Quant à l'homme et à l'écrivain, M. Rébelliau voit un «< mé- lange heureux de la science avec la religion
dans le style des Variations. Mais cette acclimation érudite » n'aurait pas persisté.
Or, elle est manifeste dans le Traité de la Concupiscence, les Maximes, les Méditations, les Élévations. M. Rébelliau cons-
tate la variété du style de Bossuet, où se font sentir la phrase la- tine, la Bible et les Pères, plus que ne le dit l'auteur. Bossuet est simple, mais non pas trivial; la simplicité dans la magnifi-
cence est sa caractéristique beaucoup plus que l'accent oratoire ». Chez lui, « le style est l'homme même M. Rébelliau, qui parle si bien du caractère trop méconnu de Bossuet, ne le méconnaît-il pas lui-même en parlant de « l'apre Bossuet des derniers jours »? Il aura été gêné par les éloges de la Revue bleue et la Faillite de Bossuet, du Siècle......
bonnes àmes qui parlent de la « bénignité de Bossuet sont tous ses contemporains et Saint-Simon lui-même. Bossuet n'a pas gâté par des rigueurs sa mansuétude » envers les « frères Il n'est pas vrai qu'il n'ait « reculé devant rien tre Richard Simon, le P. Caffaro, Launoy. Leibniz ne s'est pas plaint de son ton décisif et altier Bossuet n'a été trop vif» et ni avec Ferri et les protestants, ni avec Me Guyon, Fénelon, Richard Simon, Malebranche.....
Très libéral en direction, Bossuet était gai, sobre, frugal. — Sa « men- talité ne semble ni
ses Sermons de vêture, ni la plupart de ses œuvres ne sont « des lieux communs », « des vérités claires et grosses »>. - M. Brunetière estime à bon droit que Bossuet est « moderne » pour avoir exprimé dans un style définitif des vérités éternelles. Insultes de
M. Henry Bérenger contre le « cardinal hors cadres »..... M. Rébelliau, Chateaubriand, Mmes de Sévigné et de Caylus calom- nient Bossuet, à propos du départ et de la rentrée de Mme de Mon- tespan à la cour. La conduite du prélat fut celle d'un pontife des premiers temps », et il faut le féliciter de n'avoir pas eu «< l'es- prit de la Cour ».......
La correspondance avec Leibniz n'était pas une << négociation »>, mais une « controverse ». Bossuet a reçu beaucoup de lettres de solliciteurs ». (( Il était révéré de tous à la Cour. Il ne << souffrit » jamais de sa « situation secondaire », suffisante pour son humilité. Il eut de la « candeur », de la « bonhomie »>, mais pas de « naïveté », de « maladresse », d'« étroitesses ». — M. Bru- netière à Besançon a répondu à toutes ces critiques, en exposant les divers ordres de vérités qui nous frappent................ L'idée générale de M. Rébelliau sur Bossuet, « se formant et se dé- formant sous la pression des hommes et des choses », est absolument
inexacte, sauf pour le gallicanisme, dont il s'est corrigé. cette erreur initiale de M. Rébelliau découlent toutes les autres, qui font qu'il n'a pas donné le « vrai Bossuet ». — M. Brunetière en a parlé mieux que lui, en nous le montrant plus grand par le cœur que par le génie.....
Bossuet et le Père Quesnel.
D'après la Revue du Clergé français, Bossuet serait « l'apologiste du P. Quesnel
I. — Né en 1634, oratorien en 1657, le P. Quesnel publia ses Pensées
chrétiennes en 1671 et les Œuvres de saint Léon en 1675 : elles
furent mises à l'Index, ce qui provoqua des lettres insolentes de
Quesnel. Exilé à Orléans, il refusa de signer un formulaire anti-
janséniste et se rendit auprès d'Arnauld. - 11 joua un rôle consi-
dérable et devint bientôt le « Père prieur » de la secte. Il pu-
blia un grand nombre d'ouvrages, que leur onction fit goûter..... 413
Diverses éditions des Réflexions morales, 1671, 1679, 1687, 1693, 1695. Approbation de Mar de Noailles, qui condamne en 1696 le livre de Barcos. Problème ecclésiastique, 1698-99. Bossuet est prié d'y répondre et de « justifier » son métropolitain, mais non pas le P. Quesnel, bientôt arrêté, évadé de prison et écrivant d'Ams- terdam maints pamphlets, jusqu'à sa mort en 1719. On peut louer Voltaire et Pascal sans être leur Bossuet
est tout au plus « l'apologiste » des Réflexions morales, comme
M. de Harlay, le P. de La Chaise, le Pape Clément XI........... 416
« L'authenticité de la Justification des Réflexions morales
a-t-elle une importance décisive pour déterminer le rôle de Bossuet dans les querelles du Jansenisme? » Non, certes. Ce rôle se déter- mine par ce que le prélat a fait et publié de son vivant. Le titre de Justification est apocryphe. - Bossuet était anti-janséniste en 1660, en 1662, en 1663, en 1664-65, en 1669-71, en 1681, en 1685, en 1688, en 1692, en 1695, en 1696, où il condamnait le livre de Barcos, en 1699, en 1700, en 1701, en 1702-1703, où il triomphait de la condamnation d'un livre du P. Quesnel, en 1704 enfin. — Oublier tous ces faits, est-ce être impartial?.......
