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P. Monsabré lui-même pour avoir, dans tout un article de la Somme théologique, nié l'Immaculée Conception de la Sainte Vierge, définie depuis peu comme l'infaillibilité du Pape. Où donc a-t-on vu contre saint Thomas, saint Augustin, saint Cyprien, Tertullien, Origène, saint Irénée et tant d'autres Pères, qui ont soutenu quelques erreurs, des diatribes passionnées comme celles qu'ont écrites contre Bossuet gallican Joseph de Maistre, Lamennais, Rorhbacher, Dom Guéranger, Davin, Réaume, Gérin, le P. Longhaye, qui ne veut point qu'on regrette que Bossuet n'ait pas fini son Discours sur l'Histoire universelle, parce << qu'il avait le malheur d'être gallican »>? Ainsi, la perte d'un chef-d'œuvre tel qu'eût été le tableau du moyen âge et des temps modernes par Bossuet, ne cause aucun regret à cet excellent critique; il est bien près de souhaiter, comme de Maistre, que Bossuet fût mort avant la Déclaration de 1682: nous n'aurions ainsi ni l'Histoire des Variations, ni les Méditations sur l'Evangile, ni les Élévations sur les Mystères, ni les Lettres de direction, ni la Défense de la Tradition et des Saints Pères, c'est-à-dire aucun des plus beaux livres de notre langue. Ce ne sont pourtant pas les chefsd'œuvre du P. Longhaye, ni même ceux du comte de Maistre, qui les remplaceraient.

Mais qu'y faire? La passion est aveugle. Disons seulement que Bossuet ne devint pas gallican par courtisanerie, en 1682, comme on a osé l'écrire, mais qu'il avait été élevé dans les idées gallicanes, dont on trouve la trace dans ses Cahiers de théologie, et qui, d'ailleurs, étaient celles de la plupart des théologiens français du xvIIe siècle, sauf les Lazaristes, les Sulpiciens et la grande majorité des Jésuites. Disons encore, avec M. Algar Griveau, qu'à la fin de sa vie Bossuet avait abjuré le gallicanisme et qu'en tout cas il défendit expressément de publier la Defensio, qui, dès lors, n'exprime plus la dernière pensée de M. de Meaux. Disons enfin, avec M. Gaillardin, avec l'abbé Fleury, qu'au lieu que Bossuet ait été « l'âme, le dominateur de l'Assemblée de 1682 », il ressort clairement de ses lettres, de ses confidences à l'abbé de Rancé, à Fleury, à Le Dieu, « qu'il appréhendait... de grands dangers pour l'Église; qu'il a été tout au plus et par moments le modérateur » de

gens décidés, comme M. de Harlay, M. de Choiseul et Colbert lui-même, le véritable auteur des quatre articles, à aller jusqu'au schisme. Bossuet l'a empêché, en faisant accepter sa rédaction de la Déclaration à la place de celle de M. de Choiseul, et il disait à Le Tellier, archevêque de Reims : « Vous aurez la gloire d'avoir terminé l'affaire de la régale; mais cette gloire sera obscurcie par ces propositions odieuses. »

Toutefois, si Bossuet a été gallican avec presque tout le clergé séculier de France, Fénelon a bien été quiétiste, seul dans tout le clergé et condamné personnellement par le Pape: cela n'empêche pas ses amis de l'admirer à juste titre. Pourquoi donc se montrent-ils plus exigeants et plus sévères pour Bossuet, dont les œuvres oratoires, historiques, philosophiques, théologiques, mystiques, exégétiques, sont si supérieures à celles de Fénelon? Mystère, ou plutôt parti pris passionné.

