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est intimement liée à celle de l'Université Catholique. Il ne m'appartient pas d'écrire ces pages: elles seront dites plus tard, en leur lieu et place, par la voix fidèle d'un ami de la première heure qui, les ayant vécues avec lui, nous montrera dans son ampleur magnifique, la riche moisson accumulée.

Je voudrais cependant parler ici du Professeur; il fut, dans la pleine acception du mot, un « Maître ». Son esprit parfaitement ordonné savait apporter dans son enseignement cette lucidité parfaite, cette merveilleuse synthèse d'idées générales, qui était sa caractéristique, et d'où découlait naturellement une clinique logiquement thérapeutique; un sens clinique très sûr et particulièrement avisé, une érudition très étendue puisée autrefois à l'école des Maîtres les plus éminents, une parole toujours élégante et facile contribuaient au succès d'un enseignement dont l'organisation solide imprima une empreinte si forte et si durable aux générations nombreuses d'étudiants qui se succédèrent depuis la fondation de l'Université. Le Professeur H. Desplats avait au plus haut point le don parfait de la parole, et ses cliniques étaient particulièrement suivies. Elles avaient lieu deux fois par semaine et, malgré l'heure matinale, elles réunissaient toujours une assistance régulière et très nombreuse : toujours brillantes, elles étaient parfois incomparables, tant par l'élégance de la parole et leur documentation rigoureuse que par la vie véritable qui les animait. Après un exposé, toujours d'une méthode et d'une clarté parfaites, après une discussion où la rigueur scientifique le disputait à la précision des investigations cliniques, le Maître arrivait au point culminant de son argumentation, qu'il appuyait presque toujours d'un fait de sa pratique, exactement adapté au cas étudié. Il vivait alors réellement son sujet : sa voix, dont les inflexions se pliaient merveilleusement aux diverses phases de la

narration, son geste qui soulignait étroitement la parole vive et colorée, son regard qui allait chercher et subjuguer le regard de l'auditeur, tout, et l'expression même de son visage, nous faisaient revivre, dans une fidélité saisissante, « le drame pathologique toutes ses surprises, ses craintes, ses angoisses et ses espérances, ses déceptions et ses victoires.

avec

L'enseignement clinique au lit du malade retenait pareillement toute sa vive sollicitude, et il en avait fait l'objet principal de ses constantes préoccupations. Donnant lui-même l'exemple d'une rigoureuse ponctualité, il demandait à tous une assiduité invariable, exigeant une rédaction exacte des observations des malades confiés à chacun et s'assurant, par des interrogations fréquentes, qu'elles étaient régulièrement suivies. Une mémoire exceptionnelle lui permettait de n'omettre aucun détail de traitement, aucune prescription, même la plus infime, ce qui ne laissait de surprendre... à leurs dépens ses internes même les plus attentifs. Novateur souvent hardi, esprit toujours ouvert à toutes les recherches scientifiques nouvelles, il gardait cependant une défiance instinctive vis-à-vis de nouveautés trop incomplètement ou trop hâtivement étudiées, que sa méthode persévérante et sûre et sa haute conscience ne pouvaient accepter; parfois, devant une théorie plus audacieuse ou plus incertaine, il s'abstenait de prononcer aucun jugement, mais sa lèvre se plissait d'un fin sourire sceptique, dont l'indulgente ironie était toute une leçon.

Les jours de clinique exceptés, il choisissait généralement, pendant sa visite, au hasard de ses deux services, toujours largement pourvus, un malade dont l'état clinique lui paraissait particulièrement instructif : aussitôt le cercle se formait, empressé et attentif, autour du Maître qui, simplement, empruntait la chaise du malade qu'une main rapide avait opportunė

ment débarrassée. Ce n'était plus alors la démonstration brillante de la salle de clinique, mais bien une leçon et un exercice pratiques infiniment précieux où, en des causeries familières, l'étude des symptômes était poussée dans ses moindres détails, où l'étudiant était initié aux difficultés de l'examen du malade et à la pratique de tous les modes d'investigation clinique. Ces leçons au lit du malade sont restées fidèlement gravées dans la mémoire de tous ses élèves il leur donnait là le meilleur de sa science, il leur donnait aussi tout son cœur. Car il connaissait et aimait tous ses chers étudiants, qui étaient pour lui des fils; sa psychologie très affinée lui donnait très rapidement la clef des âmes qu'il voulait aussi bien diriger qu'instruire, et il ne manquait aucune occasion de le faire ; jamais il ne perdit de vue ce double but d'éducation morale autant que professionnelle, qui resta toujours sa constante préoccupation. Il gagnait ainsi la confiance absolue de ses élèves, et je n'ai pas le souvenir que jamais ce principe d'autorité, qu'il avait si solidement assis, eût été jamais transgressé, même d'une façon minime; sa sévérité nécessaire n'était-elle pas toujours tempérée par ce bon sourire indulgent que nous lui connaissions tous, et souvent ne fut-il pas le premier à faire des démarches officieuses auprès de l'autorité académique pour tempérer ou effacer les rigueurs d'une sanction cependant très méritée ?