D'ailleurs, l'authenticité de l'Avertissement, reconnue en 1710, n'a
fait accuser Bossuet de Jansénisme, ni par Mer de Bissy, ni par Le
Dieu, ni par le docteur Gaillande, ni par Mg de Saléon, ni par
les Jésuites de Colonia et Patouillet. L'abbé Guettée, mort pope
russe, Albert Le Roy et M. Urbain sont seuls à taxer Bossuet de
Jansénisme à ce propos..
Quant à « la fable », à « la légende des « 120 cartons exi- gés par Bossuet pour les Réflexions morales, il est d'abord inexact
de prétendre qu'il n'avait entrepris l'Avertissement qu'à condition
qu'on ferait les 120 corrections demandées : il avait travaillé pour
Mgr de Noailles et contre le Jansénisme de Quesnel avant le Pro-
blème ecclésiastique et sans poser de condition. Il exigeait,
sans doute, des cartons, puisqu'il en reste 25 et que Bossuet lui-
même les signale (§ XXIII). - Le nombre de 120 est accessoire.
Toutefois, il ne vient pas de Gaillande. L'abbé de Saint-André, très
digne de foi en 1722, comme en 1711 et dans le récit pour Vinslow,
parle de « 80 cartons », puis de plus de cent endroits à retou-
cher », d'après une abbesse et le président Le Pelletier. Gail-
lande, en disant 120, n'a été contredit ni par Le Dien, ni par M. de
Saint-André, ni par Quesnel lui-même.....
Ce ne sont pas des « bruits vagues et d'autorité suspecte » que le té-
moignage de Mme de Maintenon, que celui de l'abbé de Saint-André,
que celui de Le Pelletier, que celui du cardinal de Bissy, que les
Lettres conservées encore en 1714, que ce qu'ont écrit les Jésuites
de Colonia et Patouillet. Bossuet n'était pas « l'apologiste » d'un
livre qu'il estimait « dangereux », « pernicieux », « infecté de Jan-
sénisme
IV. — Il était simplement « l'apologiste » de M« de Noailles, accusé
de Jansénisme, alors qu'il avait lancé l'ordonnance du 20 août 1696
et condamné les Cinq propositions. Bossuet n'a point « d'indul-
gence » pour la Version de Mons, qu'il travaillait en 1668 à « ré-
former en tout » et à laquelle il préférait, en 1674, celle du P. Ame-
lot. Lettre de 1685. - L'Avertissement répond au Problème ec-
clésiastique, et Bossuet « dirige les répliques qu'on lui fait..... 442
Il condamne les propositions de Jansenius, renouvelées par Quesnel :
la première, sur les « commandements impossibles »; la seconde,
sur « la grâce nécessitante » (s'il est thomiste, il n'est pas jansé-
niste); la troisième, sur la négation du libre arbitre; la quatrième,
sur la nécessité de la grâce prévenante, à laquelle on ne pourrait
résister; la cinquième, sur le Christ qui ne serait pas mort pour
tous les hommes. Bossuet ne peut être à la fois, comme le dit
M. Urbain, « l'apologiste du P. Quesnel » et l'adversaire des « Cinq
propositions », qui constituent le fond des Réflexions morales.... 446
Quesnel, de plus, renouvelle le pèlagianisme pour l'état de nature
entière. Il voit « des péchés » dans tous les actes que n'inspire pas
la charité chrétienne. Il condamne comme « servile» la crainte
des jugements de Dieu, et comme « criminels » les actes de foi,
d'espérance et des autres vertus que n'anime pas la charité. Or,
Bossuet réprouve toutes ces erreurs....
