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pouvait encore rencontrer pour consolider l'œuvre de la révolution. Il ne devait plus être question de la mise en activité de la constitution, et encore moins de convoquer une nouvelle assemblée nationale mille pétitions avaient assez exprimé l'opinion de la France à cet égard. La convention était sur la brèche; elle ne pouvait la quitter qu'à la fin de la lutte entre la liberté et la tyrannie, entre l'aristocratie et le peuple : tous les amis de la patrie étaient d'accord sur ces deux points, et tous pensaient que le seul gouvernement qui pouvait convenir à la France en révolution était celui que la convention avait reconnu propre à conjurer tous les dangers dont la république était assaillie, c'est-à-dire le gouvernement révolutionnaire, tel que l'avait demandé le peuple français.

Le principe de ce gouvernement avait déjà été consacré par un décret solennel. Il restait à en déterminer l'organisation, et à en apprécier les devoirs.

Le 10 octobre, Saint-Just, portant la parole au nom du comité de salut public, se présenta à la tribune pour faire sentir la nécessité de rectifier tout entier le gouvernement de la république, afin de le mettre à même de comprimer vigoureusement les ennemis de la liberté.

« Votre comité de salut public, placé au centre de tous les résultats, dit ce jeune homme aux hautes facultés, a calculé les causes des malheurs publics il les a trouvées dans la faiblesse avec laquelle on a exécuté vos décrets, dans le peu d'économie de l'administration, dans l'instabilité des vues de l'état, dans la vicissitude des passions qui influent sur le gouvernement. Il a donc résolu de vous exposer l'état des choses, et de vous présenter les moyens qu'il croit propres à consolider la révolution, à abattre le fédéralisme, à soulager le peuple, à, lui procurer l'abondance et le bonheur, à fortifier les armées, à nettoyer l'état des conjurations qui l'infestent. »

Parcourant ensuite la situation de toutes les branches de l'administration publique, il faisait sentir combien il était urgent de remédier promptement au défaut d'énergie, d'ordre, d'économie, de surveillance et d'ensemble qui se faisait sentir dans le gouvernement de la république: puis, après avoir démontré que, dans les circonstances où l'on se trouvait, l'établissement de la constitution serait le suicide de la liberté, il arrivait à indiquer les moyens que l'assemblée devait prendre pour établir un gouvernement propre à seconder le vœu du peuple et les desseins de la convention.

« Il est impossible, continuait-il, que les lois révolutionnaires soient exécutées, si le gouvernement lui-même n'est constitué révolutionnairement.

» Vous ne pouvez point espérer de prospérité si vous n'établissez un gouvernement qui, doux et modéré envers le peuple, sera terrible envers luimême par l'énergie de ses rapports: ce gouvernement doit peser sur lui-même, et non sur le peuple. Toute injustice envers les citoyens, toute trahison, tout acte d'indifférence envers la patrie, toute mollesse doit y être souverainement réprimée.

» Il faut y préciser les devoirs, y placer partout le glaive à côté de l'abus, en sorte que tout soit libre dans la république, excepté ceux qui conjurent contre elle et qui gouvernent mal.

» Aujourd'hui que la république a douze cent mille hommes à nourrir, des rebelles à soumettre et le peuple à sauver; aujourd'hui qu'il s'agit de prouver à l'Europe qu'il n'est point en son pouvoir de rétablir chez nous l'autorité d'un seul, vous devez rendre le gouvernement propre à vous seconder dans vos desseins, propre à l'économie et au bonheur public.

» Vous devez mettre en sûreté les rades, construire promptement de nouveaux vaisseaux, remplir le trésor public, ramener l'abondance, approvisionner Paris comme en état de siége jusqu'à la paix; vous devez tout remplir d'activité, rallier les armées au peuple et à la convention.

