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L'Église entière vous en a obligation et la France voit une erreur arrêtée... L'une et l'autre doivent avouer que Votre Grandeur a bien travaillé, et fort heureusement, pour en découvrir le venin... Tant que Dieu conservera Votre Grandeur, on aura un grand défenseur des Pères et des docteurs de l'Église. C'est, Monseigneur, ce que je demande à Dieu avec tout mon ordre. >>

On serait infini, si l'on voulait citer ici tous les témoignages flatteurs que les cardinaux de Rome ont adressés à Bossuet, pendant plus de trente ans, de 1670 à 1704. Ce sont d'abord le cardinal Cibo, le cardinal Noris, le cardinal de Aguirre, qui le louent de son excellent latin, de son Exposition de la doctrine catholique, de sa Lettre à Innocent XI sur l'éducation du Dauphin (8 mars 1679). Puis, viennent les cardinaux Spada, Albani, Altieri, Nerli, Barberini, Carpegna, Casanate, Colloredo, Censi, Ferrari, Ottoboni, Panciatici, Sacripanti, qui, d'après maintes lettres de Rome et surtout du P. Roslet, minime (octobre 1699), << honorent parfaitement » Bossuet. Ainsi, le cardinal Casanate, qui pendant la querelle du Quiétisme, <«<< agit et parle, sans aucune considération humaine, en faveur de la vérité, comme on pouvait l'attendre d'un si digne personnage » (Lettre du 20 janvier 1697). Par-dessus tous, le cardinal de Aguirre se signale par son affectueux dévouement pour Bossuet et, pendant vingt années, il «< comble de joie (le grand évêque) par les marques sensibles de sa tendre et précieuse amitié » (12 avril 1699). Le nonce de France, Ms Delphini, archevêque de Damas, veut à tout prix faire de Bossuet un cardinal. Il y a plus le Sacré Collège, en 1673, avait accordé à M. de Condom le gratis entier pour ses Bulles d'abbé de Saint-Lucien de Beauvais. « Ce gratis, écrivait l'abbé de Servien à M. de Pomponne, le 19 avril 1673, a été accordé avec tant de distinction qu'il n'y a rien eu encore de pareil. » Bossuet pouvait dire au docteur Dirois : « Je suis sensiblement touché de la manière dont le gratis de l'abbaye de Saint-Lucien de Beauvais m'a été accordé par le Sacré Collège. La promptitude, la facilité, le concours sont d'agréables circonstances de cette grâce, et les bontés de leurs Éminences, si obligeamment déclarées, y mettent le comble.

Je dois tout à M. l'ambassadeur et à M. le cardinal d'Estrées. » Sa modestie se trompait il devait tout au livre de l'Exposition, pour lequel il reçut deux Brefs d'approbation du Pape Innocent XI, sans compter le Bref relatif à l'éducation du Dauphin et signé par le cardinal Cibo.

En septembre 1681, nouveau Bref d'Innocent XI, faisant grâce à Bossuet des frais de l'expédition de ses Bulles pour Meaux, à cause des « magnifiques monuments de son génie et de ses immenses mérites: Præclara ingenii tui monumenta, ingentiaque merita ». « Les cardinaux, écrivait à ce sujet le cardinal d'Estrées au Roi, qui avait affirmé (1) au Pape « que Sa Sainteté ne pouvait appliquer ses grâces à un sujet qui les mérite mieux », les cardinaux signalèrent leur bonne volonté par beaucoup d'expressions obligeantes. Ce consentement unanime marque l'opinion qu'a le Sacré Collège du mérite de M. de Meaux. (2) ›

Les douloureuses affaires de 1682 refroidirent Rome; mais, dès 1695 et 1696, le cardinal de Aguirre félicitait Bossuet de << son livre d'or », l'Histoire des Variations. - Le pape Innocent XII lui adressait un Bref très élogieux pour les États d'oraison, 1697, et il parlait de Bossuet avec un singulier enthousiasme. Il témoignait pour lui «< une estime infinie » (3). << Comment va ce grand évêque, disait-il, ce grand défenseur de la foi? Sa santé est nécessaire au bien de l'Église. Je prie Dieu continuellement pour lui. Je le porte dans mon cœur (4). » <«< Le Pape, écrit l'abbé Bossuet le 25 juin 1699, m'a prié de vous assurer, aussi bien que M. de Paris, de son affection, de son estime et de tout ce que vous pouvez désirer. (5) » « Il m'a parlé très avantageusement de vous, écrit à son tour le prince de Monaco (7 juillet 1699), m'ayant dit en propres termes, qu'elle vous regardait comme un évêque également doué de vertus, de piété et de doctrine. (6)

(1) Lettre de Louis XIV, 12 mai 1681.

(2) Lettre du cardinal d'Estrées, 24 septembre 1681.
(3) Lettre du 20 octobre 1699.
(4) Lettre du 1er juillet 1697.
(5) Lettre du 18 mars 1698.
(6) Lettre du 28 avril 1699.

Voilà comment parlait de Bossuet un Pape cordialement dévoué à la France et que bien des historiens et des critiques nous représentent comme donnant raison à M. de Cambrai et ne le condamnant qu'à contre-cœur, parce qu'il le préférait à M. de Meaux.

