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»que campagne, prouve le contraire. En accordant la paix aux Saxons, Charlemagne ne leur imposait point, il est vrai, l'obligation expresse d'embrasser la doctrine de Jésus-Christ. Mais il n'en est pas moins vrai que la conversion de ces tribus germaines fut le résultat des expéditions de Charlemagne, et la certitude de cette proposition suffirait pour justifier les auteurs que M. Moeller accuse de s'être trompés. Mais il y a plus; car, en faisant la guerre aux Saxons, l'empereur franc avait pour but principal la conversion de ces barbares. Son premier soin, après la victoire, était d'anéantir leurs idoles. Lorsqu'ils demandaient la paix, on exigeait d'eux, comme une condition expresse, liberté et sécurité pour les missionnaires catholiques, et le premier acte d'hostilité de ces peuplades turbulentes, lorsqu'elles se révoltaient, était l'expulsion de ces mêmes missionnaires et la destruction des églises. Au contraire, les Saxons se soumettaient-ils, leur premier acte de soumission était la réception du baptême. C'est ainsi que leur célèbre chef Wittikind témoigna qu'il s'avouait vaincu, et, après sa conversion, le culte payen fut interdit sous peine de mort.

Du reste, ce point d'histoire est le seul, à notre avis, dans lequel M. Moeller ait un peu trop cédé à l'influence de son zèle religieux. Mahomet, lui-même, est jugé par lui avec moins de sévérité qu'on aurait pu le croire. M. Moeller pense, et nous partageons son opinion, que, frappé de la nécessité de purifier le culte de ses compatriotes, le réformateur de l'Orient crut de bonne foi à sa divine mission, jusqu'à ce que reçu comme souverain à Médine, il se laissa égarer par l'ambition, et supposa, dans l'intérêt de sa doctrine, une foule de prodiges dont il connaissait trèsbien la fausseté. L'élévation rapide du prophète, les progrès, non moins rapides, de ses nouveaux préceptes, les conquètes d'Omar et de ses descendans, forment, sans contredit, avec l'histoire de Charlemagne, les parties les plus intéressantes du volume que nous analysons. L'auteur, et ce que nous disons ici doit s'entendre de tout l'ouvrage, l'auteur a choisi, pour sa narration, la méthode la plus simple et la plus naturelle. Il raconte les faits dans leur ordre chronologique, sans réflexions ni commentaires. C'est la place même que chaque fait occupe, par rapport aux autres, qui fait sentir sans effort la liaison des événemens.

Cette méthode n'exclut pas, comme on pourrait le croire, les rapprochemens ingénieux; nous en donnerons un exemple. Les serfs, sous la première race, se divisaient en trois classes, les esclaves proprement dits, les colons et les ministeriales, ou esclaves domestiques. Le premier des ministériales du roi était le majordome,, ou maire du palais. Il avait, dit l'auteur, la direction suprême de la maison royale, ainsi que des domaines >> royaux ; mais il appartenait lui-même à la classe des serfs do>mestiques. En cas de guerre, il commandait les ministériales du roi. Lorsque les souverains commencèrent à donner des terres » en fiefs à leurs leudes, le maire du palais entra nécessairement › en relation avec ces derniers, et, bien souvent, c'était lui qui réglait les inféodations. Par degrés, la plupart des seigneurs » devinrent vassaux du roi, en acceptant des fiefs, et alors l'in> fluence du maire du palais s'étendit tellement que les plus » grands seigneurs aspirèrent à cette charge. Bientôt elle leur fut réservée et le maire du palais déjà puissant, par son in»fluence personnelle, le devint bien davantage, à l'aide d'une > dignité dont les attributions s'étendirent beaucoup pendant les >> nombreuses minorités des Mérovingiens. Alors, c'étaient les > maires du palais qui disposaient des fiefs, et ils parvinrent aisément à se créer, par ce moyen, un parti parmi les grands. Ceux-ci, de leur côté, étaient directement intéressés dans le ils fini>> choix du maire du palais, et, après y avoir concouru, >> rent par rendre cette charge élective. A partir de ce moment, >>> les suffrages de la noblesse se fixèrent presque toujours sur un » membre de la famille du dernier maire, afin de s'assurer la >> conservation des bénéfices qu'il leur avait accordés, et la pre» mière dignité du royaume devint héréditaire, par cela même » qu'elle était élective. La force même des choses jeta ainsi le pouvoir suprême entre les mains des maires du palais, et l'y >> rendit héréditaire. »

Cette citation fera connaître mieux que tous nos discours les avantages de la méthode de M. Moeller. En groupant ainsi quelques faits, appuyés toujours sur des autorités contemporaines que nous nous sommes abstenu de citer, il fait passer sous nos yeux la dignité la plus éminente de notre monarchie primitive, dans toutes ses transitions et ses vicissitudes, depuis son

humble origine jusqu'au plus haut degré de sa puissance et de sa splendeur. L'esprit, sans y être conduit par aucune réflexion de l'historien, peut-il n'être pas frappé de cette idée que la puissante dynastie des Carlovingiens a eu son berceau dans l'esclavage?