Inutile, Messieurs, de vous rappeler à vous, qui connaissez si bien votre Bossuet, qu'il ne fut jamais janséniste, qu'il combattit également le jansénisme dogmatique, ou les cinq propositions avec toutes leurs conséquences, et le jansénisme moral, ou «< la rigueur affectée » des « docteurs trop austères » (1). Il les combattit en 1660, dans le Panégyrique de saint François de Sales, où il dit que « Jésus-Christ s'est déclaré le Sauveur de tous;... qu'il n'y a aucune condition... à laquelle il n'ait ouvert le chemin du ciel »>, et où il recommande une charité « sévère sans rigueur ». Il les combattit en 1662, alors que, dans son Sermon sur les devoirs des rois, il souhaitait que Louis XIV « pût éteindre dans ses États les nouvelles partialités », et dans son Oraison funèbre du P. de Bourgoing, il alla si loin contre les jansénistes, qu'un des leurs, le chanoine Hermant, de Beauvais, l'accusait de « briguer » les honneurs en parlant contre la secte. Il les combattit en 1664-65, où l'archevêque de Paris, Hardouin de Péréfixe, l'employa de préférence à tout le monde, à cause de sa science et de sa bonté, pour ramener à l'obéissance les religieuses de Port-Royal, auxquelles il écrivait une Lettre que Mr Freppel appelle « un modèle de discussion solide et de charité chrétienne ». Il les combattit

(1) Oraison funèbre de Nicolas Cornet, 1663.

les

en 1672 (?), dans une Lettre célèbre au maréchal de Bellefonds, où il taxe de « pure chicane » les efforts faits par jansénistes pour éluder le jugement de l'Église et condamner les cinq propositions de Jansénius, sans croire « qu'elles sont l'âme de son livre ». Il les combattit en 1681, alors que, prêchant en pleine cour, il se plaignait « du faux respect >> janséniste, qui éloigne des sacrements, de « peur de les profaner»; en 1688, dans l'Histoire des Variations, où il blâme les théologiens et les mystiques « dont la dureté rend la piété sèche et odieuse »; en 1696, où il rédigeait l'Instruction pastorale de Mgr de Noailles contre le livre de Barcos et écrivait à l'abbé Bossuet, le 17 septembre, que « les jansénistes en étaient consternés »; en 1699, où, à propos du Problème ecclésiastique, il exigeait 120 cartons aux Réflexions morales du P. Quesnel; en 1700, où il faisait condamner par l'Assemblée du clergé quatre propositions jansénistes, en prouvant qu'à chacune d'elles convenait la qualification de fausse, téméraire, scandaleuse, schismatique et injurieuse à l'Églisé, et où il appelait Arnauld « fauteur d'hérétiques »; ses amis, des << théologastres »; Ravechet «< un esprit de travers >>; Rouland << une tête de fer »; en 1702-1703, où, de l'aveu des jansénistes eux-mêmes, «< il fit paraitre un zèle merveilleux » contre la secte et fut, avec M. de Chartres, l'évêque qui se prononça « avec le plus d'éclat » contre le Cas de conscience. Enfin, déjà très malade et presque mourant, il consacra ses derniers efforts à dicter ou à écrire le traité que devait supprimer presque entièrement le janséniste Lequeux, De l'Autorité des jugements ecclésiastiques, pour réfuter les subtilités du Jansénisme. Il mourait ainsi les armes à la main contre la secte. N'est-ce donc pas méconnaître outrageusement l'histoire que de faire de Bossuet un janséniste malgré lui, alors qu'il a pris si souvent la peine de se déclarer l'adversaire du Jansénisme? Les universitaires, M. Leroy, M. Lanson, M. Brunetière, M. Gazier, M. Rébelliau et quelques ecclésiastiques qui les suivent, ont le tort grave de ne tenir aucun compte des témoignages de Bossuet, si formels et si catégoriques.

Les accusations contre l'orthodoxie de Bossuet écartées une fois pour toutes, selon l'exemple que nous donne

Léon XIII, qui, dans son libéralisme magnanime, le loue sans réserve, nous pouvons admirer à l'aise son œuvre théologique, toute inspirée « par les principes du grand docteur de la grâce (saint Augustin) et par ceux de saint Thomas, qu'il estimait le plus attaché à sa doctrine et son plus fidèle disciple »> (1).

