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tissaient de l'île à la rive droite : ils passèrent ces ponts à la suite des ennemis, et osèrent déboucher seuls dans la grande plaine qui borde le Rhin. Ils firent plus, ils n'hésitèrent pas à renvoyer les bateaux qui les avaient transportés, et restèrent sans retraite jusqu'au moment où il leur arriva des secours.

Le contingent des Souabes était campé à quelque distance de Kell, à Wilstett; les détachements qui en arrivaient, surtout en cavalerie, rendaient périlleuse la situation des premiers débarqués: mais, dès qu'ils se virent renforcés, ils marchèrent sur Kell, abordèrent les retranchements à la baionnette, et les enlevèrent. L'artillerie trouvée dans le fort fut tournée contre les troupes ennemies arrivant de Wilstett, et suffit pour les repousser. Un pont fut jeté entre Strasbourg et Kell, et achevé dans la journée du 7. Toute l'armée de Rhin-et-Moselle y passa. Le disséminement des troupes autrichiennes rendit facile cette opé

ration.

Cette situation présentait à Moreau l'occasion des plus beaux triomphes: il pouvait fondre sur les corps ennemis éparpillés le long du fleuve et les détruire l'un après l'autre ; mais il fallait pour cela le génie, l'ardeur et l'audace du vainqueur de Montenotte. Moreau, esprit lumineux et ferme, manquait de cette chaleur d'âme qui, à la guerre comme ailleurs, entraîne les hommes aux grandes choses. Ce général employa quatre jours à réunir ses divisions, pendant lesquels il se borna à faire attaquer dix mille Autrichiens retranchés sur la Renchen: il les battit et leur fit huit cents prisonniers ; mais le reste se replia sur le corps de Latour qui remontait la rive droite.

Le 12 messidor toute l'armée de Moreau se trouva réunie au-delà du fleuve; elle comptait soixante-trois mille hommes d'infanterie et six mille chevaux. Le général donna la droite à Férino, le centre à Saint-Cyr, la gauche à Desaix: il se trouvait au pied des montagnes Noires, et devait les franchir pour déboucher dans la vallée du Necker. Moreau pouvait sans inconvénient négliger le contingent des Souabes et le corps de Condé qui se retiraient du côté de la Suisse, et fondre avec la masse de ses forces sur les troupes du général Latour : il l'aurait infailliblement accablé, et serait entré en vainqueur dans la vallée du Necker. Mais, en général prudent, al détacha Férino pour suivre les Souabes et Condé, dirigea Saint-Cyr vers les montagnes pour occuper cerlaines hauteurs, et longea lui-même leur pied pour descendre à Rastadt, au-devant de Latour. Moreau marcha avec une grande circonspection et n'arriva que le 15 à Rastadt. Il était temps encore d'accabler Latour, car les têtes de colonne

du prince Charles étaient loin: Latour put fortifier sa position. Ce ne fut que le 17 messidor que Moreau l'attaqua avec la gauche de son armée: ses troupes se conduisirent avec une grande valeur; mais les divisions de la plaine eurent beaucoup de peine à déboucher sous le feu de l'artillerie et en présence de la nombreuse cavalerie autrichienne. Néanmoins les Français parvinrent à se rendre maîtres de la Murg, sur tous les points, et firent à l'ennemi un millier de prisonniers : Moreau s'arrêta sur le champ de bataille. Cependant l'archiduc n'avait pas encore rejoint Latour, qui pouvait toujours être défait, Moreau sentit alors la nécessité d'avoir Saint-Cyr sous la main pour agir avec de plus grandes forces: il l'attendit jusqu'au 24 avant d'attaquer, et cet intervalle permit à l'archiduc d'arriver avec un renfort de vingt-cinq mille hommes; ce qui rétablit l'égalite des forces.

