendant, le diorama du Congo, exposé par M. Robert Mols. Ces toiles superbes et d'une étonnante vérité, mises en lumière par l'artifice d'opposition et de contraste habituel des dioramas, donnent l'idée exacte de ces grandioses

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