>> Il n'est pas inutile non plus que les devoirs des représentants du peuple auprès des armées leur soient sévèrement recommandés: ils y doivent être les premiers amis des soldats; ils doivent coucher sous la tente; ils doivent être présents aux exercices militaires; ils doivent être peu familiers avec les généraux, afin que le soldat ait, quand il les aborde, plus de confiance dans leur justice et leur impartialité. Rappelons-nous toujours qu'un soldat malheureux est plus malheureux que les autres hommes; car pourquoi combat-il, s'il n'a rien à défendre qu'un gouvernement qui l'abandonne? Les représentants doivent manger seuls; ils doivent être frugals, et se souvenir qu'ils répondent du salut public, et que la chute éternelle des rois est préférable à la mollesse passagère. Ceux qui font des révolutions dans ce monde, ceux qui veulent faire le bien, ne doivent dormir que dans le tombeau. »>

Après avoir établi ces grands principes, SaintJust.terminait son long et lumineux rapport par une série de mesures qui devaient servir de base au gouvernement provisoire de la république. Le gouvernement était déclaré révolutionnaire jusqu'à la paix, et toutes les autorités se trouvaient placées sous la surveillance du comité de salut public, à charge par lui de rendre compte de ses opérations, tous les huit jours, à la convention nationale. Les lois révolutionnaires devaient être exécutées rapidement, et à cet effet, le gouver

nement devait correspondre directement avec les districts pour toutes les mesures de salut public. Des délais devaient être fixés pour l'exécution des lois. Les généraux en chef devaient être nommés par la convention nationale, sur la présentation du comité de salut public.

Les subsistances et la sûreté générale étant deux points essentiels dans le gouvernement révolutionnaire, Saint-Just indiquait les moyens de les

assurer.

La convention adopta à l'unanimité le rapport et le décret proposés par Saint-Just, et plaça ainsi volontairement et avec connaissance de cause, l'autorité gouvernementale entre les mains du comité de salut public, qui, luimême, mit la France entière dans une espèce d'état de siége. C'est ainsi que le gouvernement de la république française devint, par la réunion de tous les pouvoirs exécutifs entre les mains de ce comité, une sorte de dictature forte, concentrée, mais collective, et tout en faveur du peuple. Ce fut une idée heureuse, salutaire, parfaitement adaptée aux circonstances dans lesquelles la France se trouvait, et qui eut les résultats les plus étonnants; ce fut de plus un acte de courage et d'energie nécessaire pour sauver la liberté; et certes nous pouvons répéter ici le jugement que des historiens bien évidemment hostiles aux mesures de cette époque ont porté sur cette grande création :

«Non, ont dit les auteurs de l'Histoire de la » révolution de France grands admirateurs des » vertus et des talents des girondins; non, la » gironde n'eût jamais eu le courage nécessaire » pour proclamer cette vérité, que la France » était en révolution, et que son gouvernement » devait être révolutionnaire jusqu'à la paix; » non, elle n'eût jamais eu l'énergie nécessaire » pour tenir le gouvernail de ce gouvernement >> révolutionnaire : et ce fut pourtant ce gouvernement qui vainquit les rois et sauva la répu»blique! »>

Saint-Just n'ayant fait que poser les bases du gouvernement révolutionnaire, quelque temps après Billaud-Varennes en traça le mode, et en compléta l'organisation, en présentant un code complet, qui fut voté définitivement le 14 frimaire an II.

« Vous avez jeté les bases d'un gouvernement préparatoire et révolutionnaire, dit-il dans un rapport des plus remarquables; il vous manque encore le complément de cette mesure; il vous manque cette force coactive qui est le principe de l'existence, du mouvement et de l'exécution. » Et faisant ensuite la critique de la faiblesse avec laquelle on avait marché jusqu'alors, il présenta les moyens de donner au gouvernement toute la vigueur dont il avait besoin pour opérer le bien.

Partant du principe qu'en gouvernement, comme en mécanique, tout ce qui n'est point combiné avec précision, tant pour le nombre que pour l'étendue, n'obtient qu'un jeu embarrassé et occasionne des brisements à l'infini, et qu'il fallait en tout faire disparaître les résistances entravantes et les frottements destructeurs afin de simplifier la machine, Billaud démontrait combien était fausse cette vieille idée, propagée par l'impéritie, qui tendait à faire admettre que, dans un vaste état, on doublait les forces par la multiplicité des leviers. « Il est au contraire démontré à tout observateur politique, ajouta-t-il, que chaque graduation devenant un repos arrestateur, l'impulsion première décroît à proportion des stations qu'elle rencontre dans sa course. N'y aurait-il que l'ïnconvénient d'élever autant de barrières entre les représentants du peuple et le peuple lui-même qu'il existe d'autorités intermédiaires, que cet inconvénient serait le premier vice à extirper pour rendre aucorps législatif toute sa force. »