Ce même jour, 21 messidor, Moreau attaqua les Autrichiens ainsi renforcés: Saint-Cyr, à la droite, déploya cette habileté de manœuvres qui l'a distingué dans sa belle carrière. N'ayant pu déloger l'ennemi d'une position formidable, il feignit une fuite pour engager les Autrichiens à se jeter à la poursuite des Français; ce qui réussit. Alors Saint-Cyr, qui avait des troupes préparées, les lança sur les Autrichiens et se rendit maître du plateau. De ce moment il put s'avancer et intimider les Saxons chargés de déborder notre droite : ils se replièrent en effet. Au centre, Desaix s'était engagé vivement, avait pris et perdu le village de Malsch, et fini sa journée en se portant au pied des hauteurs. Dans la plaine, notre cavalerie ne s'était point engagée; Moreau l'avait tenue à la lisière des bois. Ainsi, la bataille était donc indécise, excepté du côté de Saint-Cyr; mais c'était le point important. L'archiduc crut devoir se retirer, pour ne pas compromettre la monarchie autrichienne. Il avait aussi un autre but, celui de devancer Moreau dans la vallée du Necker, et couvrir ainsi les états héréditaires à leur grande ligne du Danube. En y concentrant ses forces, l'archiduc était là chez lui, avec la faculté de manœuvrer sur les deux rives du fleuve, et d'accabler l'une des deux armées envahissantes. Les Français, au contraire, se trouvaient fort loin de chez eux, avec le désavantage d'un pays affreux à traverser, et enfin l'inconvénient d'être divises en deux corps, et d'être commandés par deux généraux. Ainsi, les impériaux gagnaient, en se rapprochant du Danube, tout ce que perdaient les Français.

Pendant que le prince Charles marchait pour arriver sur le Danube, l'armée de Jourdan passait de nouveau le Rhin à Dusseldorf et Neuwied, et

Moreau livra un combat à Canstadt pour le passage du Necker; il s'enfonça ensuite dans les montagnes et déboucha sur la vallée du Danube vers le milieu de thermidor (fin juillet). De son côté, Jourdan remonta le Mein, s'empara de Wurtzbourg, puis déboucha au-delà des mon

maneuvrait, comme elle l'avait déjà fait, pour déboucher dans la vallée du Mein. Jourdan avait devant lui trente mille fantassins et quinze mille hommes de cavalerie sous les ordres du général Wartensleben, lequel avait reçu l'ordre de se retirer pied à pied sur le Danube, par la vallée du Mein. Cette nombreuse cavalerie couvrait l'infan-tagnes de Souabe, sur les bords de la Naab, qui terie, et rendait inutiles toutes les tentatives des Français pour l'entamer. Cependant l'avant-garde française, commandée par Lefebvre et Kléber, engagea le combat à Neukirchen, battit les Autrichiens, et passa la Lahn à Marbourg.

La marche rapide de cette armée est tracée d'une manière remarquable dans le récit rapide de Jourdan. Voici comment il en rend compte: « Le 12 messidor (50 juin), le général Kléber a » passé la Sieg; le 45, il vint à Uchazath et s'en >> rendit maître sans opposition; le 44, le général » Jourdan força le passage du Rhin à Neuwied, et » le 15 il effectua sa jonction avec le général Klé» ber; le 16, le général Lefebvre attaqua l'aile » droite de l'ennemi, la culbuta et fit six cents » prisonniers; les 47, 18 et 19, l'armée s'est avan»cée, en se portant sur la Lahn; le 20, l'ennemi » s'est retiré; le 21, l'armée a passé la Lahn; le » 22, elle a continué sa marche, Kléber rencon» tra l'ennemi à Friedberg et le battit; le 25, » l'armée se reposa; le 24, elle passa la Vida, et » se porta partie sur Francfort, et partie sur » le Mein; le 25, Francfort fut sommé, et, sur ■le refus de la garnison autrichienne, bombardé; » le 26, cette place capitula, et le 28 (18 juillet), » les Français y sont entrés. » Kléber écrivait à son ami Grouchi: « Nous comptons, mon cher » général, nos marches par nos combats, et nos » combats par nos victoires. »

Néanmoins, plus Jourdan s'avançait, plus son armée s'affaiblissait par les forts détachements qu'il était obligé de laisser autour des places fortes il ne lui fallut pas moins de vingt-sept à vingt-huit mille hommes pour garder Mayence, Cassel, Konigstein, Ehrenbreitstein, etc., ce qui réduisait le nombre de ses combattants à quarante et quelques mille.