Jusqu'ici, dans ce que nós réflexions ont eu de spécial, nous nous sommes principalement arrêté à l'histoire de notre patrie. C'est aussi sur des faits appartenant à cette histoire, que nous exposerons quelques doutes à M. Moeller. Il avance (pag. 106): que les Francs, du tems de Clovis, avaient déjà >> abandonné leur vie aventurière, qu'ils s'étaient fixés dans la » Belgique et dans le nord de la Gaule, où ils se mêlèrent aux >> anciens habitans, en leur imposant leur langue et leurs institutions >> sociales. » Nous pensons qu'il serait difficile de prouver la dernière partie de cette proposition; on établirait plus aisément le contraire. En décomposant une langue, on arrive sans peine à découvrir le secret de son origine. Or, une analyse même superficielle de la langue française, à quelque époque qu'on la considère, met hors de doute la prédominance de l'élément romain sur l'élément germanique. D'ailleurs, il ne nous reste aucun monument de cette prétendue langue de nos pères; nos plus anciens auteurs ont écrit en latin; c'est en latin aussi que les rois de la première race donnaient leurs diplomes. Les institutions des Francs gardèrent leur autorité parmi eux après la conquête; mais il ne paraît pas qu'ils aient songé à les imposer aux peuples vaincus. Telle n'est pas du moins l'opinion des plus savans écrivains, et le passage suivant de Montesquieu, en appuyant l'opinion que nous avons émise, contredit encore cette proposition de M. Moeller, que les guerres des Francs n'étaient point des expéditions entreprises pour faire du butin, mais de véritables guerres de conquête. « Lorsque >> les Francs, dit l'auteur de l'Esprit des Lois, les Bourguignons » et les Goths faisaient leurs invasions, ils prenaient l'or, l'argent, les meubles, les vêtemens, les hommes, les femmes, » les garçons dont l'armée pouvait se charger; le tout se rap>> portait en commun, et l'armée le partageait. Le corps entier » de l'histoire prouve qu'après le premier établissement, c'està-dire après les premiers ravages, ils reçurent à composition TOMB XVI.-N° 93. 1838.

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»les habitans, et leur laissèrent tous leurs droits politiques et » civils 1. D

En effet, les formules de Marculfe offrent mille preuves que les lois romaines étaient en vigueur dans la Gaule au 7° siècle. Une de ces formules, la 8a du liv. 1, oblige les ducs et les comtes à rendre justice à chacun, suivant la loi de la nation dont il fait partie. C'était là, comme le prouvent les capitulaires, un ancien usage, auquel les rois, à leur avènement, juraient de demeurer toujours fidèles. Les canons du concile d'Orléans, tenu en 511, l'année même de la mort de Clovis, consacrent plusieurs dispositions du droit romain, et un édit de Clotaire qui, après la mort de ses frères, avait réuni sous son sceptre la monarchie entière, exprime formellement que, depuis long-tems, les divers sujets de sa couronne, Romains et autres, vivaient sous l'autorité de leurs anciennes lois nationales. Cette diversité de lois fut même une des causes de l'influence du clergé sous les deux premières races, car peu de seigneurs laïcs étaient assez instruits pour posséder à fond la législation des diverses fractions de peuples qui vivaient sous leur juridiction, et les clercs, qui furent d'abord simples assesseurs, se virent investis par la suite d'une magistrature dont la compétence était fort étendue.

Les juridictions nous amènent naturellement à parler des divisions du territoire, sujet sur lequel l'opinion de M. Moeller ne nous paraît pas encore à l'abri de toute objection. Nous regrettons vivement que le savant professeur n'ait point connu l'ouvrage intitulé: Essai sur le système des divisions territoriales de la Gaule sous les rois Francs, publié en 1832 par M. Guérard, membre de l'Institut. Quoique ce livre soit un extrait d'un travail plus étendu, la partie systématique du sujet y est traitée à fond, et nous ne pensons pas qu'il soit désormais possible de faire rien de plus complet. Nous allons puiser dans ces doctes recherches quelques observations que nous soumettons à l'examen de M. Moeller. D'après ce dernier, les pays soumis à la domination franque étaient généralement partagés en duchés, qui se divi

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saient eux-mêmes en districts ou comtés (pagi). Les comtés se subdivisaient en centuries (centenæ, pagi minores). On pourrait contester peut-être la synonymie des mots centenæ et pagi minores; mais cette erreur, si toutefois c'en est une, est de peu d'importance. Nos observations portent plus particulièrement sur les propositions suivantes :

1o Les subdivisions de la centurie s'appelaient marcæ; elles étaient administrées par des doyens ( decani ).

2° Chaque marca se divisait encore en plusieurs métairies (mansi), qui formaient ensemble un village (villa, locus).

Il faut remarquer, avant tout, que M. Moeller ne parle ici que des divisions administratives, celles que M. Guérard appelle divisions dynastiques. Or, le nom de division administrative convient seulement à celle qui est réellement administrée par un officier spécial. D'après cela, on ne peut admettre au nombre de ces divisions ni le mansus, qui était simplement une habitation, mansio; ni la villa, qui était la réunion de plusieurs mansi. Un exemple, tiré de l'état actuel de la France, fera mieux sentir la portée de notre observation. Le territoire, par rapport à l'administration, est partagé en préfectures, sous-préfectures, cantons et communes. Mais qui s'aviserait de faire entrer dans ce système divisionnaire les habitations isolées qui représentent les anciens mansi, et qui, dans le midi de la France, en ont conservé le nom (mas), ou même les hameaux et les villages, villa, qui ne sont point administrés par un maire, et qui dépendent d'une localité plus considérable? Ces divisions, comme on voit, sont purement géographiques, et n'ont point une place particulière dans le système des divisions administratives.

Il n'en était pas de même de la centaine ou centurie : c'était, dès le siècle, une division administrative quoiqu'il faille descendre jusqu'au commencement du ge siècle pour trouver des preuves incontestables de l'existence de la centaine comme arrondissement territorial. Mais cet arrondissement, purement administratif, admettait-il encore des subdivisions? C'est ce qu'il reste à examiner. Ces subdivisions ne pouvaient dans tous les cas être les marca. On désignait par ce mot des districts militaires commandés d'abord par des comtes ou par des préfets;

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