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Ne dites plus que la science enfle... Elle enfle les demisavants, ces êtres dangereux, ineptes, importuns qui troublent le monde, selon le portrait qu'un philosophe a laissé d'eux, en réclamant à bon droit place en leurs rangs. Mais pour les savants qui sont en même temps des saints, la science ne les rend que plus humbles, en leur faisant puiser à une source plus haute la conviction de leur ignorance, en leur révélant plus à fond la corruption de l'homme, sa misère et son

néant.

La foi est le principe de leur science; et la science leur découvrant dans une plus large étendue les fondements de la foi, leur montre mieux qu'aux autres hommes l'humilité de ce Dieu qui s'est fait petit enfant, la pauvreté de ce Dieu qui naquit dans une étable, la pureté de ce Dieu qui ne pouvait avoir qu'une Vierge pour mère, l'obéissance de ce Dieu qui eut pour nourriture la volonté de son Père céleste, enfin le dévouement de ce Dieu qui mourut pour nous sur la croix.

Mais sur ces fondements il faut élever un édifice dont la grandeur y puisse dignement répondre. C'est là le besoin qui les presse; les lumières nouvelles qu'ils reçoivent chaque jour ne font qu'exciter leur ardeur, tandis qu'elles sont pour les contradicteurs des vérités divines comme ces fiammes vengeresses qui vinrent autrefois empêcher de relever les ruines du temple de Jérusalem; rien n'interrompt leur tàche, l'édifice ne cesse de grandir; l'humilité est posée comme la première pierre : la pauvreté, la chasteté, l'obéissance sont les colonnes; le dévouement est comme le ciment qui maintient tout; le ciel même en est le couronnement.

Je ne m'étonne pas que Dieu les choisisse aussi bien que << les simples » pour l'œuvre surnaturelle de la conversion et de la sanctification des âmes, eux qui n'ont perfectionné la nature que pour se faire les instruments plus dociles de la grâce. C'est Jésus-Christ qu'ils veulent prêcher et non pas eux-mêmes; aussi Jésus-Christ met-il en eux cette parole vivante, efficace, sermo vivus et efficax, qui divise l'àme d'avec elle-même, qui pénètre jusqu'au fond du cœur; si bien que, malgré les suggestions de l'enfer, les faux docteurs euxmêmes ne peuvent se soustraire à l'ascendant de tels apôtres; convaincus par la science, ils sont plus encore touchés

par la vertu et la charité. Et comment résisteraient-ils à qui leur témoigne une compassion si douce, et leur dit avec saint Augustin «Que ceux-là s'irritent contre vous, qui ne savent pas au prix de quelle peine on trouve la vérité et combien il est difficile de se garder de l'erreur! Que ceux-là s'irritent contre vous, qui ne savent pas combien il est rare et malaisé de s'élever, par la sérénité d'une âme pieuse, au-dessus des grossiers fantômes; que ceux-là s'irritent contre vous, qui ne savent pas ce qu'il faut de soupirs et de gémissements pour arriver à comprendre quelque petite chose de Dieu. Pour moi, je ne puis pas, non, je ne puis absolument pas vous traiter avec rigueur ! »

Quelle différence! La vérité, sur les lèvres du savant orgueilleux qui se cherche lui-même, devient facilement comme l'erreur, une arme homicide: quand le philosophe Hégésias avait éloquemment disserté sur l'immortalité de l'âme, ses auditeurs se donnaient la mort. L'Apôtre prêche la résurrection du Sauveur, gage assuré de la nôtre, et trois mille personnes se convertissent et reçoivent la vie dans le baptême : c'est l'admirable puissance de la sainteté, soutenant la vérité de son témoignage. La science, la civilisation, comme on l'appelle, sous l'influence du philosophe irréligieux, c'est bien souvent cette torche sinistre, qui n'éclaire le monde qu'en y portant l'incendie et la désolation. Mais, sous l'influence du savant chrétien, la science unie à la vertu, c'est le flambeau de la civilisation divine, lucerna ardens et lucens, qui répand partout, avec la lumière, la chaleur, la vie, la paix. P. OLIVAINT.

C. Epist. Manich., c. II.

LA LIGUE A QUIMPER

ET

DANS LE DIOCÈSE DE CORNOUAILLE

(1589-1598)

DEUXIÈME ARTICLE 1.

III

Nous avons vu jusqu'ici les événements de la Ligue en Bretagne se dérouler dans une série d'épisodes auxquels manque souvent la vraisemblance, lors même que la vérité est le mieux constatée. Ce n'est donc pas sans quelque raison que M. de Carné ajoute l'observation suivante : « Cette époque attend plutôt un romancier qu'un historien. » Mais une semblable appréciation doit s'appliquer d'une manière plus spéciale au rôle affreux que jouèrent sur cette scène sauvage plusieurs membres de la noblesse.

