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De ce moment, le Palais-Royal devint le forum | conduit en triomphe au Palais-Royal, où ils resde Paris, et les cafés de Foy, Corrazza, le Ca- tent sous la sauvegarde de tous les citoyens. Les veau furent érigés en une sorte de bureau d'es- hussards et les dragons, qui avaient reçu l'ordre prit public. Le jardin était constamment rempli de charger les habitants, posent les armes et se de citoyens de toutes les conditions qui se mon- joignent à la foule on les caresse, on les flatte, traient avides de nouvelles de l'assemblée natio- et l'on entend partout les cris de vive la nation! nale. A défaut de journaux qui rendissent compte devenus l'expression de l'opinion publique, dede ce qui se passait à Versailles, on y lisait et puis que, par la constitution des communes en commentait des bulletins manuscrits qui circu- assemblée nationale, on avait cessé de crier vive le laient avec une étonnante rapidité: ces bulletins tiers-état! étaient lus au milieu du jardin, quand le temps le permettait, ou dans les cafés, par des orateurs improvisés, qui montaient ordinairement sur une table ou sur une chaise pour être mieux entendus de la foule. Cette multitude toujours agitée, toujours inquiète sur le sort de l'assemblée nationale, applaudissait ou huait ces bulletins, suivant qu'ils étaient favorables ou contraires à la cause de la liberté les motions les plus violentes, les résolutions les plus hardies suivaient ordinairement la lecture des nouvelles du jour. Il eût été dangereux de manifester, au milieu de cette multitude exaltée, des opinions contraires à la cause du peuple ou au ministre qui était alors l'idole de la nation : l'imprudent qui se serait permis des réflexions opposées au vœu national, aurait été ou chassé immédiatement de ce foyer du patriotisme, ou jeté dans le bassin, ou réduit à faire publiquement amende honorable.

Telles étaient les dispositions de ce célèbre forum, et telles étaient aussi celles du peuple de Paris. Le Palais-Royal et le peuple se seraient portés aux dernières extrémités, si l'inébranlable fermeté de l'assemblée nationale, dans ces jours de troubles et d'incertitudes, n'avait tranquillisé les amis de la liberté sur la suite des événe

ments.

Tout à coup le Palais-Royal est prévenu que plusieurs gardes françaises ont été enfermés à l'Abbaye à cause de leurs opinions patriotiques, et qu'ils vont être transférés à Bicêtre, prison des plus vils scélérats. Le régiment des gardes françaises, depuis le pillage de la maison Réveillon, avait fait abjuration de cette discipline passive qui l'obligeait de tirer sur le peuple : les soldats, les sous-officiers avaient été éclairés sur ce qu'ils devaient à la patrie ; ils avaient fraternisé avec les habitants de Paris, et étaient devenus, en quelque sorte, les auxiliaires du peuple : leur cause devint la cause publique. Un cri général se fait entendre: « Courons les délivrer! » et aussitôt le PalaisRoyal, semblable à un torrent qui entraîne tout et grossit dans sa course, arrive à la prison de l'Abbaye les portes en sont enfoncées; on s'empare de neuf gardes françaises, de six soldats de la garde de Paris et de quelques officiers, et on les

Le lendemain matin, le Palais-Royal, voulant donner une couleur favorable à cette insurrection, envoya une députation de vingt personnes à l'assemblée nationale pour lui faire part de l'événement de la veille, et la prier de confirmer la liberté donnée aux soldats détenus. L'assemblée prit le parti de recommander les gardes françaises au roi; et Louis XVI, satisfait de cette marque de déférence, fit grâce à ces soldats, après avoir exigé qu'ils se rendraient à leur prison, d'où ils sortirent aussitôt après.

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CHAPITRE III.

Motion de Mirabeau contre le rassemblement des troupes. Réponse du roi à la députation de l'assemblée. Décla ration des droits. Le gouvernement hâte l'exécution de ses projets. Renvoi de Necker. Ministère contre-révolutionnaire. Effet que ces changements produisent à Paris. - Camille Desmoulins fait courir les citoyens aux armes. — Combats entre les troupes et les gardes françaises.-Journée du 15 juillet. Effet qu'elle produit sur l'assemblée nationale. Déclaration de cette assemblée.