En conséquence, Billaud-Varennes proposait de rendre au gouvernement toute son élasticité, et de le dégager des formes lentes, tortueuses et suspensives, inséparables de l'envoi et de l'enregistrement hiérarchique des lois; et il demandait à cet effet que cette promulgation fût faite directement à toutes les autorités chargées de l'exécution, au moyen d'un bulletin des lois authentique et uniforme. Il voulait aussi que l'on fit exécuter ces lois par une réaction forcée, aussi directe et aussi exacte que l'action même ; et enfin que la convention décrétât des peines sévères contre les autorités qui s'écarteraient de ces règles. Il trouvait, dans ce mode d'exécution, la garantie que l'intention du législateur ne s'affaiblirait point par la transition graduelle de plusieurs centralités.

« On nous accuse d'être anarchistes, concluait Billaud-Varennes; prouvons que c'est une calomnie, en substituant spontanément l'action des lois révolutionnaires aux oscillations continuelles de tant d'intérêts, de combinaisons, de volontés, de passions qui s'entrechoquent, et qui déchirent le sein de la patrie.

» Certes, ce gouvernement ne sera pas la maîn de fer du despotisme, mais le règne de la justice et de la raison; ce gouvernement sera terrible pour les conspirateurs, coërcitif envers les agents publics, sévère pour les prévaricateurs, redoutable aux méchants, inexorable aux oppresseurs, favorable aux patriotes, bienfaisant pour le peuple. C'est ainsi qu'à l'avenir tous vos décrets, toutes les lois que vous porterez n'auront plus d'autre effet que de maintenir la république dans toute son intégrité, que de vivifier la prospérité générale, que de conserver à la convention toute

« La révolution, disait Robespierre, est la guerre de la liberté contre ses ennemis; la constitution est le régime de la liberté victorieuse et paisible.

sa force. En masse tenez ici vigoureusement la fonder: différence immense, qui avait échappé les rênes de l'état; ressemblez au faisceau que à tous les publicistes pour ne pas avoir prévu le vous représentez: comme lui tirez toute votre cas où la convention se trouvait. puissance de votre réunion, et qu'ainsi le crime le plus grave soit ou l'ambition de s'élever audessus des autres, ou la désertion de la cause du peuple. Point de grâce pour de pareils attentats point d'inviolabilité pour qui que ce soit; c'est une monstruosité politique. La seule qui ne soit point dangereuse, la seule légitime, réside dans la vertu. »

Après cet exposé, Billaud-Varennes présenta le code révolutionnaire. Il était divisé en plusieurs sections: la première traitait de l'envoi et de la promulgation des lois; la seconde, de l'exécution des lois; la troisième déterminait la compétence des autorités constituées; la quatrième était relative à la réorganisation et à l'épuration des autorités constituées; et la cinquième déterminait la pénalité que les fonctionnaires et autres agents de la république devaient encourir en cas de négligence: tout s'y trouvait en peu d'articles, et la concentration des pouvoirs entre les mains du comité de salut public, sous la haute surveillance de la convention nationale, et l'action rapide des lois, et l'effrayante responsabilité des autorités et de leurs agents, et les précautions pour assurer l'unité et l'indivisibilité de la république.,

Saint-Just avait posé les bases du gouvernement révolutionnaire; Billaud-Varennes venait d'en déterminer le mode, il restait à en fixer les principes: Robespierre le fit par un rapport dans lequel il s'éleva à une grande hauteur de pensée et de style. Reconnaissant que la théorie du gouvernement révolutionnaire était aussi neuve que la révolution qui l'avait amenée, et qu'il ne fallait point la chercher dans les livres des écrivains politiques, qui n'avaient point prévu cette révolution, ni dans les lois des tyrans, qui, disait-il, contents d'abuser de leur puissance, s'occupaient peu d'en rechercher la légitimité; il sentait la nécessité d'expliquer ce que la convention entendait par ce gouvernement unique dans les anuales du monde, afin de rallier tous les bons citoyens aux principes de l'intérêt public.

» Le gouvernement révolutionnaire a besoin d'une activité extraordinaire, précisément parce qu'il est en guerre. Il est soumis à des règles moins uniformes et moins rigoureuses, parce que les circonstances où il se trouve sont orageuses et mobiles, et surtout parce qu'il est forcé de déployer sans cesse des ressources nouvelles et rapides pour des dangers nouveaux et pressants.

