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de Dieu, mais elles sont distinctes: chacune a son domaine qui lui est propre et ses limites qu'elle ne doit pas franchir'. » Les deux principaux ouvrages de Barclay, le De regno, et le De potestate papæ ne sont que le développement de ce principe. Dans le premier, l'auteur défend la royauté contre les prétentions populaires; dans le second, il la met à l'abri des entreprises ultramontaines. L'un était dédié à Henri IV, au prince qui avait restauré en France l'autorité royale; l'autre était dédié à Clément VIII, au pape qui avait su contenir dans ses justes limites la puissance spirituelle dont il était dépositaire. La querelle de Barclay et de ses adversaires n'était, à proprement parler, que la guerre du passé et de l'avenir. Le cardinal Bellarmin, en réfutant le livre de la papauté, empruntait tous ses arguments à un temps qui s'éloignait chaque jour davantage, à une époque d'anarchie qui admettait des priviléges, des conflits de juridiction, des corps indépendants formant un État dans l'État. Barclay, au contraire, représentait l'esprit du dix-septième siècle : plus de priviléges, plus de juridictions particulières en lutte avec la juridiction du chef de l'État. Le premier besoin des peuples était d'arriver à l'unité civile sous les auspices de la royauté.

Mais l'esprit nouveau dont l'Europe était animée n'était point incompatible avec le maintien de la souveraineté pontificale. Il importait aux nations qui étaient restées fidèles à la foi romaine, que le pasteur suprême fût libre dans l'exercice de son pouvoir spirituel; et il ne pouvait l'être que s'il était souverain. On l'avait vu jadis sous l'empire romain et sous les Césars d'Orient, lorsque l'autorité du prince pesait sur le pontife et prétendait régler jusqu'au dogme. Mais il ne suffisait pas que le pape eût un domaine temporel: il fallait que ce domaine ne fût point exposé à l'influence prépondérante d'une des puissances européennes. On n'avait pas oublié ce que la société chrétienne avait souffert quand au dixième siècle la papauté était aux prises avec la féodalité italienne; au onzième, quand elle était esclave de la couronne germanique; au quatorzième, quand elle était dominée par la France, et plus récemment quand elle était tombée sous le joug de l'Espagne. L'État pontifical devait être au milieu de la chrétienté une sorte de terrain neutre où le chef du pouvoir spirituel fût inviolable et indépendant.

4. Barclay, Tractatus de potestate papæ, an et quatenus in reges et principes seculares jus et imperium habeat.

608 DES ORIGINES DU POUVOIR TEMPOREL DES PAPES.

Telle est la doctrine que la France a professée et mise en pratique sous Henri IV, sous Richelieu, sous Louis XIV. Elle ne cherchait qu'à fortifier la souveraineté politique du saint-siége, et à la préserver de toute tyrannie étrangère. S'il arrivait que la cour de Rome sortit elle-même de ses limites et empiétât sur les droits des puissances temporelles, la France lui opposait les traditions de son Église nationale, la déclaration de la Sorbonne en 1663 et celle du clergé en 1682; respectueuse dans sa fermeté, elle se défendait, selon l'expression du chancelier d'Aguesseau, non pas avec le glaive, mais avec le bouclier. Elle avait autrefois contribué, plus qu'aucune autre nation. à fonder le pouvoir temporel des papes; elle l'avait soutenu à travers toutes ses vicissitudes, et elle le croyait toujours nécessaire à la dignité de la religion comme aux intérêts des peuples chrétiens.

FIN DES ORIGINES DU POUVOIR TEMPOREL DES PAPES.

L'ANNÉE LITTÉRAIRE

CHAPITRE XXX.

25 AVRIL 1860.

I

Les hommes les plus compétents en ont parlé avec tant d'éloges que ce n'est pas sans un certain embarras que je viens à mon tour dire quelques mots du dix-septième volume de l'Histoire du Consulat et de l'Empire, par M. Thiers. Je ne prétends traiter que la question littéraire, et sur ce terrain même, je me trouve en désaccord avec un si grand nombre d'autorités, que j'hésite à faire connaître mon opinion sur le style de M. Thiers et sur sa façon d'entendre la composition historique. Je l'essaye cependant à mes risques et périls, et pour mettre ma responsabilité à l'abri, je commence par citer une des premières pages du livre : « Si telle était la situation là où Napoléon avait commandé, elle n'était guère plus satisfaisante ailleurs, et ses lieutenants, soit en Italie, soit en Espagne, n'avaient pas été beaucoup plus heureux que lui.

« Le prince Eugène, chargé de défendre les Alpes Juliennes, était parvenu, en puisant dans les vieux cadres de l'armée d'Italie, et en les recrutant avec les conscrits du Piémont, de la Toscane, de la Provence, du Dauphiné, à se procurer cinquante mille soldats au lieu de quatre-vingt mille qu'il avait ordre de réunir. Il en avait formé six divisions d'infanterie et une de cavalerie, jeunes en soldats mais vieilles en officiers, et avec leur secours, il avait essayé de garder la Drave et la Save de Villach à Leybach. Après s'être maintenu pendant les mois d'août, de septembre et d'octobre sur cette ligne si étendue, attendant toujours les Napolitains qui n'arrivaient pas, il avait vu les Autrichiens se présenter en masse aux débouchés de la Carinthie, son armée s'amoindrir par la désertion des Croates et des Italiens, et il s'était replié successivement d'abord sur l'Isonzo, puis sur le Tagliamento. La défection de la Bavière ouvrant tous les sages du Tyrol sur sa gauche, avait rendu sa position encore plus

Tome IX.