Tout parut calmé; mais il s'en fallait de beaucoup que les esprits fussent tranquilles. A Paris, on ne s'entretenait que de l'appareil militaire que le gouvernement déployait autour de cette ville, dans un moment où les approvisionnements étaient si difficiles. L'assemblée nationale était instruite des alarmes des citoyens, et à chaque instant, il arrivait aux députés des avis particuliers qui inspiraient les plus justes terreurs.

Tout à coup Mirabeau demande la parole pour un objet très-important, et qui, dit-il, quoique étranger à la constitution, devait cependant en précéder et en interrompre le travail, par la nécessité des circonstances. Le plus grand silence règne dans la salle. « Déjà, s'écrie-t-il, un grand nombre de troupes nous environnaient : il en est arrivé davantage; il en arrive tous les jours. Des trains d'artillerie les suivent; on intercepte tous les passages; nos chemins, nos ponts, nos promenades sont changés en postes militaires; les préparatifs de la guerre frappent tous les yeux et remplissent d'indignation tous les cœurs. Ce n'était pas assez que le sanctuaire de la liberté ait été souillé par des troupes, que l'assemblée ait été

soumise à la consigne et à la force armée, il fallait déployer tout l'appareil du despotisme, et montrer à la nation assemblée plus de soldats menaçants qu'il ne serait nécessaire d'en montrer à l'ennemi. Et pourquoi cet appareil? Pour l'ordre? pour contenir le peuple? Le peuple a été ramené à l'ordre, a été contenu par un acte de clémence et de bonté, dans une circonstance récente et remarquable la raison seule suffit done pour le rappeler à ses devoirs. Jamais le peuple n'a dû être plus calme, plus patient qu'au moment où il a des représentants qui font valoir ses droits, ses plaintes, et qui vont améliorer son sort. Ici, Mirabeau supposait que le roi était étranger à tous ces complots liberticides, et qu'il ignorait le but auquel tendaient ces grands préparatifs militaires. Puis, par un esprit prophétique, il ajoutait : « Ces précautions, au lieu de calmer le peuple, lui inspireront des alarmes et l'agiteront; les soldats s'électriseront par le contact de la capitale; ils s'intéresseront à nos discussions politiques; citoyens inquiets, soldats insubordonnés, ils se livreront à des mouvements impétueux la sédition marchera la tête levée. Que deviendront les auteurs de ces mesures quand l'incendie général sera allumé, quand le peuple enivré se sera précipité dans des excès dont l'idée fait frémir? »

La motion de Mirabeau est universellement applaudie. Sièyes ajoute que les états de Bretagne ne se croyaient pas libres si des troupes étaient réunies à dix lieues de leurs séances; et l'assem- | blée arrête qu'il sera fait une adresse au roi pour lui peindre les vives alarmes qu'elle conçoit de ces mesures contraires à la liberté et à l'honneur des députés, et pour le supplier d'ordonner le renvoi des troupes et de l'artillerie au lieu d'où on les a tirées. Mirabeau est chargé de cette adresse il s'en acquitte avec un rare bonheur. Tout ce que l'éloquence peut offrir d'entraînant, tout ce que les convenances peuvent permettre de vérités dignes de l'assemblée, tout ce qu'on peut dire de grand, de fort, de mesuré, se trouve dans cette longue adresse : l'assemblée nationale couvre de ses applaudissements la lecture de ce plaidoyer devenu célèbre, et l'adopte sans le moindre changement.

:

Deux jours après, une députation de l'assemblée, ayant à sa tête le comte de Clermont-Tonnerre, successeur de Bailly au fauteuil de la présidence, porta cette adresse au roi : ClermontTonnerre la lut avec un ton ferme. Mais on avait inspiré au roi une réponse contenant un refus assaisonné d'une espèce de raillerie.

» Si pourtant, dit le roi, la présence nécessaire des troupes dans les environs de Paris causait encore de l'ombrage, je me porterais, sur la de

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mande de l'assemblée, à transférer les états généraux à Noyon ou à Soissons, et alors je me ren drais à Compiègne pour maintenir la communication qui doit avoir lieu entre l'assemblée et moi. » Les paroles du roi, en réponse à une adresse si forte et si pressante, affligèrent la plupart des dé putés. L'offre de transférer l'assemblée à Noyon ou à Soissons donna beaucoup à penser, et ne laissa plus de doute qu'il n'existât des projets, dont le roi lui-même, ont dit plusieurs historiens, d'a près Necker, ne connaissait pas toute l'étendue'.

