Sayfadaki görseller
PDF
ePub

སུ

"

1259. Des motifs divers déterminèrent le premier Consul à cette résolution." Comment avoir des mœurs? disait-il à Roederer; il n'y a qu'une manière, c'est de rétablir la religion... La société ne peut exister sans l'inégalité des fortunes, et l'inégalité des fortunes ne peut subsister sans la religion. Quand un homme meurt de faim à côté d'un autre qui regorge, il est impossible d'accéder à cette différence, s'il n'y a pas là une autorité qui lui dise: "Dieu le veut ainsi, il faut ,, qu'il y ait des pauvres et des riches dans le monde; mais ,, ensuite, et pendant l'éternité, le partage se fera autrement (1). Bonaparte voulait encore le rétablissement de la religion, parce qu'il répondait à un vœu populaire qui avait persisté à travers tous les obstacles, et qu'il contribuerait à l'apaisement des discordes civiles. Mais pour atteindre son but de pacification, ce rétablissement, dans la situation de la France d'alors, ne pouvait s'opérer que par une entente avec le St-Siège." Le peuple (de la Vendée) s'apaisait, dit M. Vandal, depuis que l'on avait rendu à son culte des facilités réelles, mais la simple tolérance est en soi arbitraire, précaire, et la soumission demeurerait provisoire tant que la tolérance le serait. Bonaparte se rendait compte qu'à moins de conférer au culte des garanties positives, légales, il ne finirait jamais la grande sécession de l'Ouest. Pendant la négociation du Concordat, le nom de la Vendée reviendra plusieurs fois sur ses lèvres; il aura toujours les yeux sur la grande plaie à fermer., Seule aussi l'intervention du St-Siège pouvait mettre fin au schisme des constitutionnels, aux difficultés soulevées par la déclaration de soumission (2) et aux divisions âpres et passionnées qui séparaient le clergé et les fidèles en deux camps irréconciliables. "Un schisme, disait Portalis au Corps législatif en présentant le projet qui donnait l'approbation législative au Concordat, est, par sa nature, un germe de désordre qui se modifie de mille manières différentes, et qui se perpétue à l'infini. Chaque titu

(1) ROEDERER, Œuvres, t. III, p. 335.

(2) Voir plus haut, no 1255.

(3) PORTALIS, Discours, rapports et travaux inédits sur le Concordat de 1801, Paris, 1845, p. 32.

laire, l'ancien, le nouveau, le plus nouveau, ont chacun leurs sectateurs dans le même diocèse, dans la même paroisse, et souvent dans la même famille. Ces sortes de querelles sont bien plus tristes que celles qu'on peut avoir sur le dogme, parce qu'elles sont comme une hydre qu'un nouveau changement de pasteur peut à chaque instant reproduire... Heureusement les théologiens catholiques reconnaissent un chef, un centre d'unité dans le pontife de Rome. L'intervention de ce pontife devenait donc nécessaire pour terminer des querelles, jusqu'alors interminables. De là, le Gouvernement conçut l'idée de s'entendre avec le St-Siège... Il est toujours heureux d'avoir un moyen canonique et légal d'apaiser les troubles religieux., L'entente avec le St-Siège, enfin, fournissait le moyen de résoudre les difficultés de conscience soulevées par les acquisitions de biens nationaux, et de donner au clergé français des chefs qui adhéreraient au Gouvernement consulaire et rompraient toute attache avec l'ancien régime. "La position du clergé, écrit encore M. Vandal, est la plus étrange qui se peut concevoir : il avait, pourrait-on dire, le corps en France et la tête hors de France. En somme, soixante-dix à quatre-vingts prélats expatriés restaient maîtres de la tranquillité intérieure en France. Et cette situation sans exemple, le Gouvernement de l'an VIII ne disposait d'aucun moyen de la faire cesser, à moins de recourir à une autorité supérieure à celle des évêques et d'en obtenir les prérogatives de la royauté, c'est-à-dire, de restaurer l'accord de l'Etat et de l'Eglise sur sa base séculaire et de renouveler l'antique stipulation avec Rome „ (1).

1260. LA CONCLUSION DU CONCORDAT. C'est en revenant de Marengo que Bonaparte, passant par Verceil, fit faire au Pape, par l'intermédiaire du cardinal Martiniana, évêque de cette ville, les premières ouvertures en vue d'un Concordat. Le Pape accepta d'entrer en pourparlers et envoya à Paris, où il arriva le 14 brumaire an IX (5 novembre 1800), Mgr Spina. archevêque de Corinthe. Les propositions du Gouvernement français paraissant inacceptables pour l'Eglise, Mgr Spina,

(1) Revue des Deux-Mondes, étude citée, p. 512.

qui n'était d'ailleurs autorisé à signer aucun traité, obtint, mais non sans peine, que le St-Siège fût directement saisi du projet de convention désiré par le premier Consul (févriermars 1801). Avant que la réponse du St-Siège ne fût arrivée à Paris, Bonaparte, qui s'impatientait des retards que subissait l'examen de la convention à Rome, adressa au St-Siège, le 9 prairial an IX, par l'intermédiaire de l'ambassadeur de France, Cacault, l'ultimatum formel d'avoir à adopter son projet ou de voir rompre les négociations. Le cardinal Consalvi, secrétaire d'Etat du St-Siège, partit en toute hâte pour Paris, où après de laborieuses discussions on tomba enfin d'accord. La convention fut conclue le 26 messidor an IX (15 juillet 1801), et les ratifications en furent échangées le 23 fructidor (10 septembre) de la même année (1).