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difficile, et dans le désir de couvrir à la fois Vérone et Trieste, il avait partagé son armée en deux corps. Il avait envoyé le général Grenier sur Bassano avec quinze mille hommes, tandis qu'avec vingt mille soldats, il tâchait, en manœuvrant sur le Tagliamento et la Piave, de couvrir le Frioul et Venise. C'était l'étude des campagnes du général Bonaparte qui lui avait inspiré, etc... >>

Je cite encore ce passage : « Napoléon, de peur de désorganiser les seules provinces d'Espagne où la guerre n'eût pas été désastreuse, n'avait pas voulu retirer le maréchal Suchet de l'Aragon, et par le motif que nous avons déjà indiqué, il avait choisi le maréchal Soult. Ce maréchal, qui avait une grande renommée, moindre toutefois en Espagne, où il avait servi, qu'ailleurs, n'était pas accueilli de l'armée avec une entière confiance. Cependant il pouvait beaucoup réparer. Il avait affaire, etc... >>

J'examinerai tout à l'heure si ces minutieux détails stratégiques sont d'un intérêt bien considérable, et si le récit ne gagnerait pas à en être allégé. Il y a des histoires spéciales où l'on aime à chercher ces sortes de renseignements. Si on les supprimait, on diminuerait d'un bon quart la longueur de chacun des volumes de l'ouvrage de M. Thiers, dont ils forment la base, et le principal mérite aux yeux de certaines gens. Il n'y faut donc point songer. Reste la façon dont ces détails nous sont donnés. Sous ce rapport, on peut dire que M. Thiers manque d'une des qualités essentielles de l'écrivain, la variété. Qu'est-ce que le style sinon l'abondance et la diversité des tours, l'harmonie et la facilité de la période? Je ne trouve rien de tout cela dans le style de M. Thiers. Toujours la même forme, la même tournure de phrase: l'imparfait du verbe avoir revenant à chaque instant. J'ai compté jusqu'à deux cent dix avait dans le premier tiers de la première partie de ce volume, l'Invasion. J'ai laissé de côté les autres temps du même verbe, les aurait, les ayant, qui y pullulent ainsi que les était. Il est difficile, je le sais, de se passer des verbes auxiliaires, mais il ne faut point en abuser sous peine de tomber dans la sécheresse et dans la monotonie. Il est indispensable, me dira-t-on, dans des ouvrages du genre de celui-ci, de faire des sacrifices à la clarté. J'en conviens, mais on peut être clair avec élégance, et Voltaire l'a fort bien prouvé dans ses œuvres historiques.

Le récit de la bataille de Narva, dans l'Histoire de Charles XII, tient quatre ou cinq pages tout au plus, et je le trouve très-suffisant;

rien d'essentiel du moins n'y est omis. Le récit de la bataille de Pultava, dans laquelle périt la fortune de Charles XII, n'est guère plus long. De combien de pages Voltaire n'eût-il pas grossi son livre s'il se fut cru obligé de donner le chiffre des régiments qui y figuraient, la force exacte de leurs bataillons, les garnisons d'où on les avait tirés, le nombre des chevaux et des canons, les lieux de remonte des chevaux et l'âge des cavaliers et des canonniers, ainsi que M. Thiers le fait avec tant de complaisance : « Ce n'était pas tout, nous dit-il, que de lever des hommes, il fallait les équiper, les armer, les pourvoir de chevaux de selle et de trait. Napoléon créa des ateliers extraordinaires à Paris, à Bordeaux, à Toulouse, à Montpellier, à Lyon, à Metz, etc., afin d'y façonner des habits et du linge avec des draps et des toiles qu'on achetait et requérait en payant comptant. L'équipement, quoique difficile, rencontrait moins d'obstacles que les remontes. La France cependant avait été moins épuisée que l'Allemagne en chevaux de selle, et elle en possédait un assez grand nombre d'excellents. Les chevaux de trait pour l'artillerie et les équipages ne laissaient rien à désirer. On venait d'en acheter cinq mille. Napoléon en fit acheter encore autant et ordonna d'en requérir dix mille autres en les payant, et ces vingt mille chevaux suffisaient avec ceux qui restaient, pour une guerre à l'intérieur. Les chevaux de selle étaient plus rares. Drouot dut en chercher pour la garde. Des fonds furent envoyés à tous les régiments pour acheter autour d'eux ceux qu'ils pourraient se procurer. »

Je me demande en vain où est l'intérêt de ces détails qui se reproduisent presque à chaque page, et qui dans une foule de cas sont poussés jusqu'à la plus puérile minutie. Nous venons d'apprendre que Napoléon fit acheter et requérir, en payant comptant, des draps et des toiles pour façonner des habits et du linge, maintenant nous allons avoir des nouvelles de nos forteresses. Il suffirait, à ce qu'il semble d'abord, de nous dire tout simplement si elles étaient en bon ou en mauvais état. Nous nous contenterions de ce renseignement, mais il faut bien que M. Thiers montre l'étendue et la variété de ses connaissances : « Huningue, Strasbourg, Landau, Mayence, Metz, Mézières, Valenciennes, Lille, étaient dans le plus complet abandon. >> Tout semble dit après cela; pas du tout, M. Thiers continue: « Les escarpes étaient debout, mais dégradées, les talus déformés, les ponts-levis hors de service. L'artillerie insuffisante n'avait point d'affuts: on manquait d'outils, d'artifices, de bois pour les blindages...»

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