Dumouriez nous a appris plus tard en quoi con. sistaient ces projets mystérieux. D'après les confidences qui lui furent faites à cette époque, Necker devait être renvoyé; l'assemblée nationale dissoute les quarante-sept nobles de la minorité étaient destinés à être renfermés à la Bastille avec Mirabeau, Target et une centaine de membres les plus influents du tiers; enfin, le maréchal de Broglie devait occuper Paris et Versailles militairement.

Cette réponse négative ne pouvait satisfaire ceux des membres de l'assemblée que la présence des troupes alarmait : ils se plaignirent de l'ambiguité des paroles du roi. Mais le parti royaliste soutint que les députés devaient trouver des motifs de confiance dans les sentiments du monarque. « Nous avons rempli notre devoir envers la nation en demandant la liberté de l'assemblée, dit alors le comte de Crillon; remplissons notre devoir envers le roi en lui témoignant notre confiance. »>

Mirabeau, qui ne pensait pas comme les courtisans, répliqua aussitôt que cette confiance illimitée dont on se targuait comme d'une vertu avait toujours été le vice de la nation. « La parole du roi est digne en effet de notre confiance, ajouta-t-il ; mais c'est un mauvais garant de la conduite d'un ministère qui n'a cessé de surprendre sa religion. Notre aveugle et mobile inconsidération nous a conduits, de siècle en siècle, et de fautes en fautes, à la crise qui doit enfin dessiller nos yeux, moins que nous n'ayons résolu d'être des enfants toujours mutins et toujours esclaves. »

à

'Comment est-il possible de supposer qu'il y avait des secrets et des arrière-secrets pour le roi, quand on lui entend prononcer une réponse qui contient tant de secrets que le monarque doit nécessairement savoir, à moins qu'il ne soit un être

stupide, ou un perroquet auquel on apprend à réciter des mots dout il ne comprend pas la signification? Nous ne pouvons pas douter qu'il n'ait été fait, à cette époque, par les partisans du pouvoir ab-otu, plusieurs plans pour réprimer l'audace de l'assemblée nationale, ou plutôt du tiers-étt, et pour rendre au roi la plénitude de ses pouvoirs. F ulon, que le peuple traita si cruellement après la prise de la Bastille, fut l'auteur d'un de ces plans: il consistait à conseiller au roi de ne point se séparer de son armée, afin de faire arrêter le due d'Orléans, ainsi que beaucoup de députés. Quelques jours après, Louis XVI appela Foulon au ministere. Le roi savait donc pourquoi on avait rassemblé tant de troupes autour de Paris, et pourquoi on s'obstinait à les y garder, malgré les vives réclamations des babitants et celles de l'assemblée.

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Puis abordant les insinuations du roi sur le pro- | n'était plus temps alors de prévenir de grands jet de transférer l'assemblée, Mirabeau dit qu'il malheurs. Le gouvernement, prévoyant qu'il lui n'y avait pas lieu à délibérer si les députés de la serait impossible de conserver longtemps autour France iraient se placer entre trois corps de trou- de Paris les troupes qu'il y avait réunies, se hâta pes. « Nous n'avons pas demandé à fuir les trou- de passer à l'exécution de son plan. En consépes, s'écria-t-il, mais seulement qu'elles s'éloi-quence, il donna des ordres pour faire agir les gnent de la capitale; non pas pour nous, mais parce qu'elles troublent l'ordre et la paix publique. Voulons-nous être conséquents? insistons sans relâche sur le renvoi de ces troupes. »

Malgré tout ce que put dire Mirabeau, on était encore tellement habitué à se confier dans les promesses royales, ou plutôt à montrer que l'on s'y confiait, que l'assemblée ne décida rien sur cette motion; on passa à l'ordre du jour, qui était la nomination d'un comité des finances.