Il paraît superflu d'ajouter qu'il était adoré de tous ses malades; ceux-ci lui gardaient une vive reconnaissance, non seulement pour ses soins médicaux si éclairés, mais aussi pour les paroles consolatrices que sa voix, infiniment persuasive, laissait tomber doucement au chevet de ceux qui, dans la souffrance, semblaient ne plus pouvoir espérer. Aussi, lorsqu'à l'issue de la cérémonie religieuse, le funèbre cortège passa devant l'Hôpital Sainte-Eugénie, les malades avaient encombré les fenêtres de son service et s'y

pressaient en vraies grappes humaines; immobiles et recueillis dans un impressionnant silence, ils rendaient ainsi un muet et saisissant hommage à celui qui, dans la tristesse du matin sombre, passait lentement pour la dernière fois.

L'activité scientifique du Professeur Desplats fut considérable; en 1878-1879 il avait été l'un des promoteurs et des fondateurs de la Société des Sciences Médicales, dont il fut le président à deux reprises, en 1882 et 1892. Il manquait bien rarement les réunions de la Société, et en ceci donnait à de beaucoup plus jeunes un exemple de constante assiduité, à un tel point que ses absences à nos deux dernières réunions nous avaient paru d'un fâcheux indice. Il aimait à se mêler aux discussions avec son ardeur habituelle, mais alors que les opinions contradictoires semblaient le plus confusément se heurter, il savait souvent avec un merveilleux-à-propos, tirer la conclusion exacte des faits qui venaient d'être exposés devant lui. Il fut également l'un des fondateurs, en 1879, du JOURNAL DES SCIENCES MÉDICALES DE LILLE, où il ne cessa de donner, pendant 37 années, une collaboration des plus importantes. Entre-temps, il collaborait à plusieurs Revues étrangères, participait aux Congrès et faisait en France ou à l'étranger des Conférences d'une haute tenue scientifique et morale (1).

(1) Qu'il nous soit permis de rappeler ici ce que le Dr Henri Desplats fut pour la Société scientifique de Bruxelles. Membre de notre Société depuis 1878, il présida à plusieurs reprises les travaux de la IVe Section des sciences médicales, et fut Président général en 1885-1886 et en 1910-1911. Nous eùmes quatre fois l'honneur de le compter parmi les conférenciers de nos assemblées générales. Il enrichit nos ANNALES d'une dizaine de mémoires ou de communications présentés à la IVe Section: citons en particulier son magistral rapport sur la dépopulation et l'infécondité voulue. Sa collaboration à cette REVUE nous fut aussi des plus précieuses: nous ne lui devons pas moins d'une dizaine d'articles de longue haleine sur des sujets médicaux. Sa bonne amitié et ses sages conseils ne nous firent jamais défaut, et nous gardons le souvenir reconnaissant du cordial accueil que le Pr Desplats et ses collègues de l'Université catholique voulurent bien nous faire lors de nos congrès de Lille (N. D. L. R.).

Mais la lourde charge de la vie professionnelle ne pouvait suffire à son activité : avec lui la Science allait toujours de pair avec la Charité, et il s'occupait d'œuvres nombreuses avec la plus active sollicitude et le véritable esprit d'organisation qu'il savait apporter en toutes choses.

Une de ses œuvres préférées était la Conférence Sainte-Eugénie des Étudiants qu'il avait fondée et qu'il maintenait à un degré de florissante prospérité; son assiduité aux réunions hebdomadaires du vendredi était proverbiale. Il tenait à s'occuper des moindres détails de son fonctionnement, connaissait toutes ses familles pauvres, s'associait à leurs joies et à leurs peines, était leur conseiller, leur ami, et... ce qu'il n'eût permis à personne de dire devant lui, leur bienfaiteur. Avec quel soin ne préparait-il pas leur Arbre de Noël qui était pour lui une vraie fête, aidé dans ce ministère de la charité par la main infiniment délicate et bonne qui savait être si maternelle aux déshérités de la vie !

Il était aussi le Président du Groupement du Nord de la Société Saint-Luc, Saint-Côme et Saint-Damien, dont il restait un des plus fermes appuis ; il ne manquait jamais d'assister, à Montmartre, aux réunions annuelles et chacun de nous sait l'impulsion vigoureuse qu'il donna dans le Nord au développement de la Société. Il y voyait la continuation nécessaire de l'oeuvre morale élaborée dans les années d'études et l'une des meilleures sauvegardes surtout des jeunes médecins. Chaque année, il se rendait à Lourdes au Bureau des Constatations, où son autorité et sa parfaite loyauté scientifiques ne pouvaient être discutées. Vice-Président du Conseii particulier des Conférences de Saint-Vincent de Paul, Conseiller de la Fraternité des Sœurs de l'Assomption, il était à tous ceux qui faisaient appel à sa charité. Nous le vîmes bien

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