Sayfadaki görseller
PDF
ePub

III

Bossuet et Lyon, d'après des documents
du XVIIe siècle (1)

Lorsque, il y a un an, Son Eminence, notre vénéré cardinal, publiait dans la Semaine religieuse la Lettre que lui avait adressée Mgr de Briey, évêque de Meaux, à propos du Monument à élever à Bossuet en 1904 dans son antique cathédrale, on pouvait y lire, ainsi que dans l'admirable Lettre de Sa Sainteté Léon XIII à Son Eminence le cardinal Perraud, de l'Académie française, président du Comité du Monument de Bossuet, que, si ce grand homme appartient avant tout à la ville et au diocèse de Meaux dont il a porté le nom, il appartient à nous tous, Français, comme l'une de nos gloires nationales les plus hautes, les plus pures et les plus rayonnantes.

Et pourtant, quelques villes, en dehors de Meaux, ont le droit de le revendiquer plus particulièrement pour elles : Dijon, qui s'honore et doit s'honorer à jamais de lui avoir donné le jour; Metz, alors la « ville vierge », aujourd'hui, hélas! foulée aux pieds par l'étranger, et où Bossuet, chanoine dès 1640, archidiacre de Sarrebourg en 1652 et de Metz en 1654, doyen du chapitre en 1664, se révéla comme un mer

-

Le

(1) Conférence faite aux Facultés catholiques, le 9 février 1900. conférencier, après avoir remercié de leur présence Mrs Déchelette et Vindry, vicaires généraux de Lyon, a présenté à l'assistance un portrait de Bossuet, copie d'un Rigaud de 1700 (?), gracieusement mise à la disposition des Facultés par M. le chanoine Déchelette, supérieur des Chartreux, et les armes parlantes de Bossuet, prises par sa famille au XVIe siècle : trois roues d'or posées deux et une sur champ d'azur. D'après Palliot, l'oracle du blason, c'est le symbole de la théologie de même que la roue dans son mouvement monte et descend, de même le théologien monte des choses humaines aux choses divines, et descend des choses divines aux choses humaines.

:

[ocr errors]

veilleux orateur, avec quelques défauts que Chateaubriand appelle « l'écume au mors du jeune coursier », mais avec toute la verve familière et hardie, avec tous les élans et toutes les envolées d'une lyrisme superbe, avec toute << la première sève de l'enthousiasme créateur » (1); Verdun et Stenay, où il alla dans sa jeunesse, pour servir les intérêts de Metz auprès du grand Condé; Brissac et Strasbourg, où il se rendit pour le mariage du Dauphin, en 1680, et où il se lia avec M. d'Obrecht, encore protestant, qu'il convertit bientôt; Marly, Fontainebleau, Compiègne, Plombières-les-Dijon, Arc-sur-Tille (2), où il suivit la cour; Saint-Germain-en-Laye, où il séjourna avec elle et lui prêcha le Carême de 1666 et l'Avent de 1669; Versailles, où l'on appelait Allée des philosophes le lieu de promenade de Bossuet et de ses amis du Petit Concile, de ces réunions où l'on commentait l'Écriture sainte et où Bossuet était le Père grec » (3), La Bruyère, Pellisson, Caton de Court, Cordemoy, le comte de Troisville (Tréville), le maréchal de Bellefonds, étaient les Pères laïques; l'abbé Renaudot, les deux frères Veil, Nicolas Thoynard et Barthélemy d'Herbelot, savants orientalistes, étaient les rabbins, et l'abbé Fleury, secrétaire du Petit Concile, Huet, Fénelon, Gallois, Mabillon, étaient les Pères latins; la basse Normandie, où le titre de prieur de l'abbaye du Plessis-Girmoult, qui lui avait été résignée en 1672 par l'abbé de Thorigny-Matignon, son successeur au siège de Condom, dont il s'était démis en 1671 par un scrupule peu commun à cette époque, le conduisit plusieurs fois, comme l'établissait naguère M. Gasté, dans son Bossuet en Normandie, Discours de rentrée solennelle des Facultés de Caen (4) (1893); Gassicourt-les-Mantes, dont il était aussi prieur, depuis qu'en 1660 l'évêque d'Auguste, suffragant de Metz, Mer Bédacier, lui avait fait en mourant ce cadeau, si vivement contesté par des compétiteurs dont le plus ardent était le futur évêque de Belley, dom Pierre du Laurens, re

(1) D'ALEMBERT : Éloge de Bossuet, 1779.

