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AVANT-PROPOS.

SORTI,

en 1794, des prisons dans lesquelles j'ai été mis avant et depuis la mort de Louis XVI, j'exécutai le projet que j'avois formé d'élever, à la mémoire de cet infortuné Monarque, un monument de mon éternelle reconnoissance. Sans consulter mes forces, et n'écoutant que mon cœur profondément touché du témoignage honorable dont le meilleur des maîtres avoit si grandement recompensé mes trop foibles services*, je me livrai au sentiment dont mon âme étoit remplie.

Lorsque j'entrepris de rassembler tant de tristes souvenirs, la France couverte de ruines, fumoit

• "Je croirois calomnier cependant les sentimens de la nation, si je ne recommandois ouvertement à mon fils MM. de Cha

b

encore du sang des victimes immolées à la fureur des partis. Une fermentation sourde, des secousses fréquentes, annonçoient de nouveaux bouleversemens: ce fut donc au bruit des armes, au son du tocsin, que je traçai les premières lignes de ce récit. Combien de fois l'apparition subite d'inquisiteurs sanguinaires, soudoyés pour épier les sentimens secrets, pour interroger les pensées, m'a forcé de détruire mon ouvrage! Enfin, je le terminai, mais en me réservant de lui donner plus de développement, lorsque cela me seroit possible. Ma famille le remit à un étranger qui partoit pour l'Angletere*. Depuis cette époque, la preuve que j'ai acquise de l'abus qui a été fait de la con

"milly et Hue, que leur véritable attachement pour moi avoit " portés à s'enfermer avec moi dans ce triste séjour, et qui ont "pensé en être les malheureuses victimes."-(Testament de Louis XVI, du 25 Décembre, 1792.)

Quelques mois après, je reçus le manuscrit, et la lettre sui

vante:

"Londres, ce 3 de Juillet, 1796." "Il y a déjà plus de trois mois, Monsieur, qu'en retournant

fiance avec laquelle j'avois livré mon Manuscrit, a été le principal motif qui en a retardé la publication; mais j'ose espérer que cette circonstance n'atténuera point l'intérêt que la nature de cet ouvrage devoit inspirer.

Ce n'est pas l'histoire de la révolution Françoise que je prétends donner au public. Cette tâche appartient à l'écrivain d'un autre siècle, qui n'aura ni les mêmes intérêts que nous, ni les passions dont nous sommes tourmentés dans celui-ci. Mais il est utile, pour éclairer le jugement de la postérité, que

de France en Angletere, je me suis chargé, avec plaisir, du "manuscrit de vos Mémoires; j'ai cherché envain une occa

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sion sûre pour vous les faire parvenir; mais je profite de la

première que je peux regarder comme telle. Incertain sur " votre véritable séjour, je vous expédie ce paquet, dont M. le

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Comte Charles de Damas veut bien avoir la bonté de se

charger. Je désire qu'il vous parvienne bientôt..

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"J'ai l'honneur d'être, &c. &c.

"LOUIS D'AUERWECK."

viii

chacun, suivant la position dans laquelle il s'est trouvé, écrive ce qu'il a vu, et rapporte ce qu'il a entendu. J'acquitte donc une dette, et je soulage mon cœur, en révélant à l'histoire les scènes déchirantes dont souvent je fus le témoin. Je dois aussi publier les sentimens dont mon auguste Maître me rendit quelquefois le dépositaire, mon but dans cet écrit étant de mettre ses vertus en opposition avec les crimes de ses ennemis.

Louis XVI, ce Prince vertueux, qui tenoit d'une longue suite d'ancêtres, le droit de règner sur la France, passa rapidement du trône à l'échafaud. La Reine, Madame Elisabeth, expirèrent sous le couteau fatal. Louis XVII mourut dans les fers. Madame, sœur de l'enfant Roi, échappa seule à la rage des factieux. La révolution détruisit tout; un déluge de crimes et de calamités inonda la France! Les vols, les incendies, les pillages, l'envahissement des propriétés, les assassinats, les proscriptions, les emprisonnemens, les supplices, se multipliè

rent de toutes parts. Au-dehors, le fer ennemi moissonnoit les François ; au-dedans, l'anarchie les dévoroit.

Cette nation, si long-temps le modèle des autres peuples, et l'objet de leur envie; cette nation, dont alors une partie fut coupable, et dont l'autre fut plongée dans la consternation et l'effroi, se courba toute entière sous le joug des plus vils tyrans. L'excès des maux lui avoit-il done ravi jusqu'à la faculté de les sentir! Tandis que, pour motiver contre les Rois l'accusation d'un despotisme supposé, on alloit chercher à des époques reculées l'exemple de quelques abus du pouvoir, la tyrannie la plus barbare dont aient jamais fait mention les annales des hommes, étendit impunément ses ravages d'un bout de -la France à l'autre. Aveuglée ou corrompue, une multitude frénétique voulut du sang, toujours du sang; et elle s'enivra du sang le plus pur. Des cris féroces, des chants de cannibales, des hymnes de

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