Enfin, Clément XI, l'ancien cardinal Albani, fit à Bossuet le plus grand honneur qu'il pût rêver, ou plutôt qu'il rêvait depuis cinquante ans : il le pria de préparer un projet de réunion pour les Églises protestantes, comme celui que le grand évêque avait ébauché avec l'abbé Molanus et Leibniz.

M. Brunetière, qui parlait naguère à Rome si éloquemment de ce projet de réunion, comme d'une preuve de la modernité de Bossuet, aurait pu rappeler ce désir de Clément XI, pour mieux glorifier Sa Sainteté Léon XIII, qui continue si bien les traditions séculaires de ses prédécesseurs : c'est ce que prouvent ses efforts pour ramener les dissidents dans le giron de l'Église, sa Lettre au cardinal Rampolla, du 15 juin 1887, sa Lettre aux Polonais, du 19 mars 1894, sa Lettre aux Anglais, du 14 avril 1895, ses Encycliques Principibus populisque universis, du 20 juin 1894, et sur l'Unité de l'Église, du 20 juin 1896, comme aussi l'honneur incomparable qu'il fait à «< notre grand Bossuet, à l'aigle de Meaux », ainsi qu'il l'appelle, en invitant la France entière à lui élever une statue, digne de son éloquence, digne de son immortel et lumineux génie.

23 février 1900.

VII

Bossuet historien (1)

Parmi les œuvres de Bossuet, ses œuvres historiques sont les plus méconnues peut-être, du moins les plus mal comprises par certains critiques.

Et pourtant, La Bruyère, qui devait à Bossuet sa place chez les Condé et qui le louait en pleine Académie, le 15 juin 1693, faisait passer chez lui l'historien après l'orateur et avant le théologien et le philosophe, il disait : « Orateur, historien, théologien, philosophe, d'une rare érudition, d'une plus rare éloquence;... un défenseur de la religion, une lumière de l'Église, parlons d'avance le langage de la postérité, un Père de l'Église. » Lorsque, à la fin de mars 1681, parut le Discours sur l'Histoire universelle, le célèbre bénédictin Dom Mabillon écrivait aussitôt à son ami Magliabecchi : « Il n'y a rien de plus beau que ce Discours. (2) » Charles Perrault écrivait, dans son Parallèle des anciens et des modernes, 16881696, 4 vol., t. II, pp. 99, 100: « Vous parlez de majesté, vous parlez d'élévation; eh bien, je soutiens qu'il y en a plus dans ce livre de M. l'évêque de Condom que dans Thucydide. Oui, la manière dont la suite des temps est développée dans ce Discours, dont y sont marquées l'économie admirable des révolutions et la conduite ineffable de Dieu sur l'univers, par rapport au Christianisme et au salut des hommes, tout cela est infiniment élevé au-dessus de tout ce qui nous reste des Anciens en pareille matière. »

(1) Conférence faite à Verdun, le 7 juin 1900, devant Sa Grandeur Mgr Pagis.

(2) Lettre du 31 mars 1681. Correspondance inédite de Mabillon, de Montfaucon, etc., publiée par Valéry, 1846.

Quant à l'Histoire des Variations, annoncée avec bruit et attendue avec impatience par les adversaires de l'auteur, elle n'eut pas plutôt paru en mai 1688 qu'elle fut signalée à toute l'Europe. Le Journal des savants du 2 août 1688 en donnait un compte rendu, qui ne « respire que l'admiration sans réserve d'un catholique et une entière adhésion aux conclusions de Bossuet». Les gazettes protestantes, l'Histoire des ouvrages savants de Basnage, à Rotterdam, la Bibliothèque universelle et historique de Le Clerc et La Croze, à Amsterdam, les Nouvelles de la République des Lettres, les Actes des érudits de Leipzig, avaient beau affecter le dédain pour une œuvre manquée; elles révélaient, par l'étendue même des analyses qu'elles faisaient de l'ouvrage de Bossuet, l'importance d'une attaque contre laquelle allaient se coaliser, pendant plus de quarante ans, toutes les forces vives du protestantisme.

En dehors du Discours sur l'Histoire universelle et de l'Histoire des Variations, c'étaient des œuvres d'histoire autant que de polémique et de controverse que la relation de la Conférence avec M. Claude, 1682, le Traité de la communion sous les deux espèces, 1682, et la Relation sur le Quiétisme, 1698, auxquels il faut ajouter l'Histoire de France, publiée en 1747, avec la Tradition défendue sur la matière de la communion sous une espèce, rédigée en 1682.

Tel est l'ensemble des œuvres historiques de Bossuet, d'après M. Rébelliau, dans sa remarquable thèse Bossuet historien du protestantisme, 1891, et d'après M. Crouslé, qui le complète dans son Fénelon et Bossuet, 1894-95.

Or, personne encore n'a envisagé toutes ces œuvres pour en dégager la vraie physionomie de Bossuet historien, étrangement défigurée par Voltaire et nos libres penseurs.

I

ni

D'après l'auteur de l'Essai sur les mœurs et sur l'esprit des nations, 1740-1756, Bossuet « n'a été ni assez complet, assez exact ». Il s'est arrêté à Charlemagne et il faudra le continuer. Sa conception de l'histoire est trop étroite: «< Il parait avoir écrit uniquement pour insinuer que tout a été fait dans

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