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notre être en elle; et pourrait-elle donc recevoir la perte d'un cœur défaillant pour mourir en elle? Venez, ô Jésus, venez, et que je languisse après vous... Ah! je ne veux pas seulement languir, je veux encore mourir pour vous,... m'abîmer en vous, me perdre en vous. Ah! fendons-nous le cœur de regret d'avoir été un moment sans aimer... O Jésus, vous êtes le seul que je veux qu'on aime. »>

Voilà, certes, de magnifiques élans de cœur qui mériteraient d'être plus connus. Ils s'expliquent par la dévotion sincère et profonde qu'avait Bossuet pour la sainte Eucharistie. « Il était appliqué tout entier aux saints mystères qu'il célébrait, et quand il voyait les autres célébrer et faire l'office avec dévotion, il en était le premier attendri et édifié. »

Qui donc a jamais parlé de la sainte communion comme le fait Bossuet dans les Méditations sur l'Évangile, écrites avec son cœur encore plus qu'avec son génie? « Un jour du SaintSacrement, dit sœur Cornuau, le mauvais temps ayant empêché la procession de sortir, on la fit dans l'église. Comme elle fut assez longue, (sœur Cornuau) vit plusieurs fois passer le Saint-Sacrement par l'endroit où elle était, et il lui semblait que le saint prélat qui le portait était tout perdu en ce qu'il tenait. » Elle lui en parla un peu plus tard et «< il lui avoua bonnement qu'il avait encore plus porté le Saint Époux dans son cœur que dans ses mains; que là il lui avait dit tout ce qu'un amour tendre et respectueux peut dire, et qu'il avait été si occupé de cette jouissance qu'il n'avait pas pensé s'il marchait ou non. »

Cet amour de Dieu immense » se manifestait dans l'administration des sacrements, de la confirmation en particulier. << Il étonnait les gens, dit son secrétaire, par son sérieux, par sa gravité et par sa constance. Pour sa modestie, c'était celle d'un ange plutôt que celle d'un homme, je le dis à la lettre : ses yeux suivaient son action avec une retenue qui inspirait aux autres la dévotion. »

« Quand il donnait l'absolution, dit sœur Cornuau, il renouvelait son attention avec une dévotion surprenante et une ferveur qui quelquefois l'emportait comme hors de lui-même : il demeurait assez de temps les deux mains levées, dans un

silence profond, et quand il prononçait les paroles de l'absolution, il semblait que c'était Dieu même qui parlait par sa bouche, tant il en sortait d'onction. >>

Après les sacrements, ce qu'aimait le plus la piété ardente du grand évêque, c'était la parole de Dieu, c'était l'Ecriture Sainte, qu'il regardait comme un sacrement, comme un mystère mystère et sacrement semblables à celui de l'autel, à celui du Corps et du Sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Aussi, depuis l'âge de quatorze ou quinze ans, où la lecture de la Bible le charma, dans le cabinet de son père, il en fit son aliment et ses délices jusqu'au jour où il écrivait à ses prêtres : « In his senescere, in his immori, summa votorum est. Mon vœu suprême, c'est de vieillir, c'est de mourir sur nos Livres saints. » La Providence permit la réalisation de ce vœu sacré. En attendant, il savait la Bible par cœur, «< ne cessait de la lire et relire tous les jours de sa vie ». Dans sa voiture même, il prenait soin qu'on mît un Nouveau Testament avec son bréviaire.

<«< Dans le cours de vingt années, dit Le Dieu, je ne l'ai jamais vu monter en chaire qu'après s'être prosterné en secret aux pieds de son crucifix, dans une humiliation profonde, pour demander les lumières du Saint-Esprit... Je l'admirais allant d'une paroisse à l'autre, l'Évangile à la main, le méditant pour se pénétrer des vérités qu'il voulait annoncer aux plus simples, avec une attention respectueuse et un esprit de prière, plutôt qu'avec ses grandes lumières. »

Après la Bible et la parole de Dieu, ce qui charmait le plus la piété de Bossuet, c'étaient les entretiens spirituels avec les religieux, et les religieuses, « mes saintes filles »>, comme il les appelait. « Qu'on est heureux, ma fille, disait-il un jour, quand on peut parler de Dieu, de ses bontés et de son amour à des âmes qui en sont touchées! » De là, ces conférences <«< d'une beauté enchantée », qu'il faisait au Carmel de Paris, à la Visitation et chez les Ursulines de Meaux. « Ce grand homme, disent les Mémoires de la Visitation, qui s'était élevé si haut dans l'estime de son siècle, et par la sublimité de sa science et par son génie prodigieux, ce grand homne, dans son air recueilli et absorbé en Dieu, semblait sortir du fond

du désert pour apprendre à aimer Dieu souverainement et å mépriser le monde et ses maximes. Il répondait à nos questions sur l'Écriture Sainte et la vie intérieure avec tant d'onction et de clarté que nous croyions être au ciel. »

Non, ce n'était pas le ciel; mais c'était bien la parole d'une âme nourrie des choses du ciel. Bossuet, pour s'en mieux pénétrer, allait à la Trappe chez son ami de Rancé, pour y faire sa retraite huit fois, de 1682 à 1696. « II vaquait à tous les exercices de la Communauté et n'y prenait pas d'autre nourriture... L'abbé était ravi de le voir à l'office du jour et de la nuit, au réfectoire et partout, un si grand exemple ne pouvant manquer d'encourager ses religieux. » « La Trappe, au dire de Bossuet, était le lieu où il se plaisait le mieux après son diocèse.» « Je suis affectionné à la Trappe, écrivait-il, comme serait un de vos religieux. »

S'il n'avait pas l'habit du trappiste, il en avait l'âme, et il estimait par-dessus tout ces vœux qu'on méprise aujourd'hui et qu'on veut supprimer, sous prétexte qu'ils ont « pour objet des choses qui ne sont pas dans le commerce ». Sœur Cornuau nous raconte que « ce saint prélat avait un si grand amour pour les vœux de la religion qu'il ravissait, quand il en parlait. Il a dit plusieurs fois qu'il tâchait de vivre comme s'il les avait faits; qu'il se regardait dans sa dignité comme ne possédant rien,... et qu'il n'avait d'argent que pour les charités qu'il faisait; quelquefois même son intendant ne lui en donnait pas facilement, et il en éprouvait de la joie, parce que cela le faisait entrer dans l'esprit de la sainte pau

vreté ».