Lorsque s'alluma la guerre civile dans la province, on vit des gentilshommes, unissant des instincts cruels à la brutalité générale des mœurs du temps, se mettre à la tête de bandes recrutées parmi les vassaux de leur famille, et, secondés par quelques compagnons de débauche, se livrer à des excès d'une énormité exceptionnelle. A côté des surprises de places et des défis chevaleresques, on rencontre le pillage des châteaux, l'incendie des chaumières, des sacriléges et

Voir la livraison d'Octobre 1874. • Les États de Bretagne, t. I, p. 174.

des attentats inouïs, l'égorgement sans merci des paysans, de leurs femmes et de leurs enfants. a Ni les condottieri de l'Italie, ni les reîtres de l'Allemagne n'approchent des hideux personnages dont l'historien est contraint d'évoquer la mémoire et de rappeler les crimes, afin de faire comprendre toute l'étendue des misères publiques'. »

D

Ces désordres étaient, comme nous l'avons indiqué, une conséquence naturelle de la désorganisation des affaires dans les deux partis, du roi et de Mercœur. Les registres des parlements de Rennes et de Nantes sont remplis des mêmes doléances sur les misères du temps. On les trouve résumées dans les plaintes rédigées en 1590 par le sieur de Bourgneuf : 4° Les soldats licencieux et sans discipline militaire, pillards, ravageant tout, exercent toute inhumanité sur le peuple, sans que l'on gagne rien sur l'ennemi; 2° on fait des levées extraordinaires de deniers, pour les frais des garnisons qui sont aux maisons de plusieurs gentilshommes, payées sur le sang du peuple, outre les énormes extorsions et pillages,... etc., etc. »

2

Les magistrats de la Ligue et les chefs royalistes prenaient des mesures pour satisfaire aux vœux de la population opprimée, mais elles demeuraient presque toujours inefficaces. « Les crimes des soldats, dit l'article 43 des États de Nantes, en 1591, seront punis pour maintenir la discipline militaire.» « Nous vous enjoignons, disait de son côté SaintLuc à ses lieutenants, de faire vivre lesdits gens de guerre avec toute police et discipline, sans permettre qu'ils fassent nulle violence ou désordre aux paysans et laboureurs et autres personnes, etc. *»

Cette voix de la justice et de l'humanité ne put parvenir à se faire entendre au milieu du cliquetis des armes, de l'écroulement des murailles et des cris des mourants. Les mêmes excès continuèrent d'être commis au sein des deux partis. On ne parlait plus partout que de châteaux assiégés et livrés au pillage, que de terres envahies et ravagées comme pays en

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nemi, que de personnes de distinction enlevées et mises à rançon, que de malheureux brûlés dans leurs maisons ou pendus aux arbres du chemin. Mais, il importe de bien le remarquer; ces violences, loin d'être l'effet d'un zèle de parti, provenaient, du moins le plus souvent, d'une grossière avidité ou d'animosités et de rancunes.

Si tel était l'état déplorable des choses dans la partie de la Bretagne, occupée par des troupes régulières, combien cette pénible situation ne dut-elle pas être aggravée dans la Cornouaille, contrée inaccessible aux armées nombreuses? Ici, nul plan concerté, mais seulement des guet-apens et des coups de main. L'audace des petits capitaines était d'autant plus grande que l'autorité des principaux généraux était moindre. Parmi cette sombre galerie de brigandeaux, deux figures se dessinent entre toutes les autres : Anne de Sanzay, comte de la Maignane, et Guy-Eder, baron de Fontenelle. Ces hommes, semblables à des bêtes féroces, ont laissé d'horribles traces de leur passage, depuis le sommet des montagnes d'Arrhès jusqu'à la baie des Trépassés. Leur souvenir se retrouve encore au milieu de ces monceaux de ruines qui jonchent le sol; il est attaché aux vieilles murailles noircies par le feu; il se dresse au pied des clochers qui virent flamber d'immenses bûchers; il se renouvelle enfin avec le retour de la vague qui vient battre plaintive les grèves désertes où furent immolées d'innombrables victimes 1.

Nous parcourrons les sanglants théâtres témoins de tant de scènes de désolation. Toutefois, afin de conserver à cette période de la Ligue en Bretagne son vrai caractère, il ne sera pas inutile d'insister sur une remarque, déjà faite avec à propos par MM. P. de Courcy et de Kerdrel'. Si quelques seigneurs ont pu mériter de l'histoire la qualification de brigands, leurs déportements eurent lieu malgré les prescriptions sévères des États. Il n'est point de guerre civile, où l'on ne rencontre des hommes qui vivent de dilapidations et de rapines commises sur tous indifféremment, sur leurs adver

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Notice sur Landerneau. Ann. du Finistère, 1842. Bull. arch. de l'Assoc. Bretonne, t. V, p. 420.

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