(2) En 1674.

(3) Lettre de l'abbé Le Dieu, 15 nov. 1696.

(4) M. Gasté évalue à 10 ou 12.000 livres et Le Dieu à 8 ou 9.000 livres le revenu du Plessis-Grimoult.

ligieux de Cluny (1); Beauvais, où Louis XIV, pour le dédommager des 40.000 livres de rente dont il s'était privé en se démettant de l'évêché de Condom, lui avait donné, le 14 août 1672, l'abbaye de Saint-Lucien, dans laquelle, disent les registres de l'Hôtel de Ville de Beauvais en 1680, la municipalité alla rendre visite au cardinal d'Estrées et à l'évêque de Condom, à qui l'on avait offert, la veille, «< comme à leurs Majestés, et aux princes et princesses », quelques << petits présents» (2); Granvilliers, où la charité du grand évêque le conduisit au mois de septembre suivant, pour faire une visite aux habitants désolés d'un terrible incendie, et d'où il alla, sans doute, présider, à son abbaye de Saint-Lucien, la translation d'une relique de saint Jean-Baptiste, le 27 octobre 1680 ; Saint Denis, où il « versait des larmes avec des prières » sur les tombes royales de la duchesse d'Orléans et de la reine Marie-Thérèse; Issy, où eurent lieu les fameuses conférences entre Bossuet, Mer de Noailles et M. Tronson, que M. Levesque racontait naguère dans le Bulletin trimestriel de SaintSulpice, et d'où sortirent les 34 Articles d'Issy contre le Quiétisme; Paris enfin, où, pendant dix années, 1642-1652, le collège de Navarre vit en lui le plus pieux, le plus aimable et le plus brillant de ses étudiants de théologie, et où les églises des Minimes, des Grandes Carmélites de la rue SaintJacques, des Petites Carmélites de la rue du Bouloi, du Louvre, de Saint-Thomas du Louvre, de l'Hôpital Général, de Saint-Lazare, de la Visitation, de Sainte-Marie de Chaillot, de Saint-Gervais, de Saint-Sulpice, des Nouvelles Catholiques, des Jacobins, des Jésuites, des Feuillants de la rue SaintHonoré et de la rue d'Enfer, des Pères de la Merci, de SaintVictor, des Grands Augustins et de Notre-Dame, entendirent maintes fois la parole de celui que les gazettes du temps appelaient un «< docteur angélique », un prédicateur «< incomparable », qui « prêchait divinement », et dont Sainte-Beuve (3)

(1) Voir Bossuet, prieur de Gassicourt-les-Mantes, par M. E. Jovy de VITRY (Société des sciences et des arts de Vitry-le-François, 1896-99.) (2) Le P. GRISELLE: Revue Bossuet, 25 janvier 1900, p. 26. (3) Causeries du lundi, x, p. 182.

nous dit que c'est « la voix la plus simple, la plus forte, la plus brusque, la plus familière, la plus soudainement tonnante » qui fut jamais.

Et Lyon, Messieurs, Lyon, siège de la primatie des Gaules n'aurait-il eu aucun rapport avec « notre grand Bossuet », comme l'appelle Léon XIII? II me répugnait de le croire. J'ai cherché dans les bibliothèques de Lyon et de Meaux; grâce à Dieu, j'ai trouvé, et je suis heureux et fier de vous dire, ce soir, que la grande Église de Lyon a écrit en 1693 au grand évêque de Meaux pour « le prier de venir la gouverner » et que, dans trois lettres de Bossuet à cette époque, il parle luimême du bruit de sa nomination comme archevêque de Lyon.