>>

Quelle préparation, d'abord, que ces huit ou neuf ans consacrés à la théologie, au collège de Navarre, depuis 1644, où Bossuet fut reçu maître ès arts, jusqu'en 1652, où il prit le bonnet de docteur! Théologie « spéculative ou scolastique », théologie « positive » ou historique, théologie polémique ou controverse, théologie patristique, théologique, mystique, il menait tout de front, avec une ardeur que stimulait Nicolas Cornet, qui avait deviné immédiatement « le mérite » de son élève, et avec une facilité telle qu'il <<< semblait ne faire que jouer, tant l'étude lui était aisée », dit Le Dieu. Il traçait, en 1648 probablement, tout un Plan d'un traité de théologie, publié naguère, avec l'indication soit « des matières traitées dans la troisième partie de la Somme de saint Thomas », soit des « Traités des Pères les plus utiles pour commencer l'étude de la théologie » et se rapportant à l'idée générale de la religion, à la Trinité, à l'Incarnation, à la Grâce, aux Sacrements, à la Pénitence, à l'Église, à la Morale, à la Controverse avec les juifs. En même temps, il prenait des Notes, comme l'attestent de vieux cahiers qui se trouvent dans votre bibliothèque ou ailleurs. M. Phélip, de Lyon, m'en communiquait naguère sur la vraie Église, sur la présence réelle. On comprend qu'ainsi armé de toutes pièces Bossuet ait prononcé, au jour de son doctorat, ce magnifique discours qu'il répétait à Le Dieu, cinquante et un ans plus tard, avec un juvénile enthousiasme : « Je dévouerai ma tête à la mort pour Jésus-Christ et tout mon être à la vérité... Un docteur, en effet, n'est-il pas un témoin de la vérité? C'est pourquoi, Ô souveraine Vérité, conçue dans le sein du Père, nous nous enchaînons tout entiers à vous; nous vous consacrons tout ce qui respire en nous. »

Pour ce qui regarde la théologie spéculative, Bossuet nous (1) Le Dieu, Mémoires, p. 39.

en fournit des modèles admirables. Quelles pages magnifiques sur la vraie religion que le Sermon sur la divinité de la religion, ou plutôt de Jésus-Christ, prêché trois fois par Bossuet, et surtout que la deuxième partie du Discours sur l'Histoire universelle, contre les rabbins et les libres penseurs! Quelle superbe synthèse d'un traité sur la vraie Église que la Conférence avec M. Claude, le Sermon sur l'unité de l'Église, les Instructions sur les promesses de l'Église (17001701)! On n'a rien écrit de plus élevé ni de plus fort sur la Sainte Trinité que le commencement des Élévations sur les Mystères, qui enchantent M. Brunetière. N'a-t-on pas dit à bon droit que les Sermons de Bossuet sur la Sainte Vierge forment un merveilleux traité de l'Incarnation?

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La question si délicate, si importante, du péché originel et de la grâce est supérieurement traitée dans un chef-d'œuvre peu connu, le Traité de la Concupiscence (1693), où Bossuet est tout entier; dans la polémique avec Malebranche et dans les sept derniers livres de la Défense de la tradition et des saints Pères, encore un chef-d'œuvre, que M. Brunetière se plaint avec raison de voir trop ignoré. Le dogme catholique sur les sacrements est très exactement exposé, d'après le Catéchisme du Concile de Trente, que recommande Léon XIII, dans le Sentiment de l'évêque de Meaux sur les Cogitationes de Molanus, les Réflexions sur l'écrit de l'abbé de Lokkum, le Traité de la Communion sous les deux espèces (1682), la Tradition défendue sur la matière de la Communion sous une espèce (1683), la Dissertation sur la charité requise dans le sacrement de pénitence (1700). Enfin, il y a le Traité de l'usure et les quatre Petites Dissertations contre le probabilisme, à propos desquels on peut différer d'opinion avec Bossuet, mais qui sont des modèles de discussion claire et méthodique.

Quel magnifique cours de théologie morale ne pourrait-on pas extraire des œuvres oratoires de Bossuet!

Quant à la théologie positive, il en est, en même temps que Petau et Thomassin, l'un des premiers et le plus éloquent de nos maîtres français, avec ses deux Traités sur la Communion, l'Eclaircissement sur le reproche d'idolatrie (1689

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