» Le gouvernement constitutionnel s'occupe principalement de la liberté civile, et le gouvernement révolutionnaire de la liberté publique. Sous le régime constitutionnel, il suffit de protéger les individus contre l'abus de la puissance publique; sous le régime révolutionnaire, la puissance publique elle-même est obligée de se défendre contre toutes les factions qui l'attaquent.

» Le gouvernement révolutionnaire doit aux bons citoyens toute la protection nationale; il ne doit aux ennemis du peuple que la mort.

» Ces notions, ajoutait le célèbre membre du comité de salut public, suffisent pour expliquer l'origine et la nature des lois que nous appelons révolutionnaires. Ceux qui les nomment arbitraires ou tyranniques sont des sophistes stupides ou pervers, qui cherchent à confondre les contraires : ils veulent soumettre au même régime la paix et la guerre, la santé et la maladie, ou plutôt ils ne veulent que la résurrection de la tyrannie et la mort de la patrie. S'ils invoquent l'exécution littérale des adages constitutionnels, ce n'est que pour les violer impunément; ce sont de lâches assassins, qui, pour égorger sans péril la république au berceau, s'efforcent de la garrotter avec des maximes vagues dont ils savent bien se dégager eux-mêmes. »

Robespierre indiquait ainsi les devoirs du gouvernement révolutionnaire, qui, disait-il, était appuyé sur la plus sainte de toutes les lois, le salut du peuple, et sur le plus irréfragable des titres, la nécessité. Il trouvait que ses règles devaient être puisées dans la justice et l'ordre public; qu'il ne devait point être dirigé par les passions particulières, mais bien dans l'intérêt public seulement. Il disait que ce gouvernement ne devait avoir d'autre mesure de sa force et de son énergie, que l'audace ou la perfidie de ses ennemis; que

Robespierre s'attacha donc à définir la nature des lois que l'on appelait franchement révolutionnaires, et celle du gouvernement qui devait les appliquer. Il établit d'abord que les fonctions d'un gouvernement étaient de diriger les forces morales et physiques de la nation vers le but de son institution. Faisant ensuite un parallèle entre le gouvernement constitutionnel et le gouvernement révolutionnaire, il reconnut que le but du pre-plus il devait être terrible aux méchants, plus il mier était de conserver la république, tandis que celui du gouvernement révolutionnaire était de

devait être favorable aux bons; que, plus les circonstances lui imposaient de rigueurs nécessaires,

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plus il devait s'abstenir de mesures qui pussent leur sollicitude. La commune, autrefois si dispogêner inutilement la liberté, et qui dussent frois-sée à empiéter sur l'autorité gouvernementale, se ser les intérêts privés sans aucun avantage pour les intérêts publies. Il pensait encore qu'il devait voguer entre deux écueils : la faiblesse et la témérité, la modération et l'excès, et que si l'on avait à choisir entre un excès de ferveur patriotique et le néant de l'incivisme, ou le marasme du modérantisme, il ne devait pas balancer, parce qu'un corps vigoureux, tourmenté par une surabondance de sève, laissait plus de ressources qu'un cadavre.

Robespierre terminait son rapport en faisant sentir que, plus le pouvoir du gouvernement révolutionnaire était grand, plus il était libre et rapide dans son action, plus il devait être dirigé par la bonne foi. « Le jour où il tombera dans des mains impures ou perfides, concluait-il, la liberté sera perdue: son nom servira de prétexte et d'excuse à la contre-révolution, et son énergie sera celle d'un poison violent. >>

Tel était le gouvernement révolutionnaire que Robespierre concevait: il n'y avait rien que de très-rationnel dans cette grande création, rien qui choquât le bon sens dans ses principes si bien adaptés aux circonstances, rien qui ne fût dans l'intérêt de la liberté et du salut public. Aussi la convention nationale consacra-t-elle à l'unanimité et les bases de ce gouvernement, et son organisation, et le mode de son action, et les principes sur lesquels il était fondé. Ce fut une grande institution, à laquelle applaudirent tous les vrais républicains, parce qu'ils avaient la conviction que le gouvernement révolutionnaire seul pouvait faire triompher la république et affermir la révolution.

