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SOIRÉE XXXIII.

Intérieur de la maison impériale. - Munificence et économie de Napoléon. Une journée de Napoléon. L'empereur et un auditeur au conseil d'État. Libre accès des Tuileries. Etiquettes des réceptions. Cortège de l'Empereur allant à la messe. Audience des dimanches. Le comte de Portalis. L'abbé d'Astros. Revue des troupes. Napoléon et un grognard. — Habitudes gastronomiques de l'Empereur.

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La maison impériale montée, ses divers services eurent pour chefs des gens habiles et honnêtes. Le grand-maréchal du palais Duroc, duc de Frioul, y remplissait les fonctions suprêmes de surintendant-général; tous les divers budgets des diverses parties de l'ensemble passaient par ses mains, et subissaient son contrôle inflexible. Sa loyauté sévère, sa probité austère, répondaient parfaitement à la volonté bien connue du maître.

« Je veux donner, disait celui-ci, je ne veux pas qu'on prenne : la dilapidation dans un souverain, loin d'être une qualité, est un vice; les gens d'honneur et de mérite n'en profitent pas; la prodigalité n'est avantageuse qu'aux fripons et à la canaille, Certes, j'abhorre l'avarice, un prince ladre est, selon moi, le dernier des hommes; et l'économe d'entre eux est, à mes regards, le premier; l'économie bien entendue, sobre et non parcimonieuse, est un fleuve d'or où tous viennent boire, et qui ne cause pas d'hydropisie. »

Jamais, sous aucun règne de l'histoire de France et même sans mettre à part ceux des magnifiques Valois, les plus généreux, sans contredit, parmi toutes les races royales, sans craindre, en outre, le parallèle périlleux avec celui de Louis XIV, jamais, dis-je, on n'a tant obtenu de faveurs, de dons, de pensions, de secours, de gratifications, de cadeaux, de libéralités, d'aumônes, que pendant les quatorze années, où soit à titre de premier Consul ou d'Empereur, Napoléon Bonaparte nous gouverna.

Chaque obtention de bienfait impérial avait bon air, grand air, était noble et convenable; on n'y remarquait rien de chiche, de serré, d'avarice foncière, déguisée sous une munificence imparfaite; les pensions montaient toujours à la somme de six mille francs, dès qu'il fallait récompenser un savant célèbre, un littérateur illustre, un

artiste distingué. Que de familles honteuses, suivant leur nombre de membres, ou l'étendue de leur besoin et l'exigence de leur situation, recevaient depuis douze cents jusqu'à douze mille francs! Jamais un bon sur la cassette impériale n'était au dessous de cent écus; jamais on ne se défia de la sincérité d'une misère, et jamais, à cette époque, ainsi qu'à celle-ci, on ne déshonorait en retour d'une aumône de cinquante francs un pauvre honteux, chez son porțier, son propriétaire, son boucher, sa fruitière, etc.

Tous les malheurs étaient constatés, protégés, secourus; une lettre à l'adresse de S. M. 1. et R. mise à la poste, lui arrivait directement. Là, aucun protecteur que le bon droit, n'était nécessaire, et en retour de cette demande isolée, mais appuyée sur des titres irréfragables, un fils entrait à Saint-Cyr, ou obtenait une bourse dans quelque collège; une fille était appelée à partager l'éducation d'Écouen; une pension, une place, une charge, une décoration, survenaient comme tombant des nues, sans s'égarer, sans récompenser l'intrigant, le menteur, le chevalier d'industrie.

La mémoire prodigieuse de Napoléon n'oubliait aucun service rendu à la France, soit ancien, soit moderne, soit par les ancêtres du demandant, soit par les solliciteurs eux-mêmes. Il faut l'avouer: sous son règne, il y a eu peu de gens sans titres, sans mérite, élevés; les ministres, leurs commis, les

députés, les journalistes, les courtiers d'affaires, n'avaient pas d'influence; tel travail de noms élaboré dans l'ombre, et dans l'intérêt d'une cotterie, tombait, au jour de la signature, devant la liste chargée de noms honnêtes, connus et méritants, que l'Empereur tirait tout à coup d'un carton ignoré`; et les dispositions savantes des maîtresses, des amis soldés, s'évanouissaient devant une demande directe, énergique et franche. Voici ce que je peux conter à l'appui de ce que j'avance:

« Une création d'auditeurs au conseil d'État devait avoir lieu; M. de L..., toulousain d'origine et Montpeillerais de naissance, était porté pour obtenir cette faveur par son compatriote, et quelque peu parent mais éloigné, le prince Cambacérés, alors archichancelier de l'Empire. La veille où le travail élaboré par ce haut personnage, devait être remis au secrétaire d'État, Hugues Maret, duc de Bassano, investi, par sa place, du droit de le mettre sous les yeux de l'Empereur, une étrangère très-influente par son haut rang et mue par une mauvaise idée, se promit de nuire au très. jeune M. L..... de L..... L..... En conséquence, elle force l'entrée du sanctuaire du ministre suprême, parvient à l'ex-citoyen Hugues Maret, et lui arrache sans peine la parole que le nom du solliciteur sera rayé de la liste dernière.

» La galanterie ridicule du duc de Bassano était connue autant que ses prétentions littéraires, et

non moins absurde; il n'en fit faute en ce moment, et sans examiner si la prière n'était pas une injustice, il s'engagea à satisfaire une colère barbare et sans cause légitime. Le nom frappé d'ostracisme, à Cythère, est aussi rayé de la liste diplomatique. M. L.... de L..... L..... qui, la veille, comptait sur sa nomination, apprend sa mésaventure, mais sans en soupçonner la cause. Il court le matin du jour suivant chez le prince Cambacérés, et lui raconte sa mésaventure; elle était déjà connue, et elle avait irrité S. A. S., blessée dans son importance, car, enfin, on avait mis à l'écart un nom inscrit par lui et avec une apostille telle qu'il la fallait pour que le choix impérial s'attachât à ce nom. Le prince partage le chagrin et la mauvaise humeur de son protégé et allié; il s'engage à pénétrer dans ce mystère et à découvrir l'ennemi secret et puissant qui venait de porter un tel coup. Ceci avait lieu un samedi, et on ajourna le candidat au mardi suivant, afin que ce jour-là on lui éclairât cette manœuvre obscure.

A onze heures avant midi, au jour indiqué, M. L... de L... L... se rendit au palais du prince archichancelier, et avec quelques solliciteurs, attendit impatiemment l'arrivée de S. A. S. Elle paraît enfin, voit son parent, vient à lui, et l'ayant approché tandis que l'autre complétait ses trois révérences d'usage, chantonne à son oreille, de la voix la plus fausse du monde, ces deux vers si

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