1261. LE TEXTE DU CONCORDAT. La convention conclue entre le St-Siège et le Gouvernement français, était ainsi

conçue :

"Le Gouvernement de la République reconnaît que la religion catholique, apostolique et romaine, est la religion de la grande majorité des citoyens français.

[ocr errors]

Sa Sainteté reconnaît également que cette même religion a retiré et attend encore, en ce moment, le plus grand bien et le plus grand éclat de l'établissement du culte catholique en France et de la profession particulière qu'en font les Consuls de la République.

[ocr errors]

En conséquence, d'après cette reconnaissance mutuelle,

(1) Sur les négociations du Concordat, il y a une source capitale, ce sont les documents mêmes de la négociation publiés par le comte BOULAY DE LA MEURTHE, Documents sur la négociation du Concordat et sur les autres rapports de la France avec le St-Siège, Paris, 1891-1905. Parmi les principaux récits des négociations nous pouvons citer: CONSALVI, Mémoires, publiés par CRétineauJOLY, Paris, 1864; THEINER, Histoire de deux Concordats conclus en 1801 et 1803 par Napoléon Bonaparte et le St-Siège, Bar-le-Duc (1869-1871); COMTE D'HAUSSONVILLE, L'Église romaine et le premier Empire, Paris, 1871; SÉCHÉ, Les origines du Concordat, Paris, 1894; P. RINIERI, La diplomatie pontificale au XIXe siècle, le Concordat entre Pie VII et le premier Consul (1801-1802) (trad. VERDIER), Paris, 1901); cardinal MATHIEU, Le Concordat de 1801, Paris, 1903; etc.

tant pour le bien de la religion que pour le maintien de la tranquillité intérieure, ils sont convenus de ce qui suit :

ARTICLE 1. La religion catholique, apostolique et romaine, sera librement exercée en France. Son culte sera public, en se conformant aux règlements de police que le Gouvernement jugera nécessaires pour la tranquillité publique.

ART. 2. Il sera fait par le Saint-Siège, de concert avec le Gouvernement, une nouvelle circonscription des diocèses français.

ART. 3. Sa Sainteté déclarera aux titulaires des évêchés français qu'elle attend d'eux, avec une ferme confiance, pour le bien de la paix et de l'unité, toute espèce de sacrifices, même celui de leurs sièges. Après cette exhortation, s'ils se refusaient à ce sacrifice commandé par le bien de l'Eglise (refus néanmoins auquel Sa Sainteté ne s'attend pas), il sera pourvu par de nouveaux titulaires au gouvernement des évêchés de la circonscription nouvelle, de la manière suivante. ART. 4. Le premier Consul de la République nommera, dans les trois mois qui suivront la publication de la bulle de Sa Sainteté, aux archevêchés de la circonscription nouvelle. Sa Sainteté conférera l'institution canonique suivant les formes établies par rapport à la France avant le changement de Gouvernement.

ART. 5. Les nominations aux évêchés qui vaqueront dans la suite seront également faites par le premier Consul; et l'institution canonique sera donnée par le Saint-Siège, en conformité de l'article précédent.

ART. 6. Les évêques, avant d'entrer en fonctions, prêteront directement, entre les mains du premier Consul, le serment de fidélité qui était en usage avant le changement du Gouvernement, exprimé dans les termes suivants : " Je jure et promets à Dieu, sur les saints Evangiles, de garder obeissance et fidélité au Gouvernement établi par la constitution de la République française. Je promets aussi de n'avoir aucune intelligence, de n'assister à aucun conseil, de n'entretenir aucune ligue, soit au dedans, soit au dehors, qui soit contraire à la tranquillité publique; et si, dans mon diocèse ou ailleurs, j'apprends qu'il se trame quelque chose au préjudice de l'Etat, je le ferai savoir au Gouvernement. "

ART. 7. Les ecclésiastiques du second ordre prêteront le même serment entre les mains des autorités civiles désignées par le Gouvernement.

ART. 8. La formule de prière suivante sera récitée à la fin de l'office divin dans toutes les églises catholiques de France:

"

Domine, salvam fac Rempublicam ;

Domine, salvos fac Consules. „

ART. 9. Les évêques feront une nouvelle circonscription des paroisses de leurs diocèses, qui n'aura d'effet que d'après le consentement du Gouvernement.

ART. 10. Les évêques nommeront aux cures. Leur choix ne pourra tomber que sur des personnes agréées par le Gouvernement.

ART. 11. Les évêques pourront avoir un chapitre dans leur cathédrale, et un séminaire pour leur diocèse, sans que le Gouvernement s'oblige à les doter.

ART. 12. Toutes les églises métropolitaines, cathédrales, paroissiales et autres non aliénées, nécessaires au culte, seront mises à la disposition des évêques.

ART. 13. Sa Sainteté, pour le bien de la paix et l'heureux rétablissement de la religion catholique, déclare que ni elle, ni ses successeurs, ne troubleront, en aucune manière, les acquéreurs des biens ecclésiastiques aliénés; et qu'en conséquence, la propriété de ces mêmes biens, les droits et revenus y attachés, demeureront incommutables entre leurs mains ou celles de leurs ayants-cause.

ART. 14. Le Gouvernement assurera un traitement convenable aux évêques et aux curés dont les diocèses et les cures seront compris dans la circonscription nouvelle.

ART. 15. Le Gouvernement prendra également des mesures pour que les catholiques français puissent, s'ils le veulent, faire en faveur des églises, des fondations.

ART. 16. Sa Sainteté reconnaît dans le premier Consul de la République française les mêmes droits et prérogatives dont jouissait près d'elle l'ancien Gouvernement.

ART. 17. Il est convenu entre les parties contractantes que, dans le cas où quelqu'un des successeurs du premier Consul

« ÖncekiDevam »