On conçoit que ce gouvernement inouï, cette conception hardie, gage de succès pour les amis de la liberté, ait fait jeter les hauts cris à tous ceux qui auraient voulu voir la révolution vaincue, et à ceux qui n'ont jamais pu comprendre cette énergique création. Mais la France révolutionnaire le trouva nécessaire, utile, admirable, et la convention l'adopta avec le sentiment de ce qu'elle faisait. Tout le monde était convaincu qu'il fallait un gouvernement rapide, vigoureux, propre à inspirer autant de confiance aux amis de la république que de crainte à ses ennemis. On se débarrassa des formes hypocrites, et en établissant la chose, on l'appela par son nom.

Le gouvernement révolutionnaire, ainsi décrété et organisé, pouvait compter sur l'appui du peuple; la commune, les jacobins, qui l'avaient appelé de leur væu, s'y rattachèrent avec toute l'ardeur qu'ils portaient aux affaires publiques, et il devint la base de tous leurs actes, l'objet de toute

renferma dans ses attributions, et ne travailla plus qu'à seconder le comité de salut public. Elle s'occupa avec ardeur des subsistances et de la police de la ville; elle prêchait les bonnes mœurs, surveillait les spectacles, travaillait à faire fermer toutes les maisons de jeu, tous les mauvais lieux. Le peuple français, auquel on se forçait tous les jours de dévoiler le charlatanisme des prêtres, montrait la plus grande indifférence pour tout ce qui avait rapport à la religiou; la convention avait le bon esprit de ne se mêler nullement des cultes, et de leur laisser la plus grande liberté; mais Chaumette songeait à se servir de cette liberté pour arriver à une révolution dans les idées religieuses. Déjà il avait fait défendre aux ministres de tous les cultes d'exercer leurs fonctions à l'extérieur des maisons à ce destinées, et la commune s'était emparée de tout ce qui tenait à l'état civil des citoyens, naissances, mariages, sépultures; elle s'était placée ainsi dans la voie d'une grande et révolutionnaire réforme.

Quant aux jacobins, ayant enfin obtenu ce qu'ils sollicitaient depuis longtemps, un gouvernement fort et redoutable aux ennemis de la révolution, ils continuèrent à rester le criterium de l'opinion. N'ayant pour le moment aucune grande question à examiner et à débattre, ils ne s'occupèrent, pendaut quelque temps, que de la surveillance qu'ils exerçaient journellement sur les fonctionnaires, les généraux, et même sur les députés en mission: tout ce qui était da ressort gouvernemental était soumis à cette surveillance, comme les autres citoyens l'étaient à celle des comités révolutionnaires. Le contrôle que les jacobins exerçaient ainsi sur les hommes investis de fonctions publiques était toujours actif, souvent tracassier, quelquefois même injuste; mais il n'en profitait pas moins à la chose publique, car il bridait les fonctionnaires de manière qu'ils n'osaient se permettre rien qui pût être l'objet d'un blâme de la part de cette société; ce qui pouvait devenir dangereux. Le moindre excès de pouvoir, la plus petite exaction étaient un motif de radiation de la liste des jacobins, et par suite, du renvoi au tribunal révolutionnaire.

On se figure aisément combien cette crainte était propre à retenir les fonctionnaires dans la ligne qui leur était tracée par le gouvernement: aussi en voyait-on peu qui ne fussent d'une probité et d'un dévouement à toute épreuve; et si quelques-uns péchèrent en ce temps-là, ce fut plutôt par excès de zèle que par tiédeur. La république pouvait donc compter sur tous les agents qu'elle employait à l'intérieur, comme elle comp

tait en même temps sur l'intrépidité de ses sol- | dans l'oubli du principe de la guerre en masse;

dats citoyens.

CHAPITRE XVII.

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Grandes mesures adoptées contre la Vendée. -- Dispositions prises pour les autres armées. Lyon. — Prise de cette ville.-Décret de colère porté contre Continuation du siége de elle. Opération du siége de Toulon, Bataille de Wattignies. - Échecs vers la Moselle et le Rhin.- La convention ordonne aux armées de la république d'exterminer les Vendéens, avant la fin d'octobre.-Grands succès obtenus dans la Vendée. Procès et condamnation de Marie-Antoinette. -Procès et condamnation des girondins.-Suite du système de terreur décrété contre les ennemis de la république.

