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resteront en dépôt jusqu'à ce que les lois de la nature les rappellent sur la terre pour animer d'autres corps i. Mais celles que le génie vient de repousser, lui dis-je, quelle sera leur destinée? Elles vont se rendre au champ de la Vérité, répondit-il; des juges intègres condamneront les plus criminelles aux tourmens du Tartare 2; les autres, à des courses longues et désespérantes. Alors, dirigeant mes regards, il me montra des millions d'âmes qui, depuis des milliers d'années, erraient tristement dans les airs, et s'épuisaient en vains efforts pour obtenir un asile dans un des globes célestes 3. Ce ne sera, me dit-il, qu'après ces rigoureuses épreuves qu'elles parviendront, ainsi que les premières, au lieu de leur origine 4.

Touché de leur infortune, je le priai de m'en dérober la vue, et de me conduire au loin, vers une enceinte d'où s'échappaient les rayons d'une lumière plus éclatante. J'espérais entrevoir le souverain de l'univers entouré des assistans de son trône, de ces êtres purs que nos philosophes appellent nombres, idées éternelles, génies immortels 5. Il habite des lieux inaccessibles aux

Plat. in Tim. t. 3, p. 42.

Axioch. ap. Plat. t. 3, p. 371.

3 Empedocl. ap. Plut. de vitand. ære alien. t. 2, p. 830. Diog. Laert. lib. 8, §. 77. 4 Plat. in Tim. t. 3, p. 42. -5 Anonym. de vit. Pythag, ap. Phot. p. 1316. Beausobr. hist. du manich. t. 1, p. 576.

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mortels, me dit le génie : offrez-lui votre hommage, et descendons sur la terre.

Après que Télésiclès se fut retiré, je dis à Euclide: Quel nom donner au récit que nous venons d'entendre? Est-ce un songe? est-ce une fiction? L'un ou l'autre, répondit-il; mais enfin Télésiclès n'a presque rien avancé qui ne soit conforme aux opinions des philosophes. Il faut lui rendre justice : il pouvait, en adoptant celles de la multitude, augmenter considérablement la population des airs; nous parler de ces ombres que l'art des devins ou des sorciers attire du fond des tombeaux'; de ces âmes infortunées qui s'agitent tumultueusement autour de leurs corps privés de sépulture; de ces dieux et de ces fantômes qui rôdent la nuit dans les rues pour effrayer les enfans ou pour les dé

vorer 2.

Je lui sais gré de cette modération, repris-je, mais j'aurais souhaité qu'il se fût un peu plus étendu sur la nature de cet être bienfaisant auquel j'appartiens. Dieu l'a commis, à ce qu'on prétend, pour veiller sur mes sentimens et sur mes actions 3; pourquoi ne m'est-il pas permis

lib. 2,

0.581.

t. 2 , P..

' Homer. odyss. lib. 11, v. 37. — 2 Plat. de rep. Theocr. idyll. 15, v. 40.- 3 Plat. de leg. lib. 10, t. 2, p. 903 et

de le connaître et de l'aimer? Télésiclès vous a répondu d'avance, dit Euclide : Le bonheur de voir des génies n'est réservé qu'aux âmes pures. J'ai ouï cependant citer des apparitions dont tout un peuple avait été le témoin. — Sans doute; et telle est celle dont la tradition s'est conservée en Italie, et qu'on eut autrefois l'attention de représenter dans un tableau que j'ai vu. Attendez-vous à un tissu d'absurdités; elles vous montreront du moins jusqu'à quel excès on a porté quelquefois l'imposture et la crédulité.

Ulysse ayant abordé à Témèse, ville des Brutiens, un de ses compagnons, nommé Politès, fut massacré par les habitans, qui bientôt après éprouvèrent tous les fléaux de la vengeance céleste. L'oracle, interrogé, leur ordonna d'apaiser le génie de Politès, d'élever en son honneur un édifice sacré, et de lui offrir tous les ans la plus belle fille de la contrée. Ils obéirent, et jouirent d'un calme profond. Vers la soixantesixième olympiade, un fameux athlète, nommé Euthyme, arriva au moment qu'on venait d'introduire dans le temple une de ces malheureuses victimes. Il obtint la permission de la suivre, et, frappé de ses attraits, il lui demanda si elle consentirait à l'épouser dès qu'il aurait brisé ses

chaînes. Elle y consentit; le génie parut, et, ayant succombé sous les coups de l'athlète, il renonça au tribut qu'on lui avait offert pendant sept à huit siècles, et alla se précipiter dans la mer voisine 1.

'Strab. lib. 6, p. 255. Pausan. lib. 6, cap. 6, p. 419.

FIN DU CHAPITRE SOIXANTE-QUATRIÈME.

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CHAPITRE LXV.

Suite de la Bibliothèque. L'Histoire.

Le lendemain, Euclide me voyant arriver de bonne heure: Vous me rassurez, me dit-il ; je craignais que vous ne fussiez dégoûté de la longueur de notre dernière séance : nous allons aujourd'hui nous occuper des historiens, et nous ne serons point arrêtés par des opinions et par des préceptes. Plusieurs auteurs ont écrit l'histoire ; aucun ne s'est expliqué sur la manière de l'écrire, ni sur le style qui lui convient '.

Nous placerons à leur tête Cadmus, qui vivait il y a environ deux siècles, et qui se proposa d'éclaircir les antiquités de Milet sa patrie 2: son ouvrage fut abrégé par Bion de Proconnèse 3.

Depuis Cadmus, nous avons une suite non interrompue d'historiens. Je cite parmi les plus anciens, Eugéon de Samos, Deïochus de Proconnèse, Eudémus de Paros, Démoclès de Pygèle 4. Quand je lus ces auteurs, dis-je alors,

'Cicer. de orat. lib. 2, cap. 15, t. 1, p. 206.—2 Suid. in Kádu. 3 Clem. Alex. strom. lib. 6, p. 752.. 4 Dionys. Halic. de Thucyd, judic. t. 6, p. 818.

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