V. — Si l'Avertissement n'a point paru, nous savons pourquoi par des « indications précises », que nie M. Urbain. Le Dieu dit en 1711 que l'archevêque de Paris « ne jugea point à propos de le faire im- primer», quoiqu'il « descendit à réfuter officiellement » le Pro- blème ecclésiastique. Il en coûtait à son amour-propre de « se cor- riger lui-même », comme le dit Le Dieu dans son Journal, en 1702 et 1704 Bossuet se plaignait qu'on n'eût pas utilisé « le meilleur de son écrit », des parties « qui tranchaient dans le vif », mais al- teignaient M de Noailles, qui s'égara, quand il n'eut plus Bossuet pour lui servir de guide..........
<< Calomnies sur calomnies. »
C'est le mot de Mathieu Marais à propos de la fable du mariage de
Bossuet, inventée par le prêtre apostat Denis et reproduite par Jor-
dan, d'Argens, Voltaire, La Beaumelle, l'Encyclopédie, Prosper
Marchand, Irailh, Maurepas et Potter. - L'abbé Jacques Fouilloux,
Le Dieu, Levesque de Burigny, Barral, Le Roy, dom Clémencet, d'A-
lembert, de Bausset, Floquet, Drioux, Garnier, Rébelliau, avaient
si bien fait justice de cette calomnie qu'on s'étonne de la voir réédi
tée en partie par M. Beaugrand dans une étude intitulée: Est-
ce un madrigal de Bossuet? où il veut attribuer à « M. de Condom >>
un fragment sur l'Espérance, qui suppose «l'expérience des
choses de l'amour. Il ne donne aucune preuve et calomnie Bos-
I. D'abord, de 1671 à 1681, il y a eu deux « M. de Condom »> :
pourquoi attribuer à Bossuet ce qui a pu être l'œuvre de Jacques
de Goyon de Matignon? En second lieu, le témoignage de l'abbé
Legendre, invoqué par M. Beaugrand, n'est qu'un tissu d'erreurs
grossières sur ce qui se passa à la mort de Bossuet, où Mile de Mau-
léon, au lieu de réclamer « son douaire et ses conventions » de
« veuve », se vit réclamer par les héritiers du prélat les sommes qui
lui étaient dues, et cela sans « scandale », ni « intervention de
Louis XIV ». En troisième lieu, le roman de Legendre sur les re-
lations amoureuses de Bossuet et Ml de Mauléon n'est bâti que sur
des faussetés, des anachronismes et des impossibilités absolues.
En quatrième lieu, ni à la cour ni à Meaux, Mile de Mauléon n'a
été « maîtresse » chez Bossuet, inattaquable dans ses mœurs.......
La Lettre de l'abbé Fouilloux, janséniste, est d'un témoin oculaire, d'au-
tant plus digne de foi que Bossuet a fait « enrager » la secte. 11
s'accorde parfaitement avec Le Dieu sur la jeunesse de Bossuet et
sur ses relations avec Mlle de Mauléon, « une enfant » de neuf à dix
ans, quand il en avait 37 à 38. · Ce n'est pas la marquise de Sen-
necey qui « fit connaître ce que valait Bossuet » à la cour de la du-
chesse d'Orléans la tante de Mile de Mauléon peut y être pour
beaucoup. Enfin, toute la fin du récit de Fouilloux sur « le con-
trat de cautionnement est parfaitement d'accord avec le texte de
Le Dieu. M. Beaugrand ne fait que répéter les dires
tiques, des quiétistes et des libertins ».....
II. — Il « incrimine » à tort Bossuet, qui n'a « défrayé la chroni-
que scandaleuse de son temps » ni à Navarre, ni à Metz, ni à Paris,
ni à la cour, ni à Meaux. - Saint Vincent de Paul, Le Dieu, Nicolas
Colbert, un factum d'adversaires en 1660-64, le professeur Maury, le
maréchal de Bellefonds, M de La Vallière, Mme de Montespan, les
Cambraisiens, Fléchier, le P. de La Rue, lui rendent les plus beaux
témoignages
« ÖncekiDevam » |