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teté n'a pas manqué de présenter, dans le temps, ses remontrances, à la sagesse et à la pénétration de l'Empereur. Le zèle que Votre Eminence a toujours eu pour le bien de la religion donne au Saint Père l'espérance fondée que vous solliciterez la justice et la magnanimité de Sa Majesté Impériale, pour ôter ladite vigueur à ces dits décrets, et ne faire subsister que le concordat dans son intégrité. » Le soussigné profite de cette occasion, etc.

» Le Card. ANTONELLI. »

Il ne fut fait, pour le moment, aucune réponse favorable à cette demande, malgré les sollicitations du cardinal Fesch qui, en cela, approuvoit tous les sentimens du Saint Père. Et que se passoit-il à Rome dans de telles circonstances?

Cette ville, après avoir parlé quelque temps du ballon-courrier, s'étoit livrée à ses distractions ordinaires. Le prince électoral de Bavière, aujourd'hui le roi Louis I, étoit arrivé sous le nom de comte de Haag. Le célèbre Kotzebue, muni de lettres de recommandation de Paris, de Berlin et de Russie, se faisoit présenter dans toutes les sociétés, surtout dans celles où l'on parloit mal de la France, et il s'attachoit à expliquer aux Italiens qu'ils ne savoient pas faire des comédies, en leur conseillant de traduire les siennes, ce qu'il finit véritablement par obtenir dans une grande partie de l'Italie. Son voyage se seroit prolongé au-delà de l'hiver, si un de ses compatriotes, par je ne sais quel motif d'en

vie et d'hostilité, n'eût fait insérer dans une gazette d'Allemagne, qu'une grande puissance demandoit l'arrestation et l'expulsion de cet écrivain Allemand. Ce bruit n'avoit aucun fondement, mais ce qui étoit arrivé à M. de Vernègues effraya M. de Kotzebue, et il précipita son départ.

Par suite d'un arrangement du cardinal Fesch, nous étions à Rome deux agens de France, M. D'Isoard et moi : mais quoiqu'il eût suffi de n'en avoir qu'un, nous vivions tous deux dans une bonne intelligence convenable, et qui devint chez moi pour monsignor D'Isoard, le germe d'une estime dont j'eus le bonheur de lui donner un témoignage sous le règne de Léon XII. Monsignor étoit, comme il est toujours encore sous la pourpre, une personne bonne, obligeante, généreuse, amie de la paix, et recommandable par ses vertus religieuses.

Au commencement de février, Rome éprouva un désastre qui occasionna de graves dom

mages.

Le Tibre déborda dans la nuit du 31 janvier au 1 février. Des physiciens ont prétendu que ces débordemens du Tibre ont pour cause des vents du sud-ouest, qui soufflant avec violence dans la direction de l'embouchure, entre Torre Clementina, et Torre San Michele, font refluer les eaux du fleuve, et les empêchent d'entrer dans la mer; mais de Rome à Porto, quoiqu'il

n'y ait qu'une distance de treize à quatorze milles italiens, le Tibre fait des détours si multipliés, qu'on ne peut admettre cette raison. La vraie cause de ces inondations est la fréquence des pluies dans la partie des Apennins où le Tibre prend sa source, aux mêmes lieux que l'Arno. En une seule nuit, le quartier de Ripetta fut couvert d'eau, la campagne opposée paroissoit un autre fleuve. Nous considérions ce ravage du haut de la terrasse du palais Borghèse. Le Tibre charrioit des arbres, des meubles, des chevaux et des bestiaux qui avoient été surpris dans la campagne. La rue de l'Orso étoit toute entière submergée. Les femmes, les enfans, les vieillards n'avoient pas eu le temps de s'enfuir: ceux qui demeuroient dans les étages inférieurs avoient pu seulement gagner les toits que l'eau respectoit encore. Ces malheureux poussoient des cris de douleur : ils manquoient de pain et de toutes sortes de provisions. On n'entendoit que ces mots : Barcarolo, a noi, pietà, pane. Le cardinal Consalvi venoit d'accourir un des premiers, après avoir ordonné à tous les boulangers de faire une cuisson extraordinaire. Tout à coup on vit un spectacle admirable. Consalvi ne craignit pas de confier sa vie à la fragilité d'une barque. Il alla lui-même, en habits de cardinal, porter du pain aux habitans de la rue de l'Orso, et cet exemple ne tarda pas à être imité par d'autres Romains. Je félicitai Son

Éminence sur cette action si courageuse. Elle me répondit : « Ah! j'ai été richement récom» pensé, en entendant les bénédictions des fem» mes, des enfans; ils baisoient mes mains, ma >> robe, les pains; ils n'en vouloient que pour un » jour, afin que personne ne fût oublié; et puis >> ne dois-je pas agir ainsi pour consoler le Pape, >> quand il apprendra ce malheur? »

La cause ne pouvoit pas être le vent de sudouest, car il cessa, et cependant la ville étoit envahie jusque dans la rue du Corso, et sur le chemin de Ponte-Molle. On redoubla de zèle pour assister les malheureux habitans bloqués par les eaux. Je remarquai aussi alors le jeune prince Aldobrandini, aujourd'hui prince Borghèse, occupé avec une ardeur pleine de courage, à faire passer des comestibles à ses gens qui habitoient des maisons autour du palais Borghèse, et à toutes les rues voisines qui ne pouvoient communiquer avec Rome que par ce palais.

Outre ces actes d'humanité d'un si noble exemple, quand on les voit pratiquer par des chefs de gouvernement et par ceux qui occupent les premiers rangs de la société, il y avoit encore une autre mission bien plus périlleuse : il falloit porter du pain à plus de mille Contadini retenus dans des villas près de Rome. On vit des ecclésiastiques au nombre des personnes qui remplirent ce dangereux devoir. Si la crue avoit

continué, nous nous serions retirés avec tous les Français à notre villa Médicis, qui est comme la citadelle de Rome, et où il étoit impossible que les eaux arrivassent, à moins qu'on n'eût à craindre un déluge universel.

Le temps étoit assez clair, le vent du nord souffloit avec constance; cependant toutes les fenêtres des maisons inondées étoient ouvertes et chacun y faisoit ses observations avec anxiété, pour pouvoir connoître le moment où l'eau cesseroit de monter. Le 2 février, à vingt-quatre heures (cinq heures du soir), un premier symptôme de décroissance se manifesta. On n'entendoit plus que des cris de joie et d'espérance. Mais en se retirant, le fleuve, qui avoit atteint la hauteur des eaux du débordement de 1750, laissa des sédimens de limon malsain et épais, qu'il fallut promptement chercher à rejeter dans le véritable lit du fleuve; il y eut aussi quelques maisons qui s'écroulèrent. La bonne administration du cardinal Consalvi répara promptement les maux. On distribua des secours en argent, et la saison du printemps commença de bonne heure à faire éprouver sa première influence.

Le Pape fut très-affligé quand il apprit le débordement du Tibre. Il regrettoit de n'être pas présent et de n'avoir pu lui-même se montrer, pour consoler le peuple et diminuer encore plus ses souffrances.

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