Où sont-ils donc ceux qui prétendent que Bossuet était ignorant des secrets du mysticisme et de la spiritualité? Il en avait mieux que la science : il en avait la pratique, et l'on comprend que le cardinal de Noailles « lui donnât le titre de grand maître de la vie intérieure ». L'on comprend que sœur Cornuau parle de « toutes les héroïques vertus qu'elle a eu l'honneur de voir en ce saint Père, ce saint guide », admirable par sa profonde humilité, par sa pureté angélique, par sa piété, son immense charité, « sa sublimité dans la vie intérieure », qui lui font devant Dieu une auréole plus belle en

core que celle que mettent à son front les multiples chefsd'œuvre de son merveilleux génie.

II

Les vertus extérieures du zèle sacerdotal et épiscopal, mes Frères, ne sont que le rayonnement d'une grande âme de prêtre et d'évêque, et ce rayonnement est toujours en raison directe de l'intensité du foyer dont il émane. Le divin Maître nous l'enseignait, quand il définissait ainsi saint Jean-Baptiste, son précurseur et le plus grand des enfants des hommes: « Ille erat lucerna ardens et lucens; c'était une lampe ardente et luisante (1). » Elle brûlait d'abord, et puis elle brillait, ou plutôt elle ne brillait que parce qu'elle était embrasée.

Bossuet en était convaincu, lorsqu'en 1660, il appliquait à saint François de Sales, dans le Panégyrique de ce grand évêque qu'il aimait tant, les paroles de l'Évangile à propos de saint Jean et faisait voir « combien a relui ce flambeau sacré », parce qu'il « échauffait puissamment par sa douce charité ».

Ce n'est peut-être pas l'avis de ceux qui ne parlent à notre époque que de l'action extérieure du clergé « allant au peuple». Mais c'est la pensée de Léon XIII, quand il recommande. aux prêtres français d'être avant tout « le sel de la terre, et de ne jamais perdre de vue le conseil de saint Paul: In omnibus teipsum præbe exemplum bonorum operum, in doctrina, in integritate, in gravitate, verbum sanum, irreprehensibile (2). En toutes choses, donnez le bon exemple par vos œuvres, par votre doctrine, par l'intégrité de votre vie, par la gravité de votre conduite, en ne faisant usage que de paroles saintes et irrépréhensibles. »

C'est parce qu'il était « la forme », l'idéal « de son troupeau par le cœur et par l'âme, forma facti gregis ex animo », que notre grand Bossuet avait toutes les qualités d'un zèle extérieur aussi fécond qu'admirable. Volontiers, il eût dit comme

(1) S. Jean, v. 35.

(2) Ep. à Tite, 1, 7, 8.

saint Ignace de Loyola : « Da mihi animas; cætera tolle tibi. Donnez-moi les âmes; prenez le reste pour vous. »

Bossuet aimait les âmes d'une charité ardente, d'une charité universelle, d'une charité douce et bénigne, d'une charité souverainement efficace.

Admirez d'abord, mes Frères, les ardeurs apostoliques de ce grand cœur. Elles éclatent dans le serment qu'il prononçait à l'âge de vingt-cinq ans, en 1652, lorsqu'il reçut le bonnet de docteur: « Je dévouerai ma tête à la mort pour Jésus-Christ et tout mon être à la vérité. Qu'est-ce qu'un docteur, sinon un témoin de la vérité?... O souveraine vérité, conçue dans le sein du Père......, nous nous enchaînons tout entiers à vous; nous vous consacrons tout ce qui respire en nous; nous comprenons désormais que ceux-là ne doivent point ménager leurs sueurs à son service qui ont à être pour elle prodigues de leur sang. » Telle était la conviction avec laquelle Bossuet se consacrait ainsi à faire naître la vérité dans les âmes qu'à cinquante-un ans d'intervalle, en 1703, il répétait à son secrétaire ravi la formule latine de ce serment solennel, auquel il n'avait jamais manqué.

Jeune prêtre, il s'écriait dans une confidence d'une merveilleuse beauté : « L'âme fidèle, regardant (Jésus) tout couronné d'âmes qu'il a conquises par son Église, veut être consumée d'amour pour lui et pour les âmes... Elle regarde celles qui se perdent comme autant de pierres précieuses qu'on arrache de la couronne de Jésus-Christ; elle prie sans cesse que sa couronne soit complète et qu'aucune âme ne périsse... O Jésus, couronné des âmes! ô âmes! couronne auguste de Jésus-Christ! faut-il que vous vous perdiez! faut-il qu'aucune se perde! Là, dans l'amour de Jésus, on conçoit un amour infini pour toutes les âmes et on ne veut penser à la sienne que par l'amour sans bornes que l'on désire d'avoir pour toutes en général et pour chacune en particulier. O Jésus! par la soif ardente que vous avez eue sur la croix, donnez-moi d'avoir soif de toutes les âmes... Je veux les aimer toutes, parce qu'elles sont toutes capables de vous aimer, que c'est vous qui les avez faites avec cette bienheureuse capacité, et

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