L'établissement du gouvernement révolutionnaire qu'avaient enfanté les circonstances dans lesquelles la France se trouvait, et qui, comme elles, était sans exemple dans les annales du peuple, n'était autre chose que la détermination proclamée par la montagne de sauver la liberté, quels que fussent les moyens que l'on dût employer. Et en effet, les hommes qui avaient pris les rênes de ce gouvernement venaient de jurer qu'ils feraient triompher la république ou qu'ils s'enseveliraient sous les ruines de la patrie : résolution magnanime, mais qui ne pouvait être exécutée par les moyens ordinaires, et qui ne devait s'appuyer que sur une volonté inflexible.

Le développement de ce système révolutionnaire ne se fit pas attendre: la terreur contre les ennemis du peuple français fut mise partout à l'ordre du jour; et en même temps que l'on donna aux comités populaires le pouvoir de faire mettre en arestation toutes les personnes suspectes, le comité de salut public porta toute son attention sur les armées de la république, afin d'étouffer promptement les rébellions de Lyon et de Toulon, et de terminer dans une seule campagne la guerre liberticide que les rois de l'Europe faisaient à la grande nation qui avait proclamé les droits de l'homme.

Pensant avec raison qu'il fallait commencer par extirper le cancer de la Vendée pour arriver à obtenir des succès ailleurs, le comité concentra pour quelques instants toute sa sollicitude sur ces contrées. Barère présenta, sur cette malheureuse guerre, un magnifique rapport dans lequel il ne dissimulait nullement la situation des choses. Il examinait d'abord toutes les causes qui avaient contribué aux progrès des Vendéens, et les trouvait dans le trop grand nombre de représentants et de généraux, dans les divisions morales et militaires qui existaient dans les armées de l'Ouest;

dans trop d'indiscipline dans le succès, trop de faux rapports quand on faisait le récit des événements, trop d'activité et de pétulance, trop d'amour de l'argent, et enfin dans l'intérêt que des gens avides de richesses ou de renommée semblaient avoir à la durée de cette guerre.

Le rapporteur proposait ensuite comme remède à tous ces maux de réduire le nombre des reprémandement à un seul général, de ramener les sentants près de ces armées, d'en donner le comsoldats à la discipline, de surveiller ceux qui donnaient de fausses nouvelles, de mettre un frein aux dilapidateurs, et surtout de faire une guerre en masse.

« C'est à la Vendée, disait Barère, que vous devez déployer toute l'impétuosité nationale, et développer tout ce que la république a de puis

sance et de ressources.

« Détruisez la Vendée; Valenciennes et Condé ne seront plus au pouvoir de l'ennemi; détruisez la Vendée, l'Anglais ne s'occupera plus de Dunkerque; détruisez la Vendée, et le Rhin sera délivré des Prussiens; détruisez la Vendée, et l'Espagne se verra harcelée, conquise par les méridionaux, joints aux soldats victorieux de Mortagne et de Chollet; détruisez la Vendée, et une partie de cette armée de l'intérieur ira renforcer l'armée du Nord, si souvent trahie, si souvent travaillée détruisez la Vendée, et Lyon ne résistera plus, Toulon s'insurgera contre les Anglais et les Espagnols, et l'esprit de Marseille se relèvera à la hauteur de la révolution républicaine. Enfin, chaque coup que vous porterez à la Vendée, retentira dans les villes rebelles, dans les départements fédéralistes, dans les frontières envahies. La Vendée et encore la Vendée, voilà le charbon politique qui dévore le cœur de la république française: c'est là qu'il faut frapper.

<<"C'est à la convention, ajoutait le rapporteur, à commander cette fois le seul plan de campagne qui doit être exécuté dans la Vendée, celui qui consiste à marcher avec audace vers les repaires des brigands... Les brigands doivent être vaincus et exterminés dans leurs propres foyers. Semblable à ce génie fabuleux qui n'était invincible que quand il touchait la terre, il faut les soulever, les chasser de leur propre terrain pour les abattre. »

Et aussitôt la convention adressa à l'armée de l'Ouest une proclamation courte, énergique, impérative, par laquelle elle lui ordonnait d'exterminer les Vendéens avant la fin du mois d'octobre. « Le salut de la patrie l'exige, lui disait-elle; l'impatience du peuple français le commande; son courage doit l'accomplir. »

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