D'après le plan du directoire, chacune des arFées françaises devait toujours tendre à déborder les ailes de l'ennemi: Moreau devait appuyer sur le Haut-Rhin, afin de se rapprocher du Tyrol, et donner la main à l'armée d'Italie; Jourdan, chargé de déborder le général Wartensleben, était forcé de s'éloigner de Moreau, car, au lieu de se rapprocher du Danube, le général autrichien se portait vers la Bohême pour la couvrir. Toutes ces dispositions étaient mauvaises, en ce qu'elles avaient pour résultat de mettre une grande distance entre les deux armées françaises.

tombe dans le Danube : ainsi, vers le milieu de l'été, les armées de la république, maîtresses de l'Italie qu'elles avaient conquise, et de la moitié de l'Allemagne qui se trouvait envahie, menaçaient l'Europe.

Ce fut alors qu'à la suite d'une conférence tenue à Pyrmont, où se rendit le roi de Prusse, les intérêts du corps germanique, fondés sur l'impérieuse nécessité, décidèrent d'abord les souverains membres de cette ligue à retirer du théâtre de la guerre leurs troupes, autres que celles de leur contingent: bientôt, par des paix partielles, chacun stipula pour ses intérêts, et la maison d'Autriche se trouva abandonnée à ses seules forces. Déjà des émeutes avaient signalé l'esprit révolutionnaire jusqu'à Vienne : le peuple, rassemblé devant l'hôtel du ministre Thugut, avait fait entendre des vœux pour la paix, et la deman dait avec une audace qu'on ne connaissait pas au peuple autrichien; la force armée avait été nécessaire pour dissiper ces attroupements. Il paraît même que l'Autriche redemanda alors l'armistice qu'elle venait de rompre, et que Moreau s'y refusa.

Dans cet état de choses, l'empereur ordonna à son frère de concentrer ses forces, en se repliant sur la ligne de défense qu'offrait encore le Danube, et de se borner à garantir la Bavière et les états héréditaires. En même temps que le prince Charles se retirait sur le Danube, tout le corps commandé par Wartensleben abandonnait la defensive de la rive gauche du Mein, et se dérobait au général Jourdan pour se diriger sur le Necker, puis sur l'armée du prince. Jourdan, ne trouvant plus d'ennemis devant ses troupes, poussa vivement ses avantages sur le Haut-Mein, et, dans cette marche rapide, son aile droite, qui devait se tenir à la hauteur de la gauche de l'armée du Rhin-et-Moselle, la dépassa de beaucoup, et se trouva ainsi ayant son flanc droit à découvert.

Soit que la prompte retraite des Autrichiens fût la suite d'un plan combiné du prince Charles, soit que, profitant de cette marche précipitée de Jourdan qui rompait la ligne des deux armees, il conçût son projet d'après l'événement, c'est de là qu'il faut dater les revers qui changèrent si subitement l'état des choses, et reportèrent en peu de jours le théâtre de la guerre du Danube i au Rhin.

Au premier rapport de cette retraite, Moreau s'était empressé de marcher en avant sur le Lech, et d'attaquer le corps du général Latour, qu'il battit complétement; mais cette victoire l'éloignait encore davantage de Jourdan, et n'eut pas l'effet que Moreau s'en promettait, celui de faire rétrograder le prince Charles. Ce jeune général sentait que toute la campagne dépendait de ce qui allait se passer sur le Mein il se contenta d'envoyer quelques secours au général Latour, et continua de poursuivre l'armée de Sambre-et Meuse.

Après plusieurs combats de détail, et à la suite | fité de l'intervalle que laissait cette retraite pour d'une affaire sérieuse où le prince Charles avait se jeter sur les derrières du centre et de l'aile attaqué tout le front de Moreau et l'avait même gauche de Jourdan, celui-ci, menacé d'être enforcé à reculer de quelques lieues, l'armée fran-veloppé et coupé dans ses communications, se çaise du Rhin-et-Moselle, grâce aux efforts vigou- | hâta de se replier sur Amberg. Là, attaqué de reux de Desaix qui avait rétabli le combat, avait front par Wartensleben, et en flanc par le prince, repris ses positions près de Donauwert. Celle de il dirigea sa retraite sur la position de Pfortzheim, Jourdan, pénétrant en même temps dans la Fran- où il comptait réunir son armée. conie, s'était avancée jusqu'à Bamberg : cette armée était alors sous le commandement de Kléber, par suite d'une chute grave que Jourdan avait faite dans une reconnaissance. Kléber, après un combat de cavalerie avantageux, avait repoussé l'armée ennemie jusqu'à Nuremberg, où Jourdan reprit le commandement. Desaix occupa Donawert: Moreau était entré à Augsbourg. La résidence de la cour de Bavière étant menacée, l'électeur s'était réfugié en Saxe. Les Autrichiens, retirés derrière le Lech, avaient été obligés d'abandonner cette position, après une affaire sanglante à Friedberg, où ils perdirent quinze cents prisonniers. Les avant-postes de Moreau étaient à deux lieues d'Ingolstadt; ceux de Jourdan s'approchaient de Ratisbonne. Les divisions de droite, sous les ordres de Férino, s'avançaient vers le Tyrol par les vallées que forment le cours de l'Inn et les sources du Lech. La jonction avec l'armée d'Italie devait amener la ruine de l'armée de Wurraser, et forcer l'Autriche à une paix avantageuse pour la république : une seule journée, à la droite de l'armée de Jourdan, changea tous ces succès en revers prolongés.

Le prince Charles non-seulement avait concentré toutes ses forces, mais encore il avait reçu de la Hongrie un renfort de quatorze mille grenadiers, ainsi que plusieurs autres détachements arrivés de l'intérieur. Il calcula un grand mouvement d'après la position des différents corps de l'armée française. Jourdan avait sa droite avancée jusqu'à Neumarck, et, en avant de ce poste, Bernadotte occupait le village de Teining, ayant devant lui le corps de Wartensleben en retraite. Tout à coup ce général reçoit l'ordre de faire volte-face, de marcher sur Teining, et d'attaquer de front, sans égard aux forces qu'on pourrait y trouver. En même temps le prince Charles repasse la Danube, à la tête de quinze mille Hongrois, et attaque subitement Bernadotte sur son flanc gauche. Malgré la supériorité du nombre, le général français tint toute la journée; mais les secours que lui envoyait Jourdan ayant été arrêtés par les troupes de Wartensleben, qui avaient déjà dépassé le flanc gauche des Français, Bernadotte fut forcé à la retraite.

Elle se fit d'abord, sans grand désordre, sur Nuremberg; mais le prince Charles ayant pro

Cette armée se retirait avec le plus vif regret et en conservant le sentiment de ses forces; c'était elle qui avait vaincu à Wattignies, à Fleurus, aux bords de l'Ourthe et de la Roer. Cette retraite ne l'avait pas découragée. Jourdan s'arrêta à Wurtzbourg pour laisser reposer ses troupes, et fit des dispositions qui annonçaient l'intention de combattre. Il pensait que l'archiduc était revenu sur le Danube, et qu'il n'aurait pas à lutter contre toute l'armée autrichienne.

Mais le prince Charles était encore là, et, le 17 fructidor, il déploya des forces très-supérieures. La bataille s'engagea d'abord avec quelques avantages pour les Français; cependant la cavalerie fut rompue dans les plaines, et, après s'être ralliée plusieurs fois; elle ne trouva d'abri que derrière les feux de notre infanterie. Jourdan aurait pu remporter la victoire, si sa réserve n'eût pas été trop éloignée : il l'avait lui-même placée à Schweinfurt, afin de se ménager une retraite; il lui fit dire d'avancer par des officiers. qui ne purent pénétrer jusqu'à Lefebvre. Jourdan fut donc obligé de replier son armée pour la dérober à la redoutable cavalerie dont elle était entourée. La retraite se fit en bon ordre sur Arnstein: dès-lors il ne s'arrêta plus dans sa marche rétrograde; il donna l'ordre à Marceau de se retirer de devant Mayence, et arriva le 24 fructidor derrière la Lahn. Dans sa pénible retraite depuis les frontières de la Bohême, l'armée de Jourdan n'avait perdu que six mille hommes environ; mais la république eut à regretter la mort du jeune Marceau, qui fut atteint d'uno balle, sans qu'on pût l'emporter du champ de bataille. L'archiduc Charles le fit entourer de soins, mais il expira bientôt. Le jeune héros,

regretté des deux armées, fut enseveli au bruit des décharges de leur double artillerie.

Après les journées de Wurtzbourg, le prince Charles, assuré de la retraite de l'armée de Jourdan, en abandonna la poursuite à ses lieutenants, et renvoya sur le Danube une partie des renforts victorieux qui l'avaient suivi, tandis qu'avec les garnisons réunies il gagnait les débouchés des vallées qui devaient servir de retraite à l'armée du Rhin-et-Moselle. La position de Moreau devint alarmante; à peine osait-on espérer d'en revoir les débris sur la rive gauche du Rhin.

Moreau, toujours au delà du Danube et du Lech, attendait impatiemment des nouvelles de Jourdan, dont il ignorait la position: il tâtonnait sans oser prendre un parti. Dans l'intervalle, sa gauche, sous les ordres de Desaix, eut un combat des plus rudes à soutenir contre la cavalerie de Latour, qui, après s'être réunie à celle de Nauendorff, déboucha à l'improviste par Langenbruck. Desaix fit des dispositions si justes et si promptes, qu'il repoussa les nombreux escadrons ennemis et les dispersa dans la plaine, après leur avoir fait éprouver une grande perte.

Aucun des officiers détachés pour avoir des nouvelles de Jourdan n'étant retourné, Moreau, toujours dans l'incertitude, se décida enfin, après une vingtaine de jours d'inaction, à tenter un mouvement pour aller à la découverte. Le 24 fructidor, il fit repasser le Danube à sa gauche et à son centre, et laissa sa droite seule au delà de ce fleuve, vers Zell. Après quatre jours d'attente dans cette singulière et dangereuse position, et ayant appris la retraite forcée de Jourdan, ainsi que les tentatives faites par la garnison de Manheim sur Kell pour détruire le pont, il se décida à se mettre en route pour regagner la France.

La position de Moreau était périlleuse; elle offrait des dangers incalculables: mais il avait une superbe armée de plus de soixante mille hommes, dont le moral n'avait été ébranlé par aucune défaite, et qui avait une confiance extrême en son chef. Appréciant une pareille ressource, Moreau ne s'effraya pas, et résolut de regagner tranquillement sa route. Ses parcs, ses bagages marchaient devant lui, sans confusion, et tous les jours ses arrière-gardes repoussaient bravement les avant-gardes ennemies. Jugeant qu'une victoire donnerait à ses troupes du courage et de la fermeté pour le reste de la retraite, le général français s'arrêta, le 14 vendémiaire, non loin de Biberach, et attaqua le général Latour sur tous les points pénétrant avec art à travers les positions des Autrichiens, abordant les unes de front, tournant les autres, Moreau accula l'ennemi sur le Riss, le jeta dedans, et lui fit quatre mille pri

sonniers. Cette victoire éclatante rejeta Latour fort loin, et permit à Moreau de continuer sa retraite, sans être inquiété pendant quelques jours. La vallée qui aboutit à Kell étant occupée par l'ennemi, le général français aima mieux passer par le Val d'Enfer, et déboucha dans la vallée du Rhin, plutôt en vainqueur que dans l'attitude d'un général qui bat en retraite.

Toutefois Moreau, qui était rendu dans la vallée du Rhin dès le 24 vendémiaire, et sans avoir éprouvé aucune perte, commit la faute de ne pas passer ce fleuve au pont de Brissac : il voulut remonter la rive droite jusqu'à Kell, et risqua ainsi le chances d'une bataille devenue inutile. Le 28 vendémiaire les deux armées se trouvèrent en présence, à Emmendingen; un combat sanglant s'engagea : Moreau se vit dans l'impossibilité de percer jusqu'à Kell, fit repasser le Rhin à sa gauche sur le pont de Brissac, et retourna vers Huningue, affaibli du tiers de son armée. Il comptait sur la belle position de Schliengen, sur Jaquelle il pouvait se placer et combattre. Le 15 brumaire il s'y arrêta, et y livra au combat opiniâtre et balancé pendant lequel ses bagages passèrent le Rhin il quitta lui-même sa position pendant la nuit, repassa sur la rive gauche et s'achemina vers Strasbourg.

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Ainsi finit cette campagne commencée avec tant de bonheur, et cette retraite célèbre. Le plan en était vicieux, et chaque général fit des fautes. Le jeune archiduc Charles dut au vice de ce plan une grande pensée qu'il exécuta glorieusement. Jourdan fit une campagne toute de dévouement. Moreau fut célèbre par sa belle retraite. De co jour il devint l'homme de ceux que le génie supérieur offusque, et qui lui préfèrent le mérite moins éclatant.

Toutefois l'issue de la campagne d'Allemagne fut fâcheuse pour la république : quoique les armées de Sambre-et-Meuse et du Rhin-et-Moselle se fussent retirées sans de grandes pertes et fussent à même de tenir la ligne du Rhin jusqu'au moment de reprendre l'offensive, les ennemis du gouvernement triomphaient ouvertement, et répandaient les bruits les plus sinistres : ils exagéraient nos revers, comme nous avions exagére nos succès.

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La retraite momentanée des armées du Rhin laissait à celle d'Italie une grande et pénible tâche à remplir. Le directoire n'avait encore rien terminé ní avec Gènes, ni avec Rome et Naples : les négociations de la paix avec ces deux dernières puissances souffraient des retards, qu'elles attendaient, pour conclure, les événements de la guerre. Quant à Venise, au lieu d'accéder à la proposition qui lui avait été faite d'une quadruple alliance, elle armait avec activité.

il était évident

Le général en chef Bonaparte pensa que dans le moment il fallait traîner les négociations, paraître ignorer toutes les démarches hostiles et ne rien décider jusqu'à ce que de nouvelles victoires eussent permis à la république française de parler en maître.« Si je suis vainqueur, écrivait-il, il suffira d'une simple estafette pour terminer toutes les difficultés qu'on me suscite. »

Au moyen d'un secours de neuf à dix mille hommes qui lui était arrivé des Alpes, et des malades sortis des dépôts de la Provence et de Nice, l'armée française d'Italie avait réparé ses pertes et s'était même renforcée : elle comptait près de quarante-cinq mille hommes répandus sur l'Adige et autour de Mantoue, lorsque Bonaparte revint de sa marche dans le midi. Les Français avaient déjà mis hors de combat deux armées; mais il s'en présentait une troisième plus formidable que les précédentes,

Le vieux maréchal Wurmser, considéré comme un des meilleurs généraux de l'Autriche, arrivait à la tête de soixante mille hommes, dont trente mille d'excellentes troupes tirées de l'armée du Rhin, et trente mille formés des débris de Beauheu et des bataillons venus de l'intérieur de l'Autriche. Plus de dix mille hommes, sans compter les malades, étaient dans Mantoue. Ainsi l'armée autrichienne se composait de près de soixantedix mille hommes. Bonaparte, en ayant réuni près de dix mille autour de Mantoue, ne pouvait opposer que trente à trente-cinq mille combattants aux soixante mille qui allaient déboucher du Tyrol. Il fallait une grande bravoure chez les soldats et un génie bien fécond dans le général, pour rétablir la balance.

La ligne de l'Adige, à laquelle Bonaparte attachait tant de prix, allait devenir le théâtre de la lutte. Trois routes s'offraient à l'ennemi pour boucher du Tyrol : l'une, franchissant l'Adige à la hauteur de Roveredo, tournait autour du lac de Garda, et aboutissait sur les derrières de Salo, Gavardo et Brescia. Les deux autres routes, partant de Roveredo, suivaient les deux rives de l'Adige : l'une, sur la droite, débouchait dans la plaine entre le Mincio et l'Adige; l'autre, suivant la gauche, aboutissait dans la plaine vers Vérone. Toutes ces trois routes présentaient cependant de grandes difficultés, et c'est sur ces difficultés et la force de certaines positions que Bonaparte comptait pour arrêter le premier débordement des Autrichiens. Son activité, la bravoure de ses troupes auraient fait le reste.

Le général en chef plaça trois mille hommes aux ordres du général Sauret, pour garder la route qui débouche sur les derrières du lac de Garda; Masséna, avec douze mille, interceptait la route qui passe entre ce lac et l'Adige, occupant ainsi les fortes positions de La Corona et de Rivoli. Cinq mille hommes, commandés par Despinois, étaient dans les environs de Vérone; Augereau gardait la position de Legnago avec huit mille soldats; enfin le général Kilmaine formait la réserve avec deux mille chevaux et l'artillerie légère; il était placé dans la position centrale de Castel-Novo, où Bonaparte avait établi son quartier-général. Comme on tenait beaucoup à Vérone, à cause de ses trois ponts sur l'Adige, et qu'on se méfiait des intentions des Vénitiens, on demanda le renvoi des régiments esclavons le provédsteur obéit, et il ne resta dans cette place que la garnison française.

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Wurmser avait porté son quartier-général a Trente et Roveredo; l'imagination italienne, qui grossit tout, avait exagéré la disproportion des forces. Les ennemis des Français et de la liberté

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