I

C'est dans une phrase perdue vers la fin des Mémoires de l'abbé Le Dieu, page 173, que se trouve le premier de ces renseignements précieux pour l'histoire de Lyon.

Il s'agit du mariage du Dauphin, le royal élève de Bossuet, mariage après lequel, en 1680, « M. de Condom, se trouvant libre, était destiné à la première église du royaume qui viendrait à vaquer ». M de Vialard, évêque de Châlons, très infirme, le demandait au roi pour ce siège épiscopal; Mer de Ligny, évêque de Meaux, très infirme aussi, « le souhaitait ardemment pour successeur ». « Depuis, dit Le Dieu, dans les vacances qui sont arrivées, il a été désiré à Beauvais, à Lyon, à, Sens, et ces Églises lui écrivirent leurs vœux, le priant de venir les gouverner. C'était à qui l'aurait. »

L'Église de

Rien de plus juste que ce dernier trait. Beauvais, la première, en 1679, après la mort de Mer Choart de Buzenval, sollicita l'honneur d'être gouvernée par l'orateur illustre, dont l'Exposition de la doctrine catholique en matière de controverse avait dans l'Europe entière un immense retentissement. Mais, comme je l'ai établi ailleurs (1), après M. Gazier (2), Bossuet ne fut pas nommé à Beauvais, soit

(1) Encore Bossuet et le Jansenisme. Voir Autour de Bossuet, I. (2) Revue politique et littéraire, 12 juin 1875.

AUTOUR DE BOSSUET. - T. II.

6

parce que sa modeste naissance ne permit pas au roi, dit Amelot de la Houssaye dans ses Mémoires, de l'élever à un évêché qui était un comté-pairie, soit plutôt parce qu'il refusa ce que Louis XIV exigeait de lui. « Il y a, dit-il simple<<ment au roi, des choses que la conscience ne permet pas « de faire. » Il s'agissait « d'écraser » certains catholiques. suspects de jansénisme, et la bénignité du grand évêque répugnait à cet «< écrasement », alors surtout que, depuis la Paix de Clément IX, en 1668, la « secte» janséniste était en règle avec l'Église, signait le Formulaire et travaillait même à réfuter le protestantisme. « Je ne veux pas la mort du pécheur, dit l'Écriture, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. » — Après Beauvais, c'est Meaux qui demanda et obtint pour évêque, le 5 mai 1681, celui dont le Discours sur l'Histoire universelle venait de paraître avec un merveilleux succès. La joie et le ravissement de tout le diocèse nous sont attestés par le Mercure galant de mars 1682, qui consacre plus de 50 pages à raconter l'entrée triomphale de Bossuet à Meaux, les 7 et 8 février, et les splendides préparatifs presque improvisés en son honneur par la population, par les autorités civiles et militaires. On conserve encore à Meaux les délibérations de la municipalité décrétant des harangues et des illuminations en l'honneur de l'illustre prélat, et, ce qui paraitra plus significatif, c'est que deux ans après, le 12 mai 1684, les habitants de Coulommiers « firent bien mieux que ceux de Meaux » : car, ajoute Janvier, curé de Saint-Thibaut-lès-Meaux, « la ladrerie avait paru à ne point décorer rien pour recevoir ce digne prélat » (1). — L'archevêché de Sens, un des plus riches de France, puisque, vers la fin du XVIIIe siècle, le triste Loménie de Brienne, archevêque de Toulouse, s'y fit nommer, en 1787, pour avoir quelque cent mille livres de rente de plus, l'archevêché de Sens fut vacant en 1685 par la mort de MST de Montpezat: c'est alors que le chapitre demanda M. de Meaux. Mais Louis XIV y nomma Mr de la Hoguette, évêque de Poitiers, qui, par suite des démêlés de la cour de France avec Rome, à la suite des quatre Articles de 1682, ne devait obtenir ses

(1) Voir la Revue Bossuet, du 25 avril 1900, p. 108, note 2.

« ÖncekiDevam »