Soit crainte d'une prochaine dissolution, soit que l'assemblée fût pressée de s'occuper de la constitution si vivement demandée par tous les cahiers, plusieurs députés se hâtèrent de semer, ce jour-là, les germes de la liberté publique, et d'établir les principes d'une bonne organisation sociale. Quelques articles constitutionnels furent mis en discussion. La Fayette ayant présenté un projet de déclaration des droits de l'homme, on voulut s'en occuper de suite, comme pour laisser un monument achevé. La Fayette accompagna cette déclaration d'un très-beau discours, qui provoqua un mot heureux de Lally-Tolendal: « La Fayette a parlé de la liberté comme il l'a défendue, dit ce député en lui succédant à la tribune; et ce mot fut senti et vivement applaudi. Toutefois Lally ne voulait pas qu'on isolât la déclaration des droits de la constitution; et cette opinion, qu'il développa longuement, fit renvoyer la déclaration des droits à l'examen des bureaux. Elle n'en était pas moins rédigée, et elle existait.

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Pendant que l'assemblée nationale se dépêchait d'établir les principes du gouvernement de la France, les électeurs de Paris, toujours plus alarmés de l'appareil menaçant qui entourait la capitale et l'assemblée nationale, faisaient, par un mouvement de prévoyance, diverses propositions qui furent les bases de ce qui s'opéra quelques jours après. L'un d'eux, Bonneville, fit celle de se constituer en corps des communes, ce qui ne put s'effectuer, et celle non moins importante de demander au roi le renvoi des troupes, et l'établissement d'une garde bourgeoise, délibérée dans les districts qui avaient été convoqués à cette fin. Une garde bourgeoise eût été excellente pour calmer les inquiétudes des citoyens et pour veiller "a leur sûreté; elle ôtait d'ailleurs tout prétexte à la présence des troupes. Malheureusement, on avait trop tardé à adopter cette institution demandée par les électeurs dès le mois d'avril; il

baïonnettes étrangères, placées, comme je l'ai déjà dit, sous les ordres du maréchal de Broglie, qui ne cessait de dire: Je vois bien mon armée, mais je ne vois pas les ennemis.

Le moment était donc arrivé où la cour allait procéder aux grandes mesures préparées dans le silence il n'y avait plus de ménagements à garder. Aussi, dès le 11 juillet au soir, le roi écrivitil un billet à Necker, par lequel il lui enjoignait de s'éloigner sur-le-champ et de cacher son départ à tout le monde. Necker obéit, et monta aussitôt en voiture avec madame Necker, sous prétexte d'une promenade. Il se rendit d'abord à SaintOuen; et après avoir écrit à sa fille, pour la prévenir de l'événement, il prit la route de Bruxelles. Ainsi fuyait en exil le seul ministre attaché à la cause populaire : il emportait avec lui la confiance de la nation.

La nouvelle de ce départ affligeant se répandit le lendemain matin à Versailles, où l'on apprit en même temps que Breteuil, La Galissière, Laporțe, Foulon et le maréchal de Broglie devaient composer le conseil du roi. Ces nouveaux ministres étant connus par leur opposition aux réformes demandées par la nation, tous les yeux se dessillèrent, et l'on s'attendit à voir frapper le coup dont on était menacé depuis quelques jours. Malheureusement, l'assemblée ne devait pas se réunir ce jour-là, et les députés qui purent se rassembler ne crurent pas pouvoir délibérer. A Versailles, la journée se passa dans les plus vives angoisses.

Mais ce fut bien autre chose à Paris, quand la nouvelle du renvoi de Necker s'y répandit. On y prévit tout ce qu'on avait à craindre : l'assemblée nationale dissoute par la force, et la capitale envahie par des régiments étrangers. En effet, dès le matin, le baron de Besenval avait ordonné à plusieurs des régiments qui cernaient Paris et occupaient ses faubourgs, de faire un mouvement en avant et de se porter sur la place Louis XV. Un fort détachement de gardes suisses était déjà dans les Champs-Élysées, avec quatre pièces de canon. Les hussards de Berchigny, les dragons de Choiseul, et le régiment de Salis-Samade s'y rendirent aussi, non sans être insultés par le peuple.

Cependant, on s'assemble en tumulte au PalaisRoyal; la consternation se montre d'abord sur toutes les figures, et on arrête que tous les spec tacles seront fermés en signe de deuil. Tandis